L'Aisne avec DSK

28 février 2011

Les socialistes aux champs.




De la démission en politique.

Bonjour à toutes et à tous,


Le remaniement gouvernemental annoncé hier soir n'appelle pas de commentaires particuliers, tant c'est la continuité qui l'emporte. En revanche, la démission du ministre des Affaires Etrangères m'inspire quelques remarques générales sur la pratique de la démission en politique, qui ne s'adressent pas spécifiquement au présent cas :

1- Démissionner n'est pas en soi un acte glorieux. C'est le signe d'un échec, la preuve d'une faute. "L'esprit de démission" est une attitude critiquée : le renoncement à sa mission, dé-missionner. C'est pourquoi il est regrettable, déplorable d'en arriver là. Dans l'idéal, un responsable politique qui fait ce qu'il doit n'a pas à démissionner : il assume. Démissionner, c'est fuir, abandonner. Surtout, devant les difficultés, il convient d'accomplir jusqu'au bout sa tâche, d'autant lorsqu'il s'agit d'un mandat confié par le peuple.

2- Il y a ceux qui démissionnent et ceux qui appellent à la démission. Je ne me reconnais pas plus dans les uns que dans les autres. Souhaiter la démission de quelqu'un, c'est réduire la politique à une affaire personnelle, ce que je ne fais jamais : car les hommes s'en vont mais la ligne peut fort bien demeurer, ce qui ne change rien du tout au problème. Dans la demande de démission, il y a une logique du bouc émissaire, du sacrifice, de l'exorcisme qui ne me plaît pas. Comme si un départ suffisait ...

3- Pourtant, la démission n'est pas sans valeur, elle est même au contraire vertueuse quand elle traduit une prise de conscience personnelle, le sentiment d'une faute, la conséquence d'une responsabilité. "Prendre sur soi" comme on dit, et en tirer les conclusions. Cette attitude n'existe que dans quelques rares situations particulièrement graves. On ne va tout de même pas se sentir coupable et s'en aller à la moindre faute, la vie consistant à se tromper, sauf chez ceux qui ne font strictement rien !

4- Dans la vie politique française, il y a une inexactitude et une hypocrisie à parler de démission lorsqu'il s'agit en réalité d'un limogeage. Michèle Alliot-Marie n'a pas démissionné, c'est Nicolas Sarkozy qui l'a démissionnée, et ça change tout. La ministre explique même qu'elle n'a rien à se reprocher, et c'est là en vérité le plus choquant : elle ne comprend pas ce que le président a hier expliqué, l'image politique déplorable donnée ces derniers temps, même si moralement ou psychologiquement Alliot-Marie n'a sûrement pas le sentiment d'avoir mal agi. C'est ce que je rétorque régulièrement aux commentaires de ce blog : en politique il faut faire de la politique, pas de la morale ou de la psychologie.


Bonne journée politique.

27 février 2011

Sarkozy rencontre l'Histoire.

Bonsoir à toutes et à tous,


Je vous livre mes impressions et mes réflexions, juste après l'intervention du président de la République, il y a deux minutes à peine. Sur le fond, il n'y a guère à redire : ce genre d'exercice est millimétré, chaque mot a été soupesé, le texte lu ne laisse place à aucune surprise. C'est un discours présidentiel dans lequel, par définition, tout le monde peut se reconnaître. Sur la forme, je retiendrais cette leçon, à l'adresse de ceux, nombreux, qui croient que faire long c'est faire bien : en six minutes seulement, on peut exprimer beaucoup d'idées fondamentales.

Ce qui retient mon attention, c'est plutôt le moment de cette intervention, au beau milieu d'événements qui secouent des pays méditerranéens et que Nicolas Sarkozy a qualifié d' "historiques". Un président qui rencontre l'Histoire, ça n'arrive pas tous les jours. Aussi éminente soit-elle, la magistrature suprême est faite essentiellement de décisions techniques, de suivi politique, de gestion ordinaire, d'arbitrages ponctuels qui ne relèvent pas de l'Histoire, que la mémoire collective aura vite oubliés. Ce n'est que par hyperbole qu'on qualifie souvent d' "historiques" des choix ou des déclarations qui ne le sont pas en réalité. Là, en revanche, on sent bien qu'un souffle anime des peuples, que des régimes s'effondrent, que quelque chose de nouveau se prépare : c'est cela qu'on appelle l'Histoire, et ce n'est pas si fréquent.

Mais l'Histoire est un fleuve indocile, imprévisible, qui peut porter comme il peut noyer, dont on ne sait pas très bien où il nous conduit. L'homme d'Etat a du mal à y maintenir sa barque, à lui donner une direction. Louis XVI n'avait pas compris que le 14 juillet 1789 était une révolution, De Gaulle avait conscience que son appel du 18 juin 1940, bien que marginal, avait une dimension historique. Quoi qu'il en soit, il est difficile de saisir l'événement à l'instant même où il se passe, quand le sens nous en échappe largement, comme lorsque nous sommes ballottés au milieu du gué. Et pourtant, l'homme d'Etat doit parler, se décider, donner du sens à ce qui est encore un chaos.

On se souvient des reproches qu'on avait faits à François Mitterrand en 1989, devant la chute du mur de Berlin, dont l'attitude avait été prudente, avisée, pragmatique, diplomatique. Mais l'opinion attendait semble-t-il quelque chose de prophétique. Nicolas Sarkozy a voulu ce soir accompagner, peut-être même devancer l'Histoire, à défaut de la faire, tâche qui paraît désormais dévolue aux peuples plus qu'aux dirigeants. C'est la première fois depuis le début de son mandat qu'il est confronté à de telles circonstances. La crise financière, parce que financière et pas politique, n'était pas vraiment un événement historique. L'Histoire est une affaire d'hommes, pas de flux monétaires ou de cours de la bourse.

Le problème avec l'Histoire, c'est qu'elle décide d'à peu près tout, qu'elle déborde le rôle des Etats. "Puisque ces événements nous échappent, feignons de les organiser", disait Jean Cocteau. C'est ce à quoi l'homme d'Etat est contraint, au risque de se tromper. Car c'est l'Histoire seule, c'est-à-dire l'avenir, qui dira si l'événement est historique ou pas, parfois bien longtemps après qu'il se soit produit. Rencontrer l'Histoire n'est pas de tout repos. Le paradoxe, c'est qu'il faut être à la hauteur d'un événement qui pourtant nous dépasse !


Bonne soirée historique.

François premier ?

Bonjour à toutes et à tous,


On parle beaucoup de François Hollande ces temps-ci. Les sondages sont flatteurs pour lui, l'Elysée en a fait son candidat préféré et redouté. Cette vogue est tout à fait inattendue : François n'a jamais été ministre, jamais chef de courant, jamais présidentiable. De plus, sa caricature ne le prédisposait pas à un tel possible destin. Aujourd'hui, nous découvrons ce que tout socialiste sait depuis longtemps, après avoir approché l'homme : Hollande est plus complexe, plus intelligent, plus ambitieux que son image.

Surtout, c'est un type sympa qui est resté très populaire auprès de la base militante. Comme secrétaire de section, je l'ai accueilli une fois à Saint-Quentin, nous avons visité le bout du quartier Europe autour du laboratoire Pokorny, à l'époque où il y avait encore un bureau de poste. J'ai été épaté par son contact facile, très à l'aise, aussi bien à l'égard des militants que des passants anonymes. Dans les réunions politiques, François Hollande est un orateur excellent, bien meilleur que Martine Aubry.

Autre atout : il maîtrise parfaitement la culture d'appareil, fait preuve d'une grande habileté, ce qui est tout de même utile quand on recherche le soutien de cet appareil. Les élus et les notables du Parti se reconnaissent facilement en lui, il les rassure parce qu'il parle leur langage, adopte leurs comportements et prend en compte leurs intérêts. A côté, DSK est un aventurier incertain, un socialiste atypique, une personnalité ingérable (c'est-à-dire libre), bref tout ce que déteste l'appareil.

Dans les années 80, François Hollande a initié une expérience originale, celle des "transcourants", pas banale en ce temps-là. Il a été l'un des premiers à critiquer le système des courants au sein du PS, ce qui n'est pas rien. A la suite, il a esquissé un projet politique pas très éloigné de la social-démocratie, tout en se distinguant de la "deuxième gauche" de Michel Rocard. Ces derniers mois, je trouve que François a renoué avec cette période, en menant tout un travail intellectuel qui le conduit aujourd'hui à faire des propositions très pertinentes, dans la mouvance du "socialisme moderne" de Bertrand Delanoë.

Alors, pourquoi pas lui candidat du Parti ? Pourquoi pas, en effet. Mais je reste fidèle à DSK, par cohérence, par esprit de continuité et selon un principe chez moi intangible : en politique, quand il y a un choix à faire, il faut prendre le meilleur, quoi qu'il en coûte, rien n'étant plus chère à payer que la défaite. Hollande est très bon mais Strauss est meilleur. Et puis, j'ai quelques reproches à lui faire : dix ans à la tête du Parti, c'est l'immobilisme qui l'a emporté, en vertu de cette culture d'appareil qui pousse à ne rien faire, laisser venir les événements, surfer sur la vague, s'inscrire dans une logique de conservation et non de transformation du Parti. Celle-ci avait été lancée par Michel Rocard dans les années 90, François Hollande l'a stoppé net dans les années 2 000. Je me souviens des réunions de la majorité à Paris : il n'avait pas son pareil pour contrer les minoritaires, NPS et Nouveau Monde. Mais l'habileté ne fait pas la grandeur : tenir les rênes est une chose, aller au galop en est une autre.

Le pire aura été son comportement en 2 005 : avoir laissé Mélenchon et l'aile gauche bafouer le vote des militants sur le Traité constitutionnel européen, s'organiser en faction et militer contre les décisions de leur Parti, contribuer à sa défaite lors du référendum, non c'était une grave erreur politique. On a vu la suite : Mélenchon partir avec armes et bagages quelques années plus tard et continuer à l'extérieur la guérilla commencée à l'intérieur. Il n'y a pas pire faute que de ne pas faire respecter la règle majoritaire, qui est celle de notre Parti et de la démocratie. Certes, le temps a passé, mais la mémoire ne passe pas.

Si, pour le malheur de la gauche, DSK ne se présentait pas, il faudrait pourtant penser à lui, à François Hollande. En tout cas, la question se poserait sérieusement, choisir entre Martine Aubry et lui. Beaucoup de mes camarades strauss-kahniens ont une prédilection pour Martine et des réticences à l'égard de François, pour les raisons que je viens d'évoquer et que je partage. Martine est un excellent leader du Parti, mais je ne la vois pas battre Sarkozy et devenir présidente de la République. Surtout, il y a cette ambiguïté qu'elle entretient avec l'aile gauche, qui fait que celle-ci aujourd'hui en fait sa candidate, bien qu'Aubry soit parfaitement social-démocrate. Pour moi, il n'y a rien de pire en politique que l'ambiguïté, mais d'autres pensent au contraire qu'il n'y a rien de meilleur ... Question de goût et de mentalité.


Bonne journée.


PS : le titre que j'ai donné à ce billet est d'un humour nullissime, mais c'est dimanche, je suis en vacances et j'ai le droit de me détendre.

26 février 2011

Comment ça va ?

Bonsoir à toutes et à tous,


Alors ces cantonales, comment ça va ? A Saint-Quentin, ça va ça va son petit bonhomme de chemin. Rien de géant pour l'instant, mais la campagne officielle débute le 7 mars. Ah si quand même : nous avons reçu jeudi soir une personnalité nationale, à Lesdins. C'est le must de toute campagne électorale, le temps fort, la grande réunion publique avec une pointure. Généralement, ce sont les grands partis qui s'y collent. Là non, c'est la Gauche Moderne, pas très connue, avec une pointure de petite taille, Jean-Marie Bockel, ancien secrétaire d'Etat, socialiste passé à droite, invité par Antonio Ribeiro, chevènementiste passé à droite et présentement candidat dans le canton nord.

La presse locale ironise doucement sur le nombre de participants, une quinzaine. Moi je trouve que c'est pas si mal pour un tout petit parti, Bockel et Ribeiro n'étant pas des vedettes. Saviez-vous que la Gauche Moderne n'aura que 12 candidats titulaires dans toute la France et un seul dans l'Aisne ? Bin voilà, c'est fait, vous savez.

Le Parti radical de gauche, c'est tout de même autre chose. Jean-Michel Roustand lui consacre un bel article dans L'Union. Nos amis et partenaires radicaux présenteront trois candidats titulaires dans l'Aisne, estampillés "majorité départementale", et deux suppléants. Jacques Krabal est le plus connu, maire de Château-Thierry, socialiste il n'y a pas si longtemps (mais y a-t-il une différence politique fondamentale entre un radical de gauche et un socialiste ?). Ce parti a des élus dans toutes les grandes villes de l'Aisne, sauf Laon et Saint-Quentin.

Et le canton centre dans tout ça ? Ça va ça aussi, doucement. Dans le Courrier Picard d'hier, Cyril Raineau voyait la sortante Colette Blériot "sur un siège éjectable", se sentant "menacée". Ce matin, à l'inauguration de la Fête du Timbre dans le Palais de Fervaques, elle semblait plutôt confiante. Mais n'y a-t-il pas des apparences qui cachent des peurs ? Raineau souligne parmi les adversaires de la candidate UMP la présence d'Olivier Tournay, du PCF, "de plus en plus incisif en tant que conseiller municipal d'opposition". C'est vrai, mais est-ce que ça suffira pour améliorer nettement le score de 7,09 % de 2 004 ? Pas évident.

Ça va ça va, oui mais pas tant que ça : j'ai deux inquiétudes, et je ne suis pas le seul. D'abord le nombre d'abstentionnistes, qui s'annonce important, puis le vote d'extrême droite, qui pourrait bien être effrayant. Il nous reste trois semaines pour changer tout ça.


Bonne soirée.

Un parfait strauss-kahnien.



Bonjour à toutes et à tous,


Aujourd'hui, troisième et dernière leçon qui vous permettra de devenir un parfait strauss-kahnien. Nous entrons dans le disque dur de sa pensée, nous abordons l'ouvrage à emporter sur l'île déserte ou plus simplement à déposer sur votre table de chevet : "Pour l'égalité réelle, éléments pour un réformisme radical" (vignette 1 : couverture, et vignette 2 : sommaire).

Ce texte démontre que le strauss-kahnisme n'est pas un robinet d'eau tiède mais une pensée à sa façon "radicale". D'autre part, que cette pensée est foncièrement de gauche, et pas libérale comme on l'entend parfois : son concept-clé est celui d'égalité. Enfin, vous y découvrirez le secret du strauss-kahnisme : la question sociale ne s'oppose pas à la question économique puisque la réponse à la première est dans la seconde.

Après cette lecture (127 pages qu'on ne trouve pas facilement puisqu'elles ont été éditées par la Fondation Jean-Jaurès), vous serez incollables sur DSK et sa ligne politique, prêts à balayer tous les préjugés, peut-être même surpris par ce que vous apprendrez, à quoi vous ne vous attendiez sûrement pas.


Bonne journée,
bonne lecture.

25 février 2011

La Bible strauss-kahnienne.




Aujourd'hui, deuxième leçon de strauss-kahnisation accélérée. D'abord une petite révision des cinq premiers fondamentaux d'hier : parler de "Strauss", être rationnel, faire montre de décontraction, se passionner pour la communication, manipuler sans modération les nouvelles technologies. Si vous avez assimilé intellectuellement tout ça (la pratique viendra avec le temps), vous êtes prêts pour accéder au niveau supérieur, un peu plus substantiel : la lecture de la Bible strauss-kahnienne, parue en 2 002, "La flamme et la cendre", tirée d'une formule de Jaurès (vignette 1, la couverture).

Le propos est au dos (vignette 2) et la table des matières vous donne un avant-goût de la pensée exposée (vignette 3). Ces 393 pages sont d'un accès relativement facile et présentent surtout le strauss-kahnisme dans toute sa largeur, sous ses principaux aspects. Ce qui est instructif, c'est que cet ouvrage a été rédigé il y a presque dix ans et qu'il est encore d'actualité, preuve d'une pérennité de la pensée strauss-kahnienne.

A l'époque, DSK ne songeait nullement à se présenter à la présidentielle, il n'était même plus au gouvernement. Ce n'est donc pas un livre de circonstances, comme il en existe beaucoup : c'est une vraie réflexion politique, économique et social. Ces idées, ce sont les pré-requis indispensables à tout socialiste en voie de strauss-kahnisation. Je vous invite donc à lire ou relire "La flamme et la cendre", à l'annoter, à le méditer, à en retenir les principaux enseignements, à l'issue de quoi vous aurez fait un pas considérable dans l'apprentissage de la DSK attitude.


Bon courage,
et à plus tard
pour la leçon n°3

Fortiche.

Bonjour à toutes et à tous,


Quand je ne vais pas au lycée, j'écoute le matin sur RTL l'interview de Jean-Michel Apathie. C'est bref, vif et incisif, une épreuve redoutable pour les hommes politiques : Apathie est mordant et pugnace. Beaucoup n'en ressortent pas indemnes. Ce matin, c'était Xavier Bertrand. Il a été tout simplement excellent.

Pourtant, ce n'est pas toujours le cas : on se souvient de la bourde sur Public Sénat avec Nicolas Totet, où le ministre avait surjoué l'indignation pour protéger Pierre André, ce qui s'était finalement retourné contre lui en créant une polémique nationale. En général, Bertrand a du mal à refouler la pointe d'irritation que suscite chez lui la présence de l'adversaire ou du simple contradicteur.

Ce matin, sa com' a été nickel. Tout y était : le ton posé, juste ce qu'il fallait d'une émotion qui semblait non feinte, des arguments s'imposant comme des constats, une impression de bonne volonté, d'optimisme et d'énergie. C'est sans doute le plus difficile dans le métier politique : comment donner le sentiment de ne pas jouer un rôle, de ne pas endosser un personnage ? Xavier Bertrand a atteint ce matin une sorte de perfection. Généralement, les hommes politiques ont bien du mal à cacher qu'ils sont en représentation, qu'ils adoptent des postures, qu'ils tiennent un discours qui n'est qu'un discours. Pour effacer tout ça, pour le faire oublier, il faut être très fort. Bertrand est très fort.

Sa tâche n'était pas facile, et Apathie n'avait rien perdu de sa verve pour tenter de faire trébucher le ministre, mais en vain : le chômage, MAM ou la forte rémunération du patron qui va partir en retraite, autant de dossiers qui pouvaient carboniser Xavier Bertrand, le pousser à la faute ou au lapsus. Mais ce diable d'homme s'en est à chaque fois habilement sorti. Non pas qu'il ait fait des annonces spectaculaires ou des analyses géniales : mais le simple bon sens qu'il professe emporte fortement la conviction.

Peu importe que le bassin d'emploi le plus touché en France par le chômage soit le Saint-Quentinois (15%, Apathie n'en a d'ailleurs rien dit) : Bertrand rappelle qu'il y a un écart entre l'offre et la demande d'emplois, que les restaurateurs cherchent des employés qu'ils ne trouvent pas alors même que beaucoup de jeunes sont en quête d'un travail. Qu'est-ce que vous voulez répondre à ça ? Que les rémunérations et les conditions de travail dans ce secteur (je connais un peu, un de mes frères est là-dedans) ne sont pas ce qu'il faudrait pour être attractives ? Sûrement, mais Apathie ne le dit pas et l'auditeur en reste aux évidences de Xavier Bertrand.

La force communicante du maire de Saint-Quentin, c'est de contourner une difficulté (la situation tout de même déplorable de l'emploi en France) en admettant sa réalité tout en se projetant vers l'avenir : "J'ai une obligation de résultats", a-t-il répété plusieurs fois, vous me jugerez sur pièce, pour ainsi dire. La réplique désarme toute critique. Et si c'est raté, "Bertrand dehors !" comme il l'a lui-même déclaré à un internaute saint quentinois lors de son tchat du 18 février. Fortiche. On pense bien sûr au "dégage" que lancent en ce moment les peuples du Maghreb et que Bertrand reprend à son compte mais à son endroit, se condamnant ainsi à ne pas échouer, nous condamnant ainsi à lui faire confiance.

Je ne peux pas non plus résister à la définition qu'il a donnée, par la même occasion, de la politique : "La politique, c'est très simple : les Saint-Quentinois ont des problèmes, il faut les résoudre". Un tel homme, on voterait pour lui sans lire son programme, comme on dit d'un excellent chrétien qu'on lui donnerait le Bon Dieu sans confession. N'est-ce pas ce que bon nombre de Saint-Quentinois, jusqu'à la gauche, font ?

Xavier Bertrand ne provoque en moi aucune sorte d'admiration, et je le respecte ni plus ni moins que n'importe quel autre être humain. Mais je suis bluffé, estomaqué par sa maîtrise de la communication, son habileté politique, sa performance médiatique. Dans sa ville, il ne se contente plus des visites de quartier mais s'installe sur la toile une fois par mois, le tchat que je viens d'évoquer, touchant 200 internautes, dont pas mal de jeunes.

Devant un tel adversaire, on a envie de se faire tout petit, de rendre les armes, de se replier dans une sage indifférence. L'habileté appelle la prudence. Je crains que beaucoup de Saint-Quentinois n'aient basculé depuis longtemps de ce côté-là, l'avenir ne semblant sourire qu'à la droite locale. Mais que faites-vous alors du courage, et surtout de la démocratie ? Il faut à ce système républicain qui nous rassemble tous une gauche et une droite, une majorité et une opposition.

C'est quoi une bonne opposition ? Celle qui ne se destine pas à rester ad aeternam une opposition mais qui se voit, se pense déjà, agit dès maintenant en majoritaire. Quand la mentalité minoritaire a gagné les têtes, c'est fichu. Il faut être des gagnants avant d'avoir gagné. Pour que la gauche saint-quentinoise, à son tour, elle aussi, devienne fortiche.


Bonne journée.

24 février 2011

DSK et les 35 heures.


Bonsoir à toutes et à tous,


Il fallait s'y attendre : après le passage de DSK à Paris ce week-end, certains magazines lui consacre leur une, dont Paris-Match (que je n'ai pas lu) et L'Express. La couverture ne doute pas de son ambition présidentielle : elle nous montre un Strauss bras croisés, à la fois calme et déterminé (voir vignette). A l'intérieur en revanche, le dossier n'est pas très folichon : rien qu'on ne connaisse déjà quand on suit à peu près l'actualité politique. J'ai tout de même noté deux informations intéressantes :

1- Un encadré qui précise que la démission d'un directeur général du FMI pour raisons politiques n'est pas une nouveauté. Il y a eu un précédent avec l'Allemand Horst Köhler en 2 004, en poste depuis 2 000 mais obligé d'en partir après avoir été désigné candidat à la présidence de la République fédérale d'Allemagne par le parti chrétien-démocrate et les libéraux.

2- Un papier sur DSK et les 35 heures, dont on sait qu'elles suscitent encore la polémique. Leur paternité est souvent attribuée, à tort, à Martine Aubry, qui n'a fait qu'appliquer, en tant que ministre du Travail, une mesure qui avait été proposée à Jospin par DSK pour son programme législatif de 1997 (comme l'ont été aussi, par le même DSK, les emplois-jeunes). Sauf que Strauss ne concevait pas du tout les 35 heures comme elles ont été finalement mises en oeuvre : loin de vouloir une réforme centralisée et contraignante, il préconisait une adaptation par emplois, secteurs et entreprises, sans exclure le recours aux heures supplémentaires, en encourageant un rapprochement progressif entre durée effective et durée légale du temps de travail.

Je ne vais pas faire de l'histoire rétroactive, mais il est évident qu'il aurait été sage de suivre l'avis pragmatique de DSK (le pragmatisme est une caractéristique de sa pensée, comme de toute grande pensée politique). Nous avons perdu en 2 002, honteusement battus par l'extrême droite, en partie à cause des 35 heures, qui provoquaient un mécontentement généralisé alors que cette réforme était au départ paradoxalement populaire et qu'elle l'est restée encore aujourd'hui (aucun salarié ne souhaite qu'on lui enlève ses RTT !). Nous savons bien que dans certains domaines, l'hôpital par exemple, les 35 heures sont très mal passées.

Voilà, achetez et lisez ce numéro de L'Express si vous voulez, mais ne vous attendez pas à des révélations.


Bonne soirée.

DSK attitude.

Bonjour à toutes et à tous,


En prévision d'une possible et de plus en plus probable candidature de Dominique Strauss-Kahn à l'élection présidentielle, il vous faut adopter la DSK attitude. Je suis le mieux placé, à Saint-Quentin et dans l'Aisne, pour vous briefer. Coach en DSKtitude, c'est moi, et c'est gratuit ! Voilà ma première leçon, les cinq fondamentaux qui vous feront passer pour un vrai strauss-kahnien :

1- Strauss : c'est ainsi que ses partisans l'appellent. DSK, c'est le tout venant. Chtrauss-Kahn, ce sont ses adversaires (comme ils parlaient de Mittrand). A déconseiller formellement : le Dominique, qui fait fayot (ce n'est pas le genre de la maison). C'est le petit détail et la grande différence avec les ségolénistes et certains aubryistes.

2- Rationnel : c'est la marque de fabrique du strauss-kahnien, en tout circonstance demeurer rationnel, réfléchi, objectif. Pas de sentimentalité bêbête, pas d'emportement passionnel. Le strauss-kahnien n'est pas dans le perso ou le psycho ni le moralisme. D'où parfois une certaine distance et froideur qui ne sont qu'apparentes et qui peuvent même passer, chez ceux qui ne partagent pas cet état d'esprit, pour de l'arrogance ou du mépris. Il n'en est évidemment rien. Mais il est vrai que le péché mignon de tout strauss-kahnien bien construit est de se croire le meilleur, du moins en certaines situations. Ce qui est généralement vrai.

3- Décontracté : le strauss-kahnien ne va pas se prendre le chou à bavasser pendant des heures dans des réunions politiques qui sont mortelles et qui ne débouchent sur rien. La culture d'appareil le fait doucement se marrer. Il y a cette phrase du maître qui se passe de tout commentaire : "Tout corps plongé dans un bocal à cornichons devient un cornichon". Il est donc sage de prendre ses distances avec l'appareil, mais sans rompre avec, à la différence de Ségo. Le strauss-kahnien essaie de changer son parti de l'intérieur seulement. Il est sérieux mais ne prend pas trop non plus la politique au sérieux, se méfiant de ses délires et bouffonneries. C'est un militant discipliné mais surtout pas un moine-soldat. Sa décontraction ressemble parfois à du dilettantisme qui fait douter de sa détermination. Ce n'est pas le cas. Et puis, le strauss-kahnien ne demande pas la charité à la politique ; ce n'est pas la seule femme de sa vie, il a bien d'autres centres d'intérêts. Le combat électoral n'a pour lui aucune dimension existentielle, lyrique ou tragique ; ce n'est qu'un exercice démocratique.

4- Communicant : le strauss-kahnien adore les médias de toute sorte, il ne peut pas se passer de communiquer, il sait que la vie politique moderne est à ce prix, qui lui semble très léger et fort agréable, contrairement à la vieille gauche pleine de rancoeur et d'incompréhension envers les journalistes et la presse.

5- Technophile : le strauss-kahnien s'entoure des technologies dernier cri, qu'il manipule fréquemment et avec maestria. Ce blog n'est pas venu il y a cinq ans de moi (je ne savais pas alors ce qu'était un blog !) mais des strauss-kahniens de Paris qui m'ont lancé dans l'aventure. Encore aujourd'hui, ce dernier point avec lequel je termine ma première leçon de strauss-kahnisation accélérée m'est le plus étranger. Nobody is perfect, même un strauss-kahnien !

N'oubliez pas : la meilleure façon d'acquérir la DSK attitude, c'est encore d'observer, d'écouter et d'imiter Strauss, car le premier et le meilleur strauss-kahnien, c'est quand même lui.

A la prochaine fois pour la leçon suivante.


Bonne journée.

23 février 2011

Mais c'est donc ça la politique ?


J'ai vu avant hier "Le Président", documentaire d'Yves Jeuland sur la dernière campagne régionale de Georges Frêche. Paix à son âme, mais c'est édifiant ! On se croirait dans un film de Jean-Pierre Mocky : l'entourage du président de Languedoc-Roussillon est composé de tronches pas possibles, avinés, cheulou, des obligés, des faire-valoir, partisans ou courtisans on ne sait plus très bien, une petite bande aux allures de mafia, des conseillers à l'utilité douteuse et à l'humour gras, mâchant chewing-gums à la façon des ruminants, aux regards parfois de bovidés, tripotant constamment leur téléphone mobile comme pour signifier que tout les emmerde mais qu'ils ont quand même intérêt à être là, papillonnant autour de Frêche. Il en ressort une image peu glorieuse de la politique.

Georges Frêche lui-même apparaît sous un jour pas vraiment sympathique, personnage vulgaire, quelquefois écoeurant dans son comportement, se curant ostensiblement les dents quand ses conseillers tentent ... de le conseiller, avalant goulûment une tranche de jambon, léchant l'oreille de l'un de ses colistiers ou bouffant des post-it (authentique !), passant le plus clair de son temps devant des piles de parapheurs à signer mécaniquement des documents qu'il ne lit même pas !

Et puis il y a le cynisme, les mensonges, la fausse sincérité, la manipulation des hommes, l'égocentrisme, la brutalité, d'autant plus surprenant que Frêche est faible, malade, fortement handicapé, s'aidant d'une canne ou d'une épaule voisine, avec des moments de folie qui lui traversent le visage, une inquiétante immobilité de statue, à l'image de celles qu'il veut à tout prix ériger dans sa ville de Montpellier, Mao et Lénine compris (on a, de peu, échappé à Staline !).

Mais c'est donc ça la politique ? C'est donc ça le socialisme ? Et ces types dont je ne voudrais même pas dans ma cuisine, ce sont des camarades, des socialistes ? J'ai du mal à m'en convaincre, je me fais une autre et une haute idée de la gauche, pas celle que m'inflige douloureusement ce documentaire. Pourtant, je dois nuancer et corriger mon jugement, une fois le choc des images passé : le grand écran inévitablement porte à la caricature, un visage prend alors l'énormité d'une gueule, les tics, les travers sont fortement accentués, sans doute injustement.

Surtout, il y a toute une dimension de la politique que le documentaire n'aborde pas (ce n'était pas le but) : la gestion de la ville et de la région, les réalisations de Georges Frêche. L'action publique, au bout du compte, c'est ça, pas les comportements, le style ou la personnalité des individus au pouvoir. Car on dira tout ce qu'on voudra de lui, on pourra le critiquer comme je le fais, rien n'effacera que Frêche s'est fait élire cinq fois consécutives maire de Montpellier. C'est ce que l'histoire et la population retiendront de lui, parce que c'est la seule chose qui importe en démocratie. Allez voir ce film, si vous n'en ressortez pas dégoûtés, c'est que vous êtes bons pour la politique !



Bon après-midi.

Elle ou lui.

Bonjour à toutes et à tous,


Le moindre toussotement, la plus petite oreille qui bouge au Parti socialiste retiennent évidemment mon attention. Après ce week-end très strauss-kahnien, il fallait être particulièrement vigilant, surtout quand de nombreux camarades sont dans la culture du signe et pas de l'explicite. Benoît Hamon soutient Martine Aubry, c'est à peu près logique venant de l'aile gauche, qui peut difficilement se reconnaître en DSK. Mais à peu près seulement, puisque Aubry est tout autant social-démocrate bon teint que Strauss.

Non, ma surprise (mais qu'est-ce qui peut encore surprendre en politique ?) vient du positionnement d'Harlem Désir et de Pierre Cohen, maire de Toulouse, deux delanoïstes (motion A pour les initiés) qui se rallient à Aubry, alors que je les pensais proches d'Hollande, qui lui-même n'est pas très éloigné de DSK (ils se seraient rencontrés dimanche soir, Hollande n'aurait pas renoncé à se présenter aux primaires). Hollande, Delanoë, DSK, il faut que ces trois-là s'entendent puisque c'est la même ligne politique, celle du réformisme, sans complaisance envers l'aile gauche.

Aubry, c'est un peu différent : conformément à la tradition socialiste, elle pense en réformiste et elle parle très à gauche, ce qui lui permet de rassembler une majorité au sein du Parti, et c'est très bien ainsi. Mais rassembler les Français dans une élection présidentielle, c'est autre chose : le siège de Solférino n'est pas la conquête de l'Elysée. Ceci dit, c'est elle ou Strauss, Laurent Fabius en figure de "sage actif" l'a bien compris, comme il a compris qu'il fallait que les deux s'entendent, à tous les sens du terme. Voilà le fameux "pacte", ni plus ni moins. Ils ne doivent pas se présenter l'un contre l'autre, dans un affrontement qui serait dévastateur et politiquement illisible. C'est pourquoi ils ne doivent pas céder aux pressions de ceux qui les poussent au duel, donc à la faute.

De là à demander l'annulation des primaires, à la façon de Michel Vauzelle, non sûrement pas ! Bien sûr les risques de division sont réels, mais on ne ferait rien, surtout en politique, sans risque. Bien sûr les primaires collent mal à la culture d'appareil qui imprègne encore le PS et qui ne s'accommode pas d'ouvrir aussi large les portes et les fenêtres. Mais il faut le faire, parce que les adhérents l'ont décidé, parce que notre rénovation est à ce prix. A condition d'avoir conscience qu'une procédure, quelle qu'elle soit, ne remplacera jamais la réflexion et la maturité politiques : chacun restera libre de se présenter mais il serait irresponsable d'avoir pléthore de candidats. Pour moi, ce sera elle ou lui, Aubry ou Strauss, et Hamon pour représenter l'aile gauche. Et ça suffit. Car après, les candidatures ne veulent plus trop dire grand-chose, à part des ambitions personnelles.


Bonne matinée.

22 février 2011

Une seule solution ...

J'ai connu une époque où l'on scandait dans les manifestations "Une seule solution, la révolution !" Je l'entends parfois encore, mais beaucoup moins. Il viendra un jour où l'on ne l'entendra plus du tout. Il y aura encore et toujours des révolutionnaires, comme il y a encore et toujours des monarchistes dans notre pays. Mais des révolutionnaires sans révolution, parce que l'idée aura complètement disparu. A juste titre : la révolution a été historiquement un échec, passée et réussie celle de 1789. Toutes les autres, sans exception, ont fini dans la tragédie ou la déception. Je ne m'en réjouis pas, la révolution moi-aussi me fait rêver quand je me laisse aller ; mais elle ne me dispense pas de réfléchir. Et je constate sa défaite.

Qu'est-ce qui me fait dire ça ? Ce qui se passe en ce moment en Tunisie et en Egypte, qui gagne la Libye, le Maroc et quelques autres pays de la région. Besancenot s'est rendu là-bas, mais a-t-il compris que c'était pour faire son deuil de la révolution, pas lui rendre hommage ? Car le soulèvement populaire dans ces pays n'est pas un nouvel épisode de la lutte des classes, il n'est mené par aucune avant-garde prolétarienne, il n'a pas pour fer de lance un quelconque parti révolutionnaire, il ne s'inspire nullement du communisme. On l'appelle "révolution" par abus de langage, par goût contemporain de l'hyperbole, comme la publicité de Citroën pour son AX.

Que veulent les peuples arabes en révolte ? La démocratie, simplement cette bonne vieille démocratie, parlementaire et bourgeoise, qu'ils traduisent par ce mot d'ordre à l'attention de leurs sinistres et sanglants dictateurs : dégage ! Rien d'autre que ça, comme en Mai 1968 en France, lorsque les étudiants s'écriaient "Dix ans ça suffit !" Les droits de l'homme oui, mais pas l'émancipation de l'humanité. La démocratie est ainsi : elle n'accepte pas qu'on garde trop longtemps le pouvoir, elle se dit que d'autres feraient aussi bien et peut-être mieux. Bref, la démocratie, c'est l'alternance. Là où elle n'existe pas, ce n'est pas la démocratie.

Depuis deux siècles, ce n'est pas la révolution qui avance (au contraire, elle régresse) mais la démocratie. Celle-ci ne se fait plus tellement remarquer chez nous parce que nous y sommes habitués, comme le poisson rouge ne prête plus attention à l'eau de son bocal. Mais quelle affaire, quelle histoire que la démocratie ! Imaginez un peu ce qui a été pendant longtemps l'inimaginable : un régime politique qui limite et sépare les pouvoirs, en faisant élire ses dirigeants par le peuple ! C'est l'unique utopie des temps modernes qui ait réussi et soit bénéfique. La révolution a tout raté et tout ensanglanté. Une seule solution, la révolution ? Non, la démocratie !

La démocratie, c'est un courant qui s'impose par vagues successives depuis le XVIIIème siècle, qui a fait tomber les monarchies absolues, qui a gagné dans les années 1970 l'Europe et l'Amérique du Sud, puis les pays de l'Est dans les années 1980, aujourd'hui les pays arabes, demain l'Asie et l'Extrême Orient, à coup sûr. La montée de la démocratie, ce petit régime athénien de l'Antiquité qui n'osait pas encore émanciper ses esclaves, submerge le monde entier, est devenue une évidence et un espoir. Marx est mort mais Montesquieu, Rousseau et Tocqueville vivent encore.


Bonne soirée.

Des candidats et des mystères.

Bonsoir à toutes et à tous,


Nous savons depuis hier soir quels sont les candidats aux élections cantonales, sans grosse surprise mais avec quelques petits mystères. A Saint-Quentin, Josette Janssen n'en sera pas. Et il se dit en ville que la concierge de l'Elysée aurait sa carte à l'UMP. Mystère. Le canton nord est celui de l'Aisne qui a attiré le plus de postulants, autant qu'en 2 004 (sept, alors que la moyenne départementale est de quatre). Serait-ce le pressentiment d'une possible victoire ? Au centre, ils ne sont que six, un de moins que la dernière fois.

Canton nord, deux candidats se réclament de la droite (1 UMP et 1 FN) et cinq de la gauche. Mais la "Gauche Moderne" est-elle encore de gauche ? Les individus peut-être, mais l'engagement est au côté de l'UMP. Notons qu'il n'y aura qu'un candidat d'extrême gauche (celui du POI) contre deux auparavant (LO en plus). Anne Zanditenas n'a donc pas choisi de profiter de sa nouvelle notoriété de conseillère municipale. Quant aux Verts, ils ont préféré mettre en avant un non élu en reléguant leur conseillère municipale Nora Ahmed-Ali au rang de suppléante. Mystère de la tactique politique sûrement.

Canton centre, on retrouve la même difficulté à cataloguer certains candidats : pour qui roule Daniel Wargnier, de Génération Ecologie ? Est-il de gauche, de droite, d'ailleurs ou de nulle part ? Mystère, on ne le saura qu'au deuxième tour, quand il donnera ses consignes de vote. Stéphane Monnoyer, lui, est le candidat du MoDem, c'est-à-dire, normalement, anti-Sarkozy. Mais allez savoir comment il se comportera ? Mystère à nouveau. Paul Gironde, bayrouiste et membre de la majorité municipale, fera-t-il voter socialiste ? On l'imagine mal ... Le MRC n'aura plus cette fois de candidat, peut-être parce que le précédent s'appelait Freddy Grzeziczak ? Et plus personne d'extrême gauche cette fois (ils étaient deux auparavant).

Notons que le PCF se présente non plus sous l'étiquette gremetzienne "Colère et Espoir" mais "Front de Gauche", du nom d'une stratégie que la section communiste de Saint-Quentin ne cesse pourtant de condamner. Mystère de la tactique politique là aussi.

A toutes et à tous, belle et bonne campagne, que le meilleur gagne et que la gauche l'emporte !


Bonne soirée.

L'esquisse d'une politique.


Bonjour à toutes et à tous,


L'hypermédiatisation de l'homme ce week-end en ferait presque oublier les idées. Son devoir de réserve n'est pas un voeu de silence. C'est dans "Aujourd'hui en France" que DSK a esquissé hier son projet politique. J'ai retenu sept points :

1- Le FMI n'est pas "libéral". Il vient au secours d'économies mal gérées, au bord de la faillite, qui doivent appliquer des mesures draconiennes pour s'en sortir.

2- Le système bancaire doit être "surveillé". A défaut, on retrouvera des crises financières type 2 008. Les agences de notation ne font pas assez bien leur travail. Les rémunérations et bonus ont repris comme avant la crise. Il faut changer ça.

3- L'euro est nécessaire à la solidarité entre les Etats. Vouloir en sortir est une "vaste supercherie". Pour que l'Europe fonctionne mieux, la solution est politique : que "les Etats renoncent à une partie de leur souveraineté".

4- Les 35 heures : "La baisse du temps de travail est un processus historique qui découle de l'amélioration de la productivité".

5- L'âge de la retraite : "On ne pourra pas tenir avec de moins en moins de gens qui travaillent pour payer les retraites de plus en plus de personnes". Mais "la finalité d'un système de retraite, c'est qu'il soit juste à l'égard de ceux qui ont travaillé plus ou moins longtemps, dans des conditions plus ou moins difficiles et juste vis-à-vis des actifs. Le problème, c'est de le faire de façon équitable".

6- La suppression de l'ISF : "Plus on diversifie les sources de prélèvements directs, plus on a de chances d'être juste. Il faut des impôts sur le revenu, sur la consommation et le patrimoine (...) Les impôts sur le patrimoine existent dans beaucoup de pays (...) ils sont beaucoup plus lourds que chez nous".
7- Les services publics : "Je ne vois aucune raison qui mènerait à penser que, dans un univers mondialisé, il faudrait automatiquement moins de services publics".

Ce n'est pas encore le début d'un programme présidentiel mais c'est tout de même l'esquisse d'un projet. Les idées sont en tout cas sur la table, livrées au débat.


Bonne journée.

21 février 2011

Logement et sécurité.




DSK par ci, DSK par là, oui c'est très bien, mais n'oublions pas que pendant ce temps-là le Parti socialiste continue à élaborer son projet : aujourd'hui, logement et sécurité. Un candidat d'un côté, des propositions de l'autre, c'est ce qu'il faut, c'est ainsi qu'on gagne.

Sept sur sept.

Bonjour à toutes et à tous,


Le passage de DSK hier soir sur France 2 a manifestement secoué le cocotier. Pour un homme dont on reproche le silence, il y a beaucoup de paroles ! J'en ai sélectionné sept, qui sont sans doute de peu de poids à côté des sept millions de Français qui ont suivi l'émission :

Jean-François Copé, patron de l'UMP : il reproche à DSK d'être "hautain", "très arrogant" et "assez prétentieux". Marrant, ça me fait penser aux piqûres de fourmis dans certains commentaires sur ce blog. Quand on fait de la psychologie, c'est qu'on n'a plus rien politiquement à dire. Copé dénonce un "plan médiatique absolument grotesque". Ceux de Sarkozy ne le sont pas ?

Catherine Vautrin, vice-présidente UMP de l'Assemblée Nationale : "Le quotidien de DSK n'est pas celui des gens qui souffrent, ni celui des Français". Qu'on me dise quel homme politique partage le quotidien des Français et souffre avec eux ? Assez de démagogie ! Christian Jacob a déjà fait le coup de DSK = pas Français, arrêtons là.

Christine Lagarde, ministre de l'économie et des finances : "Quand on accepte de faire un job, il faut le faire jusqu'au bout". Au moins la remarque est-elle distinguée. Mais fausse : des gens qui quittent leur boulot pour faire autre chose et mieux, on en trouve tous les jours. Pourquoi pas DSK ? Et puis, l'embêtant serait de ne pas avoir de successeur à la tête du FMI. Je suis certain que le problème ne se posera pas !

Jean-Pierre Raffarin, ancien Premier ministre : DSK n'est "pas le candidat le plus dangereux". Celle-là, il faut oser la faire ! Si Raffarin dit vrai, que la droite se taise sur DSK. Mais j'ai l'impression qu'elle ne peut pas s'empêcher de le critiquer. Donc ...

Marine Le Pen, leader d'extrême droite : DSK est un "candidat mondialiste" en faveur d'une "politique ultra-libérale". Dans sa lancée, elle aurait pu dire aussi qu'il était "fasciste". Mais la fille Le Pen tient sans doute à se garder le qualificatif.

Jean-Luc Mélenchon, populiste de gauche : "Je m'en fous", sa réaction est expéditive pour un homme aussi prolixe. Il pointe quand même "l'arrogance bureaucratique" et le "cirque médiatique". Il faut dire qu'en matière de clown, Mélenchon se pose là !

Benoît Hamon, dans Le Monde de cet après-midi : "La meilleure candidate pour représenter le PS est Martine Aubry". Ok man, j'ai compris, pas besoin de me faire un dessin.

Qu'est-ce qu'il peut y avoir comme noix dans un cocotier !


Bonne fin d'après-midi.

20 février 2011

Avez-vous compris ?



Porto blanc et petits gâteaux salés, chez Anna Osman, une personnalité saint-quentinoise bien connue dans le monde de la culture, socialiste assumée et néanmoins amie, mais pas strauss-kahnienne, malgré mes efforts de ce soir pour la convertir, convivialité aidant. Trêve de plaisanterie, DSK, puisque j'étais chez Anna autant pour elle que pour lui, a réussi son coup sur France 2.

Avez-vous compris ? On sent qu'il a envie d'être candidat, à défaut de savoir s'il le sera vraiment, ce que lui aussi ignore sûrement. Mais on y va, c'est certain. Cinq indices ont retenu mon attention, qui ne valent peut-être que pour moi, strauss-kahnien convaincu, comme les croyants appuient leur foi sur les moindres signes :

1- Son insistance à dire que sa préoccupation n'était pas tant, désormais, la crise économique ou la crise financière que la crise sociale.

2- Son inquiétude de voir les classes moyennes françaises atteintes par la désespérance, contrairement à d'autres pays pourtant moins bien lotis.

3- Sa tirade bien sentie sur les hommes politiques qui feraient mieux d'être utiles aux gens au lieu de polémiquer vainement et ne penser qu'à leur réélection.

4- Son regret que Jacques Delors ne soit pas allé en 1995 jusqu'au bout de sa possible et très attendue candidature (ce qui sous-entend que Strauss ne suivra pas ce chemin-là).

5- Sa remarque hyperbolique à propos de son épouse qu'il écoute "toujours" (si c'est exact, il suivra son souhait de ne pas renouveler son mandat au FMI).

Voilà où nous en sommes ce soir : un DSK décontracté, maître de lui, confiant en son avenir, pouvant apporter, je crois, à la France et aux Français ce qui leur manque tant aujourd'hui : l'optimisme raisonnable. Il y a des hommes politiques qui jouent sur les peurs, DSK sur les espoirs.


Bonne nuit strauss-kahnienne.

Dans un mois.



Bonsoir à toutes et à tous,


Dans un mois jour pour jour, ce sera le premier tour des élections cantonales. Déjà ! Et pourtant, elles ne font guère parler d'elles. Nos concitoyens n'ont pas l'air de savoir ou de s'intéresser. A Saint-Quentin, côté campagne, c'est très calme. Un peu plus de militants sur les marchés, un peu plus d'affiches politiques sur les panneaux, mais c'est tout. Médiatiquement, il n'y a que la candidature farce de Madame Janssen qui ait détonné. On prédisait un temps un débat sur la fiscalité locale entre Xavier Bertrand et Yves Daudigny, le ministre du Travail maire de Saint-Quentin et le président du Conseil Général de l'Aisne. Mais rien pour l'instant.

Pourtant, toute élection est importante, et celle-là en particulier, où l'on s'attendrait à un peu plus de vivacité. La "carte scolaire" fait bouger les élus, les syndicats et les parents. Elle pose le problème fondamental de l'avenir de la ruralité. La réforme des collectivités territoriales remet en cause l'existence même de l'assemblée départementale, puisque le conseiller général deviendra conseiller territorial. Voilà qui mériterait débat. Et puis, à un an d'une élection présidentielle où la popularité de Nicolas Sarkozy est en baisse et où un "effet DSK" commence à se faire sentir, un scrutin même local ne devrait pas laisser indifférent. Le Parti socialiste, de son côté, a présenté un solide projet pour cette élection (à consulter sur le site national).

Les élections cantonales sont les plus difficiles et les plus ingrates des élections, et les moins connues : qui sait exactement ce que fait, quels sont les pouvoirs de son conseiller général, quand ce n'est pas parfois son nom même qu'on ignore ? C'est que ce scrutin est de pure proximité, de sortants et de notables, pas vraiment militant ni politique. Une législative peut faire basculer la majorité du pays, une municipale le destin d'une ville. Mais une cantonale ne modifie pas grand-chose. Elle ne sort l'électorat de sa torpeur que si ses candidats sont des personnalités, des figures connues qui peuvent laisser espérer une victoire possible (c'est l'élection où la prime aux sortants est la plus forte).

A Saint-Quentin, nous avons comme atout, à gauche, une occasion historique : le canton nord, délaissé par son titulaire, est prenable. C'est le genre de situation, assez rare, où l'opposition peut l'emporter, même quand la sociologie et l'histoire lui sont défavorables. Une victoire du PS et ce serait un coup de tonnerre dans le ciel de la droite, Xavier Bertrand contesté sur ses terres. Une défaite du PS et ce serait un étage supplémentaire de la maison qui s'effondrerait, la déprime poursuivant ses ravages, la nécessité de tout reconstruire. Le résultat des cantonales, à droite comme à gauche, conditionnera fortement les prochaines élections municipales, dans trois ans seulement. Nous le saurons dans un mois.


Bonne soirée,
et n'oubliez pas DSK
à 20h00 sur France 2.

Y aller ou pas.

Bonjour à toutes et à tous,


Ce week-end, tout le monde ne pense qu'à ça : il y va ou pas ? Va-t-il en parler ou non ? Un journal prédit ce matin que DSK, puisque c'est bien sûr de lui dont il s'agit, annoncera ce soir sur France 2 qu'il n'effectuera pas un second mandat à la direction du FMI, sans pour autant se déclarer candidat à la présidentielle. Nous verrons, mais ce ne serait plus un signe : tout un étendard déployé !

C'est amusant : je faisais hier après-midi une conférence à la bibliothèque de Saint-Quentin sur la puissance magique du langage. DSK ne dit rien ou presque rien et les commentaires s'affolent et débordent ! Au passage, j'ai évoqué le langage réparateur et l'exigence contemporaine d'excuses publiques, illustrés aujourd'hui par celles de notre nouvel ambassadeur en Tunisie, après un mot qui fâche. Words, words, words ! (Shakespeare, Hamlet, II, 2)

Il y a quelque chose de trivial, de vulgaire à vouloir arracher à Strauss des aveux, de l'obscénité dans cette impatience à savoir s'il sera candidat ou pas. C'est un peu comme si on exigeait d'entendre le consentement des époux longtemps avant la cérémonie du mariage. Cette arrogance médiatique est insupportable. "Je sais rien mais je dirai tout" : DSK, c'est l'inverse du film de Pierre Richard en 1973. Il va falloir nous y faire encore quelque temps.

Que croit-on qu'est la décision de se porter candidat à la présidence de la République ? Pour un homme politique, c'est sans doute le choix le plus difficile d'une vie. Pour n'importe qui et n'importe quel scrutin, se présenter est une lourde responsabilité, comme tout acte public. On ne le fait pas pour soi mais pour les autres, et au niveau de DSK pour un pays tout entier. C'est une charge redoutable qui ne se prend pas à la légère.

Dans une élection, petite ou grande, on ne devient pas candidat parce qu'on vous demande de l'être ou parce qu'on ne trouve pas mieux : il n'y a que les mauvais qui réagissent ainsi. L'engagement électoral, plus qu'une délibération politique, est surtout une question de conscience. Laissons DSK à sa liberté et à sa réflexion au lieu de lui réclamer quoi que ce soit.


Bon dimanche.

19 février 2011

Début de partie pour DSK !

Bonjour à toutes et à tous,


Arthur Nouaillat, blogueur saint-quentinois et militant UMP, consacre son billet du 15 février à Dominique Strauss-Kahn ("Fin de partie pour DSK !"), en énumérant une série de critiques que j'aimerais ce matin reprendre les unes après les autres, en leur apportant des réponses argumentées :

1- DSK s'écroule dans les sondages. Non, pas vraiment. Certains sont très flatteurs pour lui, même excellents, d'autres sont plus hésitants. Mais globalement, nul ne peut nier que DSK est porté par une dynamique. Qui ira jusqu'où ? Là je n'en sais rien, et il serait présomptueux d'en conclure quoi que ce soit.

2- L'attente est une mauvaise stratégie, qui va finir par lasser l'opinion. Non, il n'y a ni attente, ni suspense. DSK n'est pas un homme qui se laisse désirer, qui joue au séducteur, mais un responsable d'une institution internationale tenu par des délais et conscient de son devoir. L'impatience de l'opinion, c'est un autre problème, qui prouve seulement que les Français aspirent au changement.

3- L'effet d'éloignement profite aujourd'hui à DSK mais cessera dès son retour. Il est vrai que sa cote de popularité retrouvera un niveau normal au moment de son entrée en campagne, les scores actuels étant exceptionnellement élevés. Ce qui est plutôt étonnant, c'est de constater qu'un homme si loin provoque un tel engouement. Car l'éloignement, en règle générale, suscite plutôt le désintérêt et l'indifférence. Ce qui me fait penser que la popularité de DSK correspond à une vague de fond, pas à un phénomène superficiel.

4- DSK ne rassemble pas toute la gauche. C'est vrai, je l'admets. Mais Mitterrand en 1981 a connu ce cas de figure : Marchais était devenu son pire ennemi, à une époque où le PCF pesait 20%. Ça n'a pas empêché le candidat socialiste de gagner. Les opposants de gauche à DSK, aussi virulents soient-ils, restent très minoritaires. En politique, la dynamique de la victoire balaie tous les états d'âme et les résistances. Les ennemis d'hier deviennent les amis de demain.

5- DSK est éloigné de la France depuis plusieurs années. Oui, mais trois ans seulement, ce qui est bien peu. Et puis, cet éloignement est vertueux : dans une économie mondialisée, la France ne peut traiter ses problèmes que d'un point de vue global, celui que DSK a précisément acquis à la tête du FMI.

6- DSK est un technocrate étranger au peuple. Non, il a longtemps été élu, maire et député, il a été militant et responsable au Parti socialiste, et enseignant de métier, puis ministre. Ce n'est pas le profil d'un technocrate, énarque ou expert. Et même le serait-il que ces titres n'ont rien non plus de déshonorant.

Arthur Nouaillat termine son billet par la seule réflexion à laquelle j'adhère : il souhaite que DSK soit candidat, mais notre unique accord s'arrête là puisqu'il estime juste après que "c'est la personnalité de gauche la plus facile à battre", alors que je pense exactement le contraire !


Bonne journée.

18 février 2011

DSK nous manque.

Bonsoir à toutes et à tous,


DSK est arrivé à Paris pour le G20 et l'on ne parle que de lui, qui pourtant ne dit rien. "La France me manque", a-t-il dit aux lecteurs du Parisien. C'est plutôt DSK qui manque à une partie de la France, à gauche et au-delà, si l'on en croit les spectaculaires sondages. Mais manifestement pas à tous les socialistes, puisque Henri Emmanuelli, pince sans rire, a osé déclarer qu' "il n'était pas le mieux placé". Et d'ajouter que DSK ferait mieux de rester à la tête du FMI (c'est aussi ce qu'a dit aujourd'hui à l'Elysée Nicolas Sarkozy, en présence de l'intéressé), ou à défaut prenne la direction de la BCE, Banque Centrale Européenne. Qu'est-ce qu'on rigole avec Emmanuelli !

Tout ça annonce la position de l'aile gauche du Parti : instrumentaliser dans un premier temps la candidature d'Aubry (ce qui est un non sens puisqu'elle est sur la même ligne politique que DSK et qu'elle a choisi de s'entendre avec lui), puis soutenir probablement la candidature d'Hamon, éventuellement de Montebourg, qui se distingue par sa ligne correctement radicale et ses distances avec l'homme du FMI. Tant mieux : il y aura légitime débat entre social-démocratie et socialisme traditionnel. Je préfère ça aux combinaisons opportunistes.

Au fond, l'aile gauche a toujours été minoritaire dans l'histoire de notre Parti. Des minoritaires et des contestataires, elle en a la culture et les réflexes. C'était déjà le cas avec le CERES, puis la "gauche socialiste" de Dray et Lienneman. Aujourd'hui, l'aile gauche a perdu ses références idéologiques qu'étaient Chevènement et Mélenchon. Il y a bien encore Filoche, mais il n'a pas leur impact. Hamon est tenu par son rôle de porte parole, et il n'appartient pas au noyau dur de l'aile gauche. Celle-ci ne peut survivre que dans un sursaut anti-DSK. Elle n'ira pas au-delà.

L'avenir du PS est bien sûr ailleurs. La candidature de DSK entraînera inévitablement une recomposition interne aussi importante pour nous que l'adoption de la procédure des primaires. Je ne conçois cette candidature que comme le rassemblement de tous les réformistes, de François Hollande à Ségolène Royal en passant par Martine Aubry. Les strauss-kahniens, qui n'existent plus depuis deux ans en tant que courant, doivent respecter celles et ceux qui se reconnaissent peu ou prou dans la social-démocratie et un socialisme moderne. Après tout, Hollande, Royal ou Aubry sont aussi dignes que Strauss de concourir à la présidentielle, même si je crois que lui est en situation pour le moment.


Bonne soirée.

17 février 2011

Défendons la Justice.




DSK est candidat.

Bonsoir à toutes et à tous.


Ça y est, DSK est candidat à la présidentielle de 2 012. Ce n'est pas moi qui l'annonce, ni DSK d'ailleurs, mais le Nouvel Observateur de cette semaine, un magazine sérieux. Mais on peut être sérieux et se tromper. Laurent Fabius, qui serait dans la confidence, a aujourd'hui démenti. Mais comment faire autrement, même si c'est vrai ? Il ne va tout de même pas s'exclamer : youpi je sais, Strauss m'a tout dit et je vous le répète !

En tout cas, la campagne risque d'être rude. En politique, tous les moyens pour discréditer l'adversaire sont bons, qui se résument à trois : le sexe, l'argent, les convictions. Concupiscent, friqué, traître à la gauche, je force volontairement le trait mais voilà le portrait que ses adversaires s'apprêtent à faire de DSK. Je n'ai aucune illusion sur la politique : là où est le pouvoir, là sont les procédés crapoteux. C'est aussi vieux que l'humanité.

Et pourtant, je crois en la grandeur, la noblesse, l'utilité de la politique. Strauss contre Sarkozy, c'est un affrontement qui pourrait faire honneur à notre démocratie : d'un côté l'homme qui a rénové la droite en la sortant du gaullisme historique, de l'autre celui qui a rompu avec le marxisme et réconcilié la gauche avec le marché. Entre le néo-libéral et le social-démocrate, la confrontation pourrait être de grande qualité. Pourvu que DSK soit candidat !


Bonne soirée.

16 février 2011

Calmos !



Bonsoir à toutes et à tous.


Drôle de titre dans le dernier numéro du Point (en vignette) : comme si DSK avait peur de quelque chose ou de quelqu'un ! Son silence n'est pas d'hésitation ou de tactique mais de respect des règles : le devoir de réserve qu'impose sa responsabilité à la tête du FMI. Gênant ? Aucunement. Pourquoi cette excitation, cette précipitation pour une échéance qui aura lieu dans plus d'un an ? On n'a jamais vu ça. Envie d'en finir vite avec Sarkozy ? Désir de changement ? Peut-être, mais soyons sages, restons calmes : chaque chose en son temps.

Et puis, il y a cette histoire de baisse dans les sondages chez nos sympathisants, qui met certains en émoi. Là aussi, calmos ! DSK est pris dans un tourbillon sondagier très prometteur, avec ses hauts et inévitablement ses bas. Laissons tomber tout ça : ce n'est pas à coup de sondages qu'on fait de la politique. De fait, DSK est aujourd'hui populaire. Mais nous vivons dans une société superficielle, changeante et sous influence des médias, qui ne doivent pourtant pas nous dicter ce que nous devons penser. Ce qui compte, c'est notre jugement politique : le mien depuis dix ans me fait espérer une candidature franchement social-démocrate, authentiquement réformiste, celle de DSK.

Ce qui est certain, c'est que la candidature DSK monte dans le pays. Il faut nous en réjouir mais n'en tirer aucune autre conséquence, demeurer modeste dans notre approche, sachant que l'homme, comme je l'ai toujours pensé, importe moins que le projet. En cette fin de semaine, Strauss sera à Paris pour le G20 et invité du journal de France 2 dimanche soir. Nous serons attentifs à ce qu'il dira, en nous gardant de conclusions hâtives.

La politique est comme l'amour : quand les choses doivent se faire, elles se font, naturellement, sans forcer. Le temps viendra, si tout se passe bien, où nous serons tous strauss-kahniens, même les plus irréductibles. Parce que la possibilité de la victoire est la grande réconciliatrice en politique, donnant à chacun une petite part d'espoir. Et en dehors de l'espoir, il n'y a pas de politique, seulement des bavardages. C'est aussi pourquoi le silence de DSK est de bon augure.


Bonne et calme soirée.

15 février 2011

Caviar, pinard et couscous.

Bonjour à toutes et à tous.


Alors, vous prendrez quoi ? Caviar, pinard ou couscous ? Je veux bien sûr revenir aujourd'hui sur les attaques de la droite contre DSK (voir billet d'hier) et la réponse de Jean-Christophe Cambadélis ce matin sur France-Inter. Pour défendre l'ancien maire de Sarcelles et méditerranéen de coeur, il a parlé de "gauche couscous". Camba, que je connais depuis mon passage dans la section parisienne du XIXème (là non plus, on ne peut pas confondre avec le XVIème ou le VIIème arrondissement), a toujours le mot juste et la métaphore vive.

Ces attaques de la droite ne me surprennent pas. C'est la terrible loi de la politique : il faut viser le plus dangereux. Pas de surprises mais une inquiétude : qu'elles aient un impact à gauche, au sein d'une certain gauche. C'est d'ailleurs la stratégie escomptée par la droite : contourner DSK sur sa gauche pour le discréditer aux yeux de son propre camp. Clarifions la situation ; il existe trois gauches dont j'aimerais vous parler :

1- La gauche caviar. C'est un mythe, une invention, une facilité de langage. Grands patrons, haute bourgeoisie, hommes d'affaires, héritiers ou parvenus ne se retrouvent pas à gauche mais massivement à droite. Voilà la vérité. Que des gens aisés, en très petit nombre, rejoignent la gauche, c'est un fait et je m'en réjouis : plus nous serons nombreux, mieux ça vaudra. En 1789, des aristocrates ont rallié le peuple. Mais à aucun moment ce fait nous conduit à soutenir qu'il existe une "gauche caviar", expression contradictoire, ineptie sociologique, absurdité politique, pur fantasme.

2- La gauche pinard. Cambadélis a ses formules, j'ai les miennes. Il a toujours existé, historiquement, une gauche ouvriériste, protestataire, populiste, parfois cocardière, au pire à la limite de l'antisémitisme, aujourd'hui quasiment disparue, mais dont certains thèmes demeurent présents dans l'opinion de gauche : la haine du bourgeois, la volonté de tout faire péter, la hantise d'une "trahison" de son propre camp. C'est cette gauche-là que la droite aimerait voir s'opposer à DSK.

3- La gauche couscous. Celle de Camba, de Strauss et de moi ! Une gauche universaliste, cosmopolite, multiculturelle, qui rêve à l'émancipation de l'humanité plus qu'à la guerre sociale, qui ne prend pas en compte les origines mais qui ne voit que des hommes et des citoyens. Cette gauche rejette la démagogie et l'hypocrisie (c'est pourquoi elle se veut réaliste bien que rêveuse). DSK touche une très forte rémunération, et alors ? Qui propose que le directeur du FMI vive comme un moine ou soit payé comme un prof de philo ? Pas moi et personne. Arrêtons donc ce cinéma ...


Bonne journée,
et couscous au dîner.

14 février 2011

L'homme à abattre.

Bonjour à toutes et à tous.


L'histoire se souviendra peut-être que la bataille des présidentielles a commencé ce week-end. En politique, ce ne sont pas tant les soutiens que les attaques qui investissent un candidat. DSK a eu son lot hier, d'une même veine, qui trace nettement ce que sera la campagne. Christian Jacob, président du groupe UMP à l'Assemblée, a ouvert le feu :

DSK, c'est le "candidat des bobos", "ce n'est pas l'image de la France, l'image de la France rurale, l'image de la France des terroirs et des territoires, celle qu'on aime bien, celle à laquelle je suis attaché". Pierre Lellouche, secrétaire d'Etat, a complété le tableau sur un air connu : DSK, c'est "la gauche ultra-caviar".

Bref, on n'est pas très loin de "DSK pas Français", "DSK candidat de l'étranger". Le portrait constitue une cible idéale, l'homme qu'on aime détester, où une certaine droite rejoint une certaine gauche : juif, riche, cosmopolite, épicurien, économiste, social-démocrate, oui Strauss est tout cela. Et alors ? Blum, Mitterrand en leur temps ont connu de semblables attaques. DSK, ce sera sans doute pire, je le pressens.

Quand DSK est venu me soutenir en 2 004, avant le meeting à Rouvroy, j'avais eu une altercation dans un café du village avec quatre types à qui je distribuais gentiment des invitations. L'un deux me l'a rendue en disant : "DSK non, c'est un juif". Voilà où en est une certaine France encore aujourd'hui. Mais c'est l'hommage du vice à la vertu : l'homme qui peut battre Sarkozy est devenu depuis ce week-end l'homme à abattre.


Bonne journée.

13 février 2011

Baby blues.


Bonjour à toutes et à tous.


La démographie est à la hausse, les Français refont des enfants, certains commentateurs s'en réjouissent, notre pays retrouverait le moral. Ah bon ? Je dis non, pour plusieurs raisons :

1- La déprime nationale est bien là, profonde en comparaison avec d'autres pays, et ce n'est pas la relance de la natalité qui change quoi que ce soit à ce constat. Quand un Français sur deux craint de devenir SDF, c'est que quelque chose ne va pas, que les naissances ne suppriment ou ne compensent pas.

2- Au contraire, l'acte de reproduction, au demeurant fort légitime et généralement plaisant dans l'instant, est plutôt un signe de repli sur la sphère privée, dans une France qui doute d'elle-même, ne croit plus en son destin et désespère de sa vie publique.

3- Historiquement, il y a un fait, une évidence qui devraient nous amener à réfléchir et à sortir de nos préjugés consolateurs et conservateurs : ce sont les peuples pauvres et les civilisations en crise qui font de nombreux enfants. Nous n'en sommes pas encore là mais la tendance existe et elle prospère du moins dans les têtes.

4- Les bâtisseurs de l'humanité, chrétiens en leur temps, révolutionnaires à l'époque moderne, ne se référaient guère aux valeurs familiales comme moteur de la conversion ou de l'émancipation. On n'imagine pas saint Paul et Lénine en papas. Il n'y a que la très ordinaire gestion qu'on dit "de bon père de famille", la créativité paternelle n'allant pas plus loin (au passage, pourquoi les "mères de famille" sont-elles exclues de cette compétence ? Au passage aussi, pourquoi cette expression redondante "père de famille", puisque être père c'est nécessairement fonder une famille ?). Encore est-ce douteux : si les familles garantissaient la bonne marche de la société, cette vérité se saurait depuis longtemps et le monde, plein de papas, mamans et enfants, ne serait pas ce qu'il est.

5- Je me demande si cette autosatisfaction nataliste n'est pas le produit d'une nostalgie aujourd'hui fréquente et largement fausse, idéalisée (le fameux "C'était mieux avant ?") : les soi-disant glorieuses "Trente Glorieuses" et leur baby boom, celui-ci étant alors la réponse à l'inhumanité dont l'humanité avait été capable durant la Seconde Guerre Mondiale. Je ne suis pas loin de penser, sans nécessairement aller jusque-là, qu'un individu normalement heureux dans un monde sans tragédie ne ressentirait aucun désir particulier de se reproduire (mais comme la mort restera un malheur à l'échelle personnelle, les êtres humains continueront à faire des enfants pour le surmonter, sauf ceux qui sont d'ors et déjà tournés vers l'éternité). Je ne sous-entends pas que l'acte de reproduction pourrait être pathologique, mais désespéré oui probablement dans certains cas. Ce qui n'enlève rien d'ailleurs à sa beauté et à sa valeur. Quoi qu'il en soit, le baby boom peut cacher et accompagner un baby blues.

6- Ce qui est certain, c'est que les "valeurs familiales" sont en soi réactionnaires. Ce n'est pas un hasard si la République, dans sa devise, ne les reprend pas alors que le régime de Vichy les met à l'affiche. Le natalisme a toujours été une idéologie de droite, tout comme le discours moral sur la famille, les craintes quant à son "éclatement", sa prétendue disparition (comme si une réalité biologique et sociale pouvait disparaître !). On rattache souvent ce fait à l'influence du christianisme, à mon avis à tort : les Évangiles ne sont pas tendres pour la famille, la Mère de Dieu est une vierge et les modèles de l'Église, apôtres, martyrs, prêtres, moines et saints hommes, ne sont pas exactement des exaltations de la "cellule familiale" (l'expression est révélatrice !).

7- Familles je vous hais ? Non, je ne suis pas vraiment un lecteur de Gide. Comme socialiste, je laisse à chacun le soin de choisir sa vie, sans privilégier tel mode d'existence, sans établir une hiérarchie. C'est pourquoi je suis régulièrement surpris de voir que des candidats de gauche en réfèrent à leur passé familial pour justifier en partie leur engagement politique (n'ont-ils donc rien d'autres à mettre en avant ?). Qu'à droite on exalte l'héritage, l'hérédité, la lignée, la dynastie, c'est idéologiquement cohérent. Mais à gauche, ça ne se devrait pas. Pour nous autres, il n'y a que des hommes libres, des citoyens responsables, pas des "enfants de" ou des "fils de famille" même progressiste. Ce n'est pas le sang qui fait les convictions, ni les traditions, pas même l'éducation : c'est la décision, la volonté, la réflexion. Familles je ne vous hais pas, mais je hais (façon de parler, bien sûr) ceux qui vous utilisent, vous manipulent, vous idolâtrent.


Bon dimanche,
en famille je suppose.

12 février 2011

La malédiction de la gauche.

Bonsoir à toutes et à tous.




La politique c'est la guerre. Actuellement, l'ennemi c'est DSK. A droite évidemment, mais dans une partie de la gauche aussi : Mélenchon bien sûr, qui tape fort, mais également, en plus doux, en plus pernicieux, une partie de l'aile gauche du PS, qui veut l'écarter (voir mon billet du 30 janvier sur les pétitionnaires du site Martine2012). L'économiste Liem Hoang-Ngoc, député européen, l'une des figures intellectuelles de l'aile gauche, a signé.


En Picardie, ça ne se bouscule pas trop. Didier Cardon, vice-président du Conseil Régional, a mis son nom, d'autres se tiennent à carreau, pour ne pas injurier l'avenir. On ne sait jamais ... Le courage éventuellement, mais quand même pas jusqu'à la témérité. On se souvient de la triste formule de Pasqua, qui hélas ne s'applique pas qu'à lui : "En politique, on ne sort de l'ambiguïté qu'à ses dépends". Les convictions oui, mais avec beaucoup de prudence ...


Un qui a des convictions sans ambiguïté, c'est mon camarade et collègue Vincent Peillon, dans un entretien au Monde de ce week-end. Contre les petites manoeuvres de l'aile gauche qui cherche à opposer Aubry et DSK, il souligne et démontre leur complémentarité, en rappelant quelques dates qui prouvent une même ligne politique :


1994 : Aubry et DSK se retrouvent pour rénover (déjà !) le Parti socialiste.
1997 : Aubry et DSK sont ensemble ministres de Jospin (Mélenchon aussi, mais il a tout oublié, à moins qu'il ne considère sa participation comme une "erreur de jeunesse").
Années 2000 : Aubry et DSK s'efforcent de définir un socialisme moderne.


DSK incarnant l'aile droite du PS ? Là aussi, Vincent Peillon mouche les morveux : Qui s'opposait en 1992 à la politique du franc fort conduite par le fabiusien Premier ministre Pierre Bérégovoy ? Strauss ! Mais on oublie si vite, et les slogans, caricatures et préjugés sont tellement plus faciles ...

Pour Peillon, qui a choisi on l'a compris son candidat, il ne doit pas y avoir d'affrontement Aubry-DSK aux primaires. C'est le bon sens et notre intérêt collectif. Mais pour le rassemblement de toute la gauche ? Mélenchon exerce son petit chantage à l'extrême gauche qui soi-disant ne se rallierait pas à l'un ou à l'autre. Sauf que les sondages, rappelle Vincent Peillon, montrent exactement le contraire.

Pour terminer, je citerais cette phrase de celui qu'Aubry a chargé de définir la philosophie de notre projet : Il faut "mettre fin à ce qui fait la malédiction de la gauche française et qui l'a toujours empêché de gouverner durablement : l'écart entre les "discours de tréteaux", comme disait Jean Jaurès et les "pratiques opportunistes", comme les appelait Maurice Merleau-Ponty". Bravo Vincent !


Bonne soirée.

11 février 2011

Etoiles filantes.

Bonsoir à toutes et à tous.


On ne retient de la politique que les stars, grandes ou petites, on oublie que c'est un univers d'étoiles filantes, d'insectes éphémères, où l'on apparaît et disparaissait, où la durée de vie est pour beaucoup extrêmement courte. On y trouve des "ex" à la pelle. Au niveau local, que de noms en haut de l'affiche tombés ensuite dans les chaussettes ! La politique a ses trous noirs, son antimatière, un au-delà d'où l'on ne revient pas. Je m'étonne parfois d'être encore là. Mais je n'ai aucun mérite : c'est l'environnement, peu banal, qui me porte.

Tout ça pour en venir à Eva Joly, mais oui ! Cet été, elle était la reine des médias, tout le monde s'affolait à sa candidature, les sondages grimpaient, le PS s'inquiétait un peu. Fini tout ça. Les écolos pensent sérieusement la remplacer par Hulot. Qu'est-ce qui s'est passé ? Rien, un engouement passager, une histoire d'étoile filante. Son accent et ses lunettes plaisaient, son côté justicier pur et dur séduisait. Elle ne venait de nulle part, c'était amusant. Mais plus maintenant.

Olivier Besancenot, c'est un peu la même histoire. Son NPA, il y a deux ans, faisait un carton. C'était jeune, tendance, Olivier passait souvent à la télé et à la radio. Là aussi, les sondages de popularité étaient flatteurs, et Besancenot entrait quasiment dans la cour des grands. Adieu vieille LCR trotskyste, bonjour mon beau NPA radicalo-radical ! Ce week-end, l'organisation tient son congrès : c'est la saignée, elle prend l'eau, Besancenot est isolé face à un Mélenchon plein de morgue, d'assurance et de panache, les militants s'en vont par paquets, étoiles filantes eux-aussi.

La politique, c'est le dieu Chronos qui dévore ses petits. Mange, tu ne sais pas qui te mangera, voilà quel pourrait être son adage. Il faut être dur à cuire, indigeste, pour espérer s'en sortir.


Bonne soirée,
bon appétit.

10 février 2011

Dégage !

Bonsoir à toutes et à tous.


A l'instant où j'écris, Moubarak s'apprête à intervenir pour annoncer peut-être son départ. Dans les événements de Tunisie et d'Egypte, ce qui surprend, c'est l'absence de leader, de projet, d'idéologie. C'est sans doute une révolution, mais sans révolutionnaires. Pas vraiment de revendications sociales, pas de slogans politiques, pas même la demande d'élections libres. Ce n'est pas franchement un nouveau régime que semble exiger la rue. Surprenant aussi le rôle très ambivalent de l'armée, à la fois du côté du pouvoir et du peuple.

Ce mouvement est complètement inédit. Les pays d'Europe aspirant dans les années 70 à la démocratie (Portugal, Grèce, Espagne), c'était autre chose. Les pays de l'Est renversant le communisme dans les années 80, ce n'est pas non plus comparable. Je ne vois aucun soulèvement à quoi rattacher ce qui se déroule actuellement en Egypte et en Tunisie.

Un cri unique surgit de la foule, dans les deux cas : Dégage ! Toute la révolte semble se concentrer dans cet impératif, basique, élémentaire, quasiment primale : exiger le départ de l'homme qui occupe la tête de l'Etat. C'est clair, simple, peut-être trop. Comme si cette fuite suffisait. Dégage ! C'est l'interjection des jeunes d'aujourd'hui, qui remplace le "fout le camp" ou le "tire-toi".

Pourtant, à bien y réfléchir, ce "dégage" n'est qu'une pulsion démocratique dans des régimes qui ne le sont pas. Car à quoi reconnaît-on, très visiblement, la présence d'une démocratie ? Au fait que le chef ne reste pas, au mécanisme de l'alternance, au pouvoir qui cesse d'être éternel pour devenir provisoire. Dégage ! c'est la tête de Louis XVI qui tombe, mais pacifiquement, Varennes sans la guillotine.


Bonne soirée.

09 février 2011

Notre cerveau rétrécit.

Bonsoir à toutes et à tous.


J'ai découvert l'hallucinante nouvelle hier, en dernière page du Courrier Picard, sous ce titre : "Le cerveau humain rétrécit". Ce n'est pas une blague : le cerveau de l'Homo sapiens a diminué de 10% en 30 000 ans, passant de 1 500 à 1 359 cm3. L'anthropologue John Hawks parle d'une "réduction majeure" et David Geary, professeur de psychologie, avance l'explication suivante :

"Avec l'émergence de sociétés plus complexes, le cerveau humain est devenu plus petit parce que les individus n'ont pas besoin d'être aussi intelligents pour survivre, ils sont aidés par les autres".

J'avoue que cette théorie m'a séduit et stimulé. Pas besoin de vivre 30 000 ans pour constater une baisse d'intelligence généralisée autour de nous. La thèse anthropologique n'explique pas tout. J'y vois pour ma part quatre raisons sociologiques qui sont récentes :

1- L'effondrement de l'idéologie. Quoi qu'on puisse leur reprocher, les grandes idéologies, tels que le christianisme et le communisme, élevaient l'homme à un niveau très supérieur, le faisaient entrer dans des univers fort riches. Aujourd'hui, c'est la trivialité, la consommation, le concret qui règnent et qui incontestablement rabaissent les préoccupations des individus.

2- La dégénérescence du langage. L'intelligence, nous le savons bien, se développe avec la maîtrise du langage et de l'écriture. Or, le langage oral a perdu de sa superbe, de son élégance, de sa finesse. Prenez les politiques, dont le métier est de parler : c'est affligeant. Les grands orateurs d'autrefois ont disparu, le langage s'est lissé, appauvri, banalisé. Où sont les Duclos, De Gaulle, Mitterrand ? La plupart des politiques sont incapables d'improviser, ils se bornent à lire péniblement des textes médiocres qu'on leur a préparés.

3- La culture du chiffre. Partout, l'idée, le sens, la valeur ont été remplacés par le chiffre. Si vous voulez épater quelqu'un, balancez-lui des chiffres. Or, il n'y a rien de plus idiot qu'un chiffre, qu'une statistique, qu'une évaluation, qui veulent tout dire et rien dire, qu'on peut interpréter et manipuler à souhait. Et puis, cette croyance que la vie pourrait se soumettre à la mesure, à la toise, est particulièrement sotte.

4- L'addiction technologique. L'homme n'a plus besoin de chercher, calculer, penser, classer, s'orienter, c'est la machine qui le fait pour lui, le réduit à la passivité, accélère le déclin de ses capacités intellectuelles. La mémoire, la volonté, la raison, l'imagination sont beaucoup moins sollicitées. Ce sont surtout les réflexes qui sont exercés et même excités. Jeux vidéo, GPS, téléphone portable, internet, TNT, l'homme ne peut plus s'en passer, la technologie est devenue une drogue. Moralement, les gadgets électroniques et numériques alimentent des formes nouvelles de vanité, de narcissisme. Ils sont les puissants vecteurs d'un abrutissement universel.

Je n'ai évoqué ici que le psychisme. Mais que dire du corps ! Mes élèves ont du mal à franchir quelques centaines de mètres, se fatiguent très vite, leurs membres s'avachissent, le pas devient lent, l'allure s'alourdit. Le confort nous rend fragile, vulnérable. Les gens ont peur du froid, même quand il est léger (pendant "l'épisode neigeux" de cet hiver, le climat était perçu par beaucoup comme "glacial" ou "polaire", ce qui était à l'évidence excessif).

Le sens commun lui-même est en décadence : un train bloqué, une voiture stoppée et les occupants errent ahuris, hébétés, tels des zombis, au bord des routes et des rails, ne sachant que faire, où aller, se comparant stupidement à des "naufragés", ayant manifestant oublié le sens réel de ce mot. L'intelligence, difficile à définir, se reconnaît cependant à son sens aigu de l'adaptation, aujourd'hui en perte de vitesse. L'homme moderne est moins autonome que jamais.

Ce rétrécissement du cerveau, j'essaie de toutes mes forces d'y résister, je lutte contre les causes qui le précipitent, mais peut-on échapper à un phénomène collectif, historique, quasi génétique ? Ce n'est pas certain ...


Bonne soirée neuronale.

Strauss-kahnologie.

Bonjour à toutes et à tous.


Dans les prochaines semaines et prochains mois, je pressens qu'une science nouvelle va se développer, avec ses amateurs et ses professionnels, ses virtuoses et ses faussaires : la strauss-kahnologie. C'est un savoir à la croisée de la traduction des langues et de l'analyse des comportements. L'objet d'étude de cette science : DSK, ses proches et ses partisans. Sa finalité : découvrir s'il sera ou non candidat en 2 012.

La leçon inaugurale de cette nouvelle science a eu lieu ce matin, dans les commentaires autour d'une simple phrase d'Anne Sinclair, son épouse : "Pour ce qui me concerne, je ne souhaite pas qu'il fasse un second mandat (à la tête du FMI)". Autrefois, dans la théologie byzantine, quelques mots suffisaient à faire basculer le cours du monde, parfois à déclencher des guerres. Nous n'en sommes pas encore là, mais plus très loin.

Anne Sinclair est depuis toujours une femme engagée à gauche : quoi de plus normal qu'elle souhaite voir DSK, notre meilleur candidat, se tourner vers la France plutôt que vers le FMI ? N'importe quel militant socialiste un peu raisonnable ne peut être que sur cette ligne-là. Mais ça ne nous apprend rien sur les pensées de son présidentiable de mari ! Avez-vous remarqué quand même qu'Anne Sinclair ne se faisait pas appeler Anne Strauss-Kahn ?

Et puis, Strauss est trop rationnel pour être dans une culture du signe, du symbole, de l'allusion à décrypter. S'il a quelque chose à dire, y compris une hésitation ou une incertitude, il le dira directement, sans passer par l'intermédiaire de son épouse. Je connais un peu, depuis une petite dizaine d'années, le monde des strauss-kahniens : chacun est libre et responsable de soi, notre fidélité est intellectuelle, notre complicité purement politique et Strauss est le seul dépositaire de sa parole. Il n'y a pas chez nous de porteurs d'eau ou de porte-flingues, d'allégeance personnelle ou de phénomènes de cour, contrairement à d'autres cercles politiques. Cette liberté existait déjà chez les rocardiens, à la différence du petit monde très hiérarchisé, concentrique, évoluant autour de Mitterrand.

Enfin, la vérité est toujours plus simple qu'on ne le croit : Strauss-Kahn pour le moment travaille ; quand le temps viendra, quand le calendrier du Parti socialiste l'imposera, il se décidera, au vu des données politiques qu'il aura alors en sa possession, et qui peuvent évoluer au fil des mois. DSK n'a pas programmé son ambition présidentielle. Il ne sacralise pas le pouvoir, ne fait pas de sa conquête une épreuve initiatique. Il jugera en fonction de son utilité, de ce qu'il peut apporter à la gauche et à la France. Il n'y a pas besoin de strauss-kahnologie pour cela : cette fausse science est à Strauss-Kahn ce que l'astrologie est à l'astronomie, l'alchimie à la chimie et la parapsychologie à la psychologie.


Bonne journée.