L'Aisne avec DSK

14 septembre 2008

A bas la calotte?

Bonsoir à toutes et à tous.

A la suite de mon billet précédent, où je vous entretenais de la laïcité, j'aimerais ce soir parler d'anticléricalisme. Faut-il crier "à bas la calotte?" quand passe un prêtre, à la manière de certains anticléricaux d'autrefois... et de quelques-uns d'aujourd'hui? Bien sûr que non. Pire que ça: lancer ce cri de guerre serait idiot ou salaud. Idiot parce que la société déchristianisée de ce début de siècle n'a plus grand-chose à voir avec la société cléricale d'il y a 100 ans. Le slogan anticlérical perd donc son sens et est perçu comme une dérision gratuite. Salaud parce que vécu aussi comme un acte d'intolérance: chacun est libre de se vêtir comme il veut, en soutane ou en drag queen, sans se voir injurié.

L'anticléricalisme est nécessaire dans son principe mais contestable dans certaines de ses pratiques, surtout quand elles sont anachroniques. Le numéro spécial anti-Pape de Charlie-Hebdo ne m'a guère convaincu ni amusé, parce qu'il vise un peu à côté de la plaque. Mais peut-être lui fallait-il garder une partie de son lectorat qui pouvait cette semaine le quitter pour Siné-Hebdo? Le plus drôle, c'est que celui-ci ne dit presque rien, dans son premier numéro, sur la venue du Pape!

En matière d'anticléricalisme, je partage entièrement l'analyse de mon camarade de la Ligue de l'enseignement, Charles Conte, qui est à tout point de vue remarquable et que je vous résume, en vous laissant le soin de consulter son intégralité ( http://www.rue89.com/2008/09/01/a-bas-la-calotte-necessite-et-limites-de-l-anticlericalisme ):

L'anticléricalisme n'est pas un phénomène proprement laïque, puisqu'il existe dès le Moyen Age, sous une forme populaire, notamment lors de Carnaval. Au XIXème siècle, il devient plutôt intellectuel, avec la tenue des banquets. Aujourd'hui, l'anticléricalisme est une nécessité dont il faut cependant être conscient des limites, au nombre de cinq:

1- Il existe "une forme basse d'anticléricalisme", agressive et vulgaire, peu finaude, qui se retourne contre l'anticléricalisme.

2- L'anticléricalisme est souvent réactif, défensif, passionnel, pour ne pas dire pulsionnel, sans véritable assise théorique, ce qui est un comble pour une attitude qui se réclame du rationalisme.

3- L'anticléricalisme diabolise plus qu'il ne critique le catholicisme, il lui donne une importance qu'il a perdu, il met contradictoirement du religieux dans son aversion sacrée!

4- L'anticléricalisme a été parfois violent, sous la Révolution française, la Commune de Paris et surtout la guerre d'Espagne. Cela discrédite ses bonnes intentions. Que cette violence ait répondu aux violences cléricales ne constitue nullement une excuse. On n'a pas à se servir des méthodes de l'adversaire quand on est vraiment son adversaire.

5- L'anticléricalisme a souvent été perçu par la gauche comme un dérivatif contestable: pendant qu'on s'en prend aux curés, on oublie les bourgeois, pendant qu'on évoque la question religieuse, on ne parle pas de la question sociale.

Ma conclusion sera celle de Charles Conte: l'anticléricalisme n'est pas une philosophie ni une raison de vivre, ce n'est qu'une riposte nécessaire dans certaines circonstances historiques particulières.


Bonne soirée laïque.