Un samedi au bord de l'eau.
Bonjour à toutes et à tous.
Sincérement désolé pour hier, une journée sans billets. J'avais prévenu: de sortie au Tréport, départ assez tôt, retour au milieu de la nuit, ce n'était pas possible. Là-bas, il fallait que je m'occupe de mon petit monde, et le hasard ne m'a pas fait tomber sur une cyberboutique. C'est ma première infidélité depuis août, où je vous avais délaissés quelques jours pendant mon séjour parisien. Mais à l'époque, les lecteurs étaient moins nombreux et les commentaires moins exigeants.
Je vous raconte ma sortie au Tréport, qui n'était pas touristique (je ne sors pas, le bord de mer pas plus que la montagne ne m'intéressent) mais politique. Pas au sens partisan: ce n'était pas une opération socialiste! Mais au sens noble, comme on dit souvent: les activités de la cité. Et les pédants rajoutent que politique vient de polis qui en grec ancien désigne la cité. Bref, l'objectif était double: célébrer les 40 ans de Mai 1968 en permettant à des familles qui ne le peuvent pas ou difficilement de s'offrir gratuitement une journée au Tréport, avec un tas d'activités possibles. 170 inscrits, j'ai dû refuser du monde. L'an prochain, il faudrait un 4ème ou 5ème car.
Ca n'a l'air de rien: un bourgeois moyen, comme j'en connais pas mal autour de moi, prend sa bagnole pour la mer, se paie là-bas un restau, se ballade, fait une ou deux visites, rentre le soir et n'a pas vu son budget fondamentalement déséquilibré. Beaucoup de gens à Saint-Quentin (et ailleurs!) n'ont pas cette vie-là. Le transport en train, le carburant quand ils possèdent une automobile, le prix d'un déjeuner et d'un dîner, un pot dans l'après-midi, à quoi vous rajoutez un spectacle, c'est pour eux impossible. L'ordinaire des uns est l'extraordinaire des autres. Et je ne parle même pas de la grande bourgeoisie! De toute façon, elle ne va pas au Tréport.
Ce que je fais, avec Rencontre Citoy'Aisne, avec Léo Lagrange, ce n'est pas de la charité. Une militante communiste m'a un jour interpellé sur ce thème: "Tu organises des trains de pauvres". Eh oui, j'ai dû subir ce genre de remarque, auquel je finis par ne plus faire attention. Mais il ne faut jamais laisser passer: ce que je fais, c'est ce que faisaient dans les années 50 et 60 bien des municipalités... communistes, qu'on peut appeler si on veut du tourisme social ou solidaire. Ca n'a rien à voir avec la charité chrétienne au Moyen Age.
J'ajoute que ce petit voyage est ouvert à tous, même si la priorité va aux familles qui n'ont pas les moyens, ce qui me semble normal. Mais je tiens beaucoup à la mixité sociale. Ca n'efface pas la lutte des classes mais ça permet tout de même, un samedi, de rompre certaines barrières sociales. Je ne crois pas en la révolution, je crois que la société sans classes est un objectif lointain et difficile, mais qui commence aujourd'hui, dans ce qu'on fait et ce qu'on est. Pas dans les discours.
Une dernière réflexion sur la sortie d'hier: je me passionne pour les questions d'organisation. Qu'est-ce que le socialisme, sinon une autre forme d'organisation de la société? Il y a un art, presque une science, de l'organisation. Un voyage qui dure 16 heures et qui concerne 170 personnes, c'est toujours un petit défi en matière d'organisation. Sans compter que la préparation en elle-même s'étale sur au moins trois semaines (la préparation intensive, car le projet, lui, comme tout projet sérieux, se met en place plusieurs mois à l'avance, généralement un an et plus).
Ce qui m'intéresse, c'est le surgissement de l'imprévu quand on pense avoir tout prévu. Hier, j'ai eu droit, entre autres, aux personnes qui ont raté le car, à celles qui se sont égarées dans la ville, jusqu'à une hospitalisation après évanouissement durant le repas du soir (mais la personne a pu reprendre tout de même le train). Des petites choses finalement, quasi inévitables, mais qui font réfléchir sur l'organisation sociale et ses limites. De ce point de vue (mais de ce point de vue seulement!), je suis un homme d'ordre, soucieux d'efficacité dans l'organisation des sociétés, y compris au petit niveau d'une sortie divertissante. Un socialiste bordélique n'est pas un socialiste.
Bon après-midi.
Sincérement désolé pour hier, une journée sans billets. J'avais prévenu: de sortie au Tréport, départ assez tôt, retour au milieu de la nuit, ce n'était pas possible. Là-bas, il fallait que je m'occupe de mon petit monde, et le hasard ne m'a pas fait tomber sur une cyberboutique. C'est ma première infidélité depuis août, où je vous avais délaissés quelques jours pendant mon séjour parisien. Mais à l'époque, les lecteurs étaient moins nombreux et les commentaires moins exigeants.
Je vous raconte ma sortie au Tréport, qui n'était pas touristique (je ne sors pas, le bord de mer pas plus que la montagne ne m'intéressent) mais politique. Pas au sens partisan: ce n'était pas une opération socialiste! Mais au sens noble, comme on dit souvent: les activités de la cité. Et les pédants rajoutent que politique vient de polis qui en grec ancien désigne la cité. Bref, l'objectif était double: célébrer les 40 ans de Mai 1968 en permettant à des familles qui ne le peuvent pas ou difficilement de s'offrir gratuitement une journée au Tréport, avec un tas d'activités possibles. 170 inscrits, j'ai dû refuser du monde. L'an prochain, il faudrait un 4ème ou 5ème car.
Ca n'a l'air de rien: un bourgeois moyen, comme j'en connais pas mal autour de moi, prend sa bagnole pour la mer, se paie là-bas un restau, se ballade, fait une ou deux visites, rentre le soir et n'a pas vu son budget fondamentalement déséquilibré. Beaucoup de gens à Saint-Quentin (et ailleurs!) n'ont pas cette vie-là. Le transport en train, le carburant quand ils possèdent une automobile, le prix d'un déjeuner et d'un dîner, un pot dans l'après-midi, à quoi vous rajoutez un spectacle, c'est pour eux impossible. L'ordinaire des uns est l'extraordinaire des autres. Et je ne parle même pas de la grande bourgeoisie! De toute façon, elle ne va pas au Tréport.
Ce que je fais, avec Rencontre Citoy'Aisne, avec Léo Lagrange, ce n'est pas de la charité. Une militante communiste m'a un jour interpellé sur ce thème: "Tu organises des trains de pauvres". Eh oui, j'ai dû subir ce genre de remarque, auquel je finis par ne plus faire attention. Mais il ne faut jamais laisser passer: ce que je fais, c'est ce que faisaient dans les années 50 et 60 bien des municipalités... communistes, qu'on peut appeler si on veut du tourisme social ou solidaire. Ca n'a rien à voir avec la charité chrétienne au Moyen Age.
J'ajoute que ce petit voyage est ouvert à tous, même si la priorité va aux familles qui n'ont pas les moyens, ce qui me semble normal. Mais je tiens beaucoup à la mixité sociale. Ca n'efface pas la lutte des classes mais ça permet tout de même, un samedi, de rompre certaines barrières sociales. Je ne crois pas en la révolution, je crois que la société sans classes est un objectif lointain et difficile, mais qui commence aujourd'hui, dans ce qu'on fait et ce qu'on est. Pas dans les discours.
Une dernière réflexion sur la sortie d'hier: je me passionne pour les questions d'organisation. Qu'est-ce que le socialisme, sinon une autre forme d'organisation de la société? Il y a un art, presque une science, de l'organisation. Un voyage qui dure 16 heures et qui concerne 170 personnes, c'est toujours un petit défi en matière d'organisation. Sans compter que la préparation en elle-même s'étale sur au moins trois semaines (la préparation intensive, car le projet, lui, comme tout projet sérieux, se met en place plusieurs mois à l'avance, généralement un an et plus).
Ce qui m'intéresse, c'est le surgissement de l'imprévu quand on pense avoir tout prévu. Hier, j'ai eu droit, entre autres, aux personnes qui ont raté le car, à celles qui se sont égarées dans la ville, jusqu'à une hospitalisation après évanouissement durant le repas du soir (mais la personne a pu reprendre tout de même le train). Des petites choses finalement, quasi inévitables, mais qui font réfléchir sur l'organisation sociale et ses limites. De ce point de vue (mais de ce point de vue seulement!), je suis un homme d'ordre, soucieux d'efficacité dans l'organisation des sociétés, y compris au petit niveau d'une sortie divertissante. Un socialiste bordélique n'est pas un socialiste.
Bon après-midi.
8 Comments:
prévoir tout ce qui est prévisible pour n'avoir à faire face qu'à l'imprévisible.
"seul un manque, un etre vulnérable est capable d'amour : le mystere dernier de l'amour est donc que l'incomplétude, en un sens, est supérieure à la complétude."
slavoj zizek
By grandourscharmant, at 2:33 PM
D'accord avec votre première phrase. La seconde, en revanche, me laisse perplexe. Mais l'amour, ce n'est pas mon truc.
By Emmanuel Mousset, at 3:12 PM
je ne suis pas si surpris que ça,
un penseur d'extreme-gauche qui a écrit un livre titré
"Fragile absolu. Pourquoi l'héritage chrétien vaut-il d'etre défendu ?",
comment aurait il pu trouver grace à vos yeux.
By grandourscharmant, at 3:30 PM
J'appelle ça créer du lien social. Des jeunes, des vieux, des pauvres et des moins pauvres, ceux qui organisent et ceux qui sont pris en charge. C'est vivre ensemble. On ne demande pas d'adhérer au PS je suppose, ni d'être athée pour en bénéficier ? Juste une proposition et vient qui veut ? Pour une société équilibrée, c'est assez facile en fait. Il faut qu'un jeune pauvre puisse finir dans la peau d'un vieux riche de par son parcours professionnel. Cela implique qu'il soit formé, qu'il ait la compétence de créer ou d'innover, et de disposer de circonstances favorables pour démarrer dans la vie. DSK proposait un capital de départ pour chaque jeune. Je propose en sus d'un parcours professionnel mis à jour et guarantis à tous, la possibilité d'avoir le capital-risque nécessaire pour devenir un Bill Gate de demain. Une seule condition, avoir un bon business plan, et donc de mettre en place un accompagnement tel que 1,2,3,GO
organisé par Business Initiative a.s.b.l.
qui a été initié par le Luxembourg dans le cadre de la Grande Région. Les zones transfrontalières sont le laboratoire de l'Europe. Ensuite, mettre en place un fond de capital-risque de taille européenne, 15 milliards d'euros, le montant du paquet fiscal serait une bonne somme pour la France, les autres pays pourraient y contribuer en fonction de leur PIB. Et pour mettre tout cela en place et disposer d'un lieu de rencontre qui le permette, créer un spot spécifique le permettant : www.kanfen.org
By jpbb, at 3:45 PM
jpbb
justement je me disais , mais quel temps il fait à Schuman-Kanfen?
By Anonyme, at 4:02 PM
Beau.
By jpbb, at 6:35 PM
A l'ours:
Beaucoup de gens trouvent grâce à mes yeux, vous le premier, même si vous avez vos mauvais jours.
Dites moi en plus sur ce penseur d'extrême gauche que je ne connais pas.
By Emmanuel Mousset, at 9:18 PM
il est slovene, psychanalyste et philosophe et oppose au global du cosmos paien,où le bien consiste en un équilibre des principes, l'universalisme du christianisme qui introduit dans cer ordre répétitif, un principe, qui lui est totalement étranger, selon lequel chaque individu a un acces direct à l'universalité.
By grandourscharmant, at 11:24 PM
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