L'Aisne avec DSK

26 décembre 2008

Banal et abominable.

Bonjour à toutes et à tous.

J'ai passé mon Noël à lire un ouvrage sur "Hitler". Oui, je sais, ce n'est pas une lecture de circonstance, mais c'est instructif quand même. Sous-titre du bouquin: "Essai sur le charisme en politique". Auteur: l'historien Ian Kershaw. Pour moi, la réflexion sur Hitler est inhérente à tout engagement politique. En gros, la question à mon avis fondamentale est la suivante: comment l'hitlérisme a-t-il été possible? En cette journée de Noël, j'avais deux choix: méditer sur le bien, méditer sur le mal. J'ai opté pour le second.

De cette lecture, j'ai retenu quatre enseignements;

1- L'homme improbable. S'il est un leader politique qui ne pouvait pas, qui ne devait pas émerger, c'était bien lui, c'était Adolf Hitler. En matière de charisme, il n'avait rien pour lui, tout plutôt contre lui: les origines, la vie, le physique, l'intelligence, la psychologie, rien, mais absolument rien ne le prédisposait à assumer le pouvoir suprême, à fasciner des dizaines de millions de personnes et à en effrayer autant. Un marginal, un minable, un malade, voilà l'homme qui va devenir tyran charismatique. Pourquoi? La réponse est effrayante: il a été le produit d'une situation, d'un accouchement monstrueux.

2- L'anarchie autoritaire. On parle souvent de totalitarisme à propos de l'hitlérisme, on imagine un système global, une machine bien huilée, une société impitoyablement homogène, un ordre absolu. C'est totalement faux: le IIIème Reich était anarchique, désordonné, l'organisation normale de la société avait été détruite, on y donnait des ordres la plupart du temps illogiques et les lois n'avaient plus aucun sens. Ce régime chaotique a prolongé hors de lui, par la guerre, son chaos. Cet univers n'avait que l'apparence de la rationalité. Sa nature profonde, c'était la folie, non seulement meurtrière, mais ordinairement burlesque, surréaliste (en plein conflit mondial, Hitler et les siens discutent plusieurs mois pour savoir s'il faut ou non interdire les courses de chevaux en Allemagne!).

3- La répression ciblée. On croit souvent que l'hitlérisme a posé une chape de plomb sur la société allemande, victime alors d'une répression tout azimut (d'où le concept de "totalitarisme"). Ce n'est pas exact. Beaucoup d'Allemands, pas nécessairement enthousiastes envers le nazisme, n'ont nullement été inquiétés. Exemple les églises, catholiques et protestantes. Leur philosophie n'était pas en adéquation avec ce paganisme barbare que représentait l'hitlérisme. Pourtant, elles n'ont pas été persécutées, aucun évêque ne s'est retrouvé en camp de concentration. Les victimes du nazisme sont très ciblées, ce sont des minorités: juifs, francs-maçons, militants communistes, sociaux-démocrates, homosexuels, témoins de Jéhova, vagabonds, prostituées, handicapés, tziganes, ... Ca fait du monde mais ça ne fait pas non plus des masses. N'oublions pas: l'hitlérisme a pris et s'est maintenu parce que la majorité ne se sentait pas concernée ni touchée par ses crimes.

4- L'adhésion populaire. Au départ, elle n'était pas garantie. On a vu combien Hitler n'avait rien d'un séducteur. Le personnage n'éprouvait aucun amour pour son peuple. Jamais il n'a visité une ville bombardée, jamais il n'a manifesté son attention, sa compassion, sa solidarité pour ses concitoyens dans le malheur de la guerre. Le peuple allemand, il a même, à la fin, souhaité sa destruction, indigne qu'il était du projet du Führer. Et pourtant, ce peuple, jusqu'à la fin, a aimé, admiré, adulé un homme qui ne méritait que la haine et la mort qu'il répandait autour de lui.

Pour quiconque aujourd'hui fait de la politique, la réflexion sur la terrible énigme qu'a été Adolf Hitler devrait être obligatoire. Car l'humanité, avec toutes ses ressources, avec tous ses trésors, n'aurait jamais dû engendrer une telle créature, un tel homme, à la fois banal et abominable.


Bonne soirée.

2 Comments:

  • bonsoir
    tous tes commentateurs sont-ils en vacances?Excellente année 2009
    MD

    By Blogger md, at 7:32 PM  

  • Meilleurs voeux à toi aussi.

    C'est vrai, les commentaires se font rares depuis une semaine, mais la fréquentation du blog est toujours aussi forte, plusieurs centaines de visites par jour.

    Mais rappelle-toi, puisque tu as fréquenté le blog à ses débuts: les commentaires étaient très parsemés. Reviendrait-on à la normale, après les chaudes polémiques d'avant et d'après les municipales?

    Ce n'est pas impossible. Et tant mieux. C'est malgré moi que ce blog est devenu un lieu d'affrontement. S'il redevient un lieu de lecture et d'échange, c'est une bonne chose.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 8:07 PM  

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