Le retour de Fiterman.
Bonjour à toutes et à tous.
Parmi les "petites" contributions socialistes, j'en retiens deux qui tiennent sur l'Europe des propos originaux:
D'abord celle intitulée "Unité et refondation(s)!", présentée par Frédéric Léveillé, mais signée par un camarade beaucoup plus connu, Charles Fiterman, ancien secrétaire de Georges Marchais dans les années 70 et chef de file des ministres communistes (dans les Transports) dans les années 80. Fiterman aurait pu, étant donné son passé, rejoindre notre aile gauche. Mais je dirais plutôt que c'est à cause de ce passé qu'il n'a pas rallié les courants minoritaires, sachant qu'il ne faut rien attendre d'un quelconque néo-communisme. En tout cas, Fiterman a choisi, et il l'écrit: "Le réformisme est une grande ambition" (p.101).
Sur l'Europe, le texte s'affirme d'emblée en faveur d'un "socialisme européen", qu'il définit en premier lieu comme un "idéal". C'est important, parce que ce dont crève actuellement l'Europe, c'est de s'enfoncer dans ce fichu "concret" que tous ceux qui n'ont rien à dire ont aux lèvres. Le "concret", je m'en fous! Je veux comme Fiterman de "l'idéal" . Voilà ce qui manque à l'Europe. Quand les politiques brandiront fièrement l'idéal européen, les peuples suivront. Le "concret", c'est la politique au ras des crottes de chien, je n'en veux pas. Fiterman présente même l'Europe comme "la seule utopie mobilisatrice de notre temps" (p.106). Lisez ceci:
"Trop souvent dans les débats sur l'Europe, l'idéal qui est le fondement même de celle-ci s'estompe. Il n'est donc pas surprenant que les peuples se détournent de ce qui n'est plus une aventure..."
Bien vu. L'Europe doit rester un idéal et redevenir une aventure. Mais où sont les aventuriers des temps modernes? Je vous renvoie à mon billet d'il y a une semaine sur "un monde sans héros". Ceux qui affirment que l'Europe, dès le début, n'est qu'une construction économique, mercantile, sont des menteurs. Au contraire, l'Europe est sans doute la première aventure politique de cette ampleur qui ait été motivée, après guerre, par la promotion de valeurs, au centre desquelles la paix (ce qui n'exclut pas, et c'est tant mieux, les préoccupations économiques).
La contribution a une 2ème originalité, plus forte encore que la 1ère: elle dénonce le nationalisme qui se déchaîne dans les votes sur l'Europe, au premier chef celui de 2005. Enfin! Car quelle honte de voir une certaine gauche radicale, y compris au sein du PS, frayer sans vergogne avec des éléments extrémistes de l'autre bord, souverainistes, nationalistes et tutti quanti! J'ai même, à cette époque, entendu quelques camarades, rares il est vrai, soutenir que le vote FN était une forme de "protestation sociale". Vous concluez par vous-même: si ce vote est d'une telle nature, il faut se mettre à son écoute pour essayer de le comprendre. Tu parles! Ceux qui votent Le Pen sont des fachos, à traiter comme tels, ceux qui crachent sur l'Europe sont des nationalistes. Bon, Fiterman ne va pas aussi loin que moi, mais l'inspiration est la même:
"Il est surprenant de voir le nationalisme, voire l'esprit de clocher, ressurgir de manière inattendue dans les propos d'un certain nombre de dirigeants quand il s'agit de la construction européenne. Les débats sur le Traité européen ont été marqués parfois par des accents quasiment cocardiers..."
Fiterman demeure indulgent, il limite la responsabilité aux dirigeants (qui ont il est vrai une responsabilité particulière), mais les peuples, dans certaines de leurs pulsions, ne sont pas non plus innocents, même si le populisme ambiant les exonère de toute responsabilité.
Une 3ème idée me fait adhérer à la contribution signée par Fiterman, idée à laquelle je tiens énormément: il ne faut pas lâcher la perspective d'une Constitution pour l'Europe. Certes, le texte le dit modérément, évoque plus l'esprit que la mesure précise. Mais l'inspiration est là:
"Le vide institutionnel dans lequel nous demeurons devra bien être dépassé, d'une manière ou d'une autre, si nous voulons conforter une citoyenneté européenne et affirmer, avec force, à destination de l'ensemble des habitants de la planète, les valeurs humanistes et démocratiques du projet européen. L'Europe doit pouvoir exister et s'exprimer au nom de tous".
Dernière remarque qui m'agrée, la dimension universelle de l'Europe, qui ne doit pas être un empire supplémentaire mais s'ouvrir sur le monde. A partir de là, la question des frontières, qui préoccupe Laurent Fabius et d'autres camarades, n'a plus à se poser:
"Ces valeurs fondatrices et universelles (...) ne peuvent s'arrêter aux seules frontières géographiques de notre continent."
Lisez Fiterman, du moins son apport sur l'Europe: www.capgps.net . L'autre "petite" contribution intéressante est celle de Marylise Lebranchu. Je vous en parle dans un prochain billet.
Bonne fin d'après-midi.
Parmi les "petites" contributions socialistes, j'en retiens deux qui tiennent sur l'Europe des propos originaux:
D'abord celle intitulée "Unité et refondation(s)!", présentée par Frédéric Léveillé, mais signée par un camarade beaucoup plus connu, Charles Fiterman, ancien secrétaire de Georges Marchais dans les années 70 et chef de file des ministres communistes (dans les Transports) dans les années 80. Fiterman aurait pu, étant donné son passé, rejoindre notre aile gauche. Mais je dirais plutôt que c'est à cause de ce passé qu'il n'a pas rallié les courants minoritaires, sachant qu'il ne faut rien attendre d'un quelconque néo-communisme. En tout cas, Fiterman a choisi, et il l'écrit: "Le réformisme est une grande ambition" (p.101).
Sur l'Europe, le texte s'affirme d'emblée en faveur d'un "socialisme européen", qu'il définit en premier lieu comme un "idéal". C'est important, parce que ce dont crève actuellement l'Europe, c'est de s'enfoncer dans ce fichu "concret" que tous ceux qui n'ont rien à dire ont aux lèvres. Le "concret", je m'en fous! Je veux comme Fiterman de "l'idéal" . Voilà ce qui manque à l'Europe. Quand les politiques brandiront fièrement l'idéal européen, les peuples suivront. Le "concret", c'est la politique au ras des crottes de chien, je n'en veux pas. Fiterman présente même l'Europe comme "la seule utopie mobilisatrice de notre temps" (p.106). Lisez ceci:
"Trop souvent dans les débats sur l'Europe, l'idéal qui est le fondement même de celle-ci s'estompe. Il n'est donc pas surprenant que les peuples se détournent de ce qui n'est plus une aventure..."
Bien vu. L'Europe doit rester un idéal et redevenir une aventure. Mais où sont les aventuriers des temps modernes? Je vous renvoie à mon billet d'il y a une semaine sur "un monde sans héros". Ceux qui affirment que l'Europe, dès le début, n'est qu'une construction économique, mercantile, sont des menteurs. Au contraire, l'Europe est sans doute la première aventure politique de cette ampleur qui ait été motivée, après guerre, par la promotion de valeurs, au centre desquelles la paix (ce qui n'exclut pas, et c'est tant mieux, les préoccupations économiques).
La contribution a une 2ème originalité, plus forte encore que la 1ère: elle dénonce le nationalisme qui se déchaîne dans les votes sur l'Europe, au premier chef celui de 2005. Enfin! Car quelle honte de voir une certaine gauche radicale, y compris au sein du PS, frayer sans vergogne avec des éléments extrémistes de l'autre bord, souverainistes, nationalistes et tutti quanti! J'ai même, à cette époque, entendu quelques camarades, rares il est vrai, soutenir que le vote FN était une forme de "protestation sociale". Vous concluez par vous-même: si ce vote est d'une telle nature, il faut se mettre à son écoute pour essayer de le comprendre. Tu parles! Ceux qui votent Le Pen sont des fachos, à traiter comme tels, ceux qui crachent sur l'Europe sont des nationalistes. Bon, Fiterman ne va pas aussi loin que moi, mais l'inspiration est la même:
"Il est surprenant de voir le nationalisme, voire l'esprit de clocher, ressurgir de manière inattendue dans les propos d'un certain nombre de dirigeants quand il s'agit de la construction européenne. Les débats sur le Traité européen ont été marqués parfois par des accents quasiment cocardiers..."
Fiterman demeure indulgent, il limite la responsabilité aux dirigeants (qui ont il est vrai une responsabilité particulière), mais les peuples, dans certaines de leurs pulsions, ne sont pas non plus innocents, même si le populisme ambiant les exonère de toute responsabilité.
Une 3ème idée me fait adhérer à la contribution signée par Fiterman, idée à laquelle je tiens énormément: il ne faut pas lâcher la perspective d'une Constitution pour l'Europe. Certes, le texte le dit modérément, évoque plus l'esprit que la mesure précise. Mais l'inspiration est là:
"Le vide institutionnel dans lequel nous demeurons devra bien être dépassé, d'une manière ou d'une autre, si nous voulons conforter une citoyenneté européenne et affirmer, avec force, à destination de l'ensemble des habitants de la planète, les valeurs humanistes et démocratiques du projet européen. L'Europe doit pouvoir exister et s'exprimer au nom de tous".
Dernière remarque qui m'agrée, la dimension universelle de l'Europe, qui ne doit pas être un empire supplémentaire mais s'ouvrir sur le monde. A partir de là, la question des frontières, qui préoccupe Laurent Fabius et d'autres camarades, n'a plus à se poser:
"Ces valeurs fondatrices et universelles (...) ne peuvent s'arrêter aux seules frontières géographiques de notre continent."
Lisez Fiterman, du moins son apport sur l'Europe: www.capgps.net . L'autre "petite" contribution intéressante est celle de Marylise Lebranchu. Je vous en parle dans un prochain billet.
Bonne fin d'après-midi.
3 Comments:
Sans être un menteur, pour obtenir la paix, on est passé par l'économique, la paix n'étant pas un idéal, mais une réalité, l'état de non-guerre. Une réalité n'est pas par nature abstraite... mais concrète. Et tu n'en veux pas du concret ? Tu veux du rêve ? Hum...
Pour la constitution européenne, elle n'est nullement obligatoire, l'Angleterre n'en a pas non plus. Des accords suffisent largement, et de plus ce n'est pas d'actualité, surtout après le vote de l'Irlande. Il faudra bien avancer comme d'habitude, cahin-caha.
Mais les valeurs d'humanisme que porte l'Europe, sont bien sûr à exporter sur la terre entière. :-)
By jpbb, at 8:18 PM
- Le rêve, oui j'en veux, notre société en manque. Le "concret", c'est une illusion, un terme à la mode. Je ne connais que le réel, qui n'est pas contradictoire avec le rêve.
- L'Angleterre sans Constitution, et souvent si peu européenne, n'est pas nécessairement un modèle.
- Cahin-caha? J'aime pas, c'est boiteux, je veux une Europe qui glisse, qui surfe, qui vole.
By Emmanuel Mousset, at 8:48 PM
Tu es trop exigeant. ;-)
Mais c'est bien...
By jpbb, at 12:58 PM
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