Tous en scène.
Bonsoir à toutes et à tous.
Je m'intéresse beaucoup aux rites et aux symboles politiques. Le meeting en fait partie, un peu dépassé mais toujours vivace. Lui aussi s'est adapté aux temps modernes. Sur le blog de mon camarade Jean-Jacques Thomas, toujours riche en belles photographies, je vois la tribune et la salle de sa dernière réunion de campagne, hier soir à Hirson. Jean-Jacques n'est pas nécessairement un bon communicant (ses désormais légendaires discours de presque trois heures pour ses voeux sont des anti-modèles!) mais il peut l'être parfois, quand par exemple il reprend ce qui se fait beaucoup depuis quelques années: se faire accompagner, en fond de tribune, par une petite foule compacte de supporters. Cette présence sur scène du public était inimaginable auparavant. C'est que la modification du rituel a suivi les évolutions de la société, sur trois points:
1- La démocratisation:
L'homme politique n'est plus un chef solitaire, un monarque distant, à la rigueur entouré par ses fidèles lieutenants, façon de Gaulle ou Mitterrand. Non, c'est un homme presque comme les autres et presque au milieu des autres, de la foule venu l'acclamer. Cete nouvelle forme de mise en scène veut montrer que le candidat n'est rien sans les électeurs, dont la photo prouve qu'il se fond en eux. Le temps des stars de la politique est terminé. Le "grand homme" n'existe plus. Il est tout au plus le capitaine d'une équipe. Dans une société où tout le monde est devenu individualiste, seuls les hommes politiques n'ont pas le droit de l'être. Sinon, gare à la dénonciation de leur "ego surdimensionné"!
2- La communication:
Le groupe derrière l'orateur politique a aussi une visée médiatique, offrir à la presse et à la télévision, dans un même plan, sur une même photo, le candidat et son public. L'image est plus vivante et plus colorée. En termes de communication, c'est parfait. Un homme seul dans un grand espace vide, une tribune tristounette, ça ne la fait pas! Le nouveau rite donne un meilleur spectacle. A la limite, il est moins organisé pour les personnes présentes que pour sa reprise le jour même ou le lendemain à la télévision ou dans les journaux. L'homme politique exprime, par ce décor humain et bigarré, que son électorat est au rendez-vous, qu'il le sera encore plus quand il s'agira de se rendre aux urnes.
3- Le narcissisme:
Plus que l'égoïsme qui est de tout temps et négatif, mieux que l'individualisme qui est trop moderne et exigeant, la véritable tendance de notre société contemporaine, c'est le narcissisme, dont j'ai déjà dit, il y a quelques jours, que l'exemple fréquent était dans la ridicule manie de se prendre soi-même en photo à l'aide de son téléphone mobile. Eh bien, la foule qui passe de la salle à la scène s'inscrit dans cette logique. En regardant et écoutant l'homme politique, les spectateurs se contemplent eux-mêmes, dans le miroir qu'on leur tend. Il n'y a plus coupure, séparation entre la foule et le leader, il n'y a plus de périmètre sacré qui le protégerait. La foule est comme lui surélevée, que dis-je, elle est en position de supériorité puisque les gradins où elle prend place lui permettent de dominer la tribune et l'orateur.
Ce changement dans le rite des meetings politiques introduit une rupture aussi forte que celui imposé à la liturgie catholique après le concile de Vatican II. Avant la révolution vaticane initiée par Jean XXIII, le prêtre célébrait la messe devant l'autel, le dos tourné au public, pour signifier qu'avec eux et non pas devant eux, le premier parmi eux et non pas seul, il officiait. Après la modernisation du rite chrétien, le prêtre s'est adressé aux fidèles et non plus exclusivement à Dieu, il s'est désormais montré à eux, ce qui est tout de même une variation liturgique non négligeable. Les adversaires traditionalistes ont dénoncé une résurgence de la figure païenne du prêtre.
Jean-Jacque Thomas n'est certes pas prêtre d'Hirson ni évêque de Thiérache, et aucun homme politique n'est dépositaire d'une mission sacrée, mais leurs faits et gestes et dispositions de salle sont des marqueurs symboliques intéressants à suivre et à analyser.
Bonne nuit préélectorale.
Je m'intéresse beaucoup aux rites et aux symboles politiques. Le meeting en fait partie, un peu dépassé mais toujours vivace. Lui aussi s'est adapté aux temps modernes. Sur le blog de mon camarade Jean-Jacques Thomas, toujours riche en belles photographies, je vois la tribune et la salle de sa dernière réunion de campagne, hier soir à Hirson. Jean-Jacques n'est pas nécessairement un bon communicant (ses désormais légendaires discours de presque trois heures pour ses voeux sont des anti-modèles!) mais il peut l'être parfois, quand par exemple il reprend ce qui se fait beaucoup depuis quelques années: se faire accompagner, en fond de tribune, par une petite foule compacte de supporters. Cette présence sur scène du public était inimaginable auparavant. C'est que la modification du rituel a suivi les évolutions de la société, sur trois points:
1- La démocratisation:
L'homme politique n'est plus un chef solitaire, un monarque distant, à la rigueur entouré par ses fidèles lieutenants, façon de Gaulle ou Mitterrand. Non, c'est un homme presque comme les autres et presque au milieu des autres, de la foule venu l'acclamer. Cete nouvelle forme de mise en scène veut montrer que le candidat n'est rien sans les électeurs, dont la photo prouve qu'il se fond en eux. Le temps des stars de la politique est terminé. Le "grand homme" n'existe plus. Il est tout au plus le capitaine d'une équipe. Dans une société où tout le monde est devenu individualiste, seuls les hommes politiques n'ont pas le droit de l'être. Sinon, gare à la dénonciation de leur "ego surdimensionné"!
2- La communication:
Le groupe derrière l'orateur politique a aussi une visée médiatique, offrir à la presse et à la télévision, dans un même plan, sur une même photo, le candidat et son public. L'image est plus vivante et plus colorée. En termes de communication, c'est parfait. Un homme seul dans un grand espace vide, une tribune tristounette, ça ne la fait pas! Le nouveau rite donne un meilleur spectacle. A la limite, il est moins organisé pour les personnes présentes que pour sa reprise le jour même ou le lendemain à la télévision ou dans les journaux. L'homme politique exprime, par ce décor humain et bigarré, que son électorat est au rendez-vous, qu'il le sera encore plus quand il s'agira de se rendre aux urnes.
3- Le narcissisme:
Plus que l'égoïsme qui est de tout temps et négatif, mieux que l'individualisme qui est trop moderne et exigeant, la véritable tendance de notre société contemporaine, c'est le narcissisme, dont j'ai déjà dit, il y a quelques jours, que l'exemple fréquent était dans la ridicule manie de se prendre soi-même en photo à l'aide de son téléphone mobile. Eh bien, la foule qui passe de la salle à la scène s'inscrit dans cette logique. En regardant et écoutant l'homme politique, les spectateurs se contemplent eux-mêmes, dans le miroir qu'on leur tend. Il n'y a plus coupure, séparation entre la foule et le leader, il n'y a plus de périmètre sacré qui le protégerait. La foule est comme lui surélevée, que dis-je, elle est en position de supériorité puisque les gradins où elle prend place lui permettent de dominer la tribune et l'orateur.
Ce changement dans le rite des meetings politiques introduit une rupture aussi forte que celui imposé à la liturgie catholique après le concile de Vatican II. Avant la révolution vaticane initiée par Jean XXIII, le prêtre célébrait la messe devant l'autel, le dos tourné au public, pour signifier qu'avec eux et non pas devant eux, le premier parmi eux et non pas seul, il officiait. Après la modernisation du rite chrétien, le prêtre s'est adressé aux fidèles et non plus exclusivement à Dieu, il s'est désormais montré à eux, ce qui est tout de même une variation liturgique non négligeable. Les adversaires traditionalistes ont dénoncé une résurgence de la figure païenne du prêtre.
Jean-Jacque Thomas n'est certes pas prêtre d'Hirson ni évêque de Thiérache, et aucun homme politique n'est dépositaire d'une mission sacrée, mais leurs faits et gestes et dispositions de salle sont des marqueurs symboliques intéressants à suivre et à analyser.
Bonne nuit préélectorale.
6 Comments:
Tu t'es vu quand tu as bu ?
By jpbb, at 11:38 PM
L'homme politique n'existe pas. Pas plus que la femme politique. Il y a des personnes qui sentent le désir soudre en elles de diriger la bestialité ambiante et de la canaliser avec plus ou moins de bonheur, du militaire vindicatif au pacifiste béat. Cela se retrouve sur l'estrade, du singulier qui explique, au populiste qui excite. Dieu je ne sais où il est, j'espère juste qu'il me re-trouvera, à temps...
By jpbb, at 11:46 PM
Bien sûr Dieu nous a laissé après le septième jours. Il fait la sieste. C'est donc à nous de nous emparer du bousin et à faire comme s'il n'était pas là. On est des grands après tout, et on a des kleenex pour se moucher le nez.
Pour la photo, il faudrait d'abord définir ce qu'est le photon, tu sais la petite chose qui impressionne la pellicule, la cellule photo-électrique...
Ce 'est pas de la philosophie, mais de la mécanique quantique. Quoique la philosophie puisse in fine apporter des voies permettant de poser les sciences en général, mais ça je le développe sur mon blog. Non mais, faut bien que je m'auto-promotionne... ;-)
By jpbb, at 11:57 PM
Pour en revenir à la soirée électorale, finalement cela ne me fait ni chaud ni froid. Pour ma part j'ai approché l'ensemble des futurs maires et conseillers généraux de mon coin susceptibles de promouvoir la vision que j'ai. Autant à gauche qu'à droite j'ai convaincu. Faut dire que j'avais mis la cravate et le costume qui va bien. Dans l'avenir, nous aurons deux grands partis sociaux démocrates, l'un plus à gauche que l'autre. Du simple fait que l'élection consiste à séduire l'électorat, et que ce dernier regarde son caddie, la politique va devoir le remplir. Comme le pouvoir en place impose une alternance, cela réduit le tango à deux entités. La pauvre Arlette, obligée de faire tapisserie avec Olivier jusqu'à la fin des temps...
By jpbb, at 12:06 AM
Pour mon premier message, c'est le virage à 90 ° par rapport à tes messages précédents qui me l'a fait écrire spontanément, donc n'y vois pas autre chose. Passer de la politique saint-quentinoise aux spéculations méta-physiques demande un certain temps d'adaptation. Pour ma part, j'ai assisté à des meetings de droite, du centre et de gauche. Le spectacle est gratuit. La qualité n'est pas toujours là où l'on pense, et dans ce monde du spectacle, la gauche me semble à la traine. A Metz, on était debout à faire la claque. Dans le genre mépris de l'électeur égaré, on ne fait pas mieux. Pourtant il y avait François Hollande en guest star. En fait, à part des militants il n'y avait personne d'autre. Les meetings pour le PS sont juste l'occasion de faire parler de lui dans les media, et les militants ne sont convoqués qu'en tant que masse, le temps du mépris est là. Heureusement que la toile permet la circulation des idées, sinon le PS serait un ramassis d'abrutis. Jouer du populisme n'est pas la bonne solution, c'est mépriser l'humain, c'est le sentiment que je retire de cette campagne. Celle que j'ai mené pour DSK était à des années lumière au dessus.
By jpbb, at 12:32 AM
oh la couche de conneries rarement enregistrés sur un blog; t'as raison Manu, internet, c'est dangereux, on y retrouve des gens syphonés mellés à de braves types, qu'ils soient de gauche ou de droite d'ailleurs.
C'est toi qui picoles jean baptiste ou alors tu deviens fou.
Pauvre parti socialiste, ça c'est sur, on est mal barré...
By Anonyme, at 2:33 PM
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