L'Aisne avec DSK

28 novembre 2007

La politique au quotidien.

Bonsoir à toutes et à tous.


Je parlais hier de culture et de sa nécessité, même de sa priorité dans le combat politique. Je ne parlais pas de grande culture, bien sûr, mais de ces habitudes, réactions, comportements, pensées, propos qui forment au quotidien une culture, c'est-à-dire un environnement de vie, une existence humaine, un tissu social. Hier soir, j'assistais au conseil d'administration de mon lycée: l'ordre du jour portait essentiellement sur le budget. La routine, comme souvent. Puis viennent les questions diverses, là où, parfois, un peu de vie se manifeste. C'était le cas hier soir. Nous avons discuté sur les sanctions à prendre après des déprédations commises dans l'internat. Le CPE (Conseil principal d'orientation) a proposé des mesures de fermeté et de dialogue, que je n'ai pas contestées, pour la simple et bonne raison que lui seul, sur le terrain, sait vraiment ce qu'il faut faire et quelles sont les réponses appropriées pour mettre fin à des actes inadmissibles, en trouver et en punir les auteurs.



Ce que je n'ai pas apprécié, c'est le rapprochement avec le mouvement étudiant, les références à la "chienlit" et au "laxisme", qui marquent l'homme de droite. Et ce que j'ai encore moins apprécié, c'est l'intervention virulente d'une collègue, en quelque sorte "surjouée" dans le sens de l'autorité. Ce que j'ai surtout contesté, c'est l'idée de considérer une sanction collective (les internes privés de l'accès à leurs chambres au moment du repas et le mercredi après-midi) comme une "sanction exemplaire" (expression répétée plusieurs fois). C'est cet abus de langage, cet air d'autorité qui m'ont poussé à intervenir, pour dire que la sanction collective, contraire à la simple justice et à la vie en société (à laquelle nous préparons pourtant nos élèves), ne pouvait en aucun passer pour exemplaire. Les enseignants n'ont d'ailleurs pas le droit d'infliger à leurs élèves des punitions collectives. Une sanction "exemplaire", c'est celle qui frappe une personne reconnue coupable et qui dissuade ceux qui seraient tentés de suivre son chemin. Les sanctions collectives ne doivent jamais être infligées à la légère. Elles pénalisent ceux qui n'ont rien fait, qui sont innocents, elles les obligent à la dénonciation des fautifs, ce qui est dangereux et moralement contestable. Ce n'est pas tant les sanctions exemplaires qui m'intéressent que les sanctions efficaces.



J'ai dit cela parce que quelqu'un devait le dire, et que j'étais le mieux placé pour intervenir. Je l'ai fait avec prudence, mesure, sans remettre en cause ce qu'avait décidé mon collègue CPE, mais simplement en rappelant ce que je viens de dire, le caractère discutable de toute sanction collective. Un CA n'est-il pas le lieu où l'on peut discuter de ce genre de chose? Je vous parlais au début de ce billet d'une culture qui imprégnait les esprits, sous des allures de faux bon sens ou d'évidences qui n'en sont pas. Les gens de bonne foi, y compris les personnes de gauche, se laissent prendre à cette sensibilité sécuritaire et autoritaire. C'est là où il faut intervenir, ne pas laisser passer ni faire. Si chaque socialiste intervenait beaucoup plus au quotidien, sur son lieu professionnel, en famille, entre amis, la gauche n'en serait pas dans l'état où elle est. Car la politique ne se fait pas dans nos réunions de section, mais ailleurs, dans la vie, au bistrot, une salle d'attente, partout où l'on se rencontre, où l'on parle. Le militant efficace est celui-là, il ne mesure plus sa valeur au nombre de tracts distribués ou d'affiches collées.


Bonne nuit.