L'Aisne avec DSK

06 janvier 2011

"Mitterrand est mort".



Bonjour à toutes et à tous.


C'était hier et c'était il y a pourtant quinze ans ; j'étais dans mon lycée, en salle des profs, quand un collègue m'a dit : "Mitterrand est mort". Et puis, dans l'après-midi, Robert Martin, professeur de russe et communiste, a mis une photo de l'illustre disparu sur un panneau syndical, avec des remerciements pour son action. "Quoi qu'on pense de lui, on lui doit bien ça", m'a-t-il dit. En descendant la rue d'Isle pour prendre mon train (en 1996, j'habitais encore à Paris), j'ai croisé un autre collègue, socialiste cette fois, Yves Mennesson, et je lui ai dit : "Mitterrand est mort".

François Mitterrand ! Sans lui, je ne me serais peut-être pas intéressé à la politique. Dans les années 70, quand on voulait être de gauche, il n'y avait que deux grands choix : Mitterrand ou Marchais, le lettré ou l'aboyeur. Question tempérament, je n'ai pas hésité : ça ne pouvait être que Mitterrand. Aujourd'hui aussi, la politique est une affaire de tempérament : le style trompette et grosse caisse ne sera jamais le mien.

Politiquement, qu'est-ce qu'on retiendra de Mitterrand ? Deux choses qui font de moi un éternel mitterrandiste :

1- Le tournant économique de 1983, qualifié de "rigueur", qui a déclenché la longue conversion du socialisme français à la social-démocratie, qui n'est pas encore achevée. La vraie rupture du mitterrandisme, ce n'est pas 1981 (qu'en reste-t-il aujourd'hui ?) mais 1983.

2- La défense du Traité de Maastricht en 1992, qui a ancré le Parti socialiste et la France dans la construction européenne, contre les forces hostiles qui aujourd'hui encore sont à l'oeuvre dans notre pays et dans notre Parti.

La social-démocratie et l'Europe, voilà ce que nous devons à Mitterrand, alors que la droite a longtemps été spontanément souverainiste (héritage du gaullisme) et bien sûr très libérale. "Mitterrand est mort" mais son héritage est vivant et fécond.

Il est nécessaire de réactiver les mémoires contre les faussaires de l'Histoire, les faiseurs de légende, les traficoteurs nostalgiques : le Programme commun, l'Union de la Gauche, c'est pour les joueurs de pipeau, qui sont nombreux dans les anniversaires. La vérité, c'est que Mitterrand n'a jamais été marxiste, que sa tendance naturelle, sa culture personnelle l'inclinaient plutôt à l'anticommunisme. Mais Mitterrand était aussi et surtout un grand politique, c'est-à-dire un machiavélien et un cynique (au sens exact et positif de ces deux termes) : il ne s'est pas allié au PCF par sentiment, par affinité idéologique mais par pur intérêt électoral, parce que c'était pour lui, pour la gauche, la seule façon d'accéder au pouvoir.

En cette semaine anniversaire, je souhaite aux joueurs de pipeau un silence éternel et à François Mitterrand, le vrai, le grand, longue vie ! "Je crois aux forces de l'esprit et je ne vous quitterai pas", n'avait-il pas dit dans son dernier message présidentiel du Jour de l'An ?


Bonne journée.


En vignette, la visite de François Mitterrand dans l'Aisne, alors qu'il n'était encore que premier secrétaire du Parti. Merci au Mouvement des Jeunes Socialistes de l'Aisne.

2 Comments:

  • 1981: la gauche au pouvoir après 27 ans d'une France dirigée par la droite( Coty était de droite en 1954) mais surtout, oui surtout, une France qui n'est plus un état barbare:l'abolition de la peine de mort;c'est quand même le plus important non? enfin,enfin,,on n'élimine plus un être humain en le coupant en deux morceaux parce que,la guillotine, qu'est-ce-que c'est d'autre?Merci Badinter
    Je regrette actuellement que certains amis de gauche( ma famille politique) soient encore "gênés aux entournures" sur cette question:on est pour ou contre la peine de mort;il n'y a pas d'autre alternative

    By Anonymous MF, at 2:17 PM  

  • Un peu le sentiment de lire une chronique gastronomique, l'éloge de la bonne bouffe, par un anorexique.
    Bien curieux cet éloge du machiavélisme-cynisme politique par quelqu'un qui en semble incapable et qui étale ses côtés les plus conformistes à longueur de billets.
    Mitterrand lui, c'est sûr, savait cacher tout cela (ses amitiés pétainistes indécrottables, sa férocité durant la guerre d'Algérie, ses compromissions avec la Francafrique, son immobilisme constitutionnel une fois endossé l'habit tant décrié ..etc) sous son vernis bien peaufiné de fin lettré.
    Son immobilisme institutionnel a créé un modèle qui inspire encore le foisonnement des ambitions pour les primaires.Il nous a bien menés en bateau et le navire est toujours là, en rade, à se chercher un capitaine qui nous dispense de mobiliser les forces de l'esprit et du courage. On reconnaît sa "patte" dans dans cette inflations d'égos qui nous divisent sur des cartes truquées. Oui pour sûr il ne nous a pas quittés !

    By Blogger Ane-Vert, at 4:26 PM  

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