L'Aisne avec DSK

27 mai 2011

A bientôt.

Vous pouvez me retrouver sur :


http://jaitantdechosesavousdire.blogspot.com/

Au revoir.

Bonjour à toutes et à tous,


C'est la dernière fois que je vous dis "bonjour à toutes et à tous". Ce blog a commencé le 13 septembre 2 006 à 18h31, il se termine ce vendredi 27 mai 2 011 à 10h16. Il y a cinq ans, un coup de fil de l'équipe de campagne de DSK me demandait d'ouvrir un blog de soutien dans l'Aisne. Je ne savais pas faire. J'ai vite appris.

Je n'imaginais pas alors que ce blog prendrait des dimensions inattendues, aurait un impact presque excessif, des conséquences jusque dans ma vie privée. Aujourd'hui, quand je vais quelque part, il est bien rare qu'on ne m'en parle pas. A tel point que cette activité d'écriture électronique a éclipsé tout le reste, pourtant très important pour moi.

Un jour, je raconterai ce que m'a valu ce blog, ses bonheurs, ses surprises et ses mésaventures. Quelle histoire ! Cinq ans, c'est une tranche de vie. En attendant, les archives sont là, pour toujours, où chacun pourra aller puiser pour mieux comprendre un itinéraire personnel et un parcours collectif, celui de la gauche saint-quentinoise telle que je la perçois. Il est temps maintenant d'arrêter, et rien n'est plus difficile : tourner la page, passer à autre chose, évoluer parce que la vie évolue.

C'est d'autant plus difficile que ce blog n'a jamais eu autant de lecteurs, trois fois plus qu'à l'ordinaire, encore hier. Mais je n'ai pas à me déterminer par rapport aux autres ou aux événements : il n'y a que la cohérence par rapport à soi qui compte. C'est en tout cas ma morale. Le succès, à la limite, je m'en moque, je n'en ai pas besoin, même si j'ai des devoirs envers mon public.

Deux traumatismes cependant m'ont conduit à franchir le pas, à cesser là : bien sûr l'élimination de DSK des primaires socialistes et sans doute de la vie politique. "L'Aisne avec DSK", ce n'était plus possible. Mais il y a un autre traumatisme, une autre élimination : celle de la gauche saint-quentinoise aux élections cantonales, dès le premier tour, comme déjà aux municipales de 2 008 et aux législatives de 2 007, mais par l'extrême droite cette fois, et alors que j'aurais pu espérer légitimement être candidat. Ce double choc ne peut laisser indifférents, quand on est socialiste, strauss-kahnien et saint-quentinois, que les inconscients.

Oui il faut changer, sinon c'est la routine, la répétition et peut-être la mort. J'en ai assez des réunions tristes, des querelles mesquines, des soirs de défaite qui n'en finissent pas. La vie n'est pas faite pour ça, ni la politique. Je veux agir, peser, participer, pas être un éternel opposant qui ne fait que critiquer. C'est un au revoir, ce n'est pas un adieu. Nous nous reverrons, nous avons toute la vie pour ça. Dans le prochain message, je vous donnerai ma nouvelle adresse, parce que la vie continue !

Merci à vous tous, qui m'avez lu et suivi pendant ces cinq ans. Merci à ceux qui ont déposé des commentaires et qui ont eux aussi, sans doute à leur corps défendant, contribué au succès de ce blog. Je ne regrette rien de ce que j'ai écrit, je n'en veux à personne pour ce qu'il a écrit.


Au revoir et à bientôt.

26 mai 2011

La gauche a mauvaise presse.

Bonsoir à toutes et à tous,


Parmi les difficultés auxquelles est confrontée la gauche saint-quentinoise, il y a les problèmes de communication (ça ne date pas d'aujourd'hui). Et quand les problèmes de division s'ajoutent aux problèmes de communication, le cocktail est médiatiquement terrible. Dans L'Aisne Nouvelle de mardi dernier, aux pages 6 et 7, les conséquences sont politiquement déplorables.

Il y a d'abord cet article qui met en cause le conseil général : "Subventions en baisse, assos en danger". L'école de dessin Quentin-de-la-Tour et Aisne Jalmav se plaignent d'une réduction, voire d'une suppression de leur subvention départementale. Je ne connais pas ce dossier en particulier mais je connais assez bien le monde associatif : il a tout le soutien d'Yves Daudigny et de sa majorité, dont la politique fiscale a augmenté certains impôts, diminué d'autres mais maintenu l'aide aux associations. Alors ? La gauche locale devrait plus amplement communiquer sur ce dossier pour que notre point de vue soit aussi pris en compte.

Et puis, tout aussi déplorable, il y a l'assemblée générale du Comité des Oeuvres Sociales de la Ville et de l'Agglo, où se sont affrontés Dominique Gayraud et Georges Varenne, l'un pour SUD l'autre pour la CGT. Le commun des mortels, dont je suis, n'y comprend évidemment rien, sinon qu'il s'agit de chamailleries relevant de conflits de personnes.

Gayraud, Varenne sont à leur façon des figures de la gauche locale. Ont-ils conscience de l'image qu'ils donnent de celle-ci en s'affrontant ainsi publiquement ? Sans doute estiment-ils qu'ils ont chacun raison et que leur opinion personnelle l'emporte sur toute autre considération ... Mais quand le duel a lieu sous les regards et l'arbitrage de Marie-Laurence Maître, maire-adjoint UMP, on comprend les ravages que peut produire une telle division.

Enfin, dans la même page de L'Aisne Nouvelle, il y a ce conflit à l'intérieur même de la CGT, entre l'union départementale et l'union locale, entre Elisabeth Guilbert et Alain Pezé. Là aussi, on n'y comprend pas grand-chose, sinon qu'il est question d'insultes et sans doute de règlements de compte. Mais l'effet produit est également déplorable.

Les situations ici évoquées sont différentes mais la mouvance est bien la même, celle de la gauche. Et la réputation qui en est faite n'est pas en sa faveur. Si j'avais quelque responsabilité politique, je m'empresserai de travailler à l'unité de cette gauche tant divisée. Ce n'est pas de la forfanterie : l'autorité naturelle, qui ne peut provenir que des élus, a du poids, une influence, pourvu qu'on veuille l'exercer. La droite dans cette ville est impeccablement unie, et même soudée. Pourquoi pas la gauche ? Ça ne doit pas être si sorcier.

Je m'empresserai aussi de communiquer au lieu de me plaindre de la presse, vieille habitude fâcheuse et stérile. Communiquer, je sais un peu faire. Mais la gauche, elle, a du mal à s'en sortir. Si elle savait briser ses vieux schémas, rompre avec ses préjugés, tout irait mieux, en tout cas moins mal. Car peut-on faire pire qu'aujourd'hui ? Au risque de vous désespérer, je pense que oui. Mais il faut en finir avec tout ça, tourner la page, passer à autre chose. Pour un être humain, c'est ce qu'il y a de plus difficile. Un militant politique devrait plus aisément le comprendre. Espoir donc, malgré tout.


Bonne soirée.

Des radars aux fesses.

Bonjour à toutes et à tous,


De quoi nous parle l'actualité politique ces derniers jours et ces dernières heures ? Du démontage et du remontage des radars sur les routes, d'une accusation de harcèlement sexuel concernant un secrétaire d'Etat, de la "prison dorée" de DSK dont on nous livre le moindre détail. Est-ce donc cela l'actualité politique ? Évidemment non.

Nous sommes entrés, depuis quelques temps déjà, dans un processus déplorable de peopolisation de notre vie politique, que l'affaire DSK pourrait dangereusement accélérer : ce n'est plus la vie publique de nos grands hommes qui va intéresser citoyens et médias, c'est leur vie privée, et la plus intime qui soit, la vie sentimentale et sexuelle. Si nous allons vers ça, c'est la mort morale de la République !

N'y aurait-il pas pourtant bien d'autres sujets de débats ? L'Assemblée nationale a refusé hier le transfert post-mortem de l'embryon après décès du père. Voilà une question fondamentale et complexe, qui a de quoi faire trembler notre société. Mais qui en parle, qui s'y intéresse ? Autrefois, la République légiférait en matière économique, sociale et politique. Aujourd'hui, elle doit aborder des problèmes moraux, métaphysiques et anthropologiques.

C'est pourquoi on parle désormais de "lois bio-éthiques", expression inimaginable auparavant. La conception même qu'on se fait de l'être humain est en jeu. La République réclame des philosophes ! Quand donc la politique va-t-elle un peu s'élever ? Si elle se complaît dans des histoires de radars et de fesses, c'est sa fin.


Bonne journée.

25 mai 2011

L'homme normal.

Bonsoir à toutes et à tous,


François Hollande s'est inventé une image originale pour la présidentielle : l'homme normal. A priori, c'est une drôle d'idée : après "la force tranquille" il y a trente ans, "l'homme normal" aujourd'hui ! Personnellement, la posture ne me plaît pas trop : des hommes normaux, j'en croise tous les jours, je n'ai pas envie d'en voir un à l'Elysée.

Au contraire, j'attends d'un président qu'il nous surprenne, qu'il ait une dimension exceptionnelle. Le grand homme, quoi ! DSK en avait l'étoffe, Hollande flotte un peu dans le costume. Mais il peut gagner en épaisseur malgré son régime ... Trêve de plaisanterie, De Gaulle et Mitterrand en hommes normaux, ça ne le fait pas vraiment !

En même temps, le truc de Hollande est génial : face à une présidence Sarkozy hypertrophiée, boulimique, survitaminée, anxiogène, la revendication d'un homme normal peut faire mouche auprès de l'opinion. Nicolas Sarkozy n'est pas et ne veut pas être un type normal : sa personnalité et son exercice du pouvoir sont en rupture volontaire et assumée avec la figure traditionnelle du chef d'Etat à la française.

François Hollande veut se fondre dans un classicisme tranquille, rassurant. "Je suis comme vous, votez pour moi", tel pourrait être son slogan. Et il est vrai qu'Hollande est un mec sympa, et apprécié comme tel par les militants du PS, auprès desquels il a gardé une forte popularité. Ça peut le faire gagner. Le pouvoir rend fou les uns ou fort les autres ; chez Hollande, il rend normal. Ce n'est pas bête, ça peut marcher.


Bonne soirée normale.

La fin des haricots.

Bonjour à toutes et à tous,


C'est quoi ce délire ? Je veux bien sûr parler des passions qui se déchaînent, qui mobilisent l'opinion française sur et contre la fin des panneaux indicateurs de radars sur les routes. On croirait une affaire d'Etat, un drame national, la fin des haricots. Tout ça pour ça, des panneaux qu'on va mettre à la casse ? Drôle de pays, peu enclin à s'engager pour des causes autrement plus importantes et qui là s'excite comme c'est pas permis ... Même le gouvernement a dû reculer devant sa majorité parlementaire !

Et pourtant, il va de soi qu'il faut supprimer ces panneaux et interdire les détecteurs électroniques de radar, tant les accidents de la route sont un véritable fléau, dont la faute revient, et de très loin, à la vitesse excessive. La raison est claire, l'objectif est indispensable, la solution est évidente. Mais de quoi donc ont peur nos responsables politiques pour plier ainsi, renoncer au bon sens, sacrifier l'intérêt national ? Ils ont peur de perdre des voix, comme les automobilistes ont peur de perdre des points et des sous. Les deux peurs s'allient lâchement pour produire la lamentable démission à laquelle nous assistons depuis quelques jours.

Quant aux radars "pédagogiques", c'est une pitrerie : la route n'est pas une salle de classe où l'on explique et avertit, où l'on fait de la pédagogie ; c'est un lieu de vie et de mort, d'accidents et de souffrance dans lequel la loi doit s'appliquer sans pitié et sans nuance. Pédagogiques ou pas, les panneaux prévenant la présence des radars sont une immense hypocrisie, une insondable bouffonnerie à quoi il faut d'urgence mettre fin. Je soutiens de tout coeur Fillon et Guéant pour qu'ils remettent au pas leurs députés frondeurs et criminels.

Imaginez un peu qu'à l'entrée d'un magasin figure le panneau : "Attention il ne faut pas voler" ou qu'à l'entrée du tribunal un autre indique : "Interdit de mentir". Ridicule, évidemment. La vitesse, c'est le mal, c'est la souffrance, c'est la mort. La loi doit être intégralement respectée et les contrevenants sévèrement sanctionnés. Quand chaque automobiliste vivra dans la crainte d'un flash sur n'importe quel tronçon de route, même le plus paisible, le nombre des accidents baissera spectaculairement. Veut-on cela ou pas ?

La politique ne consiste pas à plaire à l'opinion mais à se donner des objectifs et à les atteindre le plus rapidement et le plus efficacement possible. Celui qui consiste à sauver des vies me semble imminent. On l'a bien fait pour le tabac ? Avant la loi sur son interdiction totale dans les lieux publics, il fallait aménager, composer, discutailler, tout le monde était consulté et personne n'était satisfait. L'interdiction pure et simple a tout réglé (je l'ai constaté dans mon établissement scolaire). Je demande la même simplicité, la même rigueur, la même efficacité pour faire respecter les limitations de vitesse sur les routes.

Ne croyez pas que celui qui vous parle soit un moraliste, un puritain ou un donneur de leçon : je roule vite, parfois plus qu'il n'est permis, je me laisse aller, parce que je suis pressé, parce qu'il y a une forme de griserie dans la grande vitesse. Mais je ne me refugie pas derrière des arguties, des excuses, des justifications à la con. J'essaie d'être responsable, de me corriger, d'admettre mes torts, d'en assumer toutes les conséquences. Et j'applaudis quand l'Etat m'y encourage, parce que c'est quand même son métier de faire respecter les lois.


Bonne journée,
roulez lentement.

24 mai 2011

Claude Gransard.



Bonsoir à toutes et à tous,


J'ai appris cet après-midi le décès de Claude Gransard, survenu la nuit dernière. Ancien instituteur, vice-président de la Fédération des Oeuvres Laïques de l'Aisne, maire de Mesnil-Saint-Laurent, Claude était un homme discret, doux, efficace, un serviteur modeste de la République. Sa grande taille lui donnait des allures de cow-boy silencieux et débonnaire, genre Gary Cooper.

Notre dernière rencontre, c'était le 28 avril, à Paris, où nous avions passé la journée ensemble, en compagnie des Amis de l'Ecole Publique, à qui j'avais fait visiter le cimetière du Père Lachaise. En vignette, devant le mur des fédérés, Claude est à ma droite, attentif aux explications. A table, nous avions discuté de son engagement d'élu, de premier magistrat d'une petite commune, qui lui était cher, dont il mesurait la grandeur et la difficulté.

Sur ce blog, j'avais relaté, dans un billet du 27 septembre 2 009, la cérémonie en l'Hôtel de Ville de Saint-Quentin, où Claude Gransard avait reçu les insignes de Chevalier dans l'Ordre National du Mérite. Je vous y renvoie. J'ai passé le 8 mai dernier dans son village de Mesnil-Saint-Laurent, pour un événement familial qui se déroulait dans la salle municipale. Les obsèques de Claude auront lieu vendredi, à 15h30, en l'église de Mesnil. J'ai ce soir une pensée particulière pour son épouse et sa famille, à qui j'adresse mes condoléances.


Bonne soirée.

Les choix des strauss-kahniens.

Bonjour à toutes et à tous,


Après discussions avec les uns et les autres, on comprend vite que les strauss-kahniens vont être dans les prochaines semaines confrontés à quatre choix :

1- Le choix idéologique : François Hollande, parce qu'il est le plus proche de la ligne social-démocrate, même si son personnage de "candidat normal" n'est pas fait pour exalter un strauss-kahnien.

2- Le choix tactique : Martine Aubry, parce que les strauss-kahniens, au congrès de Reims, se sont alliés avec elle et qu'elle a conclu un accord tacite avec DSK, dit "pacte de Marrakech".

3- Le choix identitaire : Pierre Moscovici, parce que c'est un strauss-kahnien pur jus et qu'il est toujours tentant de vouloir se faire plaisir. Mais est-ce bien politiquement raisonnable ?

4- Le choix unitaire : Laurent Fabius ou Bertrand Delanoë, au cas où la confrontation Hollande-Aubry tournerait à la foire d'empoigne. Le schéma est à la fois hypothétique et idéal, c'est-à-dire difficile sinon impossible.

Je ferai comme j'ai toujours fait en politique et ailleurs : je suis libre, je n'ai rien à gagner ni à perdre, je n'attends aucune consigne, je fais le choix des idées. Mes camarades strauss-kahniens se disperseront, c'est certain et c'est très bien. A l'heure où le parti socialiste se social-démocratise, il est bon pour la social-démocratie d'être partout présente, sans constituer de courant spécifique. Il ne faut pas se réunir en chapelle mais travailler pour toute l'église.

Déjà, au congrès de Reims, les strauss-kahniens avaient choisi trois options différentes : les reconstructeurs autour de Martine Aubry, les partisans de Moscovici, les anciens rocardiens avec Bertrand Delanoë. Le strauss-kahnisme est multiple.


Bonne journée.

23 mai 2011

Hollande versus Aubry.

Des camarades sont inquiets : et si la défection de DSK entraînait de terribles divisions au PS ? Il est certain qu'en l'absence d'un candidat quasi naturel, se détachant très largement du peloton, le risque d'affrontement augmente. N'est-ce pas une réalité très ordinaire en politique ? A vrai dire, je suis plutôt optimiste, pour trois raisons :

1- Avec DSK, nous aurions eu de toute façon une primaire entre deux candidats, lui et Hollande. Il n'y a donc pas à se soucier plus que de mesure si un duel se prépare, entre Aubry et Hollande cette fois.

2- A la différence des dernières présidentielles, la primaire impliquera les sympathisants. Ce sont eux, et pas les militants, qui décideront du choix. Le vote débouchera par conséquent sur une légitimité forte du gagnant, que personne ne pourra contester.

3- Entre Hollande et Aubry, le débat serait néfaste s'il opposait seulement des personnes. S'il est une confrontation de lignes politiques, il devient alors salutaire : d'un côté une option social-démocrate, réformiste, de l'autre une option plus traditionnelle, plus à gauche. C'est ce qui semble se dessiner, c'est ce qui donne tout son sens à cette saine concurrence.

Quant à ceux qui soutiennent que Martine serait la candidate légitime parce qu'elle est la première secrétaire, qu'on pourrait même se dispenser des primaires, ils font descendre la politique au degré zéro : être à la tête du PS ne donne pas droit automatiquement à un ticket pour la présidentielle. On peut être doué pour diriger un parti sans l'être nécessairement pour diriger un pays. C'est la ligne qu'on défend qui compte, pas la position, y compris suprême, à l'intérieur du PS.


A demain.

Le cauchemar de DSK.

Bonsoir à toutes et à tous,


DSK a envoyé aujourd'hui un courriel aux employés du FMI, avec cette phrase très claire, très forte, sans aucune ambiguïté : "Je nie dans les termes les plus forts possibles les accusations auxquelles je suis aujourd'hui confronté : je suis convaincu que la vérité sera révélée et que je serai innocenté". Après ça, qui peut encore refuser de croire et de soutenir DSK ? Qui peut encore prétendre qu'il plaidera coupable, alors que tous ses propos depuis le début du scandale affirment le contraire ?

En attendant, certains ont cru bon de s'offusquer de l'argent utilisé par son épouse Anne Sinclair pour le tirer de prison et préparer sa défense. Parce qu'un innocent n'aurait pas le droit d'utiliser tous les moyens à sa disposition pour prouver son innocence ? La famille Sinclair est riche, elle emploie sa fortune à sa guise, qu'y a-t-il de choquant là-dedans ? Voudrait-on que le couple ne fasse rien, consacre son argent à autre chose ? Que ne dirait alors t-on pas devant cette démission qui serait un quasi aveu de culpabilité ! Et si c'est l'existence de gens riches qui gêne, pas moi : je ne veux pas en ce monde moins de riches mais moins de pauvres, voilà mon socialisme.

Je veux terminer par une étrange théorie, entendue ici ou là : Strauss aurait commis un acte manqué, un suicide délibéré, c'est son inconscient qui aurait parlé, c'est-à-dire la pulsion non refoulée venant détruire ce projet auquel au fond de lui il se refusait, devenir président de la République. La vérité du corps aurait désavoué l'illusion de l'esprit. Je n'en crois évidemment pas un seul mot. Cette théorie extravagante prouve seulement que notre société se soumet de plus en plus à la psychologie, adopte ses thèses et ses catégories alors que la politique ne s'y reconnaît pas : DSK avait envie d'être candidat puis président, il s'apprêtait à faire campagne et à gagner ; un vrai "cauchemar", selon les termes de son courriel au FMI, l'en a empêché.


Bonne soirée.

22 mai 2011

Un week-end formidable.




Bonsoir à toutes et à tous,


La programmation culturelle à Saint-Quentin a été l'objet d'une polémique ces temps-ci. Samedi soir, en tout cas, un très bon spectacle était proposé au théâtre Jean-Vilar : Mai 1968 vu par un auteur trentenaire. Avec un parti pris original : nous conduire dans les coulisses en y installant une sorte d'exposition, avant de nous mettre non pas devant mais derrière la scène, la salle et ses magnifiques balcons apparaissant au fond, lentement, dans un savant jeu de lumières, au fur et à mesure du spectacle.

Parmi le public, quelques soixante-huitards saint-quentinois, un syndicaliste cégétiste, des éducateurs sociaux, une bibliothécaire, une infirmière communiste, un prêtre progressiste ... Tout ce qui reste de notre électorat de gauche, ai-je plaisanté avec ma voisine (en vignette 1, le cocktail, pas molotov).

En parlant de gauche : des féministes et des femmes de gauche ( pléonasme ?) ont manifesté aujourd'hui devant Beaubourg contre "le sexisme décomplexé" qui s'afficherait dans les médias à l'occasion de l'affaire DSK. Dénoncer le harcèlement que subissent les femmes, oui mille fois oui. Mais quel rapport avec DSK ? Encore aujourd'hui, son avocat a confirmé qu'il plaiderait non coupable, que son client clamait son innocence et que le procès déboucherait sur un acquittement.

Au nom de quoi irais-je contre ça ? Si DSK était ce que la rumeur dit de lui, il y a bien longtemps que plusieurs plaintes auraient été déposées, que de nombreux témoignages se seraient manifestés (en quarante ans de vie politique, Strauss a dû croiser pas mal de femmes !). Alors, pas de confusion, pas d'amalgame, pas de "on dit".

La droite, pour terminer : je ne sais qui m'a fait bénéficier d'un abonnement d'essai de quinze jours au Figaro. Merci à l'inconnu(e). Dans le numéro d'hier, il y avait un encart formidable (vignette 2). Regardez bien, lisez, méditez, appréciez : la joie du journal à constater que "l'ISF est maintenu !" (goûtez à sa juste valeur le point d'exclamation).

Et puis le conseil qui suit, immédiat, spontané, impératif : "Allégez-le sans attendre". La joie est si grande qu'elle est impatiente. Une photo vient illustrer ce grand bonheur : un homme jeune, polo vert tendre, à la barre d'un voilier. Comme si le bénéfice de l'ISF allégé était déjà investi ! Cerise sur le gâteau : la possibilité de gagner un week-end dans un Relais et Châteaux ! (et toujours l'exclamation). Les bourgeois sont formidables, Le Figaro aussi.


Bonne soirée formidable.

21 mai 2011

L'image d'un maire.

Bonjour à toutes et à tous,


Un maire se fait apprécier, devient populaire d'abord par ses réalisations mais aussi par son image. La personne compte autant que la politique. Quelle est l'image du nouveau maire de Saint-Quentin, Xavier Bertrand, après un peu plus de six mois de mandat ? Pas facile pour lui de succéder à la forte personnalité, haute en couleurs, de Pierre André.

D'abord, ce qui frappe, c'est sa présence, sa disponibilité pour sa ville. Ministre, il pourrait être lointain, absent. Non, il est là, comme avant. Il prend bien soin de ne pas jouer au ministre. C'est tout un art : ne pas montrer ce qu'on est. Pas trop besoin d'ailleurs : tout le monde sait. L'un des aphorismes préféré du maire : opposer le bureau au terrain, en privilégiant bien sûr le second. Et ça marche. Comme l'inauguration ce matin à 11h00 d'un distributeur automatique de billet, rue Jacques Blanchot, dans le quartier Neuville. Le concret, il n'y a que ça de vrai !

Ensuite, il y a le comportement du maire face à l'opposition, lors des séances du conseil municipal. Saignant ! A la façon de Pierre André, il ne laisse rien passer, attaque, renverse les rôles en questionnant les élus d'opposition, les somme de s'expliquer, les renvoyant à leur passé ou à leurs contradictions. Bref, le majoritaire agit comme un opposant ! Mais à la différence de Pierre André, il n'y a chez Xavier Bertrand aucune complicité dans l'adversité, aucune indulgence, aucune sympathie pour son opposition, souvent de l'ironie et parfois de la cruauté, jamais d'estime ou de reconnaissance. Conseiller municipal d'opposition, un métier de chien qui décourage les vocations ...

Enfin, et c'est sans doute le plus marquant, Xavier Bertrand a la manie du détail, se préoccupe des moindres petites choses, sur le modèle de Nicolas Sarkozy. En visite dans une résidence, il va jusqu'à tenter de régler le problème de douche de l'occupante. A la bibliothèque municipale, il fait remarquer que la verrière n'est pas très propre et que certaines peintures sont écaillées. Devant le lycée Henri-Martin, il contrôle le vendeur de glaces Martinez pour savoir s'il a une autorisation. Et, last but not least, de passage sur mon stand au Festival des associations, il me reproche, ministre de la Santé oblige, d'offrir des bonbons au lieu de mandarines.

Je crois que son image auprès des Saint-Quentinois va se jouer là-dessus : soit Xavier Bertrand sera apprécié comme un maire qui fait le job, efficace, utile et exigeant, soit il sera perçu comme un casse-bonbon qui se mêle de ce qui ne le regarde pas vraiment. Résultat dans trois ans, aux élections municipales. Mais comme la politique est aussi un combat d'images, tout dépendra de celui ou de celle que la gauche se choisira pour lui disputer la place de premier magistrat de la ville.


Bonne journée.

20 mai 2011

Après DSK, qui ?

Bonjour à toutes et à tous,


DSK ne sera pas candidat ni président, mais la vie continue. Reviendra-t-il en politique ? Peut-être, je le souhaite. Pour le moment, il doit penser à lui, à sa défense. Les strauss-kahniens sont-ils orphelins ? En quelque sorte oui. Les militants se reconnaissent dans une ligne incarnée nécessairement par un homme. Après DSK, qui pour représenter la social-démocratie ?

Martine Aubry ? Elle est social-démocrate de coeur et s'est alliée au dernier congrès avec les strauss-kahniens. Mais pour diriger le parti, pas pour briguer la présidence de la République. Sa proximité purement tactique avec l'aile gauche brouille un peu sa ligne politique.

Ségolène Royal ? Elle est moderniste mais pas vraiment social-démocrate. L'air frais qu'elle a fait entrer dans le parti a été utile, mais je ne la crois plus en situation de battre Nicolas Sarkozy. Ceci dit, aucun candidat ne pourra faire sans elle et ce qu'elle représente.

Pierre Moscovici ? C'est un social-démocrate de raison, depuis toujours. C'est pour moi le candidat intellectuellement parfait. Mais la politique ne se réduit hélas pas à l'intellect ni à la perfection. Pierre ne pourra guère s'imposer dans le parti.

Manuel Valls ? Je ne me reconnais pas dans l'aile gauche, je n'en rejoins pas pour autant l'aile droite. Manuel pose de bonnes questions, mais je n'adhère pas toujours à ses réponses.

Arnaud Montebourg ? Non, je ne comprends pas le sens de sa campagne, sinon qu'il veut constituer une aile gauche crédible et présentable, un peu comme au temps du NPS. Ça ne marchera pas.

Benoît Hamon ? Évidemment non, il est hostile à la social-démocratie.

François Hollande ? J'ai beaucoup de choses à lui reprocher, mais parmi les "grands" candidats (ceux qui ont une chance de gagner), c'est le plus proche de la social-démocratie. L'un dans l'autre, mon préféré c'est lui.

Laurent Fabius ? On l'a oublié, pas moi ... ni lui sûrement. Pendant vingt ans, il a incarné, en concurrence avec DSK, le socialisme moderne. Ce qui me gêne : il a été anti-rocardien virulent dans les années 70, mais surtout anti-Constitution européenne en 2005 (ce qui l'a perdu politiquement). Ceci dit, il faut choisir : de tous les candidats, il est celui qui a l'étoffe et l'expérience d'un homme d'Etat. Alors pourquoi pas lui ?


Bonne journée.

19 mai 2011

Le regard de l'innocent.

La journée a bien débuté, par cette lettre de DSK proclamant son innocence ; elle se termine également bien par l'annonce de sa libération sous caution. Entre temps, il a été, comme il fallait s'y attendre, inculpé. La période de la grande explication va donc commencer.

Je n'ai pas pu répondre à tous les commentaires qui m'ont été envoyés. Certains me demandent pourquoi je n'attends pas la décision de la justice, me reprochant mon empressement à soutenir DSK. Mais toute ma vie, et encore plus depuis que je fais de la politique, je déteste ceux qui attendent, à l'affût du vent pour savoir quelle position prendre. Non, je choisis, je m'engage, je n'attends pas, rien ni personne.

D'autres commentaires me demandent si le titre de ce blog, "L'Aisne avec DSK", va perdurer. Bien sûr que non : Strauss ne sera pas candidat, ni maintenant ni plus tard. Il serait donc ridicule de maintenir ce titre. Le blog s'arrêtera donc, après cinq ans de fonctionnement. Je ne sais pas exactement quand, mais je préviendrai.

En parcourant les photos de DSK prises par la presse ces derniers jours, je suis surpris de constater quelque chose que je n'avais pas perçu : sous la mine fatiguée percent des yeux très durs, un regard de colère et de détermination que je n'avais pas remarqué de prime abord. C'est le regard de l'innocent qui ne veut pas s'en laisser compter.


Bonne nuit,
à demain.

Des idées et des hommes.

Bonsoir à toutes et à tous,


La social-démocratie serait-elle atteinte en France d'une sorte de malédiction ? Ses figures emblématiques sont toutes confrontées à l'échec depuis 50 ans, DSK étant la quatrième à être écartée.

Tout a commencé avec Pierre Mendès-France dans les années 50, une alternative de gauche à la SFIO. Adversaire conséquent de la Vème République, PMF a toujours refusé de concourir à la présidentielle, argumentant que participer c'était consolider ces institutions monarchiques. Dans les années 60, François Mitterrand n'a pas eu ce genre de scrupule et s'est finalement imposé comme leader de son camp.

Dans les années 70-80, c'est Michel Rocard qui a été la victime social-démocrate. En respectant la légitimité du premier secrétaire du PS puis du président de la République, il s'est interdit toute possibilité d'accéder à la magistrature suprême. Dans le même temps, ses idées ont largement influencé la gauche et la politique gouvernementale. On peut même dire qu'à partir de 1983, le gouvernement a fait du Rocard sans Rocard.

Puis est venu le temps de Jacques Delors, dont la candidature s'est imposée en 1995, à laquelle il a finalement renoncé parce qu'aucune majorité ne se dessinait en sa faveur au sein du PS. Le choc là aussi a été grand. Delors était européen, économiste, un profil assez proche de DSK. Une nouvelle occasion manquée pour la social-démocratie. Et depuis dimanche, le coup qui a frappé DSK ...

De quoi dégoûter d'être social-démocrate ? Non, de quoi en être fier ... Car la social-démocratie a refusé tout opportunisme et n'a pas transigé sur les principes. Et puis, si ses hommes ont échoué, ses idées l'ont emporté. N'est-ce pas l'essentiel en politique ? Après tout, à Saint-Quentin, qui sait si les alliances avec l'extrême gauche ne seront pas désavouées plus tôt qu'on ne le croit, qui sait si une gauche réformiste ne finira pas par l'emporter ? Sans moi mais avec mes idées. Ce que l'opportunisme a fait, l'opportunisme peut le défaire. C'est très bien ainsi : seul compte le résultat, peu importe avec qui. Ce qui est dommage, c'est le temps perdu, les conflits inutiles et les relations brisées.


Bonne soirée.

Brisé mais debout.

Bonjour à toutes et à tous,


Quelques mots avant d'aller au travail : de sa prison de Rikers Island, DSK a envoyé une lettre, brève mais lumineuse. Il démissionne du FMI (comment faire autrement ?) et il clame son innocence, rejetant toutes les accusations portées contre lui. "Je veux consacrer toute ma force, tout mon temps et toute mon énergie à prouver mon innocence", écrit-il. Son destin présidentiel est brisé mais l'homme est debout et va se battre. Et nous avec lui. S'il mentait, cette lettre le condamnerait lourdement devant la justice américaine. C'est la preuve morale de son innocence.


Bonne journée,
à plus tard.

18 mai 2011

La culture, populaire ou pas ?



Bonsoir à toutes et à tous,


Depuis quinze jours, il est beaucoup question de la culture à Saint-Quentin, à travers des évènements très différents mais qui ont plus ou moins ce point commun : départ de Jean-Pierre Roux, directeur de la culture ; délégation de service public accordée à Sport Évènements, chargé également de grosses manifestations culturelles, et contestée par l'opposition ; non réouverture de la salle de théâtre La Manufacture. Mais surtout, critique par le maire Xavier Bertrand de la programmation culturelle et esquisse d'une nouvelle politique en la matière, baptisée "culture populaire".

Pour le moment, les seules réactions, négatives, sont venues du MoDem. Que faut-il penser de ce changement dans la politique culturelle saint-quentinoise, qui devrait éminemment intéresser la gauche puisque celle-ci a toujours fait de ce thème un sujet de prédilection ? Je crois d'abord qu'il ne faut pas tout mélanger : il y a d'un côté la culture, qui représente une forme d'exigence, et de l'autre le divertissement, le loisir, qui est une pure distraction. Une ville a besoin de l'une et de l'autre, qu'on ne saurait cependant confondre.

Ensuite, je trouve injustes et excessives les critiques de Xavier Bertrand envers le fonctionnement de la bibliothèque municipale. Bien sûr, il y a des progrès à faire, une modernisation nécessaire, une ouverture plus grande sur l'extérieur, des conditions matérielles meilleures. Mais justement, avec la nouvelle directrice, une évolution est en cours : je remarque tout de même que des animations depuis plus d'un an ont été mises en place et ne marchent pas si mal que ça. Nous sommes tous d'accord qu'une bibliothèque ne peut plus se contenter d'être un centre de prêt mais que son ambition, son rayonnement, ses missions doivent être beaucoup plus larges. La transformation est lancée, encourageons-là !

Enfin, il y a ce concept de "culture populaire" que le maire met en avant. Moi qui suis un militant de l' "éducation populaire", je ne peux qu'être d'accord avec l'objectif. En tant qu'homme de gauche, je n'imagine pas un seul instant que la culture puisse être élitiste, accessible seulement à une minorité déjà cultivée. Maintenant, il faut nous entendre avec Xavier Bertrand sur ce qu'il appelle "culture populaire". Là, je ne suis pas sûr que nous soyons complètement d'accord. Mais le débat me semble légitime. La gauche en tout cas doit s'en saisir, sans parti pris, sans sectarisme, en puisant dans sa sensibilité, son histoire et ses réseaux de quoi intervenir et de quoi proposer. Car quoi qu'on pense, la culture c'est important !


Bonne soirée.


En vignette, ce samedi, un événement qu'on peut qualifier de culturel, le festival des associations à Saint-Quentin, visité par monsieur le maire. "Vous allez vous compromettre", m'a-t-il dit quand nous avons été pris en photo ensemble devant mon stand. Non, je suis un homme libre et ouvert, définitivement socialiste, et ne craignant nullement de figurer auprès de Xavier Bertrand.

Séducteur ou prédateur ?

Bonjour à toutes et à tous,


L'intérêt pour le sort de DSK ne faiblit pas, trois jours après son arrestation, puisque vous avez été hier encore 4 593 visiteurs sur ce blog. Mais le débat, depuis quelques heures, semble se déplacer vers la psychologie de DSK, avec cette question : séducteur ou prédateur ? D'abord, ce n'est pas la même chose, c'est même l'opposé : le prédateur est celui qui, faute de séduire, agresse. Strauss ne peut donc pas être les deux à la fois, et l'on ne passe pas par degrés d'un état à l'autre, tellement ils sont chacun de nature différente.

Le fort intérieur d'un homme, nul ne le connaît, y compris souvent ses proches. Il reste donc les témoignages extérieurs, qui ont cependant leur valeur : séducteur ou prédateur, ces comportements tout de même se remarquent. L'être humain échappe difficilement au regard qui se porte sur lui, d'autant lorsqu'il s'agit d'un homme public qui rencontre beaucoup de monde et est énormément observé. Pour ce que j'en sais, pour ce que j'ai vu, pour ce qu'on m'en a dit, DSK est sans doute un séducteur, comme un certain nombre d'hommes ... et de femmes, il n'est aucunement un prédateur.

Les attitudes, paroles, gestes en groupe ne trompent pas. J'ai entendu et regardé DSK, au milieu d'hommes et de femmes, jamais je n'ai entendu et vu un prédateur devant moi. Au contraire ! En politique, les coqs de basse-cour sont fréquents, on les repère facilement : ils ont besoin de gens autour d'eux auxquels montrer leurs plumes, faire cocorico, parler fort et amuser la galerie. Strauss n'est pas dans cette vulgarité. Je n'ai pas senti en lui le besoin de se mettre en avant, de frimer, de dominer.

Son intelligence je crois lui suffit, son charme vient de cette aisance intellectuelle, il n'a pas besoin d'en rajouter. Aucun désir chez lui de rabaisser son interlocuteur, et un sens très fort du travail d'équipe. C'est son côté sympa et même une forme de timidité qui m'ont marqué. Il ne se prend pas la grosse tête, il n'est pas non plus dévoré d'ambition (d'où le dilettantisme que certains ont pu lui reprocher).

DSK est totalement étranger au tempérament autoritaire et paranoïaque que j'ai pu en revanche déceler chez certains camarades (la politique quelquefois rend doucement fou ...) Mes remarques psychologiques ont bien sûr leur fragilité, je ne suis pas un spécialiste des méandres de l'âme humaine. Je ne suis pas non plus un strauss-kahnien aveugle et idolâtre, je ne fais que témoigner d'un vécu, que j'essaie d'objectivement restituer.

Or, je suis atterré et même scandalisé par certains journalistes qui affirment que "tout le monde savait". C'est qui "tout le monde" ? En général, on emploie cette expression pour se désigner soi-même en évitant d'assumer la responsabilité de ce qu'on dit. Et "savait" quoi ? Lundi soir, Daniel Schneiderman, dans l'émission de Taddéï, a exhibé des preuves, et quelles preuves ! Trois courriels envoyés par Strauss à une dame ! Si c'est ça qu'on appelle harcèlement, lourdeur et agressivité sexuelle, je crains que les prédateurs soient des millions ...

Et puis, si "tout le monde savait", pourquoi personne n'a rien dit ? Bizarre bizarre, non ? Le comportement de DSK envers les femmes n'était frappé d'aucune omerta, d'aucun devoir de réserve. Rien à voir avec la fille de Mitterrand, dont on comprend fort bien que la presse et ses proches aient voulu protéger.

DSK demandait si peu de protection qu'il évoquait lui-même, ouvertement, son penchant pour les femmes, ce que nul encore une fois ne peut lui reprocher, ce qui n'en fait absolument pas un prédateur. Pourquoi aucune plainte, en quarante ans, n'a été déposée contre lui ? Si DSK était le monstre, le pervers, l'agresseur que certains décrivent, ne croyez-vous pas que la chose aurait déjà, en un tel laps de temps, été prouvée, d'une manière ou d'une autre ? Ou alors expliquez-moi en quoi je me trompe ...

La scène fondatrice du scandale, l'homme nu sortant de sa douche et se jetant immédiatement sur une femme de ménage entrée sans savoir qu'il était là, est hautement improbable telle qu'elle est racontée là. Je sais bien que la vérité paraît parfois invraisemblable, mais nous sommes tout de même, avec cette histoire, dans un porno de bas étage, un récit qui est plus de l'ordre du fantasme que du réel. N'oublions pas que le chef d'accusation est une tentative de fellation forcée, après poursuite, séquestration et violence.


Bonne journée.

17 mai 2011

Non coupable.

Bonsoir à toutes et à tous,


Le choix de DSK de plaider non coupable a manifestement une dimension politique, au sens premier du terme. C'est du moins ainsi que je l'interprète, car on ne peut pas connaître les intentions secrètes d'un homme plongé au milieu d'une telle tourmente, sans doute conseillé par ses avocats mais aussi en proie avec lui-même, sommé de faire des choix intérieurs dans la solitude d'un commissariat de Harlem.

En optant pour cette stratégie de défense, Strauss s'engage dans la voie la plus difficile pour lui, la plus longue aussi. Son strict intérêt personnel aurait été de plaider coupable, avec une procédure alors plus courte, des possibilités d'arrangement et de dédommagement financier auprès de la plaignante. Et puis, la culture puritaine apprécie qu'un accusé admette sa culpabilité même quand elle n'est pas avérée, tant il est vrai qu'elle croit que tout homme a quelque chose à se reprocher, de véniel ou de grave.

En plaidant non coupable, DSK s'oblige à prouver sa bonne foi et à retourner l'accusation contre la plaignante. C'est un affrontement qui s'annonce. Si DSK ment, il prend un risque énorme, que ses meilleurs avocats ne pourront guère atténuer : la justice américaine s'accommode plus ou moins d'un aveu de culpabilité mais elle est intraitable avec le mensonge, surtout quand celui-ci couvre un crime sexuel. Il faut que Strauss soit sûr de son fait pour avoir adopté cette ligne-là.

La présomption d'innocence n'est pas qu'un principe de justice, c'est en l'espèce une intuition intime : un homme ayant violé ou tenté de violer ne prendrait pas ce risque-là, sachant qu'il se condamne ainsi à de nombreuses années de détention à l'issue du procès, beaucoup plus qu'en reconnaissant sa culpabilité. La non culpabilité ne fait pas l'innocence mais dans les circonstances elle la présume fort.

La dimension politique, c'est que DSK a pensé, me semble-t-il, au destin qui était le sien, qu'il n'a pas voulu complètement briser, dont il a voulu sauver l'image, en garder intact le souvenir. S'admettre coupable, c'était en finir volontairement avec le chemin vers l'Elysée, c'était se disqualifier pour toujours aux yeux des français. Non coupable, c'est espérer être totalement blanchi, retrouver son honneur, même si l'élection présidentielle de 2 012, sauf coup de théâtre, est barrée pour lui, d'autant que le Parti socialiste a maintenu aujourd'hui le calendrier des primaires, avec déclaration de candidature avant la mi-juillet.

C'est peut-être cette intention politique que nous retiendrons de lui, à moins que la révélation du crime n'en fasse le pervers et le salaud qu'une certaine presse internationale nous décrit. A l'heure qu'il est, c'est un homme qui se bat pour prouver son innocence. Et dans quelques jours, tout au plus quelques semaines, ce sera un homme abandonné par beaucoup, soutenu par quelques prestigieux juristes et d'indéfectibles amis, seul et oublié des médias dans le pénitencier de Rikers Island.

Un homme, même riche, puissant et libertin, possible président de la République, mérite d'être défendu, car tout homme accusé et qui se prétend innocent mérite d'être défendu. Et si la vérité devait lui donner tort et la justice lourdement le condamner, nous aurions eu raison, nous ses amis politiques, dans l'ignorance des faits, d'assurer sa défense, tout en se pliant alors au verdict et en en tirant toutes les conséquences. Si l'homme n'était pas politique et si la situation ne l'était pas non plus, il conviendrait de se taire, de laisser une affaire privée entre les seules mains de la justice, sans en rajouter. Mais ce n'est à l'évidence pas le cas. Il faut donc écrire, parler et attendre.


Bonne soirée.

Jusqu'au bout.


De ces images qui défilent depuis plusieurs heures, montrant un DSK défait, pas rasé, au regard absent, le strauss-kahnien que je suis ne peut qu'être le premier stupéfait. Pour l'avoir rencontré dans de nombreuses réunions de courant, pour avoir discuté avec lui, pour l'avoir accueilli à Saint-Quentin (en vignette, au bar de l'Europe, en 2 004, lors des élections cantonales), le contraste est frappant, douloureux : ce visage ouvert, ces yeux vifs, cette maîtrise de soi, cette séduction naturelle, cet homme d'un charisme simple, ne se comportant jamais avec nous en "patron", ne forçant rien, cette intelligence qui était son argument principal, cette décontraction qui lui faisait prendre de la distance envers lui-même et la politique, tout cela s'est-il effondré, tout cela a-t-il disparu, ne laissant plus voir qu'un accusé avachi, fatigué, aux abois ?

Strauss-Kahn peut politiquement être disqualifié, le strauss-kahnisme, cette version moderne et française de la social-démocratie, ne disparaîtra pas. Elle se réincarnera autrement mais continuera à vivre. Mendès-France a laissé la place à Rocard, celui-ci à Jospin et ce dernier à DSK. Une ligne politique ne meurt pas, le réformisme pas plus qu'une autre.

Nul ne sait ce qui se passera dans les prochaines heures et les prochains jours. Mon soutien à DSK n'est pas affectif (je ne suis pas sentimental), encore moins intéressé (je n'ai jamais fait de la politique pour ça). Je n'éprouve pas non plus de solidarité clanique ou des connivences de table. Mais la fidélité politique n'est pas pour moi un vain mot. C'est une cohérence et une forme de respect envers soi-même. Je ne fais pas partie des voltigeurs qui passent d'un leader à un autre, d'un candidat à un autre, au gré de leurs petits intérêts et des opportunités.

S'il était prouvé que DSK a voulu abuser d'une personne, je le condamnerais fermement, n'étant pas dans mes principes politiques et moraux de tolérer ce genre d'attitude. Je fermerais ce blog et la vie continuera sans lui et sans moi. En attendant, il faut se battre jusqu'au bout. Et au bout du bout, il y a la vérité, celle à laquelle personne jamais n'échappe.


Bon après-midi.


PS : j'ai fait le choix de publier sur ce blog tous les commentaires concernant DSK, y compris les plus critiques, car c'est le prix de la démocratie et du débat public (étant donné qu'il ne s'agit pas d'une affaire privée). Je me suis contenté de censurer les messages orduriers, comme il est bien normal.

Rien que la vérité.

Bonjour à toutes et à tous,


DSK est donc en prison. Il y a deux jours, on parlait d'une peine possible de 20 ans ; nous sommes passés, dans les médias, à plus de 70 ans ! Cet écart est révélateur du drame que nous vivons en direct : ignorance, surenchère, hypothèse, spectacle. Mais où est la vérité là-dedans ?

Pour le moment, l'opinion française est du côté de Strauss. Elle n'aime pas qu'on charge ainsi un homme, quel qu'il soit et quelle que soit la vérité, que lui seul connaît à l'heure qu'il est. Elle se refuse à cette mise à mort politique à travers les médias. Et puis, il y a sans doute une part d'orgueil national, bien légitime, dans ce soutien : la vision d'un français broyé par la machine judiciaire américaine.

Mais je connais trop la versatilité de l'opinion pour ne pas prendre les devants. Le retournement peut être rapide si on n'y prend garde. Déjà, quelques prémices apparaissent dans les conversations, qu'il faut immédiatement écarter :

1- La victime : on en ferait trop pour DSK, il faudrait aussi songer à elle, la femme de ménage mériterait autant sinon plus de compassion que le puissant directeur du FMI.

L'argument est fallacieux. Nous ne sommes pas en quête de compassion mais de vérité. Ce n'est pas de morale dont il est question mais de justice. Il y a une plaignante qui accable un homme d'un crime, l'un des pires qui soit, il y a un accusé qui rejette en bloc et se déclare innocent. C'est à l'accusatrice d'apporter des preuves, c'est à l'accusé de bénéficier de la présomption d'innocence. J'ai entendu parler d'une "présomption de victime" : cette notion est une aberration, un non sens juridique.

2- L'égalité : DSK, depuis quarante huit heures, ne ferait que subir le sort commun de tous ceux qui se trouvent en pareille situation. S'en plaindre, ce serait vouloir un traitement de faveur, un privilège pour un puissant de ce monde.

Non, puisque c'est le contraire qui se déroule sous nos yeux effarés : un homme présumé innocent est exhibé comme coupable, le procès semble mené en direct et le verdict déjà tombé. Si DSK était innocent, le mal serait fait, cet homme aurait été livré en pâture à l'opinion internationale, son honneur brisé. Qui ne voit pas que l'injustice est là, flagrante ? L'argent et le pouvoir de DSK ne changent rien du tout. Un petit voyou, dans les mêmes conditions, ne subirait pas une telle opprobre. Dans ce à quoi nous assistons, il y a sans doute égalité formelle mais pas égalité réelle.

3- La réputation : il se dit qu'on savait, que DSK était un homme à femmes, entreprenant jusqu'au harcèlement. Ceci confirme donc cela.

C'est sans doute l'argument (si on peut employer ce terme !) le plus répugnant. Une accusation qui repose sur la réputation est détestable. Le sexe donne lieu aux pires ragots, que colportent généralement ceux qui ne savent pas, n'ont rien à dire et projettent leurs propres fantasmes dans leurs racontars (nous connaissons tous dans notre entourage des personnes qui ont cette manie, je dirais même cette maladie). DSK aime les femmes et mène une vie libre : c'est précisément ce genre de psychologie qu'on ne retrouve pas chez les agresseurs et les violeurs.

Quant aux soupçons de partouzes dont il a fait l'objet (en rappelant tout de même que cette pratique ne figure pas dans la liste des crimes !), elle est le lot de certains hommes politiques qu'on veut atteindre sans avoir rien d'autres à leur reprocher (les Pompidou ont aussi subi ça). Calomniez calomniez, il en restera toujours quelque chose : voilà la tactique adoptée quand une élection présidentielle se joue souvent à très peu de voix. Sauf que jusqu'à présent, les paroles sont abondantes mais les preuves inexistantes, alors que la moindre image dans notre monde hyper-médiatisé fait très vite le tour du monde. Preuve qu'il n'y a aucune preuve.


Bonne journée,
à plus tard.

Nouveau record.

Nouveau record de consultation du blog ce lundi 16 mai : 6 054 visites et 5 872 visiteurs uniques.

16 mai 2011

Soissons sans DSK.






Bonsoir à toutes et à tous,


Réunion publique du Parti socialiste ce soir à Soissons, en présence de Michel Sapin, ouverte à toute la gauche. Des enseignants du lycée Gérard de Nerval ont commencé par informer de leurs luttes et revendications (vignette 1, de gauche à droite Jean-Michel Wattier, Michel Sapin, Jean-Jacques Thomas et Patrick Day).

Jean-Jacques Thomas, au début de son intervention, a fait une allusion, sans le citer, à DSK, en appelant avec beaucoup de tact à l'unité des socialistes (vignette 2). Michel Sapin a présenté les grandes lignes du projet socialiste (vignette 3). L'assistance était nombreuse (vignette 4). On remarquait la présence des deux députés socialistes, Jean-Pierre Balligand et René Dosière, ainsi que plusieurs conseillers généraux et élus.

Au moment du pot, j'ai apprécié que DSK ne soit pas au centre des conversations. Et quand certains l'ont évoqué, c'était avec décence, sans insister. Les anti (il y en a quand même au PS !) ne se sont pas manifestés. De retour, j'ai appris que Strauss était maintenu en détention provisoire et que la justice américaine n'avait rien lâché. Nous en saurons sans doute plus demain.


Bonne nuit.

Soutenir Strauss.

Quoi penser à la mi-journée, à propos de l'affaire DSK ? Et quoi faire ? C'est très simple : quand on est strauss-kahnien, on défend Strauss-Kahn. Et quand on est socialiste, on défend un socialiste accusé, quel qu'il soit et où qu'il se trouve. C'est pourquoi Jean-Marc Ayrault a eu tort d'affirmer que le Parti socialiste n'était pas concerné. Pour le moment, l'événement n'est pas privé mais politique, et il faut le traiter comme tel.

Mais la victime ? Quelle victime ? A ce stade, c'est parole contre parole. D'un côté une plaignante que je ne connais pas et dont nous savons peu de choses, de l'autre un accusé qui ne se reconnaît pas coupable et que je soutiens. Les faits qui lui sont reprochés ne ressemblent pas à l'homme qu'il est, hormis les propos de caniveau, qui n'ont jamais fait partie de mes conversations ni de ma culture politique (histoire de cul et "qui couche avec qui ?" je ne mange pas de ce pain-là).

DSK n'a pas parlé, l'enquête n'est pas terminée, la justice ne s'est pas prononcée et l'on pourrait croire que la messe est dite. Non, tout ne fait que commencer, la riposte doit s'organiser et c'est la vérité qui doit nous guider, au milieu d'une histoire pleine de contradictions et d'invraisemblances, qu'il faut absolument lever. La carrière politique de DSK n'est pas finie, la présidentielle reste l'objectif. Une nouvelle stupéfiante peut être effacée par une autre nouvelle stupéfiante.

Les primaires ? Elles ne sont pas pour maintenant mais pour la rentrée. Les dates de candidature pourront être repoussées, s'il est prouvé que Strauss est tombé dans un traquenard. Nous serons bientôt avisés. Il ne faut pas céder à l'événement ou se laisser impressionner par les images. Des preuves, voilà ce que nous attendons. Et que justice soit rendue.


Bon après-midi.

Deux chocs.

Bonjour à toutes et à tous,


En me levant il y a quinze minutes, j'ai découvert comme vous tous cette photo sur nos écrans : DSK sortant du commissariat de Harlem, encadré par deux policiers, menotté dans le dos, emmené on ne sait où. Premier choc.

En consultant les statistiques de fréquentation de ce blog, je constate que j'ai eu hier dimanche 3 068 visites et 2 923 visiteurs uniques. Deuxième choc : du jamais vu, un record absolu depuis la création de "L'Aisne avec DSK" en septembre 2 006 !


Bonne journée,
à plus tard.

15 mai 2011

Stupéfaction et incrédulité.

Bonsoir à toutes et à tous,


Stupéfaction et incrédulité : c'est ce que je retiens des réactions entendues autour de moi, à l'issue de cette incroyable journée. DSK est-il fini ? me demande-t-on. Non, ce qui commence maintenant, ce que tout le monde attend, c'est la justice et la vérité. Car beaucoup de questions se posent :

DSK se savait surveillé, son épicurisme s'accordant mal à son destin présidentiel. Il se doutait que le moindre faux pas serait surmédiatisé. La ridicule affaire de la Porsche l'attestait. Comment donc aurait-il pu se laisser aller à une agression du type qu'on lui prête ? S'il voulait se suicider politiquement, il ne ferait pas mieux ... ou plutôt pire.

Or, il est à peu près certain que Strauss était sur le point de déclarer sa candidature, probablement le mois prochain. Dans ces conditions, quelque chose ne colle pas dans ce qui s'est passé hier à Manhattan. La description même des faits paraît invraisemblable. La thèse de la pulsion subite ne tient pas. D'autres hommes politiques, Mitterrand et Chirac, ont eu des vies sentimentales tumultueuses. Le pouvoir est un aphrodisiaque et une machine à fantasmes. Tout cela, quoi qu'on en pense moralement, ne conduit pas au crime, à la tentative de viol.

DSK a sans doute des défauts, mais il n'est pas fou ni idiot. On le voyait à l'Elysée, et c'est maintenant de vingt ans de prison dont on parle. C'est tout de même énorme ! Strauss est-il tombé dans un piège ? A-t-il été victime d'une personne fantasque ? A l'heure qu'il est, nous en sommes réduits à ce genre d'hypothèses. Dans l'idéal, il faudrait ne rien dire, attendre les résultats de l'enquête et le verdict de la justice. Mais nous savons que c'est impossible : les gens causent, s'interrogent, les médias s'emballent, il faut répondre, c'est ainsi.

Dans l'ensemble, la classe politique française s'est comportée de façon exemplaire, dans la retenue et la décence, mettant en avant le principe républicain de la présomption d'innocence. A l'exception de la représentante de l'extrême droite, mais c'est normal : elle ne fait pas partie de la République, ses réactions appartiennent à un autre univers.

Enfin, le communiqué d'Anne Sinclair est décisif : elle croit en l'innocence de son mari, et tous les strauss-kahniens, ce soir interloqués, sont sur cette ligne-là. Nous savons que la politique est un combat, que tous les coups sont souvent hélas permis, qu'il faut tuer l'adversaire et même le partenaire : Strauss était dans la fenêtre de tir, la ligne de mire. A qui profite le crime ? Nous en saurons plus dans les prochaines heures.


Bonne soirée.

Où j'en suis.

Dans les allées du Festival des associations, ce matin, on ne m'a bien sûr parlé que de ça. Le sentiment le plus répandu était la consternation. La plupart de mes interlocuteurs, y compris de droite, se sont manifestés à moi avec décence et même tristesse. A l'exception, rare, de quelques sourires, regards et propos graveleux de ceux ou celles trop heureux de voir un rival ainsi atteint dans son image. Je les retiens.

Ça commence comme un mauvais roman et ça se transforme en cauchemar politique. Une chambre à Manhattan, une femme de ménage, quelques minutes dont on ne sait encore rien mais où un destin vacille, une arrestation dans un avion qui s'apprêtait à partir pour Paris, une nuit dans un commissariat à Harlem, une inculpation grave et un homme qui nie tout.

L'hypothèse du complot ? Quelques Saint-Quentinois m'en font part. Généralement, les complots n'existent que dans les têtes qui les imaginent. Mais rien n'est à exclure en politique, et tout est possible. Il est évident que DSK est l'homme à abattre. Intellectuellement maître de lui, a-t-il cédé à ses pulsions ? La nature humaine révèle parfois de terribles surprises.

Le rapprochement avec ses aventures extra-conjugales n'a aucune pertinence à mes yeux : une vie libre n'implique pas un comportement agressif. Un séducteur n'est pas un violeur. La vérité est peut-être dans la zone grise des relations humaines, l'ambiguïté des mots et des gestes, l'incertitude entre le consentement et le refus. Quand les fantasmes s'en mêlent, que reste-t-il de la vérité ?

Quoi qu'il en soit, je reste strauss-kahnien et ami politique de Strauss-Kahn, bien persuadé que cet homme d'une envergure exceptionnelle est en capacité d'incarner une gauche moderne, une social-démocratie à la française, et de battre Nicolas Sarkozy l'an prochain. Voilà où j'en suis à l'heure qu'il est.

Trois choses à vous dire.

Bonjour à toutes et à tous,


J'ai trois choses à vous dire, avant de rejoindre le Festival des associations de Saint-Quentin :

1- Un homme coupable d'agression sexuelle ne peut pas prétendre à la présidence de la République.

2- L'esprit de justice exige le respect absolu de la présomption d'innocence.

3- La politique est pleine de choses incompréhensibles, la nature humaine aussi.


Je vous souhaite un bon dimanche.

14 mai 2011

Communistes et antisocialistes.



Je crois qu'il va falloir que nous ayons une franche explication avec nos camarades communistes de Saint-Quentin. Cette clarification, je la demande depuis longtemps. En politique, l'ambiguïté est peut-être une tactique personnelle, elle ne peut pas être une stratégie collective gagnante. De quoi s'agit-il ? Du blog de nos camarades, que je lis, qui est très bien fait, régulièrement mis à jour mais ... antisocialiste.

Convenez que pour un socialiste comme moi, c'est embêtant. Certes, je reconnais que ce blog n'est pas que cela, qu'il réserve l'essentiel de ses attaques à la droite. Mais il est aussi, très clairement, antisocialiste. Or, je n'aime pas des alliés qui me marchent sur les pieds en même temps qu'ils me serrent la main.

Ce qui me fait aujourd'hui vivement réagir, ce sont deux récents billets. Le premier, non signé, est daté du 12 mai ; il porte sur le trentième anniversaire de la victoire de François Mitterrand, et c'est stupéfiant. Jugez-en plutôt par cette phrase (soulignée par son auteur !) : "1981 marque pour le pays le début d'une régression politique, économique et sociale sans précédent depuis 1945".

Oui vous avez bien lu, vous pouvez relire et soupeser chaque mot : c'est tout simplement scandaleux. Qu'un adversaire politique l'écrive, je ne m'en offusquerais pas, c'est une opinion, c'est le jeu. Mais venant d'un partenaire et allié, non ce n'est pas acceptable. Et il y a pire : "Il est presque comique d'entendre l'ancien décoré de la francisque pétainiste entonner un refrain anticapitaliste au Congrès du PS d'Epinay en 1971". Même l'UMP n'oserait pas tenir de tels propos.

Le second billet remonte au 9 mai, signé Corinne Bécourt, à propos de Laurent Waucquier et de sa critique du RSA. J'aurais presque pu être d'accord avec Corinne, si je n'étais pas tombé sur cette phrase : "Avec stupéfaction, j'ai appris que le Conseil général de l'Aisne, avec sa majorité de gauche, a adopté un document sur le RSA allant exactement dans le sens des propos de Monsieur Waucquier". La stupéfaction est pour moi : je ne vois pas à quel document Corinne fait allusion. Mais ce que je sais, c'est qu'aucun socialiste, y compris au Conseil général de l'Aisne, ne se reconnaît dans les affirmations de Waucquier.

On peut être communiste et antisocialiste, chacun est libre de ses opinions. Je connais des socialistes qui sont anticommunistes (ce n'est pas mon cas). Mais on ne peut pas alors souhaiter s'allier avec ceux que fondamentalement on critique. Le PCF de Saint-Quentin condamne le rapprochement avec le PS (et même avec Mélenchon !) au niveau national et il le pratique au niveau local : je veux savoir pourquoi, je demande des explications. Car je n'accepte pas cette ambiguïté. Et si je n'étais pas là, sur ce blog, pour la souligner et la dénoncer, qui le ferait ?

Par bonheur, il existe des communistes qui ne sont pas antisocialistes, comme il existe des socialistes qui ne sont pas anticommunistes. Lisez donc le numéro spécial de L'Humanité sur le 10 mai 1981 (voir vignette 1) : l'événement est décrit comme une espérance, pas comme une régression.

Assistanat, cancer et caetera.

Bonsoir à toutes et à tous,


Le débat de cette semaine sur l'assistanat est particulièrement répugnant, pour plusieurs raisons :

L'assistanat, c'est quoi ? Le mot est répété en boucle, avec du dégoût plein la bouche ; on finit par le détester comme on salive, sans y réfléchir. Et pourtant, le mot d'assistance est beau et nécessaire à la vie en société : aider, secourir, protéger les plus pauvres. Autrefois, on appelait ça la charité, un très beau terme aussi, devenu également péjoratif.

C'est que les pauvres, on ne les supporte plus, dans une société devenue riche. Qui d'ailleurs ose prononcer le mot de "pauvre" ? Jadis, la pauvreté était généralisée, on n'y faisait pas attention. Aujourd'hui, les pauvres irritent ; on va jusqu'à les soupçonner de n'être pas vraiment pauvres mais fainéants, fraudeurs, profiteurs. La gauche doit tenir bon là dessus : de même qu'elle doit privilégier les classes populaires (voir billet du 12 mai), elle doit défendre les pauvres. Sinon ce n'est plus la gauche.

Et puis, au dessus des principes, il y a la vérité, que Roseline Bachelot a courageusement rappelé : un allocataire du RSA ne gagnera jamais autant ou plus qu'un smicard. Affirmer le contraire, c'est du pur mensonge ou du fantasme. Les minima sociaux ne garantissent pas une vie comparable à quelqu'un qui gagne le smic. Celui-ci vit modestement mais vit ; l'allocataire, lui, vit chichement, il survit. Disposer d'un salaire, même très bas, ouvre droit à des possibilités de crédit, d'emprunt, d'épargne, sans compter le bénéfice psychologique du travail, que ne connaîtra jamais celui qui doit se contenter d'allocations. Un boulot stable, une activité reconnue quoique mal payée, le rmiste ne demande pas mieux.

Quant à vouloir conditionner le RSA à un service à la collectivité, c'est une hérésie, une négation du droit : celui-ci est un bénéfice sous condition de situation, pas en échange d'un travail. Un droit social n'est corrélé à aucun devoir, il se justifie en soi, n'exige pas de contrepartie. Le devoir appartient à la morale, le droit à la loi : en République, on ne confond pas les deux. On a droit ou pas au RSA, point final. Mais aucune charge ne doit s'ensuivre.

Enfin, je suis horripilé par l'emploi du mot "cancer", autant que je le suis par celui d' "assistanat". Quand les deux sont associés, j'explose, et une partie de la droite a bien compris le scandale ! Ce rapprochement avec une maladie douloureuse et mortelle est du plus mauvais goût. De même l'utilisation désormais fréquente du terme "autiste" pour qualifier la classe politique. Les hommes publics, qui devraient avoir la maîtrise de leurs paroles, se rendent-ils compte du mal qu'ils font, à des milliers de personnes, en faisant de réalités douloureuses des métaphores polémiques ?


Bonne soirée.

Train de vie.

Bonjour à toutes et à tous,


La presse quotidienne et hebdomadaire revient sur le train de vie de DSK, pointant ce qui lui semble être une image négative. Strauss-kahnien, je pourrais m'en indigner, supputant de basses attaques comme on en voit fréquemment en politique. Je ne jouerais pas de cet air-là. En démocratie, l'homme public doit répondre avec le sourire aux reproches qui lui sont faits, même quand ils sont infondés et manifestement orientés. C'est la rationalité qui doit prévaloir, pas le sentiment d'indignation, trop facile à pratiquer. Je soumets à votre réflexion huit arguments :

1- Le train de vie de DSK est conforme à son rang. N'importe qui à ce niveau de pouvoir vit ainsi. On peut si on veut le déplorer mais le monde est ainsi fait, et accabler spécifiquement Strauss-Kahn est d'une injustice flagrante. Ce train de vie n'a rien d'exceptionnel au regard de ses pairs. Vouloir que les puissants mènent une existence plus modeste est une idée éventuellement intéressante, mais qu'on l'applique à tous et qu'on en donne une définition précise, pas qu'on se focalise sur Strauss et son épouse.

2- Son épouse justement, Anne Sinclair : par son grand-père, marchand d'art, elle a acquis une fortune. Ce qui ne l'a pas dissuadé de travailler, de se faire un nom dans le journalisme télévisé et d'être une femme de gauche active et engagée. Faut-il juger les hommes publics par leur situation familiale, leur reprocher leur filiation, leur mariage et leur fortune ? Je pense que non. D'autant que la famille dont nous parlons ne s'est pas indûment enrichie, que ses membres et leurs activités sont parfaitement respectables.

3- Malgré tout, un homme de gauche menant une vie très aisée ne décourage-t-il pas les classes populaires à voter pour lui ? Question typiquement petite-bourgeoise, ignorant tout de la culture de la classe ouvrière. Jean-Marie Le Pen et Bernard Tapie sont tous les deux des milliardaires, avec villa et hôtel particulier, de fortunes acquises dans des conditions fortement contestables, surtout en ce qui concerne l'ex-chef du Front national. Est-ce que cette réalité connue de tous a jamais freiné le vote ouvrier en leur faveur ? Nullement, hélas. L'affaire est donc réglée.

4- En républicain que je suis, je rappelle tout de même qu'un homme politique, comme n'importe quel autre citoyen, ne se juge pas sur ses origines, son rang social ou ses moeurs mais seulement sur ses idées. Tous autres critères ne sont pas conformes à l'esprit et à la lettre démocratiques.

5- En socialiste que je suis, je constate que nos grands leaders, Jaurès, Blum et Mitterrand, ne venaient pas du milieu ouvrier mais bourgeois. Ce qui ne les a pas privés d'être des socialistes irréprochables. Nul d'ailleurs, à l'époque, ne leur reprochait, du moins à gauche, leur extraction sociale ou leur train de vie.

6- La dénonciation des "gros", des "riches" est un mythe d'extrême droite, à tonalité antisémite, apparu à la fin du XIXème siècle, repris depuis par une certain gauche radicale. Je vous recommande la lecture de Pierre Birnbaum, "Le peuple et les gros, histoire d'un mythe", paru en 1979. C'est passionnant et éclairant.

7- La gauche authentique dénonce les inégalités, les injustices, la richesse mal répartie, l'argent improductif, l'irrationalité de la spéculation, le scandale des gaspillages, mais c'est un système, une économie, une société qu'elle critique, pas des personnes. La fin des riches ne signerait pas la fin du capitalisme. D'autre part, la gauche laisse chacun libre de son train de vie, y compris luxueux. Ce qu'elle n'admet pas, ce n'est pas l'ostentation, c'est l'exploitation. Son analyse est politique, elle n'est pas morale ou psychologique.

8- Inversement, une vie modeste ou pauvre ne garantit pas la vertu politique ou l'utilité sociale. Hitler et Staline n'étaient pas issus de la grande bourgeoisie, ils n'avaient l'un et l'autre aucun attrait pour l'argent ou le luxe, leur mode de vie était plutôt austère, des millions de travailleurs se sont incontestablement reconnus en eux. Ils ont néanmoins été de grand criminels de l'humanité, écrasant ce peuple dont ils provenaient pourtant.


Bonne journée,
quel que soit
votre train de vie.

13 mai 2011

Désolé.

Un problème de maintenance sur blogger m'a empêché de rédiger le billet de ce jour. Allez-vous vous en remettre ? Désolé.

A demain.

12 mai 2011

Les ouvriers, les moyens et les autres.

Bonjour à toutes et à tous,


J'aime beaucoup Olivier Ferrand. Ce camarade strauss-kahnien est l'inventeur des primaires à la française. Son think tank "Terra Nova" contribue précieusement au renouvellement de la pensée social-démocrate. Mais je ne suis pas d'accord avec sa dernière étude, concernant la stratégie électorale du Parti socialiste. Son constat d'une fracture entre le PS et les classes populaires, c'est l'évidence même, relativement ancienne. Mais faut-il s'en satisfaire et la considérer comme irréversible ? Olivier pense que oui et moi que non.

Certes, ses arguments ont leur valeur. De fait, la classe ouvrière au sens strict s'est démographiquement amoindrie. En même temps, je pense qu'un nouveau prolétariat est apparu, précaire, jeune, déboussolé, complètement pressuré par la société de consommation (qui convient en revanche parfaitement aux classes moyennes).

Ferrand met aussi en avant la rupture culturelle entre un PS acquis au libéralisme des moeurs, européen et mondialiste, et des catégories populaires tentées par le repli et la protection. C'est certain, mais je ne l'accepte pas et je crois que la reconquête idéologique de la classe ouvrière est possible.

Olivier Ferrand prône un nouveau socle électoral pour le PS : les diplômés, les jeunes, la "diversité", les femmes. Non, je ne vois pas du tout les choses comme ça. Vouloir persister à séduire les classes moyennes est une erreur. Celles-ci, parce qu'elles sont "moyennes", pencheront d'un côté ou de l'autre, suivront la dynamique politique du moment. Les courtiser est inutile.

Evidemment, les "moyens" sont dans nos sections socialistes. En parlant d'eux, c'est de nous dont nous parlons, comme la Castafiore qui rit de se voir si belle dans son miroir. Mais nous devons d'abord nous adresser aux ouvriers, parce qu'ils sont notre centre de gravité, notre histoire, notre raison d'être.


Bonne journée.

11 mai 2011

Les légendes du 10 mai.

Bonsoir à toutes et à tous,


J'aime beaucoup les répliques de Michel Audiard, particulièrement celle-ci : "Je suis ancien combattant, militant socialiste et patron de bistrot, c'est vous dire si j'ai entendu des conneries dans ma vie". Je confirme, bien que n'étant pas ancien combattant ni patron de bistrot. Toute commémoration a ses légendes, le 10 mai 1981 n'échappe pas à la règle. J'en repère cinq, usuelles :

1- La gauche rassemblée. Non, la gauche était très divisée en 1981, contrairement à la campagne électorale de 1974. PCF et PS s'affrontaient violemment. Les communistes accusaient les socialistes d'avoir renoncé au Programme commun, les socialistes accusaient les communistes de faire le jeu de la droite. En 1981, l'Union de la gauche était morte. Au soir du 10 mai, le PCF ne va pas particulièrement pavoiser, assurera le service minimum. Dans l'entre deux tours, un mot d'ordre de "vote révolutionnaire à droite" sera même lancé, discrètement, afin de faire perdre Mitterrand.

2- Les socialistes unis. Non, le PS était déchiré depuis plusieurs années entre deux hommes, Rocard et Mitterrand, et deux cultures, la "deuxième gauche" et le marxisme. Le déchirement était d'autant plus sérieux qu'il ne touchait pas fondamentalement à une querelle de personnes mais à deux visions antagoniques du socialisme. Les uns qualifiaient Rocard et ses amis de "gauche américaine", les autres Mitterrand et ses partisans de "gauche archaïque". Rocard s'est finalement effacé mais sans renoncer.

3- Le leader charismatique. Non, Mitterrand n'avait pas une image très positive : 23 ans d'opposition, des échecs répétés aux présidentielles et aux législatives, les divisions à gauche, 65 ans face à des adversaires plus jeunes, une personnalité qui passait mal à la télévision (alors que Giscard avait du brio). Par bien des côtés, François Mitterrand apparaissait comme un homme du passé, tribun mais pas du tout médiatique.

4- Le socialisme dominant. Non, en 1981, le socialisme n'est pas une idéologie dominante, les idées de gauche n'ont pas spécialement le vent en poupe. Mai 68 est alors déjà loin, les deux événements intellectuels de la décennie sont critiques envers le socialisme : les "nouveaux philosophes" en 1977 et la "nouvelle droite" pendant l'été 1979. Il n'y a pas de dynamique culturelle en faveur de la gauche.

5- La victoire triomphante. Non, les résultats du 10 mai n'ont pas engendré un mouvement populaire comme on pouvait l'espérer. Aucune comparaison n'est possible avec le Front populaire : pas d'occupations d'usines, pas de manifestations de rues, pas de surenchères syndicales, pas de troubles dans les institutions, pas de riposte de l'extrême droite, pas de désengagement massif du patronat. Le 10 mai a été d'autant plus banal, normalisé qu'il n'était pas attendu, que Mitterrand lui-même a été surpris par sa victoire. A la Bastille, c'était un soir de liesse où l'on a demandé à Mitterrand "du soleil", clin d'oeil d'auto-dérision qui prouvait qu'on ne vivait pas une révolution.

Il faut débarrasser le 10 mai 1981 de ses mythes et légendes, savourer un événement historique dans toute sa vérité, en tirer les leçons pour le présent et l'avenir. Car l'embêtant avec les légendes, c'est qu'elles troublent notre perception de l'instant, c'est qu'elles nous éloignent du réel, c'est qu'elles nous font fantasmer mais pas agir.


Bonne soirée.

10 mai 2011

Jean-Pierre d'Haeze.

Bonsoir à toutes et à tous,


J'ai appris sa disparition dimanche matin, lors de l'inauguration du marché aux fleurs, à quelques dizaines de mètres de son établissement aux rideaux baissés. Jean-Pierre d'Haeze, j'ai fait sa connaissance en début 1 999. Je venais d'être élu président de l'association Rencontre Citoy'Aisne et je cherchais un restaurant pour organiser mon premier dîner-débat. Le thème était le chômage, l'invité William Lesur, à l'époque leader du très actif Comité de chômeurs. J'ai choisi le Champs-Elysées. C'était le début d'une longue collaboration, faite de toutes sortes de réunions, débats, colloques, conférences de presse, ...

Pourquoi cet endroit ? Parce qu'on peut s'y réunir très facilement, un coup de fil suffisait : Jean-Pierre regardait son agenda, j'attendais le oui qui arrangeait tout. Plus simple que de réserver une salle municipale. Et puis, au Champs-Elysées, on peut boire et manger. La salle est grande, et si on la veut plus petite, la cloison en accordéon la coupe en deux. Les voitures peuvent se garer et c'est au centre ville. Ajoutez à ça la gratuité et vous comprenez que c'est parfait !

Mais il y a encore plus que cela : la personnalité de Jean-Pierre d'Haeze. Cet homme était d'une discrétion rare, indispensable dans le métier. On venait chez lui en toute confiance et sécurité. Il était la gentillesse même, ne portait de jugement sur personne. Par respect pour sa discrétion, je ne dirais pas ce qu'il m'a concrètement apporté, mais c'était pour moi précieux.

Il lui arrivait cependant de se livrer, au coin de son bar, quand les derniers clients étaient partis. Il racontait ce dont cet établissement avait été le témoin : les débuts d'un jeune leader nommé Xavier Bertrand, les personnalités politiques qui avaient fréquenté le lieu, parfois des célébrités nationales, mais par dessus tout son thé dansant du dimanche après-midi, et les rendez-vous des sportifs.

Jean-Pierre recevait toutes les sensibilités politiques, ce qui donnait lieu quelquefois à des croisements cocasses. C'est à la fin 1 999, alors que j'étais devenu la même année secrétaire de section du Parti socialiste, que mes camarades m'avaient mandaté pour nous trouver un nouveau lieu de réunion (jusque là, nous nous retrouvions rue de Théligny, dans un local dont nous n'étions ni propriétaires, ni locataires). Très vite, j'ai pensé au Champs-Elysées. J'étais loin de me douter que dix ans après, nous y serions encore. J'étais encore plus loin de me douter que nous réintégrerions la rue de Théligny, ironie du sort, au moment où Jean-Pierre d'Haeze disparaîtrait. Cela résonne en moi comme la fin d'une époque. Adieu Jean-Pierre.


Bonne nuit.


Les obsèques de Jean-Pierre d'Haeze auront lieu jeudi à 14h30, dans la basilique de Saint-Quentin.

Avis de recherche.






10 mai 1981 à Saint-Quentin raconté par la presse locale, L'Aisne Nouvelle et L'Union (je n'ai pas reçu l'autorisation de reproduction pour La Voix du Nord). Regardez bien les photos : vous reconnaissez-vous (vignettes 2 et 4) ? Trente ans après, que sont-ils devenus, ceux qui faisaient la fête sur la place de l'hôtel de ville ou rue de Théligny, alors siège du Parti socialiste ?

Dans les articles, deux noms reviennent, que nous connaissons bien aujourd'hui : à gauche Bernard Lebrun, barbu, qui fait figure de leader et qui s'apprête à se porter candidat aux législatives, à droite Vincent Savelli, à la tête du RPR, le parti gaulliste. Auraient-ils l'un et l'autre imaginé que trente ans plus tard ils se retrouveraient sur les mêmes bancs de la majorité municipale ? Sûrement pas. A l'époque, Pierre André et Xavier Bertrand ne sont pas encore officiellement nés à la vie politique locale.

Observez de près la photo prise au local du PS (vignette 2) : tout à gauche, on reconnaît, verre à la main, Pierre Arnould, récemment disparu. Et le camarade hilare presque à côté, c'est Gérard Blanquart, alors maire-adjoint chargé de la culture. Entre les deux, papier et stylo en main, sans doute le secrétaire de section annonçant les résultats. Mais qui est-ce ?

La France est socialiste.

Bonjour à toutes et à tous,


Il y a 30 ans, j'ai 20 ans, les cheveux sur les épaules, et j'habite à Saint-Amand-Montrond, 11 000 habitants, sous-préfecture du Cher, province du Berry, maire Maurice Papon. J'ai voté Mitterrand et personne autour de moi ne pense qu'il va être élu. Mon grand-père communiste est à peu près sûr de mourir sans revoir le Front populaire. Et puis à 20 heures, devant la télé, un visage s'affiche : la gauche a gagné !

A Saint-Amand, la foule ne descend pas dans la rue. Les berrichons sont des gens qui restent chez eux, pas exubérants. Dans la nuit, j'entends des klaxons. C'est un événement pour cette petite ville : il n'y a que pour les mariages que les habitants se manifestent ainsi bruyamment. Je m'endors d'un sommeil sans rêve puisque le rêve vient de se réaliser.

Mon 10 mai, c'est surtout un 11 mai. Au réveil, je prends vraiment conscience du bouleversement. Mes voisins de droite s'inquiètent : les ouvriers occuperont les usines, des drapeaux rouges fleuriront un peu partout, les communistes tenteront de faire la révolution, la gauche videra les caisses, Mitterrand partira au bout de quelques semaines ou quelques mois. Je n'y crois évidemment pas.

Au contraire, sortant de chez moi pour acheter la presse, je suis surpris du calme dans les rues. Mitterrand a gagné, il s'apprête à changer la France mais les visages n'ont pas changé, ils sont tranquilles, chacun vaque à ses activités ordinaires. Aucun drapeau rouge ne flotte nulle part, les ouvriers vont travailler comme d'habitude, les passants ne lèvent pas le poing mais sourient. Une élection est passée, pas une révolution.

Dans ma tête, je me dis et redis : "La France est socialiste, la France est socialiste", et c'est magique, à peine croyable. Libération titre : "Enfin l'aventure". Et pourtant, dans les rues de Saint-Amand-Montrond, au coeur de la France profonde, tout est normal, rien ne s'agite. Ce que je retiens de mon 10 mai 1981, c'est cette normalité, cette tranquillité de l'événement.


Bonne journée,
bon 10 mai.


PS : prochain billet, dans la matinée, le 10 mai 1981 à Saint-Quentin.

09 mai 2011

La fête, pas l'enterrement.





Bonsoir à toutes et à tous,


Les ouvrages et numéros spéciaux sur François Mitterrand se multiplient en ce trentième anniversaire. Je vous en ai sélectionné trois qui me semblent particulièrement intéressants (voir vignettes) :

1- "Mitterrand à la une", de Giesbert et Revol, un magnifique recueil des premières pages de journaux consacrées à François Mitterrand. Somptueux mais coûteux. Allez, ce trentième anniversaire n'a pas de prix !

2- "François Mitterrand, le pouvoir et la séduction", hors-série du Monde, qui privilégie le texte sur l'image, et c'est bien vu : nous redécouvrons des articles oubliés de Mitterrand sur la beauté, la géographie, ... la pornographie. C'est l'occasion pour nous rappeler que l'homme politique était aussi un écrivain (la droite aurait aimé qu'il se cantonne à la littérature !), surtout dans sa période d'opposition. C'est un fait : quand on n'est pas au pouvoir, quand on n'exerce pas de responsabilité politique, on a le temps d'écrire ...

3-"Mitterrand, une vie", hors-série de Libération, une somme des papiers parus sur Mitterrand dans le quotidien depuis 1981. Les réactions au fil de l'actualité sont instructives.

Demain, à l'invitation de Sylvain Logerot et de la section de Château-Thierry, j'irai fêter le 10 mai 1981 en témoignant de mon expérience personnelle ce jour-là. La réunion publique, ouverte aux forces de gauche, aux syndicats et aux associations, se poursuivra par un débat sur le projet socialiste d'aujourd'hui (le programme de la soirée est consultable sur le blog de la section : http://www.02400.org/ )

C'est une heureuse initiative de Sylvain et de nos camarades de Château. Le trentième anniversaire ne doit pas être un regroupement fantomatique de nostalgiques : la gauche a besoin de fêtes, pas d'enterrements. Hier oui, à condition de préparer demain.


Bonne soirée,
vive demain !

C'est demain le 10 mai 1981.





Demain, sur ce blog, le 10 mai 1981 à Saint-Quentin. A ne pas manquer.