Notre préhistoire.

Bonjour à toutes et à tous.

"Ce soir (ou jamais!)" est en passe de devenir l'une des émissions les plus intelligentes de la télévision. Finir la journée, juste avant de se coucher, avec les thèmes et les invités de Frédéric Taddéi est souvent un vrai régal. Hier soir, il était question d'un sujet hautement politique et malheureusement sous-estimé: la conquête de l'espace. C'est pourtant l'une des trois ou quatre grandes orientations de civilisation de notre siècle et du troisième millénaire, qui fait peu débat, qui souffre d'une absence de popularisation. La raison, parmi quelques autres, est le peu de culture scientifique de notre classe politique, qui exclut ce domaine de ses préoccupations pour le laisser aux savants, se contentant d'accorder (ou pas!) les financements. Il faut remédier à ce défaut, il faut mettre la conquête de l'espace au coeur de la politique.

D'abord, car c'est une exigeance démocratique, en expliquant aux citoyens l'utilité d'aller dans l'espace. Nous n'arrivons pas à nourrir ni à soigner l'ensemble de l'humanité, à quoi bon songer à la Lune, à Mars et à la galaxie? Un travail de pédagogie doit être effectué pour répondre à cette légitime question, sans oublier le rêve et l'utopie qui doivent aussi, avec la science et la raison, être des moteurs dans le développement de l'humanité.

Je crois que nous sommes entrés, depuis la fin du siècle dernier et pour très longtemps, dans une nouvelle civilisation, celle de la science et de la technique, comme celles d'autrefois étaient vouées à l'art et à la religion. Les pyramides de demain, nos nouvelles cathédrales, c'est dans l'espace que nous les bâtirons. La religion ne croyait pas si bien dire en voulant nous élever au Ciel! C'est la science qui prend la relève. Dans cet élan, la philosophie ne sera peut-être plus qu'un divertissement intelligent, dont les cafés-philo seraient les prémisses...

Toujours est-il que l'ère nouvelle nous conduit dans le futur. Les sociétés passées, pendant des millénaires, se focalisaient sur le présent, ne connaissaient que lui. C'est à partir du XVIIIème siècle et surtout du XIXème que le passé va devenir objet de préoccupation et d'investigation. Aujourd'hui et de plus en plus, seul demain comptera. La mode du "développement durable" est un signe, la conquête de l'espace oblige à l'anticipation.

L'espace, je le répète, nous ramenera à la politique, comme l'art et la religion, à de nombreuses périodes, ont été imbriqués dans la société et instrumentalisés par le pouvoir. Il faudra faire des choix financiers, car la conquête spatiale réclame des sommes immenses. Il faudra pratiquer la coopération mondiale, qui a largement débuté avec la station spatiale internationale, mais qui pourrait être stoppée, quand on voit l'acharnement chinois à vouloir envoyer un homme sur la Lune autour de 2020. La rivalité des nations serait un désastre. Un Chinois sur la Lune, le symbole serait puissant, mais ne recommençons pas la folle course des années 60 entre Américains et Russes.

Il y aura aussi des choix stratégiques, dont certains sont peut-être à revoir: La navette spatiale est-elle encore d'actualité? Faut-il continuer à investir dans la station spatiale ou bien s'orienter vers les voyages habités dans le système solaire? A l'heure actuelle, les programmes vont dans deux directions: les sondes qui explorent notre proche univers, les robots qui étudient Mars. Les uns et les autres sont d'une grande performance. Faut-il poursuivre dans cette voie, un peu oubliée de la population, ou bien en ouvrir d'autres, plus exaltantes pour l'imagination, par exemple le retour humain sur la Lune?

Beaucoup de questions, encore peu de réponses, et c'est normal: nous sommes en train de vivre la préhistoire de la conquête spatiale.


Bonne matinée.