De Versailles à Dublin.
Bonjour à toutes et à tous.
Non, le titre de ce billet ne doit pas vous tromper: je ne vous convie pas à un parcours touristique, même en juillet. Mais c'est de politique dont je vais vous parler, pour ne pas changer. Ce jour est sans doute le plus important du mois pour Nicolas Sarkozy. Pourtant, qui va s'en soucier? La France est en vacances... Le Congrès se réunit à Versailles pour se prononcer sur la réforme constitutionnelle. Ce n'est pas rien, c'est même fondamental. Pendant ce temps-là, notre président sera à Dublin, pour évoquer l'Europe et ce traité de Lisbonne qui passe mal. Ce n'est pas non plus une petite chose. Bref, une journée politiquement chargée, lourde de significations, déterminante pour l'avenir.
Versailles d'abord: la réforme des institutions pouvait être pour Nicolas Sarkozy un beau coup politique, l'occasion de manifester ses capacités de rassembler, de moderniser et de démocratiser notre Constitution. C'est raté. Il y a quelques mois pourtant, c'était bien parti. Les socialistes, sur ce sujet comme sur d'autres, étaient divisés. Sarkozy tenait sa belle majorité. Il l'a perdue et se trouve réduit, depuis quelques jours, à de piètres marchandages pour s'assurer de quelques voix supplémentaires (tiens, marchandage: vous comprenez pourquoi hier j'étais contre?). Sa réforme a des chances de passer, mais l'incertitude même du résultat, la majorité ric-rac qui en sortira signent son échec.
Si la réforme était rejetée, le désaveu serait cinglant, ce serait le séisme politique de l'été. François Fillon, qui est mine de rien habile homme, a pris les devants (ce qui veut tout dire...): si le vote est négatif, le Premier ministre ne démissionnera pas, ne se sentira pas visé. Mais qui alors? Suivez son regard, vers l'Elysée bien sûr. De là à penser qu'un rejet du Congrès ferait les petites affaires de Fillon, il n'y a qu'un pas. En attendant, la vraie réforme des institutions n'est pas pour demain. Quoi qu'il arrive cet après-midi, le rendez-vous aura été manqué.
Dublin ensuite: c'est aussi l'échec de Nicolas Sarkozy, celui de son traité "simplifié" qui a tout compliqué dans une situation qui l'était déjà. Sa visite se fait dans des conditions très désordonnées, entourée de polémiques quant à savoir qui le président va-t-il rencontrer. La semaine dernière avait donné le ton: mardi, Sarkozy affirmait que "les Irlandais devront revoter". Beau déni de démocratie, déplorable image de l'Europe, tollé monstre chez nos amis irlandais, par la faute du président français.
Samedi, dans les colonnes du Irish Times, Sarkozy se ravise: "J'étais l'un des premiers leaders européens à dire publiquement que la décision démocratique du peuple irlandais devait être respectée." Bref, Sarkozy et l'Europe, on ne sait plus très bien sur quel pied danser. D'autant que le président nous expliquait, après le non irlandais, qu'il fallait aménager le traité de Lisbonne et le rendre en quelque sorte compatible avec les exigences irlandaises. C'est la théorie, que je récuse, d'une Europe à plusieurs vitesses, les uns allant moins vite vers l'intégration que les autres. Eh bien Sarkozy nous dit maintenant le contraire, toujours dans le Irish Times: "Je ne veux pas d'Europe à deux vitesses." Notre politique européenne est devenue complètement illisible.
Comment le président justifie-t-il sa ballade irlandaise d'aujourd'hui? En affirmant qu'il veut comprendre pourquoi les irlandais ont dit non. Mais est-il besoin d'aller sur place pour cela? Les causes d'un rejet de l'Europe ne sont-elles pas évidentes, depuis longtemps? Chercher à comprendre, c'est reconnaître qu'on ne comprend pas, c'est faire un nouvel aveu de faiblesse. Ce qu'on attend du nouveau président du Conseil européen, ce sont des propositions, des solutions. Mais comment pourrait-il en avancer, puisque son traité de Lisbonne a échoué? Devant le Parlement à Versailles comme devant les autorités irlandaises, pour la Constitution française comme pour la construction européenne, Nicolas Sarkozy n'aura pas réussi ce qu'il a entrepris, même si sa réforme va probablement passer, même si les Irlandais vont sans doute revoter. Mais la France et l'Europe y auront-elles gagné quelque chose? Je ne crois pas.
Bonne matinée.
Non, le titre de ce billet ne doit pas vous tromper: je ne vous convie pas à un parcours touristique, même en juillet. Mais c'est de politique dont je vais vous parler, pour ne pas changer. Ce jour est sans doute le plus important du mois pour Nicolas Sarkozy. Pourtant, qui va s'en soucier? La France est en vacances... Le Congrès se réunit à Versailles pour se prononcer sur la réforme constitutionnelle. Ce n'est pas rien, c'est même fondamental. Pendant ce temps-là, notre président sera à Dublin, pour évoquer l'Europe et ce traité de Lisbonne qui passe mal. Ce n'est pas non plus une petite chose. Bref, une journée politiquement chargée, lourde de significations, déterminante pour l'avenir.
Versailles d'abord: la réforme des institutions pouvait être pour Nicolas Sarkozy un beau coup politique, l'occasion de manifester ses capacités de rassembler, de moderniser et de démocratiser notre Constitution. C'est raté. Il y a quelques mois pourtant, c'était bien parti. Les socialistes, sur ce sujet comme sur d'autres, étaient divisés. Sarkozy tenait sa belle majorité. Il l'a perdue et se trouve réduit, depuis quelques jours, à de piètres marchandages pour s'assurer de quelques voix supplémentaires (tiens, marchandage: vous comprenez pourquoi hier j'étais contre?). Sa réforme a des chances de passer, mais l'incertitude même du résultat, la majorité ric-rac qui en sortira signent son échec.
Si la réforme était rejetée, le désaveu serait cinglant, ce serait le séisme politique de l'été. François Fillon, qui est mine de rien habile homme, a pris les devants (ce qui veut tout dire...): si le vote est négatif, le Premier ministre ne démissionnera pas, ne se sentira pas visé. Mais qui alors? Suivez son regard, vers l'Elysée bien sûr. De là à penser qu'un rejet du Congrès ferait les petites affaires de Fillon, il n'y a qu'un pas. En attendant, la vraie réforme des institutions n'est pas pour demain. Quoi qu'il arrive cet après-midi, le rendez-vous aura été manqué.
Dublin ensuite: c'est aussi l'échec de Nicolas Sarkozy, celui de son traité "simplifié" qui a tout compliqué dans une situation qui l'était déjà. Sa visite se fait dans des conditions très désordonnées, entourée de polémiques quant à savoir qui le président va-t-il rencontrer. La semaine dernière avait donné le ton: mardi, Sarkozy affirmait que "les Irlandais devront revoter". Beau déni de démocratie, déplorable image de l'Europe, tollé monstre chez nos amis irlandais, par la faute du président français.
Samedi, dans les colonnes du Irish Times, Sarkozy se ravise: "J'étais l'un des premiers leaders européens à dire publiquement que la décision démocratique du peuple irlandais devait être respectée." Bref, Sarkozy et l'Europe, on ne sait plus très bien sur quel pied danser. D'autant que le président nous expliquait, après le non irlandais, qu'il fallait aménager le traité de Lisbonne et le rendre en quelque sorte compatible avec les exigences irlandaises. C'est la théorie, que je récuse, d'une Europe à plusieurs vitesses, les uns allant moins vite vers l'intégration que les autres. Eh bien Sarkozy nous dit maintenant le contraire, toujours dans le Irish Times: "Je ne veux pas d'Europe à deux vitesses." Notre politique européenne est devenue complètement illisible.
Comment le président justifie-t-il sa ballade irlandaise d'aujourd'hui? En affirmant qu'il veut comprendre pourquoi les irlandais ont dit non. Mais est-il besoin d'aller sur place pour cela? Les causes d'un rejet de l'Europe ne sont-elles pas évidentes, depuis longtemps? Chercher à comprendre, c'est reconnaître qu'on ne comprend pas, c'est faire un nouvel aveu de faiblesse. Ce qu'on attend du nouveau président du Conseil européen, ce sont des propositions, des solutions. Mais comment pourrait-il en avancer, puisque son traité de Lisbonne a échoué? Devant le Parlement à Versailles comme devant les autorités irlandaises, pour la Constitution française comme pour la construction européenne, Nicolas Sarkozy n'aura pas réussi ce qu'il a entrepris, même si sa réforme va probablement passer, même si les Irlandais vont sans doute revoter. Mais la France et l'Europe y auront-elles gagné quelque chose? Je ne crois pas.
Bonne matinée.
4 Comments:
Est ce donc si condamnable d'etre faible ?
N'y a-t-il de la place dans la société dont vous revez que pour les forts ou pour ceux qui passent pour tels ?
Un aveu de faiblesse est une reconnaissance de son ignorance et de ses limites.
Cela demande de l'intelligence et de l'humilité.
Comment peut on proner d'un coté la négociation et la discution et de l'autre attendre un projet tout ficelé sans meme qu'il ait été discuté et négocié.
A se demander si le seul but de certains n'est pas de s'opposer pour s'affirmer.
Seul le fort reconnait qu'il a des faiblesses car il sait que ses forces lui permettent de les supporter,
le faible lui, ne supporte pas de reconnaitre ses faiblesses car il sait que ses forces sont bien insuffisantes pour les compenser.
A vous de voir dans quel camp vous vous trouvez.
By grandourscharmant, at 1:32 PM
Heureusement que vous êtes là pour me faire rire. Vous êtes indispensable à mes vacances, ne partez surtout pas, ou alors avec votre ordinateur portable. Si je vous comprends bien, la faiblesse de Sarkozy est en réalité une force, son ignorance est une preuve d'intelligence, son échec est un signe d'humilité. Ah oui, vraiment très drôle. Avec vous, pas de doute, Sarkozy sera toujours gagnant, même quand il est perdant!
By Emmanuel Mousset, at 3:29 PM
En tout cas on sait maintenant qu'il a gagné la réforme constitutionnelle dont il avait parlé aux français lors des présidentielles, puis des législatives. C'est plutot un bon point pour lui.
By Anonyme, at 10:12 PM
Un petit point pour lui, une voix d'avance, et un mauvais point pour la France, dont les institutions ne sont pas foncièrement démocratisées ni modernisées.
By Emmanuel Mousset, at 3:12 PM
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