La promesse de septembre.
Bonjour à toutes et à tous.
Je vais vous reparler de ces élections dont on parle trop peu, les sénatoriales à la rentrée. Pourtant, toute élection, même celle-là, toute expression du suffrage universel, même indirecte, sont importantes. Dans l'Aisne, depuis quelques jours, la situation politique s'est éclaircie. A droite, nous avons trois candidats:
- Pierre André, le sortant, dont la reconduction n'est pas une surprise. Quand on a fait 60% aux municipales pour un 3ème mandat, la question ne se pose même pas.
- Antoine Lefevre, maire de Laon, a lui aussi réalisé un beau score aux municipales, et dans un contexte local beaucoup plus difficile que Pierre André, puisque le député est de gauche, René Dosière. La droite pouvait donc s'attendre à un moins bon résultat, éventuellement à la défaite. Mais l'impitoyable loi de la division, là comme ailleurs, a privé les socialistes de la victoire.
- Annick Venet est le moins connu des trois candidats de droite. C'est la très souriante maire de Vailly-sur-Aisne (que j'ai eu le plaisir de rencontrer lors d'un mariage dans sa commune!), l'une des rares femmes conseillères générales.
Bref, un bon casting pour la droite, et un non moins bon casting à gauche, avec la candidature de mon camarade Daudigny, dont je vous ai longuement parlé dans un précédent billet. A gauche aussi, la candidature de Jean-Luc Lanouilh, conseiller général de Chauny, de sensibilité communiste.
Que faut-il retenir, pour l'instant, de cette élection? Une nouveauté essentielle: le candidat socialiste peut sérieusement espérer l'emporter, et donc la droite de perdre un siège. Un petit rappel historique, afin de mettre en perspective le scrutin de septembre, n'est pas inutile, d'autant que les sénatoriales, élection de terrain, je dirais même de terroir, exige de remonter loin pour comprendre les données actuelles:
Sur un demi-siècle, la droite sénatoriale a dominé le département de l'Aisne à travers deux sensibilités:
- La droite classique, politique, gaulliste, bourgeoise, urbaine, représentée par les élus des grandes villes. En 1958, c'est Louis Roy, chirurgien-dentiste, maire de Soissons et membre de l'UNR, le parti conservateur de l'époque. Dans les années 70 et 80, cette droite est menée au palais du Luxembourg par Jacques Braconnier, maire UDR de Saint-Quentin, et sa relève à la fin des années 90, Pierre André, maire lui aussi de Saint-Quentin. On retrouve là la filiation UNR-UDR-RPR-UMP de ce que j'appelle la droite "classique".
- La droite indépendante, corporatiste, rurale, encore plus conservatrice que la droite classique, à tel point que je la qualifierais volontiers de réactionnaire, et qui allait parfois jusqu'à l'anti-gaullisme. Son parti a été aujourd'hui complétement oublié: le CNIP, Centre national des Indépendants et Paysans. L'appellation se passe de commentaire tant elle est explicite... En 1959, sa figure de proue était René Blondel, président de la FNSEA départementale., agriculteur à Pouilly-sur-Serre. Dans les années 70, c'est Gilbert Devèze, agriculteur comme il se doit et maire de Bièvres, qui prend la relève.
Aujourd'hui, la première droite, conservatrice, a entièrement remplacé la deuxième, réactionnaire. Pour des raisons sociologiques: le poids des agriculteurs, toujours réel, est cependant moins fort. Pour des raisons politiques: la droite s'est unifiée, homogénéisée, elle ne laisse plus de place à une droite "indépendante", qui soit se fond dans l'UMP, soit est absorbée par l'extrême droite.
Je ne suis pas certain que ces évolutions soient favorables à la droite. Le glacis conservateur a fondu en perdant sa représentation "indépendante et paysanne". Un espace s'ouvre à gauche, d'autant que notre sensibilité a une tradition dans l'Aisne, une gauche républicaine, radicale au sens ancien, c'est-à-dire modérée aujourd'hui. En 1959, j'oserais ranger Jean Deguise, agriculteur et maire de Douchy, dans cette catégorie. Il se présentait comme "républicain populaire", ce qui pouvait paraître osé dans nos campagnes. Mais c'est à vérifier.
Ce qui est certain, c'est qu'un autre agriculteur, Jacques Pelletier, maire de Villers-en-Prayères, récemment disparu, sera la grande figure de cette gauche dénommée "gauche démocratique", qui aura des responsabilités ministérielles. Autre représentant de cette sensibilité progressiste, qui a quitté il y a peu la vie politique: Paul Girod (que j'ai eu le plaisir de rencontrer il y a deux ans, en tant que président de la FOL). Le couple Pelletier-Girod va dominer une bonne vingtaine d'années la représentation axonaise au Sénat.
C'est ce centre gauche qui fera l'élection sénatoriale de septembre. Va-t-il se ranger derrière l'UMP ou soutenir le président du conseil général? Vous connaissez mon souhait le plus cher...
Une dernière chose: l'appel à l'unité lancé mercredi dernier par le PRG axonais, en la personne de Frédéric Naud, secrétaire national, Didier Boda, président départemental. Dans l'Aisne, nos camarades radicaux se développent à Château, Soissons, Tergnier, nous aurions tort de les négliger. Ils sont les dépositaires de cet héritage de centre gauche porté en son temps par Jacques Pelletier, ils font preuve dans notre département d'un dynamisme certain. Enfin, comment pourrais-je oublier qu'à Saint-Quentin ils ont partagé la même analyse que moi sur l'alliance avec l'extrême gauche et que le PRG a été le seul parti à refuser de participer à cette liste.
Bonne matinée.
Je vais vous reparler de ces élections dont on parle trop peu, les sénatoriales à la rentrée. Pourtant, toute élection, même celle-là, toute expression du suffrage universel, même indirecte, sont importantes. Dans l'Aisne, depuis quelques jours, la situation politique s'est éclaircie. A droite, nous avons trois candidats:
- Pierre André, le sortant, dont la reconduction n'est pas une surprise. Quand on a fait 60% aux municipales pour un 3ème mandat, la question ne se pose même pas.
- Antoine Lefevre, maire de Laon, a lui aussi réalisé un beau score aux municipales, et dans un contexte local beaucoup plus difficile que Pierre André, puisque le député est de gauche, René Dosière. La droite pouvait donc s'attendre à un moins bon résultat, éventuellement à la défaite. Mais l'impitoyable loi de la division, là comme ailleurs, a privé les socialistes de la victoire.
- Annick Venet est le moins connu des trois candidats de droite. C'est la très souriante maire de Vailly-sur-Aisne (que j'ai eu le plaisir de rencontrer lors d'un mariage dans sa commune!), l'une des rares femmes conseillères générales.
Bref, un bon casting pour la droite, et un non moins bon casting à gauche, avec la candidature de mon camarade Daudigny, dont je vous ai longuement parlé dans un précédent billet. A gauche aussi, la candidature de Jean-Luc Lanouilh, conseiller général de Chauny, de sensibilité communiste.
Que faut-il retenir, pour l'instant, de cette élection? Une nouveauté essentielle: le candidat socialiste peut sérieusement espérer l'emporter, et donc la droite de perdre un siège. Un petit rappel historique, afin de mettre en perspective le scrutin de septembre, n'est pas inutile, d'autant que les sénatoriales, élection de terrain, je dirais même de terroir, exige de remonter loin pour comprendre les données actuelles:
Sur un demi-siècle, la droite sénatoriale a dominé le département de l'Aisne à travers deux sensibilités:
- La droite classique, politique, gaulliste, bourgeoise, urbaine, représentée par les élus des grandes villes. En 1958, c'est Louis Roy, chirurgien-dentiste, maire de Soissons et membre de l'UNR, le parti conservateur de l'époque. Dans les années 70 et 80, cette droite est menée au palais du Luxembourg par Jacques Braconnier, maire UDR de Saint-Quentin, et sa relève à la fin des années 90, Pierre André, maire lui aussi de Saint-Quentin. On retrouve là la filiation UNR-UDR-RPR-UMP de ce que j'appelle la droite "classique".
- La droite indépendante, corporatiste, rurale, encore plus conservatrice que la droite classique, à tel point que je la qualifierais volontiers de réactionnaire, et qui allait parfois jusqu'à l'anti-gaullisme. Son parti a été aujourd'hui complétement oublié: le CNIP, Centre national des Indépendants et Paysans. L'appellation se passe de commentaire tant elle est explicite... En 1959, sa figure de proue était René Blondel, président de la FNSEA départementale., agriculteur à Pouilly-sur-Serre. Dans les années 70, c'est Gilbert Devèze, agriculteur comme il se doit et maire de Bièvres, qui prend la relève.
Aujourd'hui, la première droite, conservatrice, a entièrement remplacé la deuxième, réactionnaire. Pour des raisons sociologiques: le poids des agriculteurs, toujours réel, est cependant moins fort. Pour des raisons politiques: la droite s'est unifiée, homogénéisée, elle ne laisse plus de place à une droite "indépendante", qui soit se fond dans l'UMP, soit est absorbée par l'extrême droite.
Je ne suis pas certain que ces évolutions soient favorables à la droite. Le glacis conservateur a fondu en perdant sa représentation "indépendante et paysanne". Un espace s'ouvre à gauche, d'autant que notre sensibilité a une tradition dans l'Aisne, une gauche républicaine, radicale au sens ancien, c'est-à-dire modérée aujourd'hui. En 1959, j'oserais ranger Jean Deguise, agriculteur et maire de Douchy, dans cette catégorie. Il se présentait comme "républicain populaire", ce qui pouvait paraître osé dans nos campagnes. Mais c'est à vérifier.
Ce qui est certain, c'est qu'un autre agriculteur, Jacques Pelletier, maire de Villers-en-Prayères, récemment disparu, sera la grande figure de cette gauche dénommée "gauche démocratique", qui aura des responsabilités ministérielles. Autre représentant de cette sensibilité progressiste, qui a quitté il y a peu la vie politique: Paul Girod (que j'ai eu le plaisir de rencontrer il y a deux ans, en tant que président de la FOL). Le couple Pelletier-Girod va dominer une bonne vingtaine d'années la représentation axonaise au Sénat.
C'est ce centre gauche qui fera l'élection sénatoriale de septembre. Va-t-il se ranger derrière l'UMP ou soutenir le président du conseil général? Vous connaissez mon souhait le plus cher...
Une dernière chose: l'appel à l'unité lancé mercredi dernier par le PRG axonais, en la personne de Frédéric Naud, secrétaire national, Didier Boda, président départemental. Dans l'Aisne, nos camarades radicaux se développent à Château, Soissons, Tergnier, nous aurions tort de les négliger. Ils sont les dépositaires de cet héritage de centre gauche porté en son temps par Jacques Pelletier, ils font preuve dans notre département d'un dynamisme certain. Enfin, comment pourrais-je oublier qu'à Saint-Quentin ils ont partagé la même analyse que moi sur l'alliance avec l'extrême gauche et que le PRG a été le seul parti à refuser de participer à cette liste.
Bonne matinée.
9 Comments:
Deux précisions à la suite de ce billet:
- Je dois les éléments historiques et factuels à Laure Faure, dans une note du "Démocrate de l'Aisne" paru hier.
- Jean Deguise, sénateur de l'Aisne, que j'ai présenté comme "républicain populaire", était membre du MRP, c'est-à-dire les centristes de l'époque. Ce qui confirme bien l'existence de cette sensibilité qu'on retrouvera avec Pelletier et Girod.
By Emmanuel Mousset, at 1:33 PM
D'apres Maurice Gauchet le président aurais été en campagne depuis 2002 et la gauche serait en miette,
qu'est ce que cela vous inspire ?
http://www.dailymotion.com/fr/featured/cluster/news/video/x65azi_gauchet-putain-4-ans-aussi-valable_news
je vous laisse le lien de la vidéo pour que vous jugiez de vous meme.
By grandourscharmant, at 2:19 PM
D'accord avec ce que dit Gauchet, à quelques nuances près. Il n'y a pas à s'extasier que Sarkozy soit en campagne depuis 2002. Un homme politique est toujours en campagne.
En fait, Sarkozy est le premier homme politique de la société médiatique, celui qui en a intégré toutes les ficelles.
Ce "phénomène" n'aurait pu se développer à ce niveau sans le vide sidéral que traverse la gauche. C'est ce que je disais aussi à Trentesaux quant à la situation locale: Bertrand se nourrit du vide et de l'incurie de la gauche.
By Emmanuel Mousset, at 6:11 PM
....et je suppose bien entendu que vous vous incluez dans cette gauche là!
By Anonyme, at 7:19 PM
Non, cette gauche-là, je la conteste. Je crois que c'est assez clair, non?
By Emmanuel Mousset, at 7:27 PM
Mais puisqu'elle vous conteste majoritairement, que pouvez vous y faire?
By Anonyme, at 8:52 PM
pour faire echo à votre droite indépendante...
gilbert devèze fut, dans le département, l'un des principaux soutient de le pen fin 70 début 80.
By Anonyme, at 11:18 PM
A l'avant dernier anonyme:
- Vous faites erreur, cete gauche-là ne me conteste pas majoritairement puisqu'elle est minoritaire. Mais le plus grave, c'est qu'elle est minoritaire dans l'électorat.
- Que faire? Reprendre l'initiative, dès septembre, reconstruire une gauche crédible qui soit de taille à lutter contre Xavier Bertrand. L'acte 1 de cette reconstruction, ce sera en novembre l'élection d'un nouveau secrétaire de section, qui devra impulser à la gauche le dynamisme nécessaire.
By Emmanuel Mousset, at 10:08 AM
Au dernier anonyme:
Merci de cette précision, qui confirme ma thèse de l'absorption de la droite "indépendante" par l'extrême droite. Ce qui est significatif, c'est que Devèze soutient Le Pen a une époque où celui-ci n'a pas encore émergé électoralement.
By Emmanuel Mousset, at 10:38 AM
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