L'Aisne avec DSK

29 février 2008

La vérité, rien que la vérité.

Bonsoir à toutes et à tous.

Notre société a manifestement un problème avec ce qu'on appelle la vérité, un mot qui va tomber en désuétude si nous n'y prenons pas garde. L'affaire Farinet a montré la contamination rapide du faux par le moyen de l'internet. Le faux plaît, le faux amuse. La vérité est souvent moins marrante. En politique, je tiens beaucoup à cette valeur exigeante, la vérité. Faire de la politique, c'est lutter contre le mensonge, la tromperie, l'illusion. Immense travail!

Regardez ce qui vient de se passer avec le film et le livre "Survivre avec les loups". Voilà une oeuvre émouvante et édifiante, prompte à toucher la jeunesse et à mobiliser les écoles. J'avais d'ailleurs songé passer ce film au multiplexe de Saint-Quentin, dans le cadre des semaines contre le racisme, qui vont débuter dans quelques jours. Et j'apprends que tout était faux, archi-faux. Comment ne pas y avoir pensé plus tôt? Une petite fille juive qui fait 3.000 km à pied à travers l'Europe dévastée par la Seconde guerre mondiale et qui est protégée par des loups. Un joli conte, c'est certain, mais invraisemblable, complètement invraisemblable! Pourtant, tout le monde a marché, personne n'a douté. Les bons sentiments sont plus forts que tout, ils s'expriment au détriment de la vérité.

Autre relation difficile et complexe avec la vérité, le débat sur la hausse des produits alimentaires: le week-end dernier, le magazine "60 millions de consommateurs" annonce des augmentations vertigineuses sur des produits de base, + 48% en trois mois sur les pâtes! Les médias relaient abondemment ces statistiques, dans un contexte où le pouvoir d'achat tient la vedette. L'alimentation est visée, le jambon et le yaourt font les frais de la polémique, au moment où se tient le Salon de l'agriculture. Dans la même semaine, Grégoire Biseau, responsable du service économique de Libération, mène son enquête. Résultat: les hausses spectaculaires ne sont que très marginales, elles ne correspondent absolument pas à la moyenne générale. Pour Biseau, la polémique ne peut que servir les intérêts de la grande distribution, alors que la hausse des prix agricoles bénéficient aux pays pauvres.

Le journaliste de Libé ne s'arrête pas là dans sa dénonciation des contrevérités. Son article "Pouvoir d'achat: vérité et ressenti", dans l'édition de jeudi, est extrêmement intéressant. Sur les salaires, son jugement est très clair: classes moyennes et professions intermédiaires ont stagné, cadres et ouvriers ont légèrement augmenté, employés atypiques (temps partiel, CDD, intérim) sont en baisse, ce qui explique par exemple le mouvement de grève des caissières.

Sur le déséquilibre entre salaires et profits et l'envolée de ces derniers, Grégoire Biseau explique que la part des salaires dans la valeur ajoutée reste la même depuis la fin des années 80, mais que cette constance a été dissimulée par les profits records des patrons de CAC 40, qui représentent très peu par rapport aux PME.

Enfin, sur le pouvoir d'achat, la hausse est de 0,9% de 2003 à 2006, mais les dépenses de logement s'élèvent fortement. La hausse des prix, quant à elle, est de 2,8% sur la dernière année, le taux le plus fort depuis 1992. La hausse des produits alimentaires atteint 4,2%.

La vérité, vous le constatez, n'est pas chose facile. Mais quoi qu'il en soit, il n'y a que la vérité qui vaille.


Bonne soirée.

28 février 2008

La confrontation des idées.

Bonsoir à toutes et à tous.

Il n'y a pas de démocratie sans confrontation d'idées. Et en ce moment, je n'en vois pas beaucoup! Les débats contradictoires se font de plus en plus rares, sauf peut-être de temps en temps à la télévision. A Soissons, il faut saluer l'initiative de France 3 Picardie et de L'Union, qui ont organisé un débat public entre les 5 têtes de liste aux élections municipales. Bravo! Ce n'est pas dans le monologue frisant l'autisme que les citoyens peuvent se faire une idée et préparer leur choix. Je lance donc un appel pour qu'à Saint-Quentin un tel débat ait lieu, qui permettrait de départager les deux candidats. J'attends que l'un des deux au moins prenne l'initiative de la proposition: Que le plus courageux se dévoile!

Aux élections cantonales de Saint-Quentin sud, Michel Garand a suggéré à ses adversaires de débattre ensemble. Très bien. J'espère que ce sera suivi d'effets. Encore une fois, le débat, la démocratie n'a rien inventé de mieux!

Ce soir, à l'initiative du club Convaincre animé par Maurice Vatin, les sociaux-démocrates saint-quentinois se sont eux aussi retrouvés ce soir pour débattre. Par les temps qui courent, prendre de la hauteur, produire des idées, ce n'est pas la plus mauvaise façon d'agir. Du monde, une bonne ambiance, quelques retrouvailles, des échanges intéressants, que demander de mieux? Maurice m'avait sollicité pour que je parle des valeurs sociales-démocrates telles que nous pourrions les pratiquer à Saint-Quentin:

J'ai introduit le sujet en rappelant que notre ville n'était plus socialiste depuis un demi-siècle et qu'il était de notre devoir de remédier à cette situation. En faisant comment, en s'appuyant sur quelles valeurs? J'ai proposé 4 principes pour une gauche social-démocrate:

1- Une gauche qui reste fidèle à la gauche, qui conserve sa ligne politique, qui s'allie avec ses partenaires traditionnels, mais qui ne conclut pas d'accords politiques avec ceux qui ne partagent pas son projet, en l'occurrence l'extrême gauche.

2- Une gauche qui s'ouvre sociologiquement, qui ne se replie pas sur son électorat ouvrier vieillissant, qui n'exalte pas une mythique "classe ouvrière", qui part à la conquête des classes moyennes. A Saint-Quentin, il y a du boulot!

3- Une gauche qui propose, qui finance ses projets, qui fait la démonstration de sa crédibilité et de sa compétence, à l'opposé d'une gauche de protestation qui ne connaît que la démarche syndicale la plus dure.

4- Une gauche qui gagne, qui a psychologiquement un moral de vainqueur, qui ne se vit pas comme une éternelle opposante, un contre-pouvoir sans pouvoir, n'occupant jamais aucune responsabilité.

J'ai conclu en souhaitant que la majorité social-démocrate de la section de Saint-Quentin se renforce en vue de notre prochain congrès, qu'elle fasse la preuve éclatante de sa puissance, qu'elle conserve son unité, qu'elle affiche publiquement son existence et sa présence à travers de nombreuses activités, qu'elle prépare l'alternance. Car c'est la raison d'être de la politique: vouloir accéder aux responsabilités pour mettre en application ses idées.


Bonne nuit.

27 février 2008

Ce que je veux vous dire.

Je sais que de nombreux camarades passent des jours difficiles. La campagne des élections municipales a officiellement commencé. De discrète jusqu'à maintenant, elle est devenue enfin plus visible, s'affichant sur les panneaux ou dans nos boîtes aux lettres. La presse en parle, les réunions se multiplient, il en sera ainsi jusqu'au premier tour. Je comprends l'amertume de celles et ceux qui assistent, impuissants, à un combat auquel ils voulaient participer et dont on les a écartés, malgré leurs propositions. Je partage le ressentiment de celles et ceux qui ont l'impression qu'on leur a volé leur vote et cette élection. Je saisis parfaitement qu'ils se sentent victimes d'une posture purement procédurière validée par une décision fédérale purement administrative. A eux tous, je veux dire ce soir, avec beaucoup de force, ceci:


Soyez fiers d'être du côté de la vérité, assumez pleinement la justesse de vos analyses, réjouissez-vous de n'avoir suivi que vos convictions. Vous avez été des socialistes, vous avez pensé et agi en socialistes, ne regrettez pas ce que vous avez dit ni ce que vous avez fait, repoussez la rancoeur, dites-vous que vous avez eu raison même si les événements semblaient vous donner tort. Vous n'avez pas renoncé à être socialistes, vous avez défendu jusqu'au bout, dans l'honneur, l'identité et les intérêts du Parti socialiste, il n'y a que cela qui compte. Et je vous le redis: soyez-en fiers.


Dites-vous bien que dans 11 jours, tout sera fini, que vous pourrez alors relever la tête, que la réalité rejoindra et confirmera tout ce que vous avez pu affirmer. C'est quoi, 11 jours? C'est rien. Alors! La politique, c'est la durée. Ne cédez rien, ne lâchez pas, et un jour, j'en suis sûr, vous gagnerez, nous l'emporterons. Mes propos ne sont pas écrits pour vous consoler. Je déteste la compassion. Mes propos vous rappellent une vérité: on ne fait de la politique qu'avec un calendrier entre les mains. Le maître de la politique, c'est lui, c'est le temps. Que nous dit-il?


Qu'en 2008, le PS organisera un congrès, dont la préparation a déjà commencé. Ce congrès, comme tout congrès, redistribuera le pouvoir entre socialistes, à tous les niveaux de l'appareil, du sommet jusqu'à la section de base. Ce congrès, je vous le dis, donnera le pouvoir à la ligne politique qui est la nôtre, réformiste, social-démocrate, peu importe le nom que vous lui attribuez. A Saint-Quentin, il ne faut pas que cette ligne politique se contente de gagner, il faut qu'elle triomphe. Notre revanche, croyez-moi, nous la prendrons à ce moment, dans l'humble résultat d'un vote, que personne cette fois-ci ne pourra bureaucratiquement contester. Nous l'emporterons en nous donnant non pas un secrétaire de section rassembleur (le rassemblement, nous l'avons voulu, c'est lui qui nous a tués, une bonne intention se transformant en mauvais résultat), mais un secrétaire de section de combat, défendant totalement notre ligne politique et marginalisant ses adversaires.


Poursuivons la lecture du calendrier: après 2008 viendra 2009, les élections régionales et européennes. Là encore, soyons socialistes jusqu'au bout, faisons respecter les règles de notre Parti, qui disent noir sur blanc qu'on ne peut pas être à la fois vice-président de l'exécutif régional et parlementaire, français ou européen. Pour les européennes, battons-nous pour des candidats vraiment européens, qui assument et défendent les choix politiques faits par notre Parti.


En 2011, il y aura des élections cantonales, Saint-Quentin centre et Saint-Quentin nord. Les candidats, nous les avons. C'est à ce moment-là que nous pourrons nous imposer, renouer le fil qui a été coupé. Nous serons alors d'autant plus utiles, d'autant plus précieux que le Conseil général sera en difficulté pour retrouver sa majorité.


Et puis viendront les législatives et présidentielles de 2012. C'est loin? Mais non, c'est demain! Ne raisonnez pas à l'échelle individuelle, où en effet c'est loin, mais à l'échelle politique, où c'est court.


La fin de ce cycle politique, ce sera les élections municipales de 2014, qui n'auront plus rien à voir, je vous l'assure, avec les municipales de 2008. Xavier Bertrand remplacera Pierre André, l'équipe actuelle sera très largement renouvelée, nous serons dans un tout autre contexte. Ce qu'il faut savoir, c'est que la situation d'aujourd'hui est dans le prolongement de 2001, et qu'il en surgira à peu près les mêmes équilibres. Mais en 2014, tout sera vraiment différent, et cette fois, croyez-moi, nous serons là!

Camarades et amis, ne doutez pas, ne craignez rien, la peur de l'avenir n'est pas de votre côté. J'aurais pu renoncer, la rédaction de ce blog m'a coûté les pires ennuis, que vous n'imaginez pas, on s'en est pris à mes proches à défaut de pouvoir s'en prendre directement à moi. Un jour, bientôt, je vous raconterai tout. Je n'ai pas renoncé, parce que je sais que demain ne sera pas la répétition d'aujourd'hui. Voilà pourquoi il faut ce soir dormir serein.


Bonne nuit.

L'auto dans la ville.

Bonsoir à toutes et à tous.

Je garde toujours un oeil sur ce qui se passe à Paris, là où j'ai commencé mon engagement politique. L'un des thèmes de campagne, c'est le stationnement. Souvent, ce problème est abordé par le petit bout de la lorgnette: Faut-il ou non construire de nouveaux parkings, doivent-ils être en surface ou souterrains, le stationnement doit-il être de courte ou de longue durée? Je ne dis pas que ces questions ne sont pas importantes, je dis qu'il ne faut pas commencer par là, mais par une réflexion plus globale sur la place de l'automobile dans la ville, puis en venir à des interrogations plus spécifiques.

Le problème de fond, c'est que la ville n'a pas été construite pour l'automobile. Logique, la grande majorité des agglomérations ont été conçues avant que la voiture ne devienne un objet populaire très prisé, dans les années 60 et 70. N'oublions pas que pendant longtemps, elle était un produit de luxe réservé à des privilégiés. Au début de son expansion, les garages personnels ont pu répondre à la demande de stationnement. Et puis, l'accroissement considérable du nombre de véhicules a rendu impossible cette première solution, la plus naturelle: une voiture à soi doit être garée chez soi.

Il s'est produit alors un phénomène devenu aujourd'hui banal mais qui n'avait rien de normal: le stationnement sauvage le long des trottoirs. Les rues ne sont pas faites pour accueillir ainsi les véhicules. Mais nécessité faisant loi, personne ne songe aujourd'hui à dénoncer cet enlaidissement de nos villes par des voitures de toute sorte, d'autant qu'aucune solution ne peut y remédier. J'ai la faiblesse de penser que j'habite dans la plus belle rue de Saint-Quentin, la rue Jean-Jaurès, autrefois rue Royale. Elle est longue, inclinée, offrant une belle perspective sur l'église Saint-Martin, et bordée de magnifiques façades de pierre. Les rangées de voitures, dont la mienne, surtout la mienne, gâchent tout. Bien sûr, étant habitué, nous n'y faisons plus attention, un peu comme les antennes de télévision qui enlaidissent nos toits.

Quelle place voulons-nous accorder à la voiture dans la ville? La tendance actuelle, qui remonte déjà à plusieurs années, est plutôt de décourager sa présence, du moins dans le centre-ville: les parkings sont de plus en plus payants, les zones piétonnes s'élargissent, les transports collectifs sont favorisés. Faut-il poursuivre dans cette direction? Les parkings payants se généralisent en dehors même du centre-ville. La grande distribution s'y met, ainsi que, plus surprenant, les hôpitaux. Autre phénomène qui se développe: les parkings "intermodaux", au bout des lignes de bus ou de train.

J'en suis resté à une localisation du problème puis une approche descriptive de ce qui se fait. Faisant suite à mon billet d'hier sur "la grève de la consommation", j'incline à libérer la ville de l'auto ... et par la même occasion à libérer l'homme. Mais je ne suis pas sûr que cette perspective soit très populaire.


Bonne soirée.

Faut rigoler!

Bonjour à toutes et à tous.

Il nous a quittés il y a une quinzaine de jours mais nous avons encore ses refrains en tête, et l'un me revient en parcourant l'actualité: "Faut rigoler!" Et oui, seul l'immense rire d'Henri Salvador pourrait pulvériser le ridicule de notre époque.

Il y a d'abord, encore et toujours, ce qu'il convient d'appeler "l'affaire Farinet", l'agresseur plus vrai que vrai de Nicolas Sarkozy, et pourtant entièrement faux. Pendant ce temps-là, l'autre court toujours! Hier en fin d'après-midi, je reçois chez moi un appel de Canal-Plus: le journaliste me demande si j'ai le numéro de portable du déjà célèbre Michel Farinet. Eh non! Quant à son fixe, il sonne manifestement dans le vide. Canal, c'est raté. Mais Laurent Ruquier aussi! J'apprends ce matin que l'animateur a contacté Michel pour l'inviter sur le plateau de son émission. Et Michel, caprice de star ou fatigue du citoyen, a refusé. Les grands médias nationaux, demain peut-être internationaux, se l'arrachent en vain, ce sera donc L'Aisne Nouvelle, après le Courrier Picard, qui aura droit à la confession de notre ami. Quelle époque! Une information fausse fait plus de bruit que si elle était vraie ...

Cécile Duflot, secrétaire nationale des Verts, donc quelqu'un d'important, a adressé un communiqué à l'AFP, donc pour annoncer quelque chose d'important. Pas sûr ... puisqu'il s'agit de la naissance de son quatrième enfant. Plus important peut-être est le prénom qu'elle lui a donné: Térébentine. Oui, vous avez bien lu, Térébentine! Avec un h, térébenthine est le fameux dissolvant à base d'huile résineuse provenant des conifères. Pendant longtemps, les enfants se sont faits appeler Pierre, Paul, Jacques. Aujourd'hui, signe des temps et libéralisation de la loi, on peut s'inventer un prénom sur mesure. Alors, pourquoi pas Térébentine. Avant, nous étions tributaires des noms d'apôtres, de martyrs et de saints. Dans la société laïque, libéral et individualiste, chacun fait comme il veut. Mais cela ne m'empêchera pas de penser que le ridicule fait de grands progrès.

Ma coiffeuse me racontait samedi qu'elle s'est inscrite dans une salle de sport pas loin de chez moi. On cause et il me revient à l'esprit mon projet déjà ancien de faire du sport. Après toutes ces heures sédentaires passées à rédiger mon blog! Sauf que je dis ... et je ne fais pas: manque de temps, autres activités, fatigue, tous les prétextes sont bons. En vérité, je n'ai pas le courage, et peut-être pas vraiment l'envie. Ma coiffeuse a une solution: le power plate, ou bien le vibro plate. Bigre, c'est quoi ces machins-là? J'ai appris: c'est faire du sport sans faire du sport, se dépenser sans bouger, se muscler sans se torturer. Mais c'est très technique: des vibrations renforcent les muscles. L'appareil a été initialement conçu pour les ... cosmonautes. Vous faites ça une demi-heure, c'est comme si vous aviez transpiré sang et eau pendant une heure trente. Je ne sais pas pourquoi, j'ai encore moins le désir de m'inscrire dans une salle de sport, je n'ai qu'une envie: rigoler!


Bon après-midi.

26 février 2008

La grève de la consommation.

Bonsoir à toutes et à tous.

Vous vous souvenez peut-être que pendant les vacances de Noël je vous avais parlé de Paul Ariès, dont la pensée avait retenu mon attention. Je viens de lire un texte fondamental et fondateur de sa réflexion: le "Manifeste pour une grève générale de la consommation". Je ne suis pas d'accord avec tout, loin de là, sa position est plus d'extrême gauche que social-démocrate, et pourtant quelque chose me semble très pertinent dans ce qu'il écrit.

Dès les premiers mots, je désapprouve: "La société de consommation est triste, injuste et impossible." Et la France d'avant, quand les gens n'avaient pas de quoi "consommer", elle n'était pas "triste, injuste et impossible"? En même temps, j'approuve le slogan qui suit: "Moins de biens mais plus de liens." Et je trouve fort juste la distinction entre la domination matérielle du producteur et la domination mentale du consommateur. "Se refuser comme consommateur", oui, parce qu'il y a incontestablement dans ce progrès qu'est la consommation une forme d'aliénation.

A partir de là, Ariès prône "une stratégie conséquente de désobéissance civique", qui "attaquerait donc le système dans ce qu'il a de plus vital et sacré": "Sortir de la consommation est, à la fois, le début et le terme de cette révolution." Nous sommes dans l'utopie, mais réaliste: pas de "grand soir" de la révolution mais un petit matin de l'anti-consommation, une transformation sociale et culturelle qui commence ici et maintenant: "Que chacun réfléchisse, dès à présent, à sa consommation et tente déjà de consommer beaucoup moins, bref d'adopter un mode de vie minimaliste."

Ce qui me paraît très vrai dans tout ça:

- La grève de la production comme prélude au changement social appartient au monde industriel finissant.
- Le moteur du capitalisme moderne, c'est la consommation.
- Le système ne peut être transformé qu'au coeur de son fonctionnement, par l'exemple individuel et le renoncement collectif.

Paul Ariès expose une ébauche de programme politique: Une "journée sans achat" en novembre, la gratuité des transports collectifs, des tarifications différentes selon les niveaux de consommation, un revenu universel inconditionnel équivalent au SMIC, un revenu maximal d'activité, le cantonnement des publicités, le boycott de certains produits ou réseaux vitaux pour le système "hyper-capitaliste", le boycott des journaux télévisés et de la presse aux ordres.

Il faut prendre ce projet pour ce qu'il est: une utopie féconde, un idéal concret, des principes et des pratiques qui font réfléchir. Pourquoi ce texte, que je pourrais contester, me plaît-il? Parce qu'au-delà de sa radicalité qui ne me ressemble pas, je m'y retrouve: ma vie est celle-là, je n'ai jamais sacrifié à la consommation, je n'en possède ni n'en recherche les signes distinctifs, j'ai eu ma première voiture à 44 ans, je suis devenu propriétaire à 46 ans, je ne pars pas en vacances, je ne cède pas aux dernières nouveautés de l'audio-visuel et de l'électro-ménager, je vais très rarement à Cora et Auchan. La "grève générale de la consommation", c'est tous les jours pour moi!


Bonne nuit.

Le net rend fou.

Savez-vous que je suis indirectement mêlé à l'incident qui fait le tour du net, "casse-toi pauvre con"? C'est une histoire incroyable qui prouve que le net rend fou! Hier soir, à 20h30, au bar Le Manoir à Saint-Quentin s'achève le café citoyen organisé par l'association Rencontre Citoy'Aisne, que j'ai l'honneur de présider. Le café citoyen, c'est une déclinaison du café philo, mais axé sur des thèmes de société, et non pas des questions proprement philosophiques. L'animateur du café citoyen est un membre de l'association, un personnage haut en couleur, Michel Farinet, ancien cadre dans une multinationale, ancien syndicaliste, aujourd'hui auteur d'ouvrages sur la citoyenneté européenne et chanteur à ses heures! Quelqu'un de très sérieux et de complétement "décalé" (remarque importante pour la compréhension de ce qui va suivre).

Donc, Michel conclut le café citoyen, qui a très largement porté sur le citoyen virtuel, l'usage du net, etc lorsqu'un journaliste du Courrier Picard, Mélanie Tremblay, nous annonce la nouvelle: France 3-Picardie en a parlé, le net diffuse l'info depuis la fin de l'après-midi, le "pauvre con" qui n'a pas voulu serrer la main du président, c'est lui, c'est notre Michel Farinet local! Je suis le premier estomaqué ... et lui aussi. De retour chez moi, je me précipite sur l'ordi: en effet, l'information circule, avec photo à l'appui, montrant une vague ressemblance entre le quidam par qui le scandale est arrivé et Michel. Sauf que Michel n'a jamais mis les pieds au Salon de l'agriculture et qu'en bon citoyen de Rencontre Citoy'Aisne il se fait un devoir de pratiquer la courtoisie républicaine et de saluer, comme nous tous, les élus du peuple.

En quelques heures, Michel est devenu la vedette du net, à partir d'une pure et simple manipulation, ou d'une allégation fantaisiste, comme on voudra. Le Courrier Picard y consacre ce matin un article dans sa page régionale. Et tout à fait par hasard, écoutant RTL ce midi, qui est interviewé? Michel Farinet, qui dément catégoriquement. L'affaire, je présume, va en rester là, mais pendant une dizaine d'heures, un membre actif de mon association aura été victime d'une fausse et grave accusation. Heureusement, Michel a de l'humour et a pris la chose avec distance.

Qu'est-ce que nous apprend cet incident Farinet après l'incident Sarkozy? Que le net est capable de tout et de n'importe quoi, qu'un rapprochement très approximatif entre deux photos suffit à créer une fausse vérité, que très peu de temps est nécessaire pour que la toile s'emballe, qu'un personnage singulier, atypique et déjà présent sur le net fait figure de victime idéale. Tout cela prête bien sûr plus à rire qu'à pleurer, et c'est ce que nous avons fait hier soir, autour d'un dernier verre, au Manoir. Il n'empêche que cela ne laisse pas aussi sans inquiéter ... Ironie du sort, notre débat citoyen venait de porter sur les méfaits ... du monde virtuel. "Ils sont fous ces romains!", lit-on dans Astérix. "Ils sont fous ces internautes!", c'est ce que j'ai envie aujourd'hui de dire.


Bon après-midi.

Un autre 9 mars.

Bonjour à toutes et à tous.

J'ai dîné samedi soir avec mon webmaster Arthur. Ce titre est exagéré mais je n'en trouve pas d'autre. Arthur a simplement conçu ce blog en septembre 2006. Sans lui, je ne me serai pas lancé dans cette aventure. Samedi, nous avons donc discuté du blog, des réactions heureuses ou fâcheuses qu'il provoque. Je vous en parlerai en détail un jour car pour l'heure, ma discussion avec Arthur a surtout porté sur les élections du 9 mars. Non, ce n'est pas ce que vous croyez, rien à voir avec les municipales. Arthur, de son vrai prénom Arturo, est espagnol. Le 9 mars, il élira le maire de Saint-Quentin et ... les députés de son pays natal, puisque ce sera les législatives en Espagne. Notre conversation a donc abordé ce sujet.

Arthur est socialiste, comme moi de tendance social-démocrate, et il m'apprend quelque chose que j'ignorais. Un nouveau parti a été créé en Espagne, en septembre dernier, par un philosophe assez réputé, Fernando Savater, ce qui est une première originalité (je précise qu'Arthur est comme moi prof de philo, ceci explique cela ...). Ce parti, l'UPD, l'Union Progrès et Démocratie, est si j'ai bien compris une sorte de MoDem espagnol, mais issu de la gauche. Autour de Savater se sont réunis d'autres intellectuels, tels que l'écrivain Mario Vargas Llosa. Cette dimension "intellectuelle" de la démarche me semble intéressante et significative. En France aussi, la gauche est à bout d'idées. Et qui peut proposer des idées sinon les intellectuels, puisque c'est leur métier?

Ce qui m'embête, c'est que l'UPD s'affirme progressiste mais refuse de se situer à droite ou à gauche. Pour moi, on ne peut pas les renvoyer dos à dos. A part ça, les thèmes développés recueillent mon attention et ma sympathie :

- le point majeur du programme, c'est l'antinationalisme, au moment où les socialistes mettent en place une réforme des régions qui accroit leurs prérogatives. L'UPD plaide pour un certain jacobinisme, ce qui est original dans un pays comme l'Espagne où les identités régionales sont très fortes. Je suis certes favorable aux régions, mais le régionalisme, quand il devient un nationalisme, est aussi détestable que n'importe quel nationalisme, surtout lorsqu'il flirte avec la violence et le terrorisme.

- La défense de la laïcité, voilà un objectif important dans une Espagne toujours marquée par le cléricalisme, où l'enseignement de la religion à l'école est l'objet d'un débat passionné sur lequel il ne faut pas céder.

- Le rattachement de l'éducation à l'Etat et non plus aux régions, c'est aussi un combat d'envergure pour ce mouvement politique qui compte de nombreux enseignants.

Je ne sais pas du tout quel sera le score de l'UPD le 9 mars. Je pense qu'il sera modeste. Il attirera les déçus du socialisme et les adversaires du nationalisme, mais sa création est trop récente pour donner tous ses effets. Si j'étais espagnol, je voterai bien sûr socialiste. Mais je souhaite une pleine réussite à l'UPD, qui soulève de vrais problèmes et avance des propositions qui méritent réflexion. Le PSOE est donné plutôt gagnant, mais la droite remonte. N'oublions pas qu'en 2004 la victoire de Zapatero était due aux circonstances dramatiques des attentats de Madrid. Sans cela, la droite aurait conservé probablement le pouvoir. Depuis, le gouvernement socialiste a réformé utilement la société espagnole et le Premier ministre est devenu populaire. Mais les socialistes ont besoin au Parlement de gouverner avec d'autres formations, dont les nationalistes. Si l'UPD pouvait devenir son prochain partenaire, nous ne pourrions que nous en réjouir.


Bonne fin de matinée.

25 février 2008

Casse-toi, pauvre con!

Bonsoir à toutes et à tous.

Le "casse-toi pauvre con" de Nicolas Sarkozy fait le tour du Web, je me sens donc obligé d'en parler à mon tour, avec un peu de réticence: on ne va pas juger un homme politique sur quelques mots, quelques secondes, une image. Le succès de cette vidéo m'inquiéte plus qu'elle ne me réjouit. Il y a là-dedans une forme de jeu assez peu politique. On s'amuse à voir le chef de l'Etat utiliser un langage grossier. Ce qui m'intéresserait, c'est qu'on remette en cause les grandes décisions gouvernementales.

Que s'est-il exactement passé samedi au Salon de l'agriculture? On peut penser que Nicolas Sarkozy a perdu ses nerfs devant un comportement discourtois: quand la main du président de la République se tend vers vous, vous saluez, quoi que vous pensiez de l'homme et de sa politique. Mais ce refus peu aimable justifiait-il la réaction violente? Pas du tout. Un homme public est habitué à ce type de rebuffade, il ne répond pas et poursuit son chemin. Rétorquer du tac au tac, sur le même ton, non, ce n'est pas digne.

Il m'est arrivé, à mon petit niveau, encore récemment, d'être confronté à quelqu'un qui ne voulait pas serrer la main que je lui proposais. Je n'ai ressenti aucune nervosité en moi, aucune irritation. Chacun est libre de ses gestes et de ses paroles, même offensantes. Mais l'homme politique, qui plus est le président de la République, doit rester maître de lui en toute circonstance. Les pénibles explications de Michel Barnier et Xavier Bertrand pour justifier sinon excuser le courroux présidentiel avaient quelque chose de pathétique. Ils auraient mieux fait de se taire.

Je suis d'autant plus surpris par la réaction de Sarkozy que cet homme connaît et contrôle plutôt bien la communication. Il sait qu'à l'ère de la vidéo légère n'importe qui peut voir ses paroles et son image captées à la dérobée et exploitées à grande échelle. Il faut donc qu'il y ait une autre explication. Le président ne semblait pas visiblement en grande colère lors de l'altercation, il a même gardé juste après le sourire qu'il affichait juste avant. Alors?

Alors je crois que le commentaire doit être politique et pas psychologique. Depuis plusieurs années, Nicolas Sarkozy prétend incarner une nouvelle race d'homme politique: celui qui parle comme tout le monde. On se souvient de son emploi du mot "racaille", terme populaire qui paraissait déplacé dans la bouche du président. Ce qu'il a fait au Salon de l'agriculture, c'est ce que beaucoup de gens auraient fait, excédés. Je ne suis pas absolument certain qu'une partie de l'opinion ne voit pas d'un oeil indulgent cet homme politique "comme tout le monde".

Pourtant je n'adhère pas à cette façon de voir. Les titulaires d'une fonction politique, parce que celle-ci est publique, parce qu'elle s'adresse à tous, doivent veiller au langage qu'ils emploient. Faire de la politique, c'est choisir ses mots, c'est un art de la parole. Le réduire ou le rabaisser a un parler commun ne serait pas rendre service à la République et à la politique. Je ne dis pas qu'il faut remettre du sacré dans la fonction présidentielle, pas même de la solennité, mais il faut lui garder toute sa dignité. Et puis, comment le même homme, qui dit "casse-toi pauvre con", peut-il aller vers les enfants, déplorer que la morale se perde et instaurer des cours de respect dans les écoles?


Bonne nuit.

Copains d'avant.

Bonjour à toutes et à tous.

Vous savez que j'aime bien sur ce blog évoquer les "phénomènes de société". VAL, qui a fait sa réapparition parmi les commentaires, me reprocherait peut-être de faire de la "sociologie", sans doute même de la mauvaise sociologie! Je ne sais pas ... Mais ce que je sais, c'est que l'action politique, si elle veut être pertinente, si elle veut répondre aux aspirations de la population, doit s'articuler sur une analyse de la société, que j'essaie de mener au modeste niveau de ce blog et avec les capacités qui sont les miennes.

Tout ça pour vous annoncer que je veux vous parler d'une mode récente et influente à laquelle Le Parisien dans son édition d'hier a consacré un article: la recherche des camarades de classe. Grâce à internet, cette quête autrefois très difficile, sinon impossible, est devenue très simple. Plusieurs sites offrent leur service, le plus important est "Copains d'avant": 6,2 millions d'inscrits, et depuis que l'inscription est gratuite, il y a quatre mois de cela, c'est une véritable folie, 14.000 nouvelles demandes chaque jour! En tout, 15% de la population passe par ces sites de retrouvailles. Même la littérature est touchée par le phénomène puisque Didier Daeninckx vient d'en faire un roman, "Camarades de classe".

Quelques petites réflexions sur cet engouement inédit:

1- Tout être humain a la nostalgie de son enfance et souhaite revoir ceux qu'il a connus, appréciés ou aimés. Mais jamais cette nostalgie n'était devenue à ce point un phénomène collectif et massif.

2- Il est surprenant que la société moderne, tout entière tournée vers l'avenir, bascule ainsi dans le passé de la scolarité.

3- Avant, le copain d'enfance se retrouvait par hasard ou en fréquentant une association d'anciens élèves. C'est fini: aujourd'hui, le contact est électronique et individuel.

4- Mais j'ai gardé le plus surprenant pour la fin: les abonnés à "Copains d'avant" ont en moyenne entre 30 et 50 ans. Autrefois, le retour vers le passé était la préoccupation des personnes âgées, éprises de leur jeunesse. Désormais, un jeune peut désirer renouer avec sa ... jeunesse. On peut avoir 30 ans et vouloir retourner 12 ans en arrière, à ses années de lycée. Là, VAL, ce n'est plus la sociologie qu'il faut appeler à la rescousse, c'est plutôt la psychologie!

La nostalgie semble atteindre très vite une génération dont on dit cependant qu'elle reste jeune beaucoup longtemps que les générations précédentes. Que fera-t-elle, dans quelle nostalgie sera-t-elle prise quand elle entrera dans ses 70-80 ans? C'est Simone Signoret qui avait donné ce très beau titre à son premier ouvrage: "La nostalgie n'est plus ce qu'elle était". Incontestablement. Serait-ce l'individualisme de l'époque qui pousserait à renouer les liens rompus ou distendus? Ou bien la curiosité de savoir ce qu'est devenu l'ami d'enfance, de se comparer à lui, dans une société très portée à la rivalité mimétique?

Je ne peux pas terminer ce billet sans vous faire un aveu, puisque la franchise est la règle d'or de ce blog: je me suis inscrit, il y a deux ans, à "Copains d'avant"! Mais oui, même moi, qui suis très peu nostalgique, qui ne m'intéresse pas au passé ou à mon passé. Pourquoi? Parce que j'ai le sentiment, largement illusoire, que le passé nous apprend quelque chose sur nous-même. Des amis, je n'en ai pas particulièrement besoin. Ceux que j'ai me suffisent. Mais en savoir un peu plus sur moi, oui, ça m'intéresse.

J'ai ma période de prédilection: les années 1977-1979, autour de mes 18 ans, quand j'étais pensionnaire (aujourd'hui, on dit "interne") au lycée d'Argelès-Gazost, dans les Hautes-Pyrénées. Je ne dirais pas cette connerie que c'était les plus belles années de ma vie, parce que j'espère bien que celles-ci sont devant moi. Mais c'était incontestablement les premières années de ce qu'on peut appeler une vie d'adulte. Avant, je me sentais enfant ou ado, je suis entré dans l'âge adulte à ce moment-là, dans cet endroit-là, très loin de mon Berry natal. Depuis, j'essaie encore plus, encore mieux d'être adulte. Mais j'ai toute la vie pour m'améliorer!

Qu'est-ce qu'a donné mon inscription sur "Copains d'avant"? Pas grand-chose. J'ai retrouvé en effet une camarade de classe dont je me souvenais très peu, elle m'a envoyé sa photo, on a échangé quelques messages, et puis ça s'est vite terminé. Au bout de ma quête, j'ai plutôt trouvé la déception. Bien fait pour moi! Je n'avais pas à réveiller le passé en croyant en tirer quelque chose. Pourtant, j'y ai gagné le plaisir du souvenir, de se remémorer juste un peu ce qu'on a été. Essayez, pour voir ...


Copains d'hier, d'aujourd'hui et de demain,

bon après-midi.

24 février 2008

Un ouvriérisme de droite.

Bonsoir à toutes et à tous.

Je vous ai parlé il y a une semaine d'une gauche "ouvriériste" encore vivante à Saint-Quentin. Mais il existe aussi une droite ouvriériste. C'est plus surprenant. Pourtant, au plus haut niveau, Nicolas Sarkozy s'en fait parfois le représentant. Cet ouvriérisme de droite partage en commun avec son homologue de gauche ce que certains appelleraient la démagogie ou le populisme, et que je préfère qualifier d'exaltation de la classe ouvrière détachée de sa réalité. Pendant sa campagne présidentielle, Sarkozy a pratiqué l'ouvriérisme: visites d'usines, discours aux salariés, photographies au milieu d'hommes aux casques caractérisant la condition ouvrière, c'est-à-dire des postures, des images, des mots, de l'idéologie, car dans le même temps, le projet du candidat était approuvé par le Medef et son contenu ne rejoignait pas les intérêts de la classe ouvrière. Le "paquet fiscal" de 15 milliards voté durant l'été, à qui a-t-il profité? Pas aux ouvriers!

Nicolas Sarkozy, en difficulté dans les sondages, a renoué cette semaine avec les fondamentaux qui ont permis sa victoire: l'esprit sécuritaire et l'ouvriérisme, les 1.000 policiers intervenant à Villiers-le-Bel et le chef de l'Etat sur le site de Mittal à Gandrange. Là-bas, qu'a dit Nicolas Sarkozy? C'est un peu le "je vous ai compris" de De Gaulle face aux pieds-noirs à Alger. On sait comment ça s'est terminé ... Le président de la République a évoqué l'idée d'un "fonds national pour la réindustrialisation", avec l'argument suivant: "Je me demande si on n'a pas intérêt à demander aux entreprises d'investir dans un fonds national".

Pourquoi pas, ce n'est pas une mauvaise idée, DSK l'a proposée depuis longtemps, pour toute entreprise en difficulté et obligé de se reconvertir. Et Sarkozy a assorti sa proposition de propos vengeurs contre le "capitalisme sans foi ni loi", le "capitalisme de spéculateurs"! Besancenot aurait-il de la concurrence? Pas vraiment, parce que le chef de l'Etat a défendu aussi le "capitalisme intelligent", le "capitalisme d'entrepreneurs". Je veux bien, je n'ignore pas la distinction, mais n'y a-t-il pas aussi une unité du système capitaliste qui font que les entrepreneurs sont aussi des spéculateurs et qu'on peut être très intelligent jusque dans l'exploitation des hommes?

Quoi qu'il en soit, je ne veux pas en rester à des réflexes idéologiques, ce qui m'intéresse, c'est la réalité. Et de ce point de vue, je me souviens de la visite de Nicolas Sarkozy sur le même site de Gandrange en début février et de son numéro ahurissant de syndicaliste, prenant la défense des ouvriers et leur promettant l'aide de l'Etat pour satisfaire leurs revendications. Là , Besancenot n'a qu'à bien se tenir. Sauf que les vrais syndicalistes nous disent tout autre chose: le groupe Mittal n'a pas fait les investissements nécessaires, il a voulu produire à moindre coût et n'a fait que dégrader l'outil de production, ses choix de gestion et de politique industrielle ont été néfastes, les embauches n'ont été accompagnées d'aucune formation (alors que le métier de sidérurgiste ne s'improvise pas).

Pourquoi tout ça? Parce que le groupe Mittal est bien connu pour ses pratiques financières: racheter des entreprises, garder les sites les plus rentables, abandonner les activités qui rapportent moins, afin d'offrir une meilleure rémunération aux actionnaires. Le "capitalisme intelligent", très intelligent, c'est celui-là. Mais est-il utile, très utile? Ca, c'est une autre question ... Dont j'ai quand même la réponse! Mittal a réalisé 8 milliards d'euros de bénéfices l'an dernier. C'est un groupe qui a les moyens de payer, ce n'est pas aux contribuables français de réparer ses erreurs de gestion. L'ouvriérisme débouche très vite sur l'interventionnisme et l'étatisme, qui ne sont pas nécessairement des valeurs de gauche.

L'ouvriérisme passe aussi par une façon de parler. Nicolas Sarkozy s'est fait l'adepte de ce qu'il considère comme le "parler populaire": s'exprimer comme tout le monde. C'est ce qu'il a encore fait hier au Salon de l'agriculture, en injuriant vertement un visiteur qui ne souhaitait pas le saluer. Je ne sais pas si cette spontanéité va plaire aux Français mais il me semble qu'elle rabaisse la fonction présidentielle. Dans les mots comme dans les idées, de droite comme de gauche, l'ouvriérisme est à condamner.


Bonne soirée.

Passer vite à autre chose.

Bonjour à toutes et à tous.

Est-ce parce qu'aujourd'hui est le dernier jour de mes vacances? Je suis dans une forme de lassitude. Depuis ce jour funeste où le bureau fédéral a, par pure procédure, validé la liste d' "unité de toute la gauche" (sic), je suis un peu en stand by. Et ce n'est pas dans ma nature! En fait, je n'ai qu'une envie, qui explique ma lassitude: en finir au plus vite avec la situation actuelle, que le soir du 9 mars soit déjà là (encore 15 jours, c'est pourtant rien, c'est pour moi une éternité), que la page des municipales soit tournée.
Ce n'est pas le résultat qui me rend impatient, moi qui suis si patient d'ordinaire. Non, le résultat, je le connais, tout le monde à Saint-Quentin le connait, et c'est bien ça qui est terrible. Je suis impatient de passer à autre chose. Les vacances ne m'auront pas aidé. On croit tout oublier et on ressasse tout. Vivement la rentrée de demain! Il n'y a que le travail qui fasse oublier.

Depuis quelques jours, nous avons officiellement connaissance des listes municipales. Pour les villes les plus importantes de l'Aisne, ce que je remarque, c'est leur nombre: 5 listes à Laon, 5 listes à Soissons, 5 listes à Château-Thierry, 4 listes à Villers-Cotterêts. Saint-Quentin se distingue: 2 listes seulement. Ailleurs, la diversité a joué, et je crois que c'est une bonne chose lorsque nous sommes dans un scrutin à deux tours: au premier on choisit (il faut donc avoir le choix), au second on élimine. En revanche, dans un scrutin a un seul tour, la bipolarité est préférable.
A Saint-Quentin, tout se joue comme s'il n'y avait qu'un seul tour, avec en quelque sorte une alternative radicale, une forme de montée aux extrêmes: d'un côté la liste de droite avec un ministre incarnant la politique gouvernementale, de l'autre la liste de gauche unie avec l'extrême gauche. S'il y avait eu diversité, si le centre gauche, le centre droit, les écologistes avaient eu leur propre représentation dans ce scrutin, nous serions allés probablement vers un second tour et un plus grand renforcement de la gauche.

Quand je porte mon regard ailleurs dans l'Aisne, je me préoccupe fort de Château-Thierry. La dissidence de Krabal, son alliance avec le MoDem menacent mon camarade Jourdain, certes bien implanté depuis 1989. Là-bas aussi, quand la division s'en mêle, elle devient mortelle. Si nous perdions Château sans gagner Laon ni Soissons, ce serait une catastrophe. Mais je sais que Dominique a des ressources. Je lui souhaite de tout coeur la victoire, d'autant que j'apprécie particulièrement mes camarades castelthéodoriciens. A chaque fois que je me rends dans leur section pour défendre les idées strauss-kahniennes que la grande majorité ne partage pas, je suis reçu avec une courtoisie, une tolérance, une fraternité remarquables. Est-ce l'esprit toujours présent de l'auteur illustre de la ville, Jean de La Fontaine? Peut-être ...

L'actualité nationale n'arrive pas non plus à me réjouir. Je pourrais comme tout le monde à gauche me satisfaire du "dévissage" spectaculaire de Nicolas Sarkozy dans les sondages (le vocabulaire de l'alpinisme est bizarrement utilisé en politique...). Mais ces sondages nous montrent aussi que c'est moins la politique que le comportement du président qui irrite. L'incident d'hier au Salon de l'agriculture (consulté 100.000 fois en quelques heures sur le site du Parisien!) en est le dernier épisode. Surtout, François Fillon, surprise des surprises, gonfle en popularité. J'ai compris: la droite, son électorat, son influence sont toujours là, le Premier ministre leur donnant une meilleure image que le président. Ce n'est pas de bon augure pour la gauche.


Bonne matinée.

23 février 2008

Luttes ouvrières.

L'usine Fapagau à Gauchy, qui appartient au groupe l'Oréal, a fait grève il y a quelques jours, comme d'autres sites dans toute la France. Ce que je retiens de ce mouvement, c'est qu'il s'est cristallisé autour de la question du pouvoir d'achat, et c'est nouveau. Il n'y a pas si longtemps, sous Jospin, ce sont les délocalisations et leur cortège de licenciements qui provoquaient la mobilisation ouvrière. Mais quand on a un emploi, on se satisfait souvent de sa situation. Cette résignation est terminée, le thème des délocalisations, fortement médiatique, n'est plus sur le devant de l'actualité. Maintenant, c'est le pouvoir d'achat.

Nicolas Sarkozy n'est pas pour rien dans cette évolution, puisqu'il s'est fait élire sur ce dernier thème. Les salariés le prennent au mot, ils ont raison, lui qui est venu les voir dans leurs usines durant sa campagne présidentielle. Et puis, un autre facteur est intervenu: la hausse très importante des profits et des rémunérations des grands patrons et de leurs actionnaires. On nous dit que tout va mal, mais tout va bien pour certains. Et ça, les salariés, qui sont prêts à tout entendre, ne l'acceptent pas, et ils ont une fois encore raison. D'autant que Sarkozy leur a expliqué que le pouvoir d'achat augmentera à la mesure du travail fourni. Or les actionnaires et chefs d'entreprise en question ne travaillent pas plus mais gagnent beaucoup plus. L'imposture du "travailler plus pour gagner plus" se dégonfle.

Le FMI n'est pas très optimiste pour la croissance française. L'erreur de la politique économique actuelle est dans son postulat: croire que le volume de travail est la condition du redressement économique. Travaillez, travaillez, l'économie se portera mieux. Et plus les français travailleront, mieux l'économie se redressera ... Non, c'est complètement faux. Si ce présupposé, en réalité moral et pas du tout économique, était vrai, les sociétés esclavagistes, qui faisaient beaucoup travailler les hommes, auraient été parmi les plus prospères. L'histoire de l'humanité confirme plutôt le contraire. En réalité, la prospérité économique n'est pas liée à l'accroissement de la durée du travail, mais à tout un contexte. C'est souvent une invention technique, la découverte d'une ressource naturelle, l'expansion géographique, l'élan culturel, la volonté politique qui permettent à une économie de se développer.

Nicolas Sarkozy échouera par où il aura pensé réussir, le pouvoir d'achat par l'accélération du travail. Un pouvoir est toujours condamné par ses propres erreurs, pas par les coups que lui porte l'adversaire politique, qui ne font que précipiter la chute mais qui ne la déclenchent pas. Ce qui ne doit pas empêcher, au contraire, la gauche de préparer l'alternative: il ne faut pas se contenter d'une baisse de Sarkozy dans les sondages, encore faut-il que la gauche augmente. Il ne suffira pas de gagner les élections municipales, en supposant que nous puissions les gagner. S'enfermer dans un "socialisme municipal" ou pire dans une contestation municipale de gauche ne seraient pas un service rendu au Parti socialiste et à sa rénovation. Nous devons bâtir un projet mobilisateur et attractif.

Je ne crois pas que celui-ci devra se focaliser sur le pouvoir d'achat. Laissons Nicolas Sarkozy se perdre avec ce thème qu'il n'arrive pas à satisfaire, et gardons-nous de faire comme lui. La hausse généralisée du pouvoir d'achat avait un sens en 1981, dans le cadre d'une politique globale de relance de la consommation, qui a d'ailleurs échoué même si elle a permis de revaloriser des prestations sociales injustement basses. Nous savons aujourd'hui que la consommation ne conduit pas au socialisme mais qu'elle est le moteur du capitalisme moderne. De plus, nous savons aujourd'hui que notre dette publique a atteint un tel niveau que les promesses en matière de pouvoir d'achat n'engagent que ceux qui les tiennent. Enfin, les augmentations de salaires relèvent de la négociation entre syndicats et patrons. C'est le dialogue et la concertation entre les partenaires sociaux qu'il faut encourager.

Si j'avais un triptyque à proposer, ce serait celui-ci: emploi, égalité, justice, à la place du sarkozien travail, pouvoir d'achat, défiscalisation. L'emploi parce que notre société continue de souffrir d'un chômage de masse dont on ne parle plus guère, comme si on s'était résigné à son existence. Or, la pire des injustices, c'est de ne pas avoir de travail. L'égalité parce que les écarts de salaires sont devenus disproportionnés et injustifiés. La justice parce que c'est le mot qui doit résumer une politique de gauche, parce que c'est aussi par excellence une fonction de l'Etat, parce qu'enfin le terme est absent du lexique sarkozien. Bataille des idées, bataille des mots, c'est ainsi que la gauche, si elle le veut, l'emportera demain, en imposant d'autres idées et d'autres mots.


Bon après-midi.

L'image censurée.

Bonjour à toutes et à tous.

Je reçois régulièrement sur ma messagerie électronique le programme de l'excellente émission "Arrêt sur images", désormais accessible sur internet. On peut consulter ainsi des extraits. Je vais peut-être m'abonner. Ce matin, un reportage m'a littéralement stupéfait. Il s'agit d'une image tirée d'un documentaire sur la Résistance française, diffusé sur France 2. Et que voit-on que je n'avais jamais vu jusqu'ici? L'hémicycle de l'Assemblée nationale occupé par des dignitaires nazis, avec au "perchoir" Alfred Rosenberg, idéologue du régime, le drapeau à croix gammée en dessous de lui, le buste d'Adolf Hitler à côté de lui.

C'est une image incroyablement violente, symboliquement très forte: le coeur de la République, son Parlement, envahi par l'ennemi, pavoisé aux couleurs et à l'effigie de son idéologie, retentissant de la voix de son principal "penseur". De cette époque, nous avons tous en mémoire cette autre image, mille fois repassée, de Pétain serrant la main d'Hitler à Montoire. Mais là, les choses étaient claires: le Maréchal compromet la France en saluant et en se soumettant. Pire que l'image de la trahison, il y a cette dernière image, inédite, celle de l'humiliation: la France des Droits de l'Homme touchée jusque dans son temple. L'image de Pétain avec Hitler est purement politique: elle nous montre le début de la collaboration. L'image de l'Assemblée "nazifiée" a une portée psychologique profonde: non pas l'ignominie d'un homme mais la négation d'un héritage, la République, à travers une cérémonie quasiment sacrilège.

Voilà sans doute pourquoi, pendant longtemps et encore aujourd'hui, cette image a été enfouie, oubliée, refoulée, sûrement maudite, objet de honte. Il y a aussi une raison pratique, mais qui n'explique pas la censure inconsciente que cette image a subie: elle faisait partie des archives détenues par les Soviétiques, auxquelles les chercheurs ont cependant accès depuis quelques années. Il est surprenant que notre société de l'image ait occultée cette image.

Les images ont toujours été très mal vues par les penseurs, au moins depuis Platon, qui privilégient les mots et les écrits, censés provoquer la réflexion. L'image au contraire est perçue comme un instrument de propagande et de tromperie, auquel les hommes se soumettent passivement. Encore aujourd'hui, mes collègues profs de philo portent un regard suspicieux sur la télévision, boîte à images par excellence. Je ne partage pas cette réticence et cette condamnation. L'écrit peut être retors, les mots enjôleurs: ils ne sont pas nécessairement les outils de la vérité. A l'inverse, une image peut donner à penser, laissant la liberté à chacun d'apporter son interprétation. Il y a une force des images parce qu'elles ont parfois une force de vérité. C'est le cas pour celle qui a suscité ce matin ma réflexion.


Bonne fin de matinée.

22 février 2008

Détruire les églises?

Bonsoir à toutes et à tous.

Mais oui, vous avez bien lu, je vais me demander ce soir: "Faut-il détruire les églises?" C'est sérieux, je n'ai pas bu, je ne suis pas devenu un "laïquard" (laïque me suffit) ni révolutionnaire "bouffeur de curé" ou vandale sacrilège. Non, rien de tout ça. Je suis simplement tombé cet après-midi sur un article fort intéressant tiré d'une revue fort sage, "Arts Magazine" n°20, décembre 2007-janvier 2008, dont le titre m'a servi pour intituler ce billet.

De quoi s'agit-il? D'un problème crucial à 15 jours du premier tour des élections municipales, problème qui se pose à des milliers de petites communes rurales et dont personne ne parle, parce qu'il n'intéresse pas la France urbaine qui donne le ton des actualités, parce que les solutions ne sont pas faciles à trouver. Il s'agit de l'entretien difficile, sinon impossible, des 60.000 églises paroissiales que se partagent 36.700 communes de France. Ces édifices appartiennent aux collectives locales qui ont donc la lourde charge de leur entretien.

Sauf que beaucoup sont inutilisés car datant d'une autre époque, d'une autre société, fort rurale et très chrétienne. Aujourd'hui, moins d'un quart des Français habitent dans les campagnes où se trouvent ... 80% des églises. De plus, beaucoup d'entre elles, avec l'usure du temps, sont devenues dangereuses à fréquenter, non pas idéologiquement mais physiquement. 20% seraient en situation de péril, donc susceptibles, pour la sécurité des visiteurs, d'être détruites.

Alors que faire? 11.300 parmi les 60.000 églises sont classées monuments historiques, par conséquent subventionnées. Pour elle, il n'y a pas trop de problème. Elles sont protégées par leur architecture. Mais un grand nombre d'églises ne sont pas véritablement des joyaux d'art. Certains conseils municipaux décident la destruction ... et la reconstruction d'une nouvelle église, mais ce sont des exceptions. Plus souvent, la restauration, quand c'est matériellement et financièrement possible, se fait à partir d'une initiative associative, dans le but de conserver au village son cachet et son identité.

Une autre solution est d'étendre l'usage de l'église du cultuel au culturel, en l'ouvrant à des concerts ou des expositions. Dans les pays anglo-saxons, certains édifices chrétiens sont cédés aux musulmans en manque de lieux de culte. Mais là, c'est la solution extrême d'une déchristianisation des églises. On a vu ainsi, en France, des chapelles achetées par des propriétaires privées et transformées en cinémas ou en restaurants.

Voilà, j'ai voulu vous faire part d'un problème important trop souvent ignoré. N'oublions pas cette France rurale. Je me rappelle d'une chanson qu'écoutaient mes grands-parents, "La petite église", qui commençait ainsi:

Je sais une église
au fond d'un hameau
dont le fin clocher
se mire dans l'eau

Je me souviens aussi de l'affiche de François Mitterrand en 1981, avec son clocher de campagne.


Lecteurs des villes et des champs,
chrétiens et laïques,
bonne soirée.

Frère Bertrand.

Les réactions locales après l'annonce de Xavier Bertrand sur son appartenance à la franc-maçonnerie ont retenu mon attention. Le Courrier Picard d'hier en fait mention, sous la photo du ministre, mais sans insister, se contentant d'une présentation factuelle. L'Aisne Nouvelle n'en dit rien, mais peut-être faut-il attendre son édition de demain. L'Union fait fort: une pleine page avec de nombreux entretiens et rappel de la situation maçonnique régionale. Les élus de droite, solidarité politique oblige, comprennent et soutiennent Xavier Bertrand. A gauche, c'est différent:

Le député Jean-Pierre Balligand n'a guère apprécié: "C'est son choix. Mais, pour moi, c'est de la mise en scène. Ce genre d'étalage est à la mode actuellement. Après Sarkozy qui nous a fait le coup de la religion, c'est un de ses adeptes qui se dit franc-maçon. Tout cela ne relève pas de la sphère politique, mais de la vie privée. Ca n'a rien à voir avec la transparence (...). Pour ma part, si on me posait la question de savoir si je suis franc-maçon, je ne répondrai pas. Je refuse de parler de ce que je considère comme relevant de la vie privée."

Le député René Dosière n'est pas plus tendre: "Ca fait partie de la vie privée et je me fiche de la vie privée de M. Bertrand. Ce qui m'intéresse, c'est son action politique. Il convient de séparer la vie politique républicaine et la vie privée. Etre franc-maçon est une conviction personnelle dont je ne vois pas l'intérêt de l'afficher. Si on me posait la question, je n'aurai aucune raison d'y répondre. La transparence en politique, ce n'est pas le non-respect de la vie privée."

Les responsables de la franc-maçonnerie sont moins sévères mais tout de même surpris. Voilà comment L'Union relate leurs réactions:

"Théophile Prince [membre éminent du Grand Orient de France] se méfie au passage "du souci de transparence" qui peut s'apparenter à du "voyeurisme". Il stigmatise également "ceux qui confondent ce qui relève du Temple et ce qui relève du profane".

"Yves-Max Viton, membre de la loge Lamarck à Amiens, a été grand maître de la Grande Loge de France pendant un an. Il qualifie la démarche de Xavier Bertrand de "peu courante" (...). "Son choix est surprenant."

Etonnant peut-être, mais pas surprenant: vous connaissez l'explication que j'ai exposée dans un billet il y a deux jours. Je ne suis pas certain que l'opération fonctionne vraiment. Une partie de l'électorat de droite porte, à tort, un jugement négatif sur la franc-maçonnerie. Il y a toujours eu, à droite, un anti-maçonnisme assez puissant (je ne parle même pas de l'extrême droite!). Bertrand va ternir à leurs yeux son image. Mais la gauche maçonnique, ses propres frères, n'auront pas nécessairement de lui une meilleure image, qui ne respecte pas la discrétion souhaitée quand on est membre d'une loge.


Bon après-midi.

It's a free world.

Bonjour à toutes et à tous.

Le Ciné Philo a présenté lundi soir le dernier film de Ken Loach, "It's a free world". 54 spectateurs et une trentaine de participants pour le débat: pas mal. Les échanges ont porté sur le film, bien sûr, mais surtout sur les thèmes du film: un ciné philo n'est pas un ciné club, les images ne sont pas étudiées pour elles mêmes mais pour les réflexions qu'elles suscitent en nous. Le film est en quelque sorte un prétexte à débattre. Lundi soir, ce sont les conséquences du libéralisme économique sur le monde du travail qui ont été l'objet de nos réflexions.

Ken Loach a une culture trotskyste qui traverse toute son oeuvre. Et pourtant, son dernier film n'est pas anticapitaliste ou révolutionnaire, en tout cas je ne l'ai pas perçu ainsi. D'abord parce que c'est un tableau réaliste, sans caricature ni visée propagandiste, du marché de l'intérim en direction des travailleurs immigrés et clandestins dans l'Angleterre d'aujourd'hui. Ensuite parce que ce tableau n'est pas sombre ni pessimiste: il est vivant, et j'ai envie de dire que la vie est toujours porteuse d'espoir, même si Ken Loach ne donne aucune solution ni ne délivre aucun message.

Pendant le débat, nous avons eu droit, bien entendu, aux habituelles interventions "antilibérales", qui comme d'habitude ne m'ont pas semblé convaincantes tellement elles sont dogmatiques. Loach, tout trotskyste qu'il est, a su, en artiste, ne pas tomber dans le dogmatisme. Je retiens de son film deux idées qu'il a provoquées en moi et qui contredisent l'antilibéralisme de convenance ou de posture:

1- Ken Loach porte son regard non pas sur le "marché", qui a ses lois, ses juridictions, son droit du travail et des affaires, mais sur les marges du marché, l'emploi des immigrés clandestins rémunérés à l'heure (et parfois pas rémunérés du tout!), sans contrat ni droits, vivant dans des conditions épouvantables. Là, on peut parler d'exploitation et d'esclavage moderne. Là, il faut dénoncer et intervenir. Mais la conclusion est-elle pour autant "antilibérale" (si tant est que l'antilibéralisme est un sens)? Non, il en résulte seulement que le marché exige des règles, qu'en l'absence de règles, ce n'est plus le marché, c'est la jungle.

Mon camarade Jean-Marie, venu tout exprès de Soissons, défend l'idée que les marges vont s'étendre à l'ensemble du système, que la réalité d'aujourd'hui pour les immigrés sera la réalité de demain pour l'ensemble des salariés. Il rapproche le débat politique actuel sur la flexibilité de cette précarité absolue et misérable dans laquelle survivent les clandestins en Grande-Bretagne. C'est évidemment un rapprochement outré et faux. On joue, je ne sais pourquoi, à se faire peur. Il y a suffisamment de souffrances et de problèmes réels pour ne pas s'en inventer d'invraisemblables. Je ne comprends pas pourquoi certains socialistes parlent comme Besancenot ... et ne le rejoignent pas, sauf le temps d'une liste municipale. Ou je comprends trop bien: ils sont en mal d'identité politique, ils ne savent plus en quoi ils croient, ils récitent mécaniquement la messe.

2- Quand on parle d'exploitation, et ce film nous raconte une histoire d'exploitation, on a en tête le patron exploiteur, bourgeois féroce, chef d'entreprise sans scrupules, homme de droite comme il se doit. Eh bien non, ce n'est pas l'angle d'attaque choisi par Ken Loach: l'exploiteur est une récente ... exploitée, qui s'est fait virée de son boulot pour avoir résisté au harcèlement sexuel de son employeur. Elle est jeune, sexy, libérée, mère célibataire, plutôt progressiste, moderne et bourrée de dettes, son père est un syndicaliste à l'ancienne, sa famille est de gauche, elle aussi, tout le laisse supposer. Elle a décidé de monter sa propre boîte de recrutement de main d'oeuvre.

Et comment se comporte-t-elle? Pire qu'un patron de droite! A mon niveau, incomparablement moins grave, il m'est arrivé de rencontrer ce type de comportements, des gens très à gauche dont les convictions se dissipent dans la pratique professionnelle ou la vie quotidienne. Ce que nous montre Ken Loach, et qui a laissé amers certains spectateurs, c'est que le système "libéral" est arrivé à un tel point de perfection qu'il a réussi à convaincre les exploités qu'ils ne pouvaient s'en sortir qu'en devenant à leur tour exploiteurs.

Allez voir ce film, c'est un bon film qui fait réfléchir, comme j'ai tenté de vous le montrer. Ken Loach réussit, avec une fiction, à nous rapprocher d'une certaine réalité économique et sociale d'aujourd'hui, là où Michael Moore nous éloigne de cette réalité en nous proposant des documentaires que je trouve caricaturaux et faux. Loach a gardé de sa culture trotskyste cette leçon de Léon, à laquelle j'adhère complètement: "Seule la vérité est révolutionnaire". Le documentariste Moore est dans la fiction, la fiction de Loach est au coeur de la réalité.


Bonne matinée.

21 février 2008

Une France sans socialistes?

Bonsoir à toutes et à tous.

Il y a quelques années, le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin avait fait un rêve: que les socialistes, tout simplement, n'existent plus politiquement. Le PS aujourd'hui, je le dis en pesant mes mots, est en danger de mort, de lente disparition au terme d'une lente désagrégation. Trois éléments constituent le dispositif de cette mise à mort:

1- Nicolas Sarkozy, durant sa campagne présidentielle, s'est emparé des symboles et références du PS: le travail, la classe ouvrière, Jaurès. Elu président, il a entraîné vers lui des hommes du PS et appliqué scrupuleusement cette stratégie d' "ouverture" pour les élections municipales. Maintenant, il veut pousser plus loin l'avantage, en mettant en avant son ministre préféré et premier ministrable Xavier Bertrand. Celui-ci applique à la lettre cette stratégie de captation d'héritage et de marginalisation du PS: il révèle, alors que personne ne lui demande rien, qu'il est franc-maçon du Grand Orient, c'est-à-dire un "progressiste". Et cela à l'approche du discours du président de la République rue Cadet, au siège de l'obédience: un événement, le chef de l'Etat dans un temple maçonnique!

Même un président de gauche ne l'avait pas fait ... Pourtant, Sarkozy n'est pas particulièrement laïque, cela va s'en dire. Bertrand lui a ouvert probablement le chemin des loges. L'opération est flagrante: reprendre au PS ce qui lui reste, la laïcité, le déposséder progressivement de son identité, lui enlever toute raison d'être. A Saint-Quentin, le républicain Grzeziczak, le social-démocrate Lebrun, le ségoléniste Saïdi ont fait le pas. L'objectif est d'asphyxier politiquement le PS, le laisser à l'état de baudruche.

2- Cette stratégie recoupe celle de François Bayrou, qui lui aussi est en pointe sur la laïcité, qui lui aussi rêve d'une France sans socialistes. Son omniprésence médiatique, sa virulence contre le gouvernement, sa récupération de thèmes progressistes, tout cela va également dans le sens d'une marginalisation du PS. Bayrou veut être l'opposant n°1 à Sarkozy, c'est évident. Et Sarkozy n'est pas fâché de voir Bayrou occuper la place du PS. Il sait que les centristes ne l'emporteront jamais contre lui, qu'ils peuvent être une force de nuisance mais pas une véritable alternative au pouvoir de droite. Bayrou, c'est l'assurance pour Sarkozy de conserver longtemps le pouvoir, l'opposition de Sa Majesté en quelque sorte.

3- Et puis, troisième élément du puzzle dans la stratégie sarkozienne de liquidation du Parti socialiste: jeter ce qui reste du PS dans les bras de l'extrême gauche, susciter sa radicalisation, le réduire à une force de protestation pour ainsi le priver de toute chance d'accéder aux responsabilités. Saint-Quentin est le "mini-laboratoire" de cette stratégie mortifère. Sarkozy peut là encore féliciter Bertrand.

Voilà les trois B d'un terrible plan B: Bertrand, Bayrou, Besancenot, la destruction du PS par une droite "sociale", un centre "progressiste" et une extrême gauche "ouverte", restreindre l'espace politique des socialistes jusqu'à peau de chagrin, les cantonner dans une éternelle opposition. Heureusement, moi et quelques autres ne croyons pas en l'éternité.


Bonne soirée.

Bienvenue chez les Ch'ti.

"Bienvenue chez les Ch'ti", le dernier film de Dany Boon, fait un carton dans le nord. C'est incontestablement le signe d'une vitalité régionaliste, un besoin d'identification pour bon nombre de nos concitoyens. A l'heure de la mondialisation, les terroirs ont encore de beaux jours devant eux. Le film a été projeté en avant-première dans le Nord, les pays de langue picarde (comme le rappelle mon collègue Jean-Pierre Semblat dans Le Courrier Picard), mais pas dans l'Aisne ni dans l'Oise, comme si ces deux départements n'appartenaient pas à cette région, ce qui pose déjà, en soi, un problème politique.

Les identités locales, régionales ou nationales, ce n'est pas trop mon truc. La seule identité qui me semble digne d'intérêt, c'est l'identité humaine. Je suis humaniste, pas régionaliste, je suis mondialiste, cosmopolite, internationaliste, pas nationaliste. Pourtant, j'ai envie d'aller voir "Bienvenue chez les Ch'ti", d'abord parce que la bande-annonce m'a fait rigoler et que les occasions de rigoler, en ce moment à Saint-Quentin, sont plutôt rares, ensuite parce que le Nord, c'est chez moi ou presque, et que je me suis trouvé un beau jour de juin 1994 dans la même situation que le personnage du film: un fonctionnaire parmi d'autres fonctionnaires affecté dans le nord de l'Aisne, au lycée Henri-Martin.

En ce mois de juin, juste après mon année de stage à Reims, j'ai appris que ma première ville d'exercice, ce serait Saint-Quentin. Saint quoi? L'Aisne où? Soulagement quand j'ai appris que la liaison ferroviaire avec Paris était simple et rapide: je pouvais garder mon appartement dans le XIXème arrondissement et rentrer quasiment chaque soir. Turbo-prof, comme on nous appelle. Quelle a été ma première réaction en débarquant? Les années 50! J'avais l'impression d'être dans un décor des années 50 en traversant la gare SNCF. Cette impression n'était pas désagréable, simplement étrange. J'étais dans un monde anachronique qui me faisait penser à mon Berry natal, une France profonde un peu hors du temps, un peu oubliée du reste de la société.

Le Nord, je n'en connaissais rien. Gamin, j'étais allé au Tréport et à Marseilles-en-Beauvaisis, chez une tante, mais c'est tout. J'en avais l'image commune: Brel et son plat pays, Macias et ses gens du nord, Bachelet et ses corons. Des clichés! A Saint-Quentin, je me suis installé en 1998, fini le turbo-prof. Et j'y suis resté, alors que beaucoup de mes collègues venus "d'ailleurs" attendaient impatiemment leur mutation. Et j'aime maintenant cette ville et cette région, qui finalement me ressemblent (je me vois mal dans le Midi trop extraverti). Et ici, il y a tant à faire!

La pluie proverbiale ne me gêne pas, et je ne comprends pas qu'on puisse complexer à cause du climat. La pluie et le ciel gris, c'est beau, c'est mélancolique, c'est tranquille. Le soleil, ça tape, ça énerve, c'est violent. Au lieu de maudire la pluie, nous devrions en faire un argument de communication et de tourisme. Plus au nord, une civilisation pluvieuse et brumeuse, la Grande-Bretagne, a dominé le monde pendant plusieurs siècles. L'avenir sourit aux pays où il pleut.

Le Nord me plaît aussi pour deux raisons plus directement politiques: c'est le coeur de l'Europe, notre grande aventure du siècle, c'est le coeur historique du socialisme, qui commencera ici sa rénovation, ou nulle part.

Que le film de Dany Boon réhabilite dans l'humour le Nord, c'est très bien. Et puisque je vous ai parlé du Berry, je voudrais terminer par une petite anecdote: Ch'ti, c'est aussi un mot du dialecte berrichon, mais qui n'a rien à voir avec son sens picard puisque c'est un adjectif qui désigne au choix quelqu'un de malingre (ch'ti = petit), de radin ou de méchant, quand ce n'est pas les trois à la fois!


Bonne fin d'après-midi picarde.

Non-problème et problème.

C'est quoi un "non-problème"? Je suppose que c'est quelque chose qui ne pose aucun problème. En affirmant à l'hebdomadaire VSD que "les sectes sont un non-problème", Emmanuelle Mignon, directrice de cabinet du président de la République, vient à coup sûr de créer un problème! Car qui peut affirmer sérieusement que l'existence et le développement des sectes ne posent pas un problème? Même si l'ordre public n'est pas nécessairement menacé par certains groupes sectaires, on peut au moins s'inquiéter que des discours irrationnels, farfelus, déstabilisants aient un impact sur une partie grandissante de la population. Rien que ça, c'est un problème, d'éducation, de culture, de santé mentale.

Certes, Emmanuel Mignon a démenti et VSD a maintenu. Qui croire? Je pense qu'elle a réellement tenu ces propos, puisqu'elle les prolonge en critiquant la Mission interministérielle chargée de ... lutter contre les sectes. L'Eglise de Scientologie a immédiatement réagi sans s'y tromper: "La France évolue dans le bon sens." On comprend pourquoi ...
Si cette intervention ne s'inscrivait pas dans tout un contexte, voulu par Nicolas Sarkozy, de réhabilitation de la religion, je serais près à admettre la bourde et à ne pas critiquer plus loin. Mais là, non, nous sommes devant un pouvoir qui a choisi de promouvoir la "spiritualité", y compris sous sa forme la plus douteuse qu'est le sectarisme.

Non seulement les sectes ne sont pas un non-problème, mais j'affirmerais même que le problème qu'elles posent est plus grave qu'il y a 30 ans. Dans les années 60 et 70, les sectes prospéraient sur le malheur des gens. Qu'elles s'appellent secte Moon ou Témoins de Jéhova, c'étaient les personnes marginalisées socialement ou fragiles psychologiquement qui étaient visées et victimes. Depuis une quinzaine d'années, l'univers sectaire a beaucoup changé. La cible, ce sont désormais, de plus en plus, les classes moyennes, les catégories cultivées, les milieux intégrés et aisés. Les paumés n'intéressent plus, ce sont les cadres supérieurs qu'on rencontre dans les élégants symposiums ou stages de relaxation des sectes.

La rhétorique sectaire a changé elle aussi: Moon et Jéhova, c'était du baratin pseudo-religieux, la Scientologie, comme son nom l'indique, a une prétention "scientifique". Les sectes se sont modernisées, elles deviennent moins repérables et encore plus dangereuses, voilà le problème. Avant, elles discouraient sur le malheur du monde et la fin des temps. Aujourd'hui, elles parlent de bien-être, d'accès au bonheur, de médecine. Elles sont passées du registre de la peur à celui du plaisir. Dans une société qui croit beaucoup plus au sentiment qu'à la raison, elles disposent d'une redoutable efficacité.

Dans ma ville, Saint-Quentin, les sectes sont comme ailleurs présentes. Les Mormons ont un grand et bel édifice de culte, les Témoins de Jéhova sillonnent les rues de la ville, les groupes évangélistes distribuent de petites Bibles à la sortie des lycées. Rien de bien méchant, mais il faut rester vigilant et éviter la confusion des genres. Je me souviens d'une distribution de soupe assurée par ces grands gaillards de Mormons, lors des fêtes du Bouffon. Ils se faisaient remarquer par leurs très distincts badges noirs. Certes, ce n'est pas en versant du bouillon pendant un carnaval qu'on fait nécessairement des conversions, et je veux bien reconnaitre leur serviabilité, mais ce n'était pas leur place.

Julien Dray a lancé l'idée d'une manifestation de soutien à la laïcité. Bonne initiative. Les laïques ont su par le passé organiser de puissantes mobilisations. Il faut reprendre ce genre d'action.


Bon après-midi.

Le rideau de sucre.

Bonjour à toutes et à tous.

Fidel Castro a pris sa retraite. Le héros de l'extrême gauche, du moins dans les années 60, va finir sa vie en bon vieux pépère. Est-ce ainsi que se rêvait le jeune guerillero, l'ardent révolutionnaire? Toujours est-il que ce passage de témoin au frère Raoul me donne l'occasion d'une petite réflexion sur Fidel, le communisme et la gauche française:

1- Cuba est aujourd'hui le dernier régime communiste mondialement connu, le dernier vestige d'une aventure universelle qui a commencé en 1917. Qui pouvait alors penser qu'un mouvement né dans l'immense et froide Russie allait se terminer dans une petite île tropicale un siècle plus tard? La Chine bascule dans le capitalisme, d'autres régimes encore communistes tels que la Corée du Nord n'ont pas le rayonnement mondial de Cuba. De plus, le castrisme, distinct du soviétisme, a longtemps été préservé des tares les plus graves qu'on reprochait au communisme.

2- C'est pourquoi Cuba et Fidel ont bénéficié d'un capital de sympathie qui n'a jamais complétement disparu. Les plages de sable fin, la mer très bleue, les cocotiers, ce n'est pas la Sibérie ou la jungle cambodgienne! On conçoit mal le goulag s'y installer, on n'imagine pas de totalitarisme sur des airs de samba. Et pourtant ...
J'ai connu des amis socialistes, défenseurs exigeants des droits de l'homme, aller en vacances à La Havane sans problème. Toute une partie de la gauche pourtant réformiste, Jack Lang, Danielle Mitterrand, a succombé aux charmes de ce communisme exotique. Même Pierre André a dit un jour, je ne sais plus à quelle occasion et ni sur quel point, s'intéresser au régime cubain!

3- Aujourd'hui comme au premier jour, nous connaissons la nature de ce régime. Si je veux rester objectif et le plus précis dans mes termes, je le qualifierais de dictature sociale et anti-impériale. Dictature parce que les cubains n'ont jamais eu à choisir leurs dirigeants, que la vie politique là-bas n'a rien à voir avec une démocratie représentative. Mais une dictature sociale puisqu'elle a amélioré les conditions de vie des habitants et n'a pas cherché à les exploiter économiquement. Enfin une dictature inti-impériale puisque son existence, encore aujourd'hui, se fonde sur son hostilité à la puissance nord-américaine.

Ces deux dernières caractéristiques, le socialisme et l'anti-impérialisme, ont laissé croire que le castrisme pouvait être tolérable et même défendable aux yeux d'un authentique homme de gauche, exonérant le régime de sa dimension autoritaire. Non, non et non! Un vrai socialiste, de tradition réformiste, ne peut pas être, de près ou de loin, un castriste. L'émancipation de l'homme, qui est notre idéal, ne se divise pas, elle est totale, économique, politique et culturelle. Quand Castro pourchasse les homosexuels, quand il enferme les opposants politiques, il a beau donner à manger à son peuple, ce n'est pas un homme de gauche tel que je l'entends.

Si vous voulez en savoir plus sur le régime castriste, je vous conseille la projection du documentaire "Le rideau de sucre", qui aura lieu le lundi 25 février à 20h30, à Chauny, au Cinéma Lumière, en présence de la réalisatrice Carmila Guzman.


Bonne matinée.

20 février 2008

Une gauche sans avenir.

Bonsoir à toutes et à tous.

Un lecteur me demande, sur ma messagerie personnelle, de lui décrire "l'aile gauche du PS", ayant été intéressé par mon billet sur la "gauche ouvriériste" et ne sachant rien d'Alain Vidalies et de Marc Dolez. Je vais donc me livrer à une petite géographie des courants qui se qualifient eux-mêmes de "gauche socialiste" ou de "socialistes de gauche", mais ces expressions sont d'emblée polémiques et discutables, puisqu'elles impliquent l'existence de socialistes "de droite". Pour certains camarades, un strauss-kahnien, c'est un homme de droite. A la limite, à leurs yeux, je n'ai rien à faire au PS! Cette façon de voir explique bien des comportements, notamment locaux, qui semblent parfois énigmatiques ou aberrants pour le profane.

En ce qui me concerne, je ne me reconnais évidemment pas dans une soi-disant "droite" du PS. Aux lecteurs de juger si "L'Aisne avec DSK" exprime un courant de droite. Il ne me semble pas! Je suis un socialiste, de tendance social-démocrate, point. Quant à mes camarades qui se présentent comme "la gauche du PS", je les désigne moi aussi ainsi parce que je respecte l'identité qu'ils s'attribuent. J'aimerais qu'ils fassent de même en ma direction, et abandonnent les termes négatifs de "droitier" ou "social-libéral", qui ne veulent rien dire. Je vais maintenant vous présenter cette "aile gauche", du moins l'idée que je m'en fais, et que je divise en 6 sensibilités:

1- Les fabiusiens regroupés dans le club Gauche Avenir, dont le destin est surprenant puisque pendant 20 ans, ils ont incarné ... l'aile droite du PS. "Fabiusien", c'était presque une insulte! Les temps changent, les retournements sont rapides: il a suffi que Laurent dise non à la Constitution européenne en 2005 pour que l'aile gauche en fasse son chouchou et son espoir (raté en 2006). Idéologiquement, ce néofabiusisme est très fragile. On ne passe pas impunément de la gauche moderne à la gauche radicale. Il faudrait que ce courant remembre son identité. Pour le moment, il se contente de cultiver une vague nostalgie du mitterrandisme et de l'union de la gauche qui ne va pas très loin, Fabius se posant en "sage actif", ce qui n'est pas folichon. Les fabiusiens les plus lucides, Weber, Bartolone, opèrent un rapprochement avec les strauss-kahniens.

2- Le Nouveau Parti Socialiste, lui aussi, est de création récente. Sa première mouture remonte à 2002. Après le traumatisme causé par la disqualification de Jospin par Le Pen, le NPS a incarné une réaction de renouveau, portée par Montebourg et Peillon, avec comme thème central, un peu curieux car assez loin de la préoccupation des français, la revendication d'une VIème République. Puis Montebourg et Peillon sont partis, laissant le NPS actuel à Emmanuelli et Hamon. Je n'arrive plus trop à cerner aujourd'hui leur profil idéologique. Hamon est en tout cas quelqu'un avec lequel on peut discuter.

3- Pour la République Sociale, c'est le courant de Mélenchon. De tous mes camarades de la gauche socialiste, c'est celui que j'apprécie le plus humainement. D'abord parce que c'est un homme de fortes convictions et d'une grande sincérité, ensuite parce que sa démarche est extrêmement cohérente. Je ne la partage pas mais je salue son intégrité et son intelligence. A côté, Gauche Avenir et le NPS sont un peu mous et flasques! Mélenchon, c'est un personnage, et je l'aime bien pour ça! Et un militant comme on n'en fait plus! Je ne sais pas quel sera son avenir, mais il en a un, à la différence de Fabius. Sans doute plus à l'extérieur du PS qu'à l'intérieur...

4- "Forces Militantes" est animé par Marc Dolez, qui lui aussi, comme le NPS, a représenté une réaction, presque épidermique, au funeste 21 avril 2002. Mais si le NPS s'est donné une image moderniste, Forces Militantes a joué carrément la carte de la tradition. Dolez, c'est le patron de la fédération du Nord, qui a mis en avant le socialisme le plus traditionnel, celui de la SFIO, ouvriériste, laïque, basiste. Imaginez un peu le retour de Guy Mollet à l'aube du troisième millénaire! Quand le présent effraie, quand l'avenir est incertain, on se réfugie dans le passé. Et ça a un peu marché. Maintenant, c'est passé, le phénomène Ségolène Royal a balayé toutes ces scories.

5- Les poperénistes ont intégré le courant fabiusien mais conservent leur identité. Alain Vidalies est leur député, Anne Ferreira est leur députée européenne, Emmanuel Maurel est leur "idéologue". Je ne vous en dis pas plus, j'en ai longuement parlé dans de précédents billets.

6- Le courant de la "gauche socialiste" le moins connu est sans doute celui de Gérard Filoche, "Démocratie et Socialisme", à ne pas confondre avec le courant strauss-kahnien "Socialisme et Démocratie"! Filoche et Dolez sont assez proches politiquement, on peut parler à leur propos d' "ouvriérisme", Filoche étant très marqué par sa profession d'inspecteur du travail.

J'ai volontairement exclu de cette "aile gauche" du PS deux courants qui en viennent mais n'en sont plus:
- Vincent Peillon et ses amis, qui ont suivi Ségolène Royal alors que celle-ci n'était pas du tout sur une ligne de gauche, et qui sont aujourd'hui encore ses plus fidèles supporters.
- "Rénover maintenant" d'Arnaud Montebourg, qui lui aussi, étonnement, a rejoint Ségolène, mais se rapproche aujourd'hui des strauss-kahniens.

J'ajoute que Gérard Filoche et Jean-Luc Mélenchon ont été les deux seuls leaders socialistes en vue à assister aux obsèques du révolutionnaire Pierre Lambert.

Cette gauche socialiste que j'ai tenté de vous décrire sommairement, n'a pas pour moi d'avenir. La candidature de Ségolène a tout balayé sur son passage, Fabius est fini, Mélenchon pense à autre chose qu'au PS, le passé glorieux ne reviendra pas.


Bonne soirée.

Le tablier ne fait pas le maçon.

Bonjour à toutes et à tous.

Xavier Bertrand a révélé à L'Express, dans un entretien exclusif, qu'il était franc-maçon. A Saint-Quentin, dans le petit monde politique, c'était un secret de polichinelle. Le secret, ça n'existe pas, c'est un argument qu'on brandit pour faire taire les gêneurs ou pour cacher des choses inavouables. Dès que trois personnes sont ensemble, il n'y a plus de secret. Cependant, qu'un ministre très en vue fasse cet outing d'un genre inédit, c'est une première. Certes, des personnalités politiques ont par le passé admis leur appartenance maçonnique, mais à partir d'une question qu'on leur posait furtivement, sans se prêter à un interview consacré uniquement à la question. Cette ostentation est recherchée et elle mérite qu'on réfléchisse à l'objectif poursuivi.

D'abord, je ne crois pas qu'un ministre doive faire état de ses convictions intimes. J'ai reproché à Nicolas Sarkozy d'afficher son "catholicisme", j'ai la même réaction avec la proclamation "maçonnique" de Xavier Bertrand. Que la première conviction soit de nature religieuse et la seconde de nature philosophique ne change strictement rien. Au nom de la distinction laïque entre la sphère publique et la sphère privée, un ministre est libre de ses convictions personnelles mais n'a pas à en faire état en tant que ministre. A mon niveau, dans un autre registre mais avec un raisonnement analogue, fonctionnaire de l'enseignement, je ne révèle pas à mes élèves mes options philosophiques. Dans le respect des opinions de chacun, un homme politique doit en rester à ses convictions politiques, les seules qui concernent les citoyens et les éclairent dans leurs choix.

Je reproche aussi à cet aveu d'être contraire à l'esprit maçonnique. Je ne suis pas franc-maçon bien qu'ayant été sollicité à plusieurs reprises, je connais beaucoup de francs-maçons de par mon milieu politique et associatif, je m'intéresse de près à la maçonnerie dont je partage les valeurs et les idées, qui sont celles des Lumières. Je me sens solidaire des maçons lorsqu'ils sont injustement et stupidement attaqués. Bref, je suis un "maçon sans tablier", plus attaché par nature et par profession à la démarche conceptuelle qu'à la démarche symbolique.

Mais ce que j'apprécie dans cette pratique philosophique qu'est la maçonnerie, c'est le sens et l'importance qu'elle accorde non pas au secret (je vous ai dit que ça n'existait pas, et sûrement pas en maçonnerie puisque tout est décrit dans une abondante littérature), mais à la discrétion. Je crois en effet qu'on ne réfléchit bien que dans la discrétion, le calme, la sérénité, la modestie de la pensée, à l'abri des préjugés et des influences du monde. La grande vertu des loges est dans ce refus de la publicité, de l'étalage, du prosélytisme, qui prend à contrepied la société contemporaine, fort exhibitionniste et médiatique. De ce point de vue, Bertrand a le tablier, mais en respecte-t-il vraiment l'esprit?

A ce niveau politique, tout propos délibéré a une finalité. Mon hypothèse, c'est que Xavier Bertrand, par touches successives, dessine son image, compose son personnage, passage obligé pour qui aspire à de plus hautes fonctions: cette image, c'est celle d'un homme d'ouverture, d'une "droite sociale" comme il se plaît à le répéter, une droite en quelque sorte progressiste. Le Grand Orient, c'est parfait pour compléter le portrait. A Saint-Quentin et dans l'Aisne, il lui faut aussi capter la gauche laïque, réformiste, l'inclure dans la majorité municipale (et demain départementale et régionale?), et rejeter l'opposition de gauche à l'extrême gauche. C'est la stratégie Sarkozy, impeccablement réussie dans notre ville. Avec ça, un pouvoir peut se maintenir facilement 30 ans! Si personne ne vient perturber la belle mécanique ...

Je ne mets pas en cause les convictions personnelles du ministre du Travail. En tant que telles, elles ne m'intéressent pas et je n'ai pas à juger de leur sincérité. J'essaie seulement de comprendre une annonce plutôt surprenante et de proposer une explication, puisqu'il y a une raison à tout en ce monde, surtout en politique.


Bon après-midi.

19 février 2008

La corruption et la vertu.

Bernard Dordonne, dans L'Union de ce matin, a eu la bonne idée d'enquêter sur les indemnités des élus. Tous les citoyens devraient posséder ces informations, savoir combien sont rétribués les représentants du peuple. Avec internet, il n'y a plus de secret. Mais le lire dans le journal local, c'est encore mieux. Je vais donc citer les chiffres et les sommes que donne le journaliste, sous son entière responsabilité, en rappelant que Saint-Quentin est une ville de 61.062 habitants:

- Ministre: 13.905,82 euros.
- Député: 8.036,20 euros.
- Sénateur: 6.952,91 euros.
- Maire: 4.094,90 euros.
- Président de la communauté d'agglomération: 4062,41 euros.
- Maire-adjoint: 1.624,96 euros.
- Conseiller municipal: 221,59 euros.

Ces données m'inspirent trois réflexions:

1- Les rétributions des élus me semblent normales et justes. La République doit indemniser correctement ses représentants, sinon elle serait indigne d'elle même. Les montants indiqués, si on compare avec d'autres secteurs d'activité, ne sont pas excessifs, quand on sait le travail d'un élu qui accomplit consciencieusement sa tâche.

2- En revanche, il y a problème quand certains élus cumulent plusieurs mandats, en empochant à chaque fois l'indemnité afférente. Mais c'est moins la question de la rémunération que celle du cumul. Pierre André a partiellement répondu à ce problème en partageant son indemnité de maire entre ses 8 conseillers municipaux délégués, geste rare et qui l'honore. Sa rétribution n'en demeure pas moins de 11.015,32 euros par mois. En tant que sénateur, il bénéficie en plus d'une voiture de fonction, d'un chauffeur et d'indemnités pour ses assistants. Ce ne sont en rien des "privilèges", comme le soutiendraient les démagogues, mais des moyens indispensables de travail.

3- Si les indemnités des élus me paraissent normales par rapport au service rendu à la collectivité, il n'empêche que ce sont des sommes importants, qui doublent bien souvent le salaire de celles et ceux qui les perçoivent, qui représentent donc une amélioration considérable de leur niveau de vie, surtout lorsque celui-ci était précédemment médiocre. C'est là où se pose le problème, aussi vieux que la République, de la corruption, non pas au sens juridique du terme (l'écrasante majorité des élus sont des gens honnêtes) mais au sens politique et moral.

Combien acceptent de rejoindre une liste, d'intégrer tel ou tel courant, de soutenir tel candidat plutôt qu'un autre parce qu'ils seront à la clef financièrement récompensés? Beaucoup plus qu'on ne le croit. Les hommes sont des hommes, c'est-à-dire des créatures faibles, donc corruptibles, influençables. On se les met dans la poche par deux moyens: les sentiments ou l'argent, parfois les deux en même temps. On ne fait pas de politique pour gagner de l'argent (sinon nous serions beaucoup plus nombreux à en faire!), mais l'argent est le motif tabou qui explique certains choix politiques.

Les révolutionnaires de 1789 avaient bien perçu ce problème humain. Certains d'ailleurs y ont succombé, comme Mirabeau, ce qui ne les a pas empêché de jouer un rôle important et positif. Robespierre avait compris que la corruption pouvait miner la République. Mais la Terreur est un remède pire que le mal. Sans aller jusqu'à cette finalité criminelle, nous devons réhabiliter la vertu. Les fonctions et les charges électives ne peuvent pas, ne doivent pas être gratuites, mais leur rétribution ne doit pas non plus donner lieu à cette corruption passive qui conduit au reniement des convictions ou à la soumission aux puissants. Un républicain n'a qu'un seul maître, la République.


Bonne nuit.

Encore des idées.

Bonsoir à toutes et à tous.

Quintinus nous invite à consulter le blog de Marc Laimé pour alimenter notre réflexion sur le prix de l'eau. Son titre est un jeu de mots tiré d'une formule de Karl Marx: "Les eaux glacées du calcul égoïste". Je suis allé voir, il y a d'utiles documents, mais c'est un peu fouillis dans un dossier bigrement technique. De la pédagogie, des fiches feraient du bien et clarifieraient le débat. Laimé est favorable à la municipalisation de l'eau, il devrait mettre en avant quelques arguments efficaces. Je suis cartésien: la vérité est simple, même quand le dossier est complexe. Quand on n'y comprend rien, c'est qu'on est dans le faux. J'ai cependant pioché quelques éléments, que je vous livre pêle-mêle, et à vous de voir ce que vous pouvez en faire:

- Si l'assainissement de l'eau est privé, son captage et sa distribution sont municipaux.
- La régie municipale prend plusieurs formes juridiques.
- La situation actuelle est caractérisée par le monopole des grands groupes privés et la non transparence.
- Une cinquantaine de villes, ces dernières années, sont revenues à la régie municipale (ce qui fait peu, l'opération semblant juridiquement délicate).
- Grenoble est la ville où l'eau est la moins chère (c'est une régie).
- Bertrand Delanoë a proposé pour Paris le retour à la régie.
- Amiens et Reims, les deux grandes voisines de Saint-Quentin, sont en régie.

Je sais que c'est insatisfaisant, mais le projet de municipalisation intégrale de l'eau (dont je vous ai dit il y a quelques jours qu'il me laissait très sceptique) demande un gros boulot de recherches, d'analyses et de propositions si on veut être crédible politiquement et ne pas en rester à une revendication consumériste. Un autre site a retenu mon attention, mais là encore, il faut s'engager dans tout un travail personnel si on veut en tirer quelque chose de valable et de sérieux: seaus.org

Pour continuer dans les projets municipaux et l'idée d'un bar associatif que j'avais avancée ce week-end, mon correspondant Grandours suggère une maison des associations et une réactivation du Foyer laïque. Je prends, bien sûr! Il y a le centre Matisse qui regroupe plusieurs associations, mais ce n'est pas à proprement parler une "maison des associations", qui leur offrirait des services en matière de comptabilité, reprographie, aide juridique, etc. Matisse est un lieu de réunion, une maison des associations est aussi un lieu de vie.

Pour le Foyer laïque, qui n'est plus que l'ombre de lui-même rue Sainte-Catherine, je vois plus loin: implanter à Saint-Quentin une maison de la laïcité sur le modèle de ce qui se fait chez nos amis belges, un centre-ressources pour l'Education nationale, un lieu de diffusion des idées et valeurs laïques, dont la défense transcende les clivages politiques. Une maison de la République, en quelque sorte! A côté de la mairie et de la sous-préfecture, une demeure de la République qui ne soit pas élective ou administrative mais morale et pédagogique. Ce serait une première en France. Et j'insiste bien: droite et gauche pourraient s'y reconnaître, la République, c'est heureux, n'est plus aujourd'hui l'affaire d'un parti, à la différence du XIXème siècle.

Une dernière chose: l'Histoire, qui est souvent injuste, a attribué dans l'Aisne la part belle à la ville de Laon, préfecture, pour des raisons géographiques (elle est au centre du département) et surtout sociologiques (c'est la cité bourgeoise, contre Saint-Quentin la populaire). Il faut rééquilibrer les choses, remettre à Saint-Quentin les attributions qui reviennent à la ville la plus peuplée de l'Aisne, et la deuxième de Picardie. Et se pose la sempiternelle question: Saint-Quentin est trop souvent confondue avec son homonyme des Yvelines. Eh bien, modifions le nom de la ville! Je ne suis pas un homme du Moyen Age puisque je suis socialiste, mais je propose de revenir à la désignation féodale: Saint-Quentin-en-Vermandois. En plus, c'est joli, vous ne trouvez pas?


Bonne soirée.