Bonjour à toutes et à tous.
Je crois y voir un peu plus clair, ce dimanche matin, sur le choix que doivent faire les strauss-kahniens en vue de notre congrès et qui rend le premier signataire de notre contribution, Pierre Moscovici, "
perplexe", selon ses propres termes. Je le comprends, moi aussi je le suis. Mais mes pensées se décantent, malgré les deux whiskys, le verre de bordeaux et les deux "cow-boys" que j'ai pris hier soir au "Ranch", un bon restau de Guise. Je précise que c'est ma consommation exceptionnelle et pas ordinaire, réservée à une soirée entre amis (le "cow-boy" est un digestif violemment épicé, qui rend tout rouge ou fait rire sans raison une fois ingurgité cul sec).
Première leçon de ces derniers jours et heures:
l'échec d'une alliance de tous les réformistes, que prônait Mosco, que je souhaitais fortement pour des raisons de clarté, de cohérence et d'efficacité. Mais ce qui est fait est fait: la Ligne claire a rallié Royal et Montebourg a rejoint Aubry. Avec eux et élargie à d'autres, nous espérions constituer cette union des réformistes. C'est fini. Faut-il que Mosco, malgré tout, reste sur cette ligne idéale et dépose sa propre motion? Non, ce serait
suicidaire (nous allons nous retrouver seuls) et
incohérent (nous avons toujours prôné le rassemblement). Maintenant que faire?
Rejoindre Delanoë? J'ai apprécié, vous le savez, son bouquin, ce camarade est doté d'une vraie personnalité, il pourrait être ce leader dont nous avons besoin. Mais sa démarche est strictement présidentielle. Aller vers lui, ce serait se rallier à un homme, point. C'est le choix fait par plusieurs de nos camarades rocardiens, ce n'est pas notre méthode, rigoureusement collective, sans préalable sur les personnes, mais soucieuse de constituer un projet porté par une majorité. Mosco devant Delanoë, il serait à poil, sans rien à discuter, rien à négocier.
Et puis, nous achoppons avec les delanoïstes sur
trois points majeurs: l'organisation des primaires, la constitution d'un parti de toute la gauche, la rénovation du PS. Bertrand a su impulser une réflexion sur la modernisation de notre ligne économique, en se proclamant non sans provocation "libéral", mais cela ne suffit pas pour que nous le rejoignions.
Rejoindre Royal? Elle aussi a contribué à réfléchir sur nous-mêmes, en remettant salutairement en question nos fonctionnements. Sa ligne politique n'est certes pas toujours très discernable, mais elle a eu le grand mérite de ne pas s'accrocher à sa candidature, de s'ouvrir à d'autres sensibilités. Ce n'est pas rien, mais ce n'est pas suffisant (Collomb comme premier signataire de sa motion, est-ce vraiment un signe fort de rénovation?) et surtout, hélas, c'est
un peu tard.
Ségolène ne serait pas entrée la première dans la course des présidentiables pour la direction du Parti, elle y aurait renoncé beaucoup plus tôt, la discussion aurait pu s'engager plus sereinement, plus durablement, plus sérieusement, des perspectives communes auraient sans doute pu s'ouvrir. Mais là encore, ce qui est fait est fait. En politique, à la différence des westerns, celui qui dégaine le premier peut être tué, et les positions de dernière minute sont rarement les bonnes.
Rejoindre Aubry? C'est la dernière solution, elle n'est pas idéale, elle comporte plusieurs inconvénients, mais c'est
la plus réaliste. Je passe en revue ses points forts:
1- Depuis plusieurs mois, dans le mouvement qu'on appelle "reconstructeur", et cet été à travers la signature d'un texte commun, les amis de DSK, Montebourg et Aubry se sont retrouvés sur des orientations similaires. Il est logique de poursuivre dans cette voie.
2- Les fabiusiens ne doivent pas constituer un obstacle. Je l'ai écrit, ils ont changé, ne sont plus vraiment sur leurs positions "gauchisantes" de 2005-2006. Et puis, le coeur de notre motion, ce sera bien Aubry-Mosco-Montebourg, c'est-à-dire
une orientation clairement réformiste. Enfin, ma véritable inquiétude, que je vous avais confiée cet été, était de voir s'inviter dans cette alliance Hamon et Lienemann, dont les convictions, au demeurant fort respectables, ne sont pas social-démocrates. Le périmètre de cohérence est donc préservé. Je remarque d'ailleurs que Mélenchon souhaite rejoindre Hamon. Très bien, chacun chez soi et les vaches (les éléphants?) seront bien gardées.
3- On ne peut pas, comme c'est mon cas, critiquer le système délétère des courants et s'en servir pour rejeter les fabiusiens. Il faut accepter les conséquences du dynamitage des courants et admettre se retrouver avec des camarades dont nous étions très éloignés, notamment sur l'Europe. Huchon, pourtant rocardien, explique très bien ça.
4- Notre famille de pensée strauss-kahnienne doit se reconstituer, sinon c'est la mort, déchirée entre Delanoë, Royal et Aubry.
Mosco l'idéaliste et Camba le réaliste doivent se réconcilier. Cela ne peut se faire qu'autour de Martine Aubry, d'autant que celle-ci, hier, a proposé à Pierre une "place centrale". Il doit l'occuper, au nom de tous les strauss-kahniens rassemblés. Il n'aura pas mieux auprès de Royal ou Delanoë! Mosco n'en a -t-il pas conscience, lorsqu'il écrit sur son blog, avant-hier: "
La portée n'est pas fermée, mais elle est étroite".
Demain soir, je me rendrai à Paris, pour la réunion de notre contribution "Besoin de gauche", autour de Moscovici. Je redirai mon analyse de ce matin, et nous verrons bien, mais comme toujours en politique, il faudra choisir, et la délibération sera collective.
Bon après-midi.