La nationalité ne se mérite pas.

Bonsoir à toutes et à tous.


A la suite du discours de Grenoble, Xavier Bertrand s'en est pris violemment aux "faux experts", "associations de bien pensants" et au Parti socialiste qui ont osé critiquer les propositions de Nicolas Sarkozy. Que Bertrand attaque le PS, même brutalement, ça ne me choque pas, c'est le jeu politique et démocratique qui veut ça. En revanche, le coup des "faux experts" et "associations de bien pensants" est mal venu et peu correct.

Qui est visé ? Pour les premiers, il s'agit de Guy Carcassonne, l'un des plus éminents constitutionnalistes français. Ce n'est évidemment pas une raison pour être nécessairement d'accord avec lui, mais le traiter de "faux expert" est inconvenant. Quant aux "associations de bien pensants", ce sont le MRAP, la LICRA et la Ligue des Droits de l'Homme, qui toutes se sont exprimées sur le sujet. Là encore, on n'est pas obligé d'être d'accord avec elles, mais pourquoi rabaisser par l'ironie des organisations anciennes, compétentes et reconnues ?

J'en viens maintenant au fond de l'intervention de Xavier Bertrand, qui a le bénéfice de la clarté et qui se résume en une formule : "la nationalité française se mérite". C'est en effet l'axiome d'où découlent ensuite les propositions de Nicolas Sarkozy. Je le conteste totalement. La nationalité française ne se mérite absolument pas, elle s'hérite par ce principe juridique qu'on appelle le droit du sol, qui n'a pas été introduit par la Révolution Française mais date de l'Ancien Régime.

Que dit-il ? Que quelqu'un qui naît de parents qui vivent en France devient automatiquement
français ; que cette nationalité ne peut lui être retirée que pour des actes graves et rares, spécifiquement antinationaux (trahison, intelligence avec l'ennemi, etc). Pour le reste, un Français reste français à vie. Et c'est très bien ainsi. Sinon, l'attribution ou le retrait de la nationalité relèveraient de critères moraux ou politiques, de l'humeur du moment et des aléas de l'actualité.

Si l'on veut poursuivre cette perspective jusqu'à son ultime et absurde conséquence, il faudrait soumettre tout citoyen à un test ou examen de nationalité, pour vérifier s'il mérite ou pas d'en bénéficier. Mais à quel âge ? A sa majorité ? Dès l'âge de raison ? En tout cas pas durant la petite enfance, impossible ! Ce qui signifie que des millions d'individus demeureraient durant de nombreuses années sans nationalité, en attente d'attribution ! L'inanité d'un propos éclate quand on le conduit au bout de sa logique.

Le mérite est la consécration d'un travail ou d'une vertu. Il n'y a pas de vertu à être français, ce n'est généralement pas un choix, ça ne découle pas d'un travail mais des hasards de la naissance. Bien des choses en ce monde méritent ou pas d'être obtenues, mais certainement pas la nationalité.


Bonne soirée.