L'Aisne avec DSK

19 juin 2009

RSA contre RMI.

Bonsoir à toutes et à tous.

Le RSA est en vigueur depuis quelques jours. Un homme de gauche, Martin Hirsch, en est l'inventeur et les conseils généraux socialistes, soucieux d'appliquer la loi de la République, mettent le dispositif en place. Ce qui amène la gauche à une certaine indulgence vis à vis du RSA. Et puis, si par ce biais des personnes peuvent être incités à rechercher ou à conserver un travail parce qu'un supplément leur est versé, qui rend plus intéressant de vivre qu'avec des allocations, tant mieux. Mais combien de gens seront-ils touchés ? On fera dans quelques mois le bilan, on ne peut guère en dire plus maintenant.

Ce dont j'aimerais cependant parler ce soir, c'est de la signification politique du RSA. Car sous couvert d'une mesure technique, d'une gestion sociale des chômeurs et travailleurs pauvres, il y a une intention idéologique que la gauche doit d'urgence rendre visible. D'autant que le RSA, c'est sa défaite, puisque celui-ci remplace un autre dispositif voulu il y a vingt ans par Rocard et les socialistes : le RMI. Les deux logiques sont politiquement opposées : le RMI était un droit pour toute personne sans emploi de recevoir un petit quelque chose, pas grand-chose mais assez pour ne pas socialement sombrer. Grâce au RMI, on ne le dit pas suffisamment (y compris dans les rangs socialistes), la société française a échappé à la tragédie silencieuse de la grande pauvreté, telle qu'elle existe et fait des ravages aux Etats-Unis.

Le RSA, ça n'a rien à voir, c'est une mesure destinée à encourager ceux qui ont déjà un travail pour qu'ils le gardent. On n'est plus dans une logique du droit, on ne s'adresse plus aux chômeurs en tant que tels, on est dans l'idéologie sarkozienne de la "valeur-travail", on récompense le boulot, quitte à ce que celui-ci soit merdique, à temps partiel, intérimaire. On part de cette idée qu'un sans emploi ne recherche pas un emploi, qu'il est légèrement fainéant, qu'il faut l'inciter par quelques sous à embaucher quelque part.

L'idéologie du RSA est dans les têtes depuis longtemps, c'est pourquoi la droite, avec ce dispositif, a remporté une grande victoire politique. Depuis 2002, combien d'électeurs de gauche, y compris parfois des adhérents socialistes, n'ont-ils pas critiqué "l'assistanat", ce mot qui auparavant appartenait au vocabulaire de droite et qui s'est installé progressivement dans les têtes de gauche ? Combien de fois ai-je entendu des camarades me dirent : le RMI, c'est bien, mais on a oublié le I d'insertion. Oui mon con ! Ça ne viendrait pas à l'idée que l'insertion est du ressort des patrons, de l'économie, que c'est à eux de créer de l'emploi, que le chômage de masse relève aussi de leur responsabilité ?

Au lieu de ça, on préférait taper sur Jospin, les 35h, la CMU et bien sûr le RMI. Dégueulasse ! De toute façon, quand quelqu'un commence par "c'est bien mais ...", vous pouvez être sûr que s'annonce une grosse connerie. C'est ainsi que le RMI a été discrédité par notre propre électorat, qui nous accusait de venir en aide aux plus pauvres (comme si ce n'était pas la définition même du socialisme !). Le terrain a donc été préparé à Sarkozy et à son RSA. Bref, la gauche a encore un gros travail à faire pour remonter la pente et imposer ses propres thèmes idéologiques dans le débat public.


Bonne nuit.

2 Comments:

  • Il faut même aller au-delà de ce que vous dites: le RSA est aussi destiné à placer les précaires juste ou légèrement au-dessus du seuil de pauvreté et ainsi faire croire au reste de la population que, sous la droite, il n'y a plus personne qui vit en dessous de ce seuil, en bref, qu'il n'y a plus de pauvres en France.

    Le RSA n'est certainement pas une mesure sociale, car les "bénéficiaires" de cette nouvelle allocation devront obligatoirement se soumettre à l'ORE (offre raisonnable d'emploi). Ils ne pourront pas refuser plus de deux propositions d'emploi, même si elles ne lui conviennent pas (éloignement géographique, compétences...).

    Cela revient de fait à appliquer une logique, qui rappelle étrangement le STO de sinistre mémoire.

    By Anonymous Anonyme, at 10:39 AM  

  • Le STO, là, je crois que vous allez un peu loin. Mais il est vrai que le RSA ne règle pas le problème de l'emploi.

    By Blogger Emmanuel Mousset, at 1:23 PM  

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