L'Aisne avec DSK

12 mai 2008

Les petits hommes gris.

Bonjour à toutes et à tous.

J'ai regardé cette nuit "La vie des autres". On me pressait depuis plusieurs mois de voir ce film, dont on ne me disait que du bien. Je me méfie toujours des éloges et des engouements. Mais là, pour le coup, c'est amplement mérité. Un beau et grand film, un drame politique dont je retire trois réflexions:

1- Le communisme, c'est la surveillance généralisée. Chacun espionne tout le monde. On a beaucoup disserté sur la nature autoritaire, dictatoriale ou totalitaire du communisme. C'est surtout un Etat policier. L'avantage de ce film, c'est qu'il ne caricature pas le régime. Pas vraiment de torture (sinon psychologique), pas de misère, pas d'oppression visible, un certain confort, le respect des formes juridiques, mais le contrôle, le flicage, la délation. La misère du communisme est là-dedans: un idéal de transparence, ne rien cacher, tout savoir, mais quelqu'un au bout du fil qui vous écoute, et l'oeil de sa caméra qui vous regarde. Le communisme est dans ce paradoxe: l'individu mis à nu, la suppression de la vie privée par des observateurs anonymes, agents du Parti, de l'Etat.

2- Le communisme, c'est l'élite persécutée. Etrange destin que celui de cette idéologie: la lutte des classes s'est retournée en suspicion, en hostilité envers la culture, l'intelligence, la beauté, l'art, l'amour, la liberté. La subversion est désormais de ce côté. La RDA veut des intellectuels soumis, des artistes au service du régime. Le communisme, c'est la négation de la réflexion, de la sensibilité. Il ne reste plus que les rapports de forces, les influences d'appareil, la pure et simple mécanique étatique qui écrase tout. Du coup, les forces immenses de la bêtise s'en trouvent libérées.

3- Le communisme, c'est le triomphe de l'homme médiocre. Pas du glorieux prolétaire, pas de l'homme émancipé, mais du terne bureaucrate, du petit homme gris. Le communisme, c'est la revanche de l'anonyme qui a peur de la lumière, qui prolifère dans ce régime d'ombres. Le communisme, ce n'est pas le pouvoir aux travailleurs mais aux médiocres. A quoi les reconnaît-on? Par le fait que, justement, on ne les reconnaît pas. C'est l'ami, le voisin, le collègue, monsieur tout le monde employé par la Stasi. C'est l'homme ordinaire qui accède à la puissance. La passion du pouvoir pour le pouvoir, voilà la médiocrité, une passion d'impuissant.

Ce constat discrédite-t-il toute recherche du pouvoir? Bien sûr que non, sinon il n'y aurait plus ni politique, ni démocratie possibles. Mais ce pouvoir ne doit jamais être recherché pour lui-même. Alors pour quoi? Pour l'action et la création. Ordinairement, ce n'est pas le cas. C'est pourquoi le monde politique est peuplé de petits hommes gris, ennuyeux, transparents, anonymes, serviles, parce que la politique est pour eux le seul domaine où ils peuvent gagner en pouvoir. Les portes de la culture, de l'intelligence, de l'art, de la beauté, de l'amour, de la liberté leur sont fermées.

L'histoire de "La vie des autres" est celle d'un miracle, d'une conversion, d'une émancipation: un petit homme gris, officier de la Stasi, qui finit pas être séduit, bouleversé, transformé par ceux qu'il est chargé d'espionner. Après ce film, on n'a plus envie d'utiliser les mots de "socialisme" et de "camarade", qui étaient ceux de la RDA. Mais je les garde quand même, en n'oubliant pas d'être critique. Sinon, il faudrait se débarrasser aussi du mot "démocratie", dont se servait le communisme.

L'an prochain, nous fêterons les 20 ans de la chute du Mur de Berlin. Il faudra célébrer l'effondrement du communisme, la fin des régimes policiers, la défaite des petits hommes gris, la libération des peuples. Ne pas oublier que certains socialistes ont été intransigeants avec le communisme, ne lui ont rien cédé, l'ont dénoncé et combattu, tandis que d'autres socialistes ont été complaisants à son égard, pour obtenir un peu de pouvoir. Des petits hommes gris, eux-aussi...


Bonne matinée.

9 Comments:

  • Il ne reste plus que les rapports de forces, qui sont à la base de la lutte, la fameuse lutte des classes. Seul le prolo est glorifié, et tout ce qui s'en écarte doit être combattu à l'exception des prêtres qui en célèbrent le culte. Le communisme est donc une religion, qui relie, les prolos entre eux, dirrigés par des médiocres. C'est donc le triomphe de la médiocrité des petits hommes gris.

    Je viens de finir le livre de mémoires de Hubert Reeves, l'astrophysicien, en vente dans les supermarchés actuellement. Quand il dépeint ses voyages en URSS, c'est hallucinant. Comme il est scientifique, il ne glisse pas dans l'idéologie pour ou contre, seule une image tendant à l'objectivité.

    C'est joli les hommes multicolores, non ? ;-)

    By Blogger jpbb, at 12:20 PM  

  • Fin du communisme = fin des régimes policiers ? Tiens donc !!!

    Pas de flicage dans notre société ? pas de télésurveillance (bientôt à SQ), pas de drône ? Pas de bavures policières ?

    Régimes policiers dans les sociétés capitalistes AUSSI.

    By Anonymous Anonyme, at 1:55 PM  

  • Croire que Marx a donné d'inégalables outils pour penser le système capitaliste est bien faire la preuve qu'on n'a pas su percer et mettre à jour les motivations profondes qui ont conduit Marx à s'imaginer donner un sens à l'Histoire en posant à priori que le cadre de l'Histoire avait une structure scientifique. S'en servir pour disposer d'outils intellectuels fondant une critique radicale du capitalisme relève de l'auto suggestion et de la méthode Coué réunies. Le capitalisme est l'organisation du marché dans le monde, et le mettre au service de l'humanité en améliorant son fonctionnement, Marx lui-même l'aurait accepté. Seulement Marx n'était pas marxiste, seul les hallucinés petits hommes en gris ont endossé la défroque d'une pensée qui se cherchait.

    By Blogger jpbb, at 1:57 PM  

  • Qui parle de ça JPBB ? Pas moi.

    0/20 car hors sujet.

    By Anonymous Anonyme, at 2:21 PM  

  • Jpbb Toi en tout cas on ne te cherche plus on t'a trouvé. Toi que la politique amuse tu pourrais pas aller faire chier les autres ailleurs. A Schuman-Kanfen par exemple parce que la bas je te jure on se marre.

    By Anonymous Anonyme, at 2:23 PM  

  • Eh l'anonyme... sur le Blog de d'Emmanuel Mousset je fais le commentaire que je veux.

    La bonne question est de savoir pourquoi mon commentaire te gêne.

    L'anonymat convient parfaitement aux petits hommes en gris.

    By Blogger jpbb, at 2:27 PM  

  • Les régimes communistes n'étaient pas fondés sur la séparation des pouvoirs, ce qui constitue l'armature des régimes réellement démocratiques. La police il y en a toujours, mais dans un régime communiste, elle est sans le contre-pouvoir de la presse et des media. C'est en ce sens que l'on parle de régimes policiers aveugles. Le capitalisme n'est que le fonctionnement de base du marché. Il est compatible avec la séparation des pouvoirs, et leur juste équilibre, alors que le communisme est fondé sur une base dictatoriale. Confondre les deux est signer de fait son appartenance à l'ordre des petits hommes en gris.

    By Blogger jpbb, at 2:35 PM  

  • A no pasaran:

    J'ai dit que les régimes communistes étaient des régimes policiers, ce qui ne signifie pas que tous les régimes policiers soient communistes. Il y a des dictatures de droite tout aussi détestables. La différence, c'est que celles-ci n'ont jamais prétendu émanciper l'humanité.

    Pas d'accord avec la comparaison RDA, France d'aujourd'hui et St Quentin. Je ne suis pas trop favorable à la télésurveillance, mais son installation ne fait pas de notre pays une dictature.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 3:26 PM  

  • le niveau de jpbb ne s'améliore pas, toujours aussi pourri et médiocre et grand fan du libéralisme actuel et de ses dérives abominables

    By Anonymous Anonyme, at 12:35 PM  

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