10 ans et maintenant.
Bonjour à toutes et à tous.
J'étais samedi soir l'invité du journal de France 3 Picardie, pour les 10 ans du Café-Philo. Le lien est à la fin du billet. Je vais de temps en temps à la télé, c'est une expérience intéressante. Le direct vous met le trac, c'est certain, mais sur la route, jusque dans la salle de maquillage (une sorte de boule qui se balade entre la gorge et l'estomac et qui n'est pas vraiment agréable). Après, une fois entré dans le studio, c'est fini, plus rien, la décontraction (oui, j'irai jusqu'à dire ça). Allez comprendre pourquoi...
Intéressant aussi ce qu'est aujourd'hui une chaîne de télévision. Vous vous attendez à voir du monde partout, des grosses caméras, un peu une fourmilière. C'est pas du tout ça. Le grand hall d'entrée est vide, et à part l'hôtesse d'accueil et la maquilleuse, on ne voit personne. Dans le studio, c'est pire, si j'ose dire: la présentatrice, un technicien et moi, c'est tout. La numérisation a bouleversé l'ambiance de la télévision. C'est paradoxal: on se sent seul alors qu'on est en compagnie de centaines de milliers de téléspectateurs. Et on ne le ressent absolument pas.
J'en viens au contenu de l'émission. Il y a 10 ans, la télévision était déjà là, pour le lancement du Café-Philo à Saint-Quentin. Le reportage a été samedi rediffusé. J'expliquais alors que le succès de la formule venait de la perte des repères, moraux, religieux, politiques, qui conduit à s'adresser à cette réflexion fondamentale qu'est la philosophie. Dix ans plus tard, c'est toujours vrai, plus que jamais, avec cependant de fortes nuances:
La crise morale, je n'y crois pas trop. Là, les valeurs essentielles n'ont jamais périclité. L'honnêteté, la loyauté, la générosité et autres vertus n'ont pas diminué, elles appartiennent au fond humain, immuable, éternel. Je pense même que notre société est plus moralisatrice qu'il y a 10 ans. J'en veux pour preuve l'engouement devenu quasi obligatoire pour certains attitudes morales: la compassion, la repentance, le devoir de mémoire, par exemple.
Sur ce blog, il y a quelques jours, un commentateur s'en est pris à moi parce qu'il me reprochait mon manque de "compassion" envers le peuple palestinien, alors que j'avais condamné fortement l'intervention israélienne. Mais manifestement, ça ne lui suffisait pas: il lui fallait la "compassion". Souvent, les commentaires sont un mélange de psychologie et de moralisme, très caractéristique de notre époque, et moins influent il y a 10 ans.
La crise religieuse, je n'y crois pas du tout. Au contraire, les religions sont aujourd'hui beaucoup plus présentes dans l'espace public qu'il y a 10 ans: l'Islam, bien sûr, mais aussi les sectes protestantes, conquérantes en Amérique du sud et dans l'Europe de l'est. La religion, incontestablement, se porte bien, et même mieux qu'il y a 10 ans.
La crise politique, en revanche, est la plus flagrante. Quand la journaliste de France 3 m'a demandé un exemple de perte des repères, j'ai spontanément cité la politique. Socialisme, libéralisme, que sont devenues aujourd'hui ces idéologies? Il y a 10 ans, nous connaissions en France une expérience réformiste, menée par Lionel Jospin et la "gauche plurielle". Comme cela nous semble loin! Jospin a été disqualifié en 2002 par Le Pen, événement incroyable, et Sarkozy s'est fait élire en récupérant certaines références, puis certains hommes de gauche. Qui l'aurait cru il y a 10 ans!
Et dans 10 ans, qu'en sera-t-il? Je vous donne rendez-vous sur ce blog en 2019, et nous en reparlerons.
Bonne fin d'après-midi.
http://jt.france3.fr/regions/popup.php?id=c80a_1920
Cliquer samedi 17 janvier.
Début: 6 minutes et 53 secondes
Fin: 12 minutes et 21 secondes
J'étais samedi soir l'invité du journal de France 3 Picardie, pour les 10 ans du Café-Philo. Le lien est à la fin du billet. Je vais de temps en temps à la télé, c'est une expérience intéressante. Le direct vous met le trac, c'est certain, mais sur la route, jusque dans la salle de maquillage (une sorte de boule qui se balade entre la gorge et l'estomac et qui n'est pas vraiment agréable). Après, une fois entré dans le studio, c'est fini, plus rien, la décontraction (oui, j'irai jusqu'à dire ça). Allez comprendre pourquoi...
Intéressant aussi ce qu'est aujourd'hui une chaîne de télévision. Vous vous attendez à voir du monde partout, des grosses caméras, un peu une fourmilière. C'est pas du tout ça. Le grand hall d'entrée est vide, et à part l'hôtesse d'accueil et la maquilleuse, on ne voit personne. Dans le studio, c'est pire, si j'ose dire: la présentatrice, un technicien et moi, c'est tout. La numérisation a bouleversé l'ambiance de la télévision. C'est paradoxal: on se sent seul alors qu'on est en compagnie de centaines de milliers de téléspectateurs. Et on ne le ressent absolument pas.
J'en viens au contenu de l'émission. Il y a 10 ans, la télévision était déjà là, pour le lancement du Café-Philo à Saint-Quentin. Le reportage a été samedi rediffusé. J'expliquais alors que le succès de la formule venait de la perte des repères, moraux, religieux, politiques, qui conduit à s'adresser à cette réflexion fondamentale qu'est la philosophie. Dix ans plus tard, c'est toujours vrai, plus que jamais, avec cependant de fortes nuances:
La crise morale, je n'y crois pas trop. Là, les valeurs essentielles n'ont jamais périclité. L'honnêteté, la loyauté, la générosité et autres vertus n'ont pas diminué, elles appartiennent au fond humain, immuable, éternel. Je pense même que notre société est plus moralisatrice qu'il y a 10 ans. J'en veux pour preuve l'engouement devenu quasi obligatoire pour certains attitudes morales: la compassion, la repentance, le devoir de mémoire, par exemple.
Sur ce blog, il y a quelques jours, un commentateur s'en est pris à moi parce qu'il me reprochait mon manque de "compassion" envers le peuple palestinien, alors que j'avais condamné fortement l'intervention israélienne. Mais manifestement, ça ne lui suffisait pas: il lui fallait la "compassion". Souvent, les commentaires sont un mélange de psychologie et de moralisme, très caractéristique de notre époque, et moins influent il y a 10 ans.
La crise religieuse, je n'y crois pas du tout. Au contraire, les religions sont aujourd'hui beaucoup plus présentes dans l'espace public qu'il y a 10 ans: l'Islam, bien sûr, mais aussi les sectes protestantes, conquérantes en Amérique du sud et dans l'Europe de l'est. La religion, incontestablement, se porte bien, et même mieux qu'il y a 10 ans.
La crise politique, en revanche, est la plus flagrante. Quand la journaliste de France 3 m'a demandé un exemple de perte des repères, j'ai spontanément cité la politique. Socialisme, libéralisme, que sont devenues aujourd'hui ces idéologies? Il y a 10 ans, nous connaissions en France une expérience réformiste, menée par Lionel Jospin et la "gauche plurielle". Comme cela nous semble loin! Jospin a été disqualifié en 2002 par Le Pen, événement incroyable, et Sarkozy s'est fait élire en récupérant certaines références, puis certains hommes de gauche. Qui l'aurait cru il y a 10 ans!
Et dans 10 ans, qu'en sera-t-il? Je vous donne rendez-vous sur ce blog en 2019, et nous en reparlerons.
Bonne fin d'après-midi.
http://jt.france3.fr/regions/popup.php?id=c80a_1920
Cliquer samedi 17 janvier.
Début: 6 minutes et 53 secondes
Fin: 12 minutes et 21 secondes
16 Comments:
vous si friand d'europe
un sujet de réflexion
pourquoi on recrute au luxembourg des serveuses à 2000€ mensuel pour 40h
là où en France, on leur propose moitié moins.
By grandourscharmant, at 9:12 PM
Je n'ai pas la réponse, mais je suis certain que vous allez me la donner.
Par ailleurs, j'ai horreur des devinettes.
By Emmanuel Mousset, at 7:27 AM
Point de devinettes
ct juste un sujet de réflexion
pas de polémique.
D'un frontiere à l'autre, pour le meme boulot,
on a des salaires différents,
des fiscalités différentes
Pardonnez moi d'avoir été trop concret, et de m'intéresser au réel
pas à la théorie.
By grandourscharmant, at 7:35 AM
On ne comprend pas le réel sans passer par la théorie.
By Emmanuel Mousset, at 9:28 AM
et c'est avec ce genre de poncifs que vous passez pour savant ?
Avec moi, il va falloir que vous éleviez un peu le niveau,
la rhétorique ne suffit pas.
La théorie étant une abstraction du réel est il indispensable de théoriser pour comprendre
Vous ne faites que reprendre en utilisant d'autres mots ce que je vous répete depuis le début de l'année et qui vous semble incompréhensible.
Concevoir pour pouvoir voir.
Seriez vous dans la bonne direction
ou ne s'agit-il que d'un effet...
By grandourscharmant, at 11:39 AM
Je ne cherche pas à être savant mais à dire des choses justes et utiles. Les "poncifs" sont nécessaires pour ceux qui ne les comprennent pas.
By Emmanuel Mousset, at 1:36 PM
Mais pourquoi ne le faites vous pas,
pourquoi dites vous autant
de choses inutiles et injustes
By grandourscharmant, at 1:45 PM
C'est vous qui le dites. D'autres, parfois éminents, ont une meilleure image de moi. Mais je ne veux pas vous forcer à m'apprécier, et je n'en ressens pas le besoin.
By Emmanuel Mousset, at 7:49 PM
et oui, évidement
tout est une question d'image.
Je parle d'être
et vous répondez paraitre.
By grandourscharmant, at 8:21 AM
L'être et l'image vont ensemble. L'une est le reflet de l'autre.
By Emmanuel Mousset, at 1:47 PM
et les salauds ont des tetes de salauds
et les saints des tetes de saints.
A votre age,
peut on encore parler de naiveté,
si vous n'en etes que là.
By grandourscharmant, at 2:36 PM
Vous caricaturez, comme souvent, mes propos. Je crois simplement que l'image révèle quelque chose de l'individu, mais ne dit évidemment pas tout de lui. Voilà aussi pourquoi je ne condamne pas absolument l'univers médiatique, contrairement à beaucoup de personnes de gauche.
By Emmanuel Mousset, at 7:02 PM
Notre propos n'était pas là
mais puisque c'est votre réponse.
Je suis tout à fait d'accord avec vous,
l'image est révélatrice.
Et sur votre non condamnation de l'univers médiatique,
je ne peux que vous rejoindre.
Car ce n'est qu'un outil qui n'est que ce qu'on en fait.
By grandourscharmant, at 7:47 PM
Enfin un point d'accord entre nous. Comme quoi il ne faut jamais désespérer.
By Emmanuel Mousset, at 8:57 PM
vous etes un grand sentimental et un grand émotif quand meme.
Nous avons bien plus de point d'accord que cela,
mais vous etes vous pret à l'admettre...
By grandourscharmant, at 10:02 PM
Non, nous avons très peu de points d'accord. C'est pourquoi je ne suis ni sentimental, ni émotif.
By Emmanuel Mousset, at 10:34 PM
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