Le bien et le mal.
Un peu de Canto-Sperber en ce début d'après-midi:
"Les sociétés modernes se sont libéralisées. Ce processus engendre, ainsi que tous les autres phénomènes humains, sa propre pathologie. Car une telle libéralisation a pu induire des effets de servitude, la liberté des contrats dissimulant mal la contrainte exercée sur les travailleurs. Ella a pu susciter aussi des effets de domination, à cause de phénomènes inévitables de concentration des pouvoirs ou de création de monopoles qui accompagnent souvent la concurrence économique. Elle peut entraîner un désordre généralisé, où de moins en moins de personnes reconnaissent les effets de leur action et se vivent comme dépossédées de leur agir." (Faut-il sauver le libéralisme? page 43 et 44)
Le libéralisme peut produire son contraire, la liberté engendrant la "servitude" et la "domination". Le libéralisme peut aussi se pervertir, se dénaturer, la liberté dégénérant en anarchie. Ces constats condamnent-ils le libéralisme? On pourrait penser que oui et l'analogie médicale de la "pathologie" n'est pas nécessairement heureuse. Le corps social n'est pas le corps humain. En lui, grâce à la politique, il y a maîtrise et pas fatalité. La société est gouvernée, pas le corps humain. Le corps est destiné à mourir, pas la société. La métaphore biologique est toujours contestable en politique.
Cependant, la remarque de Canto-Sperber me conduit à une autre réflexion. Le libéralisme, conscient de ses limites, de ses défauts et de ses contradictions, ne prétend pas au bien, et c'est ce qui le sauve. Le communisme, système absolu, n'a pas eu conscience de faire le mal, et ce fût son drame. Le relativisme du libéralisme lui permet d'analyser et de surmonter ses échecs. La liberté, par définition, n'est jamais facile, elle peut engendrer le meilleur et le pire. En revanche, le socialisme s'est toujours perçu comme la perfection sociale, l'idéal réalisé, d'où la déception chronique lorsque ses représentants exercent le pouvoir. Le socialisme doit apprendre la modestie, c'est-à-dire le sens du réel. Il doit aussi, et j'y reviendrai, être autant une réflexion sur le mal que sur le bien.
Bon après-midi.
"Les sociétés modernes se sont libéralisées. Ce processus engendre, ainsi que tous les autres phénomènes humains, sa propre pathologie. Car une telle libéralisation a pu induire des effets de servitude, la liberté des contrats dissimulant mal la contrainte exercée sur les travailleurs. Ella a pu susciter aussi des effets de domination, à cause de phénomènes inévitables de concentration des pouvoirs ou de création de monopoles qui accompagnent souvent la concurrence économique. Elle peut entraîner un désordre généralisé, où de moins en moins de personnes reconnaissent les effets de leur action et se vivent comme dépossédées de leur agir." (Faut-il sauver le libéralisme? page 43 et 44)
Le libéralisme peut produire son contraire, la liberté engendrant la "servitude" et la "domination". Le libéralisme peut aussi se pervertir, se dénaturer, la liberté dégénérant en anarchie. Ces constats condamnent-ils le libéralisme? On pourrait penser que oui et l'analogie médicale de la "pathologie" n'est pas nécessairement heureuse. Le corps social n'est pas le corps humain. En lui, grâce à la politique, il y a maîtrise et pas fatalité. La société est gouvernée, pas le corps humain. Le corps est destiné à mourir, pas la société. La métaphore biologique est toujours contestable en politique.
Cependant, la remarque de Canto-Sperber me conduit à une autre réflexion. Le libéralisme, conscient de ses limites, de ses défauts et de ses contradictions, ne prétend pas au bien, et c'est ce qui le sauve. Le communisme, système absolu, n'a pas eu conscience de faire le mal, et ce fût son drame. Le relativisme du libéralisme lui permet d'analyser et de surmonter ses échecs. La liberté, par définition, n'est jamais facile, elle peut engendrer le meilleur et le pire. En revanche, le socialisme s'est toujours perçu comme la perfection sociale, l'idéal réalisé, d'où la déception chronique lorsque ses représentants exercent le pouvoir. Le socialisme doit apprendre la modestie, c'est-à-dire le sens du réel. Il doit aussi, et j'y reviendrai, être autant une réflexion sur le mal que sur le bien.
Bon après-midi.
2 Comments:
C'est vrai que caissière dans un supermarché, c'est pas terrible. J'ai résumé en une phrase le paragraphe de Canto-Sperber en ce début d'après-midi. Dans le temps on me disais: « Si tu ne travailles pas bien à l'école, tu finiras cantonnier et tu passera ta vie à casser des cailloux ». Autre temps autre moeurs, si tu n'a pas Bac +6, tu finiras caissier à Carouf. Les communistes, complices et bourreaux ont accepté le recours à la violence pour prendre le pouvoir et le garder. Les socialistes ont préféré une prise de pouvoir par les urnes afin de ne pas avoir à gérer un bain de sang.
By jpb, at 5:03 PM
Le cantonnier était alors objet de mépris social parce qu'il était un ouvrier qui ne produisait rien, borné seulement à l'entretien des chemins. Rien à voir avec le glorieux prolétaire de la grande industrie. Et ce n'est pas le cantonnier qui va faire la révolution!
Fernand Raynaud avait traduit et popularisé ce mépris social dans son sketch "Heureux", dépeignant le cantonnier sous les traits d'un simple d'esprit.
Juste au-dessus du cantonnier, sur l'échelle du mépris social, il y avait le manoeuvre, l'ouvrier bon à tout faire, avec ce préjugé qu'il n'y a que les bons à rien qui sont bons à tout. Cantonniers et manoeuvres ne sont pas éloignés, dans la représentation sociale qu'on s'en fait, des domestiques de l'Ancien Régime, figure très négative du larbin.
Aujourd'hui, le mépris social existe toujours. Il se porte sur la caissière de supermarché, ravissante idiote smicarde, sauf quand il s'agit d'une étudiante, fille à papa, qui travaille l'été pour son argent de poche. Le mépris social n'est jamais aussi terrible que lorsqu'une partie du peuple s'en prend à une autre partie, inférieure. L'américanisation des moeurs est aussi passée par là: ne gagner que le smic est une marque d'infamie sociale.
By Emmanuel Mousset, at 9:03 AM
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