Un acte révolutionnaire.

Je suis allé ce soir à Auchan (eh oui, je passe mes vacances comme je peux, n'aimant ni la mer, ni la montagne). J'aime bien y aller le soir, juste avant la fermeture de 22h00. Que doit faire un social-démocrate dans le temple du capitalisme et du consumérisme? Ce qu'il n'a pas l'habitude de faire, c'est-à-dire un acte révolutionnaire. Mais oui, c'est ce que j'ai osé faire ce soir, moi qui ne suis pas révolutionnaire! Ne vous inquiétez pas, je n'ai pas pratiqué ce que les autonomes et les anarchistes appellent la "réappropriation collective", et que moi j'appelle comme tout le monde le vol. Non, pas ça, pas chez moi. Mais un autre acte, infiniment plus radical, révolutionnaire.

Lequel? Je ne joue pas à vous faire languir, mais réfléchissez un peu: Auchan, c'est l'exploitation des pauvres par l'hyperconsommation. Tout ce qui est gagné par le travail est perdu dans les achats. Le gain? Un bonheur artificiel, des désirs jamais comblés. Comment mettre fin à ça? Faites comme moi, faites des achats virtuels. Oui, virtuels. Le virtuel, c'est à la mode, n'est-ce pas? Dans notre société, tout a tendance à devenir virtuel. Pourquoi pas les achats? Vous ne comprenez pas? Normal, je vous explique:

Je me suis rendu au rayon livres, des envies me sont venues devant certains titres, certains résumés d'ouvrages, certaines couvertures. J'ai pris, touché, feuilleté, un peu lu, retenu l'idée, mais je n'ai pas acheté, j'ai laissé à leur place les ouvrages, dont j'ai noté les titres sur un bout de papier. Même acte révolutionnaire au rayon dvd. Je suis rentré chez moi, heureux avec cette liste entre les mains, parcourant ces titres de livres et de films que je ne lirai ni ne regarderai, mais que j'ai là, en moi, dans mon esprit, sachant de quoi il est question.

J'ai retourné le système contre lui-même, j'ai fait la nique au capitalisme: il voulait que je consomme, je n'ai rien acheté mais je suis revenu avec quelque chose de gratuit, non pas le livre et le film, mais l'idée du livre et du film. Le système devient de plus en plus virtuel: moi aussi, contre lui, à ses dépens, et pour mon plus grand profit! Si ce n'est pas un acte révolutionnaire!

Je sens que certains lecteurs doutent un peu, craignent peut-être pour ma santé mentale, se disent qu'à force de ne pas aller à la mer ou à la montagne je suis un peu "dérangé". Bien sûr que non! Rien ni personne n'est plus sérieux que moi, vous le savez bien, et c'est parfois ce qu'on me reproche. Comme je suis ce soir de bonne composition (normal, je viens de faire mes achats virtuels à Auchan), je vais vous donner fidèlement le texte intégral, non modifié, du bout de papier sur lequel j'ai noté mes "achats" et inscrit quelques réflexions:

- Le papillon des étoiles, de Bernard Werber, l'odyssée spatiale de 144000 passagers d'un "voilier solaire" qui quitte la Terre écologiquement ravagée, pour une traversée incertaine du cosmos de 1000 ans. Un roman qui satisfait ma passion pour la conquête de l'espace et l'avenir lointain de l'humanité.

- Le parfum d'Adam, de Jean-Christophe Rufin, qui nous raconte un complot contre l'espèce humaine mené par des écologistes radicaux. Rufin est un altermondialiste critique envers les propres dérives de sa famille de pensée. Très bien.

- Sacrée Maison Blanche, de Ted Stanger. J'adore cet américain tellement français, sa lucidité, son humour... et son accent. Cette fois, il nous parle de la politique américaine. Un ouvrage indispensable en pleine campagne des élections américaines.

- Des serpents dans l'avion, de David R. Ellis, initialement un petit film, mais qui a remporté un grand succès. Même phénomène que Duel, de Spielberg, au début des années 70. J'aime ça, ces petits bijoux cinématographiques qui rivalisent avec les superproductions. Et puis, j'aime beaucoup l'avion, mais je déteste les serpents!

- La colline a des yeux, 1 et 2, de Wes Craven, parce que j'apprécie ce genre de film, bien que Craven m'ait déçu avec son Scream. Le genre épouvante parodique, mélange d'horreur et d'humour, non, j'aime pas. Il me faut de la peur, de la vraie. La colline a des yeux, je crois que c'est ça.


Bonne nuit non virtuelle.