L'Aisne avec DSK

13 février 2008

Le travail, c'est la santé!

Je viens d'apprendre la mort d'Henri Salvador. Je n'étais pas fan, mais il a fait quelques belles chansons qui ont marqué notre époque et qui resteront. C'est surtout son personnage que je retiens, dont la popularité reflétait parfaitement notre société contemporaine. Avec lui, on avait l'impression qu'on ne pouvait pas être triste et qu'on ne pouvait pas mourir. Il était âgé mais ne semblait pas vieux du tout, en tout cas pas vieillard (à 90 ans cependant!), il pouvait rire à la demande, d'un rire impressionnant, même quand la situation n'y prêtait pas. Et puis, il symbolisait cette France lointaine et cette France des îles, puisque né à Cayenne d'une mère guadeloupéenne.

Enfin, je dois à Henri Salvador quelque chose en tant que professeur de philosophie. Mais oui! Combien de fois ai-je lu, quand une dissertation portait sur le travail, cette phrase sous la plume de mes élèves: "Le travail, c'est la santé"! Des jeunes dont les parents n'étaient peut-être même pas nés quand la chanson est sortie ... Mais une référence à contresens, puisque Henri célébrait la paresse alors que mes élèves utilisent la formule (sans connaître qui en est l'auteur) pour magnifier le travail!

La transition est toute trouvée, comme on dit à la télé, pour vous parler de politique. Dans la France sarkozienne qui veut "liquider" Mai 68, entendre une voix qui vient des années 60, de leur insouciance, quelqu'un qui refuse la "valeur travail", je trouve que ça fait du bien, beaucoup de bien. Il y a de la vertu dans le rire, l'amusement, la paresse, comme il peut y avoir de l'aliénation dans le travail. C'est le message politique d'Henri Salvador que je lui attribuerai et je conserverai, en ce jour de sa disparition.

Et puis, il y a autre chose, également politique: Salvador était un français de l'outre-mer, de ceux qu'on voit souvent postiers ou infirmières, auxquels il a redonné, à sa façon, une fierté, en leur montrant que lui, immigré en quelque sorte de l'intérieur, pouvait réussir et rejoindre les plus grands artistes de la chanson. C'était avant, bien avant le discours récent sur la "diversité" et les "minorités visibles", qui parfois m'irrite. Quand je lis dans L'Union d'hier Karim Saïdi se satisfaire de représenter la "diversité" sur la liste de droite, quand j'entends Pierre André se féliciter d'avoir un "homme de couleur", le docteur Natteau, avec lui, je me dis que je n'aimerais pas être à la place de l'un ou de l'autre, parce qu'ils sont mis en avant d'abord pour leurs origines. Je ne dis pas que c'est la seule raison, je connais leur mérite respectif, que notre maire a voulu récompenser et utiliser, mais les origines ont incontestablement joué (ainsi que leur sensibilité de gauche, bien sûr).

L'origine ne devrait pas compter dans les choix politiques, mais seulement les qualités. Et je fais la même remarque à la gauche quand elle veut promouvoir les "minorités visibles". Il y a là une forme d'exhibition que je n'approuve pas. Que la promotion se fasse par l'école, le travail, la loi, l'égalité, oui. Mais par l'apparence d'une présence sur une liste, non. Et les minorités "invisibles", on en fait quoi? La parité, j'approuve, parce que la femme et l'homme sont les deux représentants fondamentaux du genre humain. Après, non, on entre dans des considérations sans fin si l'on veut que chaque minorité ait sa place en tant que telle. Il faut rester des humanistes: c'est la valeur de l'homme qui importe, et rien que ça.


Bon après-midi.

3 Comments:

  • Il aurait été surprenant que vous ayez été inconditionnel de l'artiste préféré du général De Gaulle.

    http://www.dailymotion.com/relevance/search/henri%2Bsalvador/video/x2pu88_henri-salvador-le-travail-cest-la-s_events

    Ces gens qui courent au grand galop
    En auto, métro ou vélo
    Vont-ils voir un film rigolo
    Mais non, ils vont à leur boulot

    {Refrain:)
    Le travail c'est la santé
    Rien faire c'est la conserver
    Les prisonniers du boulot
    N' font pas de vieux os.

    Ils bossent onze mois pour les vacances
    Et sont crevés quand elles commencent
    Un mois plus tard, ils sont costauds
    Mais faut reprendre le boulot

    Dir' qu'il y a des gens en pagaille
    Qui cour' nt sans cesse après le travail
    Moi le travail me court après
    Il n'est pas près de m'rattraper.

    Maint' nant dans le plus p'tit village
    Les gens travaillent comme des sauvages
    Pour se payer tout le confort
    Quand ils l'ont, eh bien, ils sont morts.

    Homm's d'affaires et meneurs de foule
    Travaillent à en perdre la boule
    Et meur' nt d'un' maladie de cœur
    C'est très rare chez les pétanqueurs.

    By Blogger grandourscharmant, at 6:16 PM  

  • Non, rien à voir avec la politique. J'aime beaucoup Michel Sardou, qui est un homme de droite.

    Mais vous, je remarque que vous citez avec grand plaisir une chanson anti-sarkozienne! Allez-vous rejoindre la gauche?

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 6:54 PM  

  • L'anti-sarkozysme de cette chanson m'aura surement échappé,
    par contre, les convictions politiques de son auteur en aucune façon.
    Henri Salvador était un homme foncièrement de droite.

    On trouve dans cette chanson, la critique du consumérisme et certainement les racines des maux actuels de la gauche.
    A l'époque de cette chanson en 1965, Stakhanov était encore un modèle pour la gauche.
    Le travail n'avait pas encore laissé place aux loisirs comme valeur centrale.

    D'ailleurs, j'y vois plutot l'annonce du sarkozysme
    travailler plus pour gagner plus
    ce qui signifie quand meme que si on ne veut pas gagner plus, on a le droit de ne pas travailler plus
    et d'aller faire une pétanque par exemple.

    Et puis de gauche, je le suis déjà,
    il me suffit de sortir du territoire nationale pour ça
    car la droite française est bien plus à gauche que bon nombre de partis de gauche en Europe.
    Il est parfois bon de quitter le microcosme local pour savoir prendre de la hauteur, de loin, on a une vue d'ensemble plus large.
    Peut etre devriez vous demander à Anne si quand elle est à Bruxelles ou à Strasbourg, elle défend strictement les memes positions que celle qu'elle défend à Amiens ou à Saint-Quentin.
    Et ce n'est pas du tout dans un esprit polémique que je dis cela,
    car je ne pense pas qu'à droite, nous ayons de leçons à donner sur ce point et si elle meme n'a pas agi ainsi, elle en aura peut etre été le témoin.
    Combien de nos parlementaires européens ont voté massivement pour
    des mesures qu'ils ont dénoncé une fois revenu en France

    Et puis sinon de nous deux vous etes certainement celui qui est le plus sarkozyste
    rien qu'avec ce blog et le temps que vous passez à y travailler,
    je ne sais pas si vous y gagnez plus, mais je ne pense pas que vous contesterez le fait que vous y travailliez plus.
    Et sans vouloir faire les questions et les réponses, vous pourrez m'objecter que ce n'est pas un travail mais un plaisir,
    et je ne pourrais que vous donner raison...

    By Blogger grandourscharmant, at 1:25 AM  

Enregistrer un commentaire

<< Home