L'Aisne avec DSK

31 octobre 2008

L'espoir fait vivre.

Bonsoir à toutes et à tous.

Le Courrier Picard, dans son édition d'aujourd'hui, annonce la candidature de Stéphane Andurand au poste de secrétaire de la section socialiste de Saint-Quentin. L'information a été donnée à l'occasion de la venue de Vincent Peillon, hier. Sous ce parrainage, et en présence du premier secrétaire fédéral Jean-Jacques Thomas, Stéphane reçoit des soutiens de poids. Cela lui permettra-t-il de l'emporter? On verra.

Ma crainte, toujours la même, celle qui m'interdit d'être candidat moi-même, c'est la division. Le journaliste du Courrier l'a bien compris (qui ne le comprendrait pas?), en qualifiant la section de "puzzle". Je trouve même le terme plutôt gentil, en dessous de la réalité. "Un puzzle qui, reconstitué, aurait bien plus de poids face au jeu bien huilé de Xavier Bertrand et Pierre André". C'est l'évidence, le bon sens, que je ne cesse de répéter, auxquels tout homme de bon sens devrait adhérer.

D'où viennent mes doutes? Comme pour les municipales, de la tentation de jouer le rapport de force, du désir malsain de vouloir se compter, de la multiplication toujours possible des candidatures. Le 6 novembre, nous aurons une représentation des sensibilités politiques dans la section. Cela devrait logiquement suffire. La composition du bureau sera l'exact reflet de cette situation. A partir de là, au lieu de voir chacun tenter sa chance pour s'emparer de la direction de la section, ne serait-il pas plus raisonnable de trouver parmi nous celui ou celle qui serait le plus apte à assumer la difficile fonction de secrétaire de section? Cette démarche aurait ma préférence, elle serait la plus efficace face à la droite, elle illustrerait notre maturité politique, notre capacité à dialoguer entre nous, à nous entendre, à nous unir autrement qu'en se rangeant, dans l'amertume, derrière le vainqueur de la compétition interne.

Je sais que mes propos resteront des voeux pieux, sauf miracle de lucidité. Ce qui ne s'est pas fait il y a un an ne se fera pas maintenant. Mais on a le droit de rêver. La difficulté de Stéphane va résider dans le choix de sa ligne politique: sera-t-elle nationale, va-t-il se présenter exclusivement au titre de la motion E? Ou bien sera-t-elle locale, reprenant les thèmes que nous avions ensemble lancés il y a quelques mois, pendant les élections municipales (le rassemblement, le refus du sectarisme, la dénonciation des accords passés avec l'extrême gauche, le respect de la règle majoritaire)? Si la section était dans une situation normale, la première hypothèse irait de soi. Mais avec l'état de crise que nous avons vécu (et qui continue, larvé), la deuxième hypothèse pourrait s'imposer.

A défaut de voeu pieux, mon voeu le plus cher serait que le scénario-catastrophe d'il y a un an ne se reproduise pas, que la raison soit la plus forte, que l'entente préside à nos débats, que l'unité en résulte. Qui a dit que l'espoir faisait vivre?


Bonne soirée.

Les 4 gauches.

Lundi dernier, Libération s'est livré à un petit jeu agréable et sérieux, sur la foi d'un sondage, la seule foi qui désormais vaille en ce monde médiatico-politique: repérer et définir les grandes familles de la gauche. L'institut Viavoice en distingue 4, je vous les donne et vous ferez votre choix personnel:

1- La gauche anticapitaliste: elle regroupe l'extrême gauche traditionnelle, le PCF et l'électron libre José Bové. Outre l'anticapitalisme, elle pratique l'antiaméricanisme et l'altermondialisme. Elle est prête à s'ouvrir à la "gauche antilibérale", un peu plus light. Son icône actuelle est Besancenot, après avoir été un temps séduite par Bové. La gauche anticapitaliste pèse 25% (sur l'ensemble de la gauche, bien sûr).

2- La gauche sociale-républicaine: elle s'appuie sur les fondamentaux du socialisme, le réformisme, la laïcité. Elle va de Henri Emmanuelli à François Hollande, défend l'éducation, l'égalité des chances, la lutte contre la précarité. En matière internationale, elle veut réguler la mondialisation. La gauche sociale-républicaine pèse 24%.

3- La gauche social-démocrate: elle influence beaucoup les classes moyennes et supérieures. Ses thèmes de prédilection sont la croissance économique, l'écologie, la santé et la construction européenne. DSK, Aubry, Delanoë et Cohn-Bendit se reconnaissent en elle. Avec 27%, la gauche social-démocrate est la plus influente.

4- La contre-gauche: drôle d'expression pour qualifier une famille... de gauche! Elle est la catégorie la plus "atypique", constituée de gens modestes favorables à la sécurité et au contrôle de l'immigration ainsi qu'aux baisses d'impôts et à la réduction de la dépense publique. J'avoue que ça me laisse perplexe, peut-être parce que je ne me reconnais pas en elle. Libé la qualifie aussi de "libéral-autoritaire". Son égérie est Ségolène Royal, mais aussi... Laurent Fabius (là, je comprends de moins en moins). Cette contre-gauche est préoccupée par l'emploi, les salaires et le logement. Elle aspire à une consultation régulière des citoyens. Son influence s'établit à 24%.

Voilà. J'espère que chacun y a retrouvé ses petits. Sans problème, je me range dans la gauche social-démocrate, et je porte un regard assez sceptique sur la contre-gauche. A vous de jouer maintenant.


Bonne fin d'après-midi.

Le devoir et le destin.

Bonjour à toutes et à tous.

Vincent Peillon était donc hier à Saint-Quentin. Ce que j'ai apprécié lors de sa conférence de presse, c'est son grand calme, sa sérénité, presque son détachement. Pas un mot plus haut que l'autre. C'est agréable, reposant de l'écouter, dans une salle qui ordinairement reçoit les échos de disputes et de gueulantes. Sur le fond, je me suis surpris, alors que Vincent soutient la motion Royal, à partager plusieurs de ses points de vue, surtout sur le Parti, son fonctionnement et sa nécessaire transformation.

J'ai même reconnu, dans son analyse et ses propositions, de fortes ressemblances avec la contribution thématique déposée par les rénovateurs de l'Aisne. Constat similaire d'un PS paralysé par ses clans, ses notables, ses opportunistes, son électoralisme, ses vieilles querelles, son cloisonnement, ses verrouillages d'appareil, son sectarisme. Quand je le dénonce, on me crie dessus, je suis le méchant. Quand Peillon dit la même chose, personne ne moufte. Ainsi va la vie, ainsi est le comportement des hommes, déférent envers les puissants. Il ne sert à rien de s'en plaindre, cette situation existe depuis au moins Jules César et Vercingétorix. Alors...

A Festieux, soirée fédérale de présentation des motions, c'était l'affluence des grands rendez-vous, devant Jean-Paul Planchou (motion A), Marie-Noëlle Lienemann (motion C), Claude Gewerc (motion D), Vincent Peillon (motion E). Tous ont été très bons, mais je ne vous dirai pas qui a été le meilleur. L'esprit militant, qui a ses grandeurs, a aussi ses misères. Généralement, un militant trouve formidable son leader, et moins bons tous les autres. Comme on ne fait pas plus con comme réaction, je préfère m'abstenir de tout jugement.

En revanche, je peux vous livrer quelques observations: Lienneman a été la plus proche du texte de sa motion, Planchou et Gewerc s'en sont un peu éloignés, Peillon a été très lyrique. Entre eux quatre, les ressemblances étaient plus fortes que les différences, à tel point que je me demande comment les militants vont faire pour les départager et choisir. Planchou et Gewerc ont été les plus consensuels, Lienemann et Peillon cultivant plus volontiers leur singularité, sans aller cependant jusqu'à une franche opposition.

C'est un signe des temps: la polémique passe mal, personne ne s'y risque, craignant d'y perdre des plumes, c'est-à-dire des voix. La société est ainsi faite, ainsi devenue. Je ne sais pas si c'est un bien ou un mal. Il y a un art honorable de la polémique, qui est le sel de la démocratie. Notre époque préfère manifestement le sucré, au risque paradoxal de tout affadir.

La campagne dans l'Aisne est quasiment terminée, du moins dans sa partie visible. Place aux ultimes courriers, aux envois électroniques et à la surchauffe des téléphones! Moi, je pars dès demain quelques jours dans le Berry. J'ai fait mon devoir, je laisse maintenant faire le destin.


Bonne matinée.

30 octobre 2008

Fin de tournée.

La campagne pour le congrès tire sur sa fin. Ce soir aura lieu à Festieux la présentation fédérale des motions, avec des personnalités nationales. En tout et pour tout, j'aurai participé à 8 réunions. Une très bonne moyenne par rapport aux années précédentes. Hier soir, c'était la finale, Cuffies et Château-Thierry, une petite section et une grande section, et les mêmes responsables de motions pour l'une et l'autre.

A Cuffies, le thème de l'autorité au sein du Parti a été notamment posé. C'est une vraie question. Je ne pense pas qu'on puisse y répondre par la recherche d'un homme fort ou d'une femme providentielle. Cette tentation d'un patron ou d'un chef pour remettre de l'ordre et s'opposer à Sarkozy existe dans nos rangs. C'est une séduction compréhensible, ce serait une erreur regrettable et une illusion certaine.

Ne nous mettons pas en quête d'un Sarkozy de gauche pour contrer le Sarkozy de droite. Ce qu'il nous faut, c'est un bon premier secrétaire qui joue collectif. L'autorité n'émane pas mystérieusement d'une personne seule, mais d'une ligne politique claire qui s'impose alors à tous. C'est ce qui a fait défaut ces dernières années, pas essentiellement un poing qui frappe sur la table.

Cuffies à peine terminé, je pars avec Pierre, mon chauffeur pour l'occasion, direction Château. C'est une grande et belle section réunie autour d'une vaste table qui nous attend, sans doute la section la plus forte du département, qui va donc jouer un rôle considérable au niveau fédéral. Les particularité de Château? D'abord, les représentants de motions sont nombreux, puisque nous étions 5. Manquait Utopia, dont le texte a cependant été lu. Ensuite, chaque intervention est suivie d'applaudissements (aussi à Cuffies).

Ce n'est pas la pratique dans toutes les sections. C'est pourtant une bonne pratique, c'est le rappel que le camarade qui s'exprime n'est pas un adversaire, ni même un concurrent, mais un socialiste qui propose une ligne politique différente, ni plus ni moins socialiste qu'une autre ligne politique. Il y a donc dans ces applaudissements quelque chose de politique et de pédagogique que j'apprécie.

Puis le débat s'est engagé, moins fait de questions que de prises de positions, d'enrichissements à nos contributions. Pas de heurts, pas de conflits, une excellente ambiance, c'est la magie de Château! Savez-vous que j'ai là-bas, moi l'homme du nord descendu au sud de l'Aisne, une certaine influence? Non, pas en ce qui concerne les résultats du congrès. Je suis comme tout le monde, je laisse chaque socialiste réfléchir et choisir, et ces résultats ne m'obsèdent pas plus que ça. Mon influence s'exerce plutôt sur la fin de réunion. A coup sûr, on lit le blog à Château, puisque la soirée s'est terminée... devant une magnifique table de charcuterie.

C'est sûr, je suis prêt à remettre ça, dans trois ans maintenant. Mais c'est si vite passé et si vite arrivé!


Bon après-midi.

La poupée qui fait non.

Bonjour à toutes et à tous.

Oui, comme dans mon précédent billet, je suis sous l'influence de Polnareff. Avez-vous suivi cette invraisemblable histoire de Sarkozy et de sa poupée vaudou? Un coffret est vendu, avec effigie du chef de l'Etat, aiguilles et mode d'emploi pour petite cérémonie d'envoûtement. C'est marrant ou de mauvais goût, chacun jugera. Moi, ça ne me dérange pas. Ségolène Royal a droit au même traitement, dans un autre coffret. Bref, quelque chose d'anecdotique, si l'une des deux "victimes" n'avait porté plainte, Sarkozy bien sûr!

Etrange tout de même: il y a chez notre président un côté matamore qui plaît bien à une partie de l'opinion. Et voilà notre homme qui n'a peur de rien trembler devant une misérable poupée à sa ressemblance. Serait-il superstitieux? Ségolène s'est contentée d'un sourire, Nicolas a fait une sale grimace et est allé se réfugier dans les robes des juges, qu'il ne cesse par ailleurs de critiquer, et peut-être secrètement de mépriser. Aucun humour, pas de distance, chez cet homme-là.

La justice évidemment l'a débouté. Que voulez-vous qu'elle fasse d'autre? Nous sommes en République, la liberté d'expression est un principe, le droit à l'humour est accordé à chaque citoyen. Et puis, cette mallette vaudou fait vivre une petite entreprise, fait travailler du monde, satisfait les consommateurs.. Par les temps qui courent, voilà une innovation sur le marché qui mériterait plutôt d'être saluée!

Là comme ailleurs, Sarkozy a introduit une très contestable rupture. Il est le premier président de la Vème République à s'adresser autant à la justice, comme un simple plaignant. Ce faisant, il rabaisse une fois de plus la fonction présidentielle, qui devrait être bien au-dessus, bien au-delà de ces contingences, surtout lorsqu'il s'agit d'une poupée vaudou. Tant qu'il y est, pourquoi ne poursuit-il pas ses masques de carnaval, aussi outrageants envers sa personne que la poupée pleine d'aiguilles?

Non, Sarkozy a décidé de se mettre à l'unisson de notre société, qui ne tolère plus le moindre écart, prêche la tolérance et se montre souvent intolérante, rit volontiers de tout mais n'accepte pas qu'on rit d'elle-même. Un problème? Le réflexe immédiat, c'est de porter plainte. Détestable manie, de plus en plus répandue, qui nous vient des Etats-Unis. Sarko l'américain est le produit de cette culture-là, très individualiste, très procédurière.

A mes camarades socialistes, à l'approche de notre congrès, tout à notre critique absolu du sarkozysme, je ne conseille cependant pas d'acheter la fameuse poupée et de se délecter à la transpercer. Je vous l'assure, en tant que laïque, adversaire de toutes les fausses croyances, ça ne sert strictement à rien. J'hésite même à ce que vous offriez le jouet à vos enfants. Moralement, cette acupuncture du mal est très contestable.


Bonne matinée.

29 octobre 2008

On ira tous au paradis?

"Paradis fiscal": drôle d'expression. La théologie et la fiscalité ne font pas bon ménage. C'est une image, bien sûr, mais les mots ne sont pas innocents, ils nous apprennent quelque chose. Le paradis, c'est le bonheur, la béatitude, la félicité. Le pied, quoi! Mais le bonheur de qui de quoi? De l'argent facile.

A ce propos, avez-vous lu Philosophie-Magazine d'octobre, paru il y a un mois environ? Son dossier, c'était "L'argent, totem et tabou", d'ailleurs très intéressant, mais avec une absence remarquable: pas un mot sur la crise financière que nous connaissons aujourd'hui. Parce qu'il y a plusieurs semaines, quand le dossier a été préparé, la crise était certes là, mais on en parlait pas dans les médias. Voilà notre société: ce n'est plus le "je pense donc je suis" de Descartes mais "je passe dans les médias donc je suis". Même un mag de philo en est la victime.

Revenons aux "paradis fiscaux", des paradis aussi artificiels que ceux de Baudelaire, et non moins dangereux. Qu'est-ce qui les caractérise? Quatre choses:

1- La pression fiscale est basse, voire inexistante. Pas ou très peu d'impôts dans ces paradis-là, alors que l'impôt est au fondement de la République, du bien commun.

2- Le secret bancaire est absolu, l'argent est caché, à la limite comme s'il n'existait pas, en ce sens fidèle au précepte d'Epicure: "pour vivre heureux, vivons caché". Sauf que le principe de la démocratie, de la chose publique, c'est la transparence, la publicité.

3- Les sociétés écrans déchargent de toute responsabilité individuelle ou collective. C'est le règne de l'illusion, de l'apparence, du trompe-l'oeil, c'est le monde du mensonge, de la dissimulation. On ne sait plus qui est qui, qui fait quoi. La République, elle, exige vérité et responsabilité.

4- Les "paradis fiscaux" échappent en partie aux actions judiciaires, administratives, policières. Ce sont des zones de non-droit, comme certaines îles autrefois servaient de refuge et d'impunité aux pirates. La loi, la justice n'y ont pas leur place, ou très peu. La République, en revanche, c'est l'Etat de droit.

Pendant longtemps, les "paradis fiscaux" ont été des anomalies utiles à certains, des exceptions confirmant la règle, les marges troubles d'un système, la fange du marché. Mais le paradis, ça ne se refuse pas, ça ne peut que séduire, s'étendre. L'idéal, le modèle, l'utopie de l'hyper-capitalisme, le voilà: le paradis fiscal! Son objectif: se répandre sur toute la planète, devenir un jardin d'Eden mondial. Si on laissait faire, oui, c'est ce qui adviendrait, en toute logique. Je ne connais pas de paradis qui n'ait pas cette tendance-là, convaincre de ses prétendus bienfaits, les faire partager.

Sauf que le paradis des riches, c'est l'enfer des pauvres. Le paradis des entreprises (laquelle d'entre elle n'a pas fantasmé un jour sur une totale dérèglementation de ses activités?), c'est l'enfer des peuples. C'est aussi le glas de la République. On ira tous au paradis? Faisons mentir cette prédiction de Polnareff, même si le chanteur avait alors un autre paradis en tête.


Bon après-midi.

Un t... sans c...?

Bonjour à toutes et à tous.

D'après une note confidentielle récente du Figaro, la première biographie de Xavier Bertrand paraîtrait le 12 novembre, sous les plumes des deux journalistes Christophe Jakubyszyn et Muriel Pleynet. Son titre: "Le chouchou", aux éditions Anne Carrière. Le ministre, dit-on, serait inquiet des révélations annoncées.

On y apprend ce qu'on sait déjà: Bertrand a soutenu Séguin, puis Juppé, puis Raffarin, puis Villepin, puis Sarkozy. Et demain qui? Lui-même peut-être, quand son heure la plus haute aura sonné... Mais peut-on le lui reprocher? Un premier de la classe doit se faire bien voir de tous ses professeurs. Et qui est le prof principal? Pierre André, non?

La biographie contiendrait quelques perles, comme celle-ci, attribuée à Villepin, poète à ses heures mais dont le langage n'est pas toujours fleuri. Quand il apprend que Bertrand vient de rallier Sarkozy, il a ce mot, qui passera peut-être à la postérité (c'est ce dont rêvent tous les poètes): "Xavier Bertrand? Un traître sans couilles!"

Notre ministre saint-quentinois peut être personnellement fier qu'on s'intéresse ainsi à lui. L'insulte en politique vaut décoration, surtout quand elle provient de votre camp. Cette première biographie n'est pas la dernière. Ian Hamel, journaliste au Point, en prépare une pour le début de l'an prochain. Il a prospecté bien sûr sur place, à Saint-Quentin, et je l'ai rencontré il y a une quinzaine de jours. J'ai dit ce que j'avais à dire sur l'homme Bertrand, ce que je sais de lui depuis 10 ans que je l'approche ou le croise, ce que vous connaissez en lisant ce blog. Mais j'écarte immédiatement, par principe, tous les ragots, rumeurs et crapotages de bistros. Certes, la vie, le comportement, la personnalité d'un responsable politique aident à comprendre son action. Mais on ne le juge pas là-dessus.


Bonne fin de matinée.

28 octobre 2008

Vive la gauche!

Depuis quelques semaines, depuis que la crise financière a fait trembler les bourses, la droite est en train de vivre sa Bérézina idéologique, même si, politiquement, elle est là, au pouvoir, bien présente, y compris électoralement influente, hélas. Nicolas Sarkozy ne cesse de reculer, de renoncer aux pièces-maîtresses de son arsenal théorique. Il avait fait de la dérèglementation son dada économique, son mot d'ordre social, servi au premier chef par Xavier Bertrand, s'attaquant au droit du travail, dégraissant la Fonction publique. Aujourd'hui, il abdique, admet la folie du marché quand il est livré à lui-même, défend, certes très mal, mais défend quand même l'idée social-démocrate de régulation. Vive la gauche!

Première étape de sa défaite: la recapitalisation des banques, une simili-nationalisation qui la fiche très mal quand on se prétend libéral. Deuxième étape: la création d'un fonds souverain à la française pour aider les entreprises face à la crise, idée émise il y a quelques mois par Fabius et en bonne place dans la motion Aubry. Bien sûr, Sarkozy tourne ses propositions de gauche à sa sauce et ne renonce nullement à sa politique fiscale et sociale très conservatrice. Mais il n'empêche qu'il baisse pavillon, pour ne pas dire son pantalon. Le roi est bientôt nu. Vive la gauche!

Troisième étape, aujourd'hui même: après les banques et les entreprises, Sarkozy vole au secours des chômeurs ou de ceux qui risquent de le devenir. Il promet 100 000 emplois aidés. Les emplois aidés, vous vous souvenez? Jospin et la gauche plurielle en avaient fait leur cheval de bataille, la droite n'arrêtait pas de les critiquer: pas de vrais emplois, soi-disant. Eh bien les revoilà! La droite se dédit et se contredit. Vive la gauche!

Certains camarades, quand je dis ça, font la grimace, hésitent, deviennent prudents et ne veulent pas qu'on dise que Sarkozy nous copie, certes très maladroitement, et en restant ce qu'il est, en ne renonçant pas à sa politique, mais nous copie quand même. Je leur réponds qu'il ne faut jamais avoir peur de la vérité. Je leur précise que Sarkozy ne gagnera rien à faire ce qu'il fait, et que nous n'y perdrons pas, bien au contraire. Soyons fiers de ce que nous sommes, soyons conquérants, reconnaissons nos victoires idéologiques, qui prépareront les victoires politiques de demain. Vive la gauche!


Bonne fin d'après-midi.

Peillon comme Hamon.

Tout homme politique a besoin de son intellectuel. Mitterrand avait Attali, Rocard avait Julliard, Jospin avait Allègre. Ségolène aura-t-elle Peillon? Au moment où l'on s'interroge sur la refondation du socialisme, Vincent apporte sa réponse, à travers un ouvrage, "La Révolution française n'est pas terminée", Seuil, 2008. C'est un clin d'oeil critique à l'historien libéral François Furet, qui pensait que l'héritage de 1789, après avoir influencé jusqu'au communisme, était désormais épuisé.

Je n'ai pas lu le bouquin, seulement parcouru quelques commentaires sur le net. Peillon veut sortir la gauche du marxisme et du libéralisme traditionnel (Tocqueville). Ce n'est pas vraiment 89 qui l'intéresse, plutôt sa postérité. Pas 1871, la Commune, mais une révolution un peu oubliée, celle de 1848. Les penseurs qu'il exhume, c'est Fourier, Cabet, Leroux, Louis Blanc, côté socialistes.

Les républicains aussi retiennent son attention, Renouvier, Bourgeois. Evidemment, c'est du moins lourd que Marx et Tocqueville, mais Peillon recherche chez eux une alternative au collectivisme. Son socialisme est résolument réformiste, républicain, pas révolutionnaire au sens marxiste, et surtout spiritualiste, ouvert à la trancendance. C'est un peu le trou noir, la grande absente d'un socialisme trop longtemps matérialiste, scientifique.

Je ne sais pas si la réflexion de Peillon est féconde, si elle inspirera le socialisme de demain. Mais au point où nous en sommes, autant aller y voir. Peillon a été prof de philo, président de la Ligue de l'enseignement de la Somme. Ca fait quand même quelques points communs avec moi. Nos divergences? Je n'ai pas toujours très bien compris son parcours politique, du NPS première version, très à gauche, à son soutien à Ségolène, jusqu'à devenir son porte-plume.

Vincent sera à Saint-Quentin jeudi, à 16h45, au café des Champs-Elysées, rue de Baudreuil, pour présenter son ouvrage. Ce sera l'occasion de débattre avec lui. Je suis allé entendre Hamon, j'irai écouter Peillon. Quand un socialiste vient, tous les socialistes devraient être là.


A jeudi,
et bon après-midi.

Crouy la bonne franquette.

Bonjour à toutes et à tous,

Une réunion de section à Crouy, près de Soissons, c'est toujours quelque chose d'exceptionnel. D'abord parce que c'est la seule section socialiste de l'Aisne que je ne connaisse où les rencontres se font à domicile, chez le secrétaire de section. Ce qui leur donne un côté très sympa, à la bonne franquette. La maison de l'ami Pierre (puisque c'est de lui dont il s'agit) est grande et robuste comme son propriétaire. Hier, il faisait un peu frisquet, à cause d'un problème de plomberie et de plombier. Mais Pierre, très vite, réchauffe les coeurs, et on oublie le froid.

Avant de commencer, il a fallu installer une table pour agrandir la table du salon, et ajouter deux bancs. Nous étions une douzaine, dont trois intervenants extérieurs, moi de la D, Jérôme de la C et Pierre (pas le maître des lieux, un autre) de la B. La motion B, le Pôle écologique! Elle n'est pas très connue, elle n'a pas énormément de représentants. Celui de l'Aisne est un jeune très aguerri, qui vient de Château, que je retrouverai donc demain soir. J'avoue, et lui ai dit, que j'aurai presque pu signer son texte, avec lequel je suis d'accord à 80%.

Savoir bien parler, savoir aussi se taire, c'est une règle d'or en politique. Parfois, j'ai l'impression que je parle trop. Déjà que j'écris beaucoup! Hier, je me suis tu. Pierre (le A, pas le B) aussi. Place aux jeunes! C'est surtout Jérôme et Pierre (le B), qui ont échangé, souvent avec fougue, toujours avec intelligence. Un débat vraiment intéressant. Un moment, je me suis lâchement éclipsé pour rejoindre Pierre (le A) dans la cuisine. Il m'avait préparé une conserve de macédoine, pour la route, s'inquiétant de me voir repartir le ventre vide (désolé pour le lecteur qui me reproche les détails culinaires des réunions de section, auquel j'ai répondu que ça faisait partie de la vie...). Pour les autres camarades, c'était chips et café. Je me suis senti privilégié!

Sinon, le fond du débat s'est surtout focalisé sur la motion Hamon: de bonnes intentions, mais un irréalisme qui pourrait s'avérer dangereux (protectionnisme, etc). Je résume brutalement bien sûr, je donne mon impression. Quant à ma motion Aubry, on m'a reproché la présence des fabiusiens, parce qu'ils n'ont pas respecté le vote militant de 2004, parce qu'ils ont été anti-européens. A quoi j'ai répondu que pour rassembler, il fallait bien s'adresser à ceux avec lesquels on était divisé. Et sur l'Europe, les fabiusiens ont moins été anti-européens que partisans d'une "autre Europe".

Mais ces interpellations, aussi vives et franches soient-elles (il le faut pour qu'il y ait débat), se sont faites à la bonne franquette. Rien à voir avec Saint-Quentin. Sur le chemin du retour, en y réfléchissant, j'ai soudainement compris pourquoi. A ma connaissance, dans toutes les sections axonaises qui ont présenté les motions, il y a eu au à chaque fois au moins un invité extérieur. Pour la petite section de Crouy, nous étions trois, comme je vous l'ai dit! Sauf... à Saint-Quentin, pourtant une grande section, où il y a donc, pour les motions, des voix à gagner. Pourquoi les camarades vont-ils partout ailleurs... sauf ici, sauf chez nous? Je sais pourquoi, et vous aussi. Pas besoin d'en dire plus. Vive Crouy et sa bonne franquette!


Bonne matinée.

27 octobre 2008

Delors soutient Aubry.

Bonsoir à toutes et à tous.

Sarkozy doit demain faire son discours sur l'emploi. Aubry a pris aujourd'hui, sur le même thème et quelques autres, les devants en affichant ses propres propositions, que je vous détaille:

- Annulation de la défiscalisation des heures supplémentaires.
- Instauration du chèque-transport.
- Augmentation des allocations familiales.
- Revalorisation du SMIC.
- Incitation à des accords salariaux, sous peine de suppression d'allégements de charges.
- Rétablissement des emplois aidés dans les associations et les collectivités.
- Rétablissement des congés de conversion en cas de licenciements.
- Création de 200 000 formations supplémentaires pour les chômeurs.

Le financement de toutes ces mesures sera assuré par la suppression de la loi TEPA (le paquet fiscal) et la remise en cause d'une partie des 72 milliards d'euros des niches fiscales.

Martine Aubry sera demain l'invitée du journal de TF1, à 20h00. Elle reviendra probablement sur toutes ces propositions. En attendant, elle a reçu aujourd'hui un soutien de poids, celui de Jacques Delors, ce qui prouve, si cela restait à faire, que sa démarche s'inscrit dans ce que la social-démocratie européenne a de meilleur.


Bonne nuit.

L'amour ou la raison.

Qui va s'allier avec qui? Je crains que ça ne devienne le petit jeu à la mode dans les prochains jours parmi les socialistes. A tort. Chacun devrait se concentrer sur ses analyses, ses propositions, sa ligne politique. Les alliances viendront, mais après.

Ceci dit, la question, même maintenant, n'est pas stupide. Les adhérents veulent savoir, c'est normal. Il nous faudra, in fine, une majorité. Avec 6 motions, on ne voit pas laquelle, on s'interroge, on s'inquiète.

Fabius, hier sur Radio J, a levé en partie le voile: le risque d'une forte abstention est réel, il faut le conjurer, car le résultat en serait faussé. Hamon a peu de chances d'arriver en tête. C'est la motion qui aura le meilleur score qui décidera du rassemblement. Aubry est la mieux placée pour ça.

Avec qui peut-elle s'allier? Pour Fabius, c'est Hamon, car "ses thèses sont très proches des nôtres". Oui et non. Sur quelques points forts (l'ancrage à gauche, le refus de la présidentialisation), on se rejoint. Mais la ligne économique et sociale n'est pas exactement la même. Ou je n'y comprends plus rien...

Hamon tout seul, pourquoi pas, ça se discute (ça s'est d'ailleurs discuté, sans résultat). Mais le quatuor Lienemann-Mélenchon-Filoche-Dolez, c'est quand même pas ce que le PS fait de plus ouvert ni de très nouveau.

Jospin a peut-être eu, lui aussi hier, cette fois sur Europe 1, la bonne réponse: Aubry et Delanoë sont "faits pour travailler ensemble". Idéologiquement, ça me semble moins bancal que l'autre mariage. Mais en politique comme dans la vie, il y a des mariages d'amour et des mariages de raison. Je ne sais pas qui l'emportera à Reims, l'amour ou la raison. Tout dépendra probablement des résultats obtenus par les uns et les autres.


A ce soir, après Crouy.

A gauche toute?

Bonjour à toutes et à tous.

Depuis quelques jours, depuis surtout la crise financière, les médias nous expliquent que le Parti socialiste vire à gauche, que les motions sont entrées dans une course à l'échalote pour savoir qui sera le plus à gauche. Notre aile gauche s'en réjouit, laissant croire ainsi que le débat tourne autour de ses propositions, mais se dépite aussi de voir piller ses idées. En fait, tout cela est faux, je vous dis pourquoi, c'est assez simple, et c'est nécessaire pour la clarté du débat:

1- Les motions ont été rédigées avant la crise financière. Celle-ci n'explique donc pas le prétendu gauchissement du Parti.

2- Il y a quelques semaines, les médias nous expliquaient que les trois motions principales étaient de même nature, sociale-démocrate, qu'elles se ressemblaient plus qu'elles ne différaient. Maintenant, on nous explique le contraire. Il faudrait savoir!

3- Dans ce gauchissement imaginaire, on vise particulièrement la motion Aubry. Mais elle n'a pas attendu la crise pour dénoncer le capitalisme financier et faire des propositions solidement de gauche. Je vous en cite quelques-unes: fonds souverain à la française pour le soutien de notre économie, système d'alerte au niveau du FMI, révision des normes comptables au plan international, nouvelles agences publiques de notation, lutte contre les paradis fiscaux, taxe mondiale pour ralentir les flux de capitaux, encadrement de la rémunération des acteurs financiers et des dirigeants.

Encore une fois, tout ça a été pensé et rédigé avant que la crise ne se manifeste spectaculairement. Aubry n'a en rien modifié sa stratégie: donner une claire identité de gauche à notre projet. C'est tout, c'est beaucoup, c'est essentiel, et ça n'a rien à voir avec le petit jeu idiot du "plus-à-gauche-que-moi-t'es-pas-cap". La motion D veut un tracé précis, conforme à notre passé, fidèle à notre héritage et ouvrant une perspective sur l'avenir. Pas besoin de jouer au faux gauchiste pour faire ça, il suffit d'être soi-même, de ne pas oublier d'où nous venons, pour qui et pour quoi nous luttons, dans quel objectif pour demain.

4- Le fond de l'air n'est pas rouge, ni au PS, ni dans la société. La grande crise de 1929 a engendré des mouvements radicaux, le communisme à gauche, le fascisme à droite. Rien de tel aujourd'hui. Au contraire, ce qui ressort de cette crise, c'est la pertinence des solutions sociales-démocrates, autour de ce concept qui leur est propre: la régulation. Ce n'est pas la gauche qui se gauchise, c'est la droite qui se social-démocratise! Je n'irai pas jusqu'à dire comme Chavez, loin de là, que Sarkozy est devenu socialiste. Mais il a manifestement du mal à rester libéral au moment ou le libéralisme financier prouve son ineptie et son incurie.

5- Qu'est-ce qui explique cependant cette impression, erronée, d'une gauchisation du PS? Un phénomène très simple, l'effet de contraste. Du fait de la crise, les motions mettent en avant leur critique du capitalisme. En tant ordinaire, elles n'auraient pas insisté sur ce qui va de soi, fait partie de nos fondamentaux. Nous aurions alors privilégié par exemple la culture, l'écologie, la fiscalité locale, l'Europe, qui sait la politique étrangère, etc. Mais comme notre société est sous l'influence des médias, c'est la crise financière qui a pris le pas. Et c'est d'ailleurs normal. Il ne faut pas en conclure que le PS aurait, par opportunisme, changé son discours. Nos adversaires ont le droit de le dire, c'est de bonne guerre. Nos militants ne le peuvent pas, ce serait un mauvais coup porté contre nous.

6- Pendant longtemps, au PS, un congrès s'est gagné à gauche. Aujourd'hui, nous savons que ce temps est fini. En 2005, les adhérents ont validé le oui à la Constitution européenne et n'ont pas suivi le non de l'aile gauche. En 2006, ils ont choisi Ségolène Royal et accordé à peine 20% au candidat de l'aile gauche, Laurent Fabius. Reims ne se gagnera pas à gauche toute, mais simplement, clairement à gauche, sans excès, sans abus, sans surenchère, sans besoin d'avoir à démontrer quoi que ce soit. En défendant ce que nous sommes, en préparant ce que nous serons. En commençant par être fiers de nous-mêmes, de notre bilan au gouvernement, que Martine Aubry incarne si bien. Je me souviens d'un temps pas si lointain où j'entendais des critiques très dures contre la politique de Jospin, venant des rangs mêmes du PS. Il faut assumer ce que nous avons fait.


Bonne matinée.

26 octobre 2008

La crise a bon dos.

La crise, la crise, la crise. On en parle partout, on dit parfois n'importe quoi. Il y a 6 mois, personne ne la voyait venir, elle était pourtant là, depuis la crise américaine des subprimes. Aujourd'hui, on ne pense qu'à elle, mais elle n'a toujours pas vraiment atteint l'économie "réelle". C'est pour dans 6 mois, nous dit-on. Mais on n'en sait rien.

La vérité, c'est que la crise est pour l'instant financière, et pas économique, au sens de la production industrielle. On peut certes faire des hypothèses, supposer que le crédit va être plus difficile pour les entreprises, que leur activité va donc être freinée, que la récession va s'installer, que le chômage va donc augmenter, que le pouvoir d'achat va être amputé etc. C'est possible, je n'en sais rien et personne n'en sait plus que moi.

L'économie est une fausse science. Ce sont des supputations, qui seront probablement oubliées dans 6 mois. Ce qui m'intéresse, c'est le présent, c'est le réel, pas les projections fantasmatiques sur le proche futur. A entendre certains prophètes de mauvaise augure, on approche quasiment de la fin du monde, c'est-à-dire de la fin du capitalisme. J'attends de voir, ne débouchons pas le champagne dès maintenant. Ce que je sais, en revanche, c'est que la crise financière a bon dos.

Prenez la Camif, la centrale d'achat des enseignants. Elle est aujourd'hui en cessation de paiement, et ça n'a strictement rien à voir avec la crise financière. Il y a plusieurs mois déjà que l'entreprise bat de l'aile, à cause du net qui concurrence son système de vente par correspondance. Ce que je crains, c'est qu'on mette sur le compte de la crise ce qui relève en réalité de l'inadaptation de notre appareil de production et de nos entreprises non compétitives.

Je crains encore plus que Nicolas Sarkozy ne se serve politiquement de la crise mondiale pour justifier son échec qui est purement personnel et purement national. Le "paquet fiscal", qui est à l'origine de tout, n'a aucun rapport avec la crise financière. J'invite donc mes camarades socialistes à la prudence et surtout à la vérité quand il parle de la crise financière. Elle n'est pas l'alpha et l'oméga de ce qui se passe à travers le monde. Sinon, elle se transformerait en piètre excuse pour le gouvernement de droite. Ce que je ne veux pas. Cette crise est-elle conjoncturelle ou systémique? Là encore, je ne me prononce pas, je laisse les parleurs parler, je reste dans la rationalité, dans la réalité.


Bonne nuit.

Bienvenue chez les Guisards.

Bonsoir à toutes et à tous.

Thierry et Claudine nous ont fort bien accueilli vendredi soir, à Guise, lors de la réunion de présentation des motions. Avec un sympathique petit buffet pour commencer. Tiens, voilà une idée pour Saint-Quentin! On dit que la musique adoucit les moeurs. Et la charcuterie? C'est bien possible aussi... Mais sans bière, parce que ça énerve.

Autre surprise marrante: je n'étais pas le seul Saint-Quentinois, j'ai même cru un moment que nous allions vers un remake de jeudi soir! Pas vraiment quand même. Mais je note que j'ai été sur ce point, comme sur quelques autres, un pionnier. Les fois précédentes, j'étais le seul. Mes camarades s'y mettent, c'est bien. S'ils pouvaient faire de même dans d'autres domaines! Peut-être finiront-ils par me suivre complètement?

Bon, je plaisante, c'est dimanche, c'est le début de mes vacances, j'espère que personne n'y prendra ombrage. Allez, je redeviens sérieux. La réunion s'est bien passée, les échanges ont été je crois fructueux. Là comme ailleurs, la motion Aubry suscite peu de critiques. Une cependant a ouvert la réunion:

Martine Aubry est-elle un "éléphant", un "vieux machin", comme l'a dit une camarade? Non, Martine Aubry est une femme d'expérience, un symbole de la gauche de gouvernement, une figure du socialisme nordiste, et cela ne me gêne pas. Je ne pratique pas le jeunisme. On peut être jeune de corps et vieux d'esprit. La fascination contemporaine pour les trentenaires et les quadras m'irrite beaucoup, elle n'est pas sage, elle est même très sotte. Aubry approche des 60 ans, et alors? Ca gêne qui? Ca prouve quoi?

La vraie question est autre: ce qu'il faut, c'est un changement de génération au sein de l'équipe dirigeante du PS. Là oui, il faut avancer, évoluer. Nous devons parmi nous pratiquer l'ascenseur social et générationnel. C'est pourquoi les signataires de notre motion commencent par "la génération du changement", plusieurs dizaines de jeunes élus socialistes autour de Martine Aubry, dont certains camarades que je connais depuis plus de dix ans, je pense notamment à Christophe Borgel et Mao Péninou.

Prochaine réunion: demain, chez l'ami Pierre, à Crouy. Avec ou sans charcuterie?


Bonne soirée.

Todd et notre congrès.

Dans quelques jours paraîtra le dernier ouvrage d'Emmanuel Todd, intitulé "Après la démocratie", chez Gallimard. Un nouveau bouquin de Todd, c'est toujours un petit évènement. Cet intellectuel est l'un des plus libres et des plus originaux de ces 30 dernières années. Je ne suis pas nécessairement d'accord avec ses thèses, mais elles sont très construites et elles ne laissent pas indifférent, elles font réfléchir. Que demander d'autres à un intellectuel?

J'ai pioché sur le net et dans la presse quelques informations sur le livre, je vous donne quelques pistes:

1- Todd ne croyait pas que Sarkozy se ferait élire. Comment notre vieux pays, égalitaire, spontanément méfiant envers l'argent, admirateur du beau langage et d'un certain raffinement, comment la France a-t-elle pu désigner à sa tête un homme vulgaire, instable, fasciné par le monde du fric? Réponse de Todd (et je la partage): Sarkozy n'a pas été élu à cause mais grâce à ses défauts, parce que notre peuple s'est hélas reconnu dans ce qu'il représentait.

2- Le fond du problème (et là encore j'adhère), c'est la fin de toute croyance, c'est le pessimisme foncier qui fait des ravages dans l'opinion publique, tous milieux confondus: progrès, avenir, égalité, socialisme, justice, etc, personne ne croit plus en rien ni en personne. La disparition du catholicisme est la cause de ce nihilisme ordinaire. La foi chrétienne structurait de grandes valeurs, dont certaines ont été laïcisées, elle engendrait en réaction d'autres valeurs, telles que la République et la laïcité. Tout ça a disparu, faisant le vide dans les têtes et dans les coeurs. Ne reste plus que le cynisme anxiogène de la droite sarkozyste.

3- Où est l'espoir selon Todd? Dans une résurgence de la lutte des classes, mais très différente de celle du passé. Ce n'est plus du côté des prolétaires mais plutôt des classes moyennes, des "jeunes éduqués" déclassés qu'il faut attendre une révolte salutaire. C'est aussi mon idée.

4- Se révolter en vue de quoi? C'est là où je me sépare de Todd. Sa cible, c'est le libre-échange, sa solution, le protectionnisme. Il le dit clairement, ce n'est pas moi qui le fait parler. Et je pense un peu à Hamon en l'écoutant, même si mon camarade semble aller moins loin dans cette proposition. Pourquoi je suis sceptique? Parce que le libre-échange n'est pas en soi, pour moi, une mauvaise chose. Je crois au contraire que la libre circulation des marchandises, des idées et des hommes est un grand progrès pour le développement de l'humanité. Se protéger, c'est plus ou moins s'enfermer, c'est se condamner, c'est dépérir. C'est pourquoi la concurrence me paraît être une valeur saine, même si je crois aussi en d'autres valeurs (l'égalité, la justice, la fraternité...).

Mais que le libre-échange doive être régulé, que la concurrence soit autant que possible loyale, c'est indispensable, c'est même inhérent à l'organisation et au bon fonctionnement du marché. C'est pourquoi je ne suis pas antilibéral, même si je suis très critique envers le libéralisme (critiquer quelque chose ne signifie pas nécessairement être contre cette chose).

S'il y a un débat avec l'aile gauche du Parti socialiste, à l'occasion de la parution de l'ouvrage d'Emmanuel Todd, c'est bien celui-là. S'il est mené honnêtement, c'est bien, ça va. Ce devrait être l'objet de notre congrès. Je pense même qu'il peut en sortir quelque chose de positif pour le PS, c'est-à-dire un projet commun. Mais si ce débat se mêle à des enjeux de pouvoir, s'il est un instrument dans des rapports de forces, alors ce sera fichu et le congrès sera raté. Je suis à la fois un peu inquiet et raisonnablement optimiste.


Bon après-midi.

Des millions de Charline.

Bonjour à toutes et à tous.

Il y a une rubrique dans le Courrier Picard que j'aime bien, que je lis à chaque fois: "C'est vous... qui le dites!" Le principe est simple, comme l'indique le chapeau: "Chaque jour, nous vous donnons la parole pour exprimer votre point de vue sur l'actualité et la vie locale". C'est la technique journalistique du micro-trottoir, très en phase avec notre société, qui se méfie des institutions, des représentations et valorise la base, les simples citoyens, les "gens". C'est la France d'en bas, censé détenir la vérité, le bon sens, contre la France d'en haut, menteuse, intéressé. Je pousse un peu, mais il y a de ça.

Il n'empêche que j'adore cette rubrique, parce qu'elle nous apprend beaucoup sur l'état de l'opinion. En politique, c'est important de connaître l'esprit public. "C'est vous... qui le dites!" vaut tous les sondages à prétention scientifique. Il faudrait découper dans chaque numéro du Courrier Picard les propos tenus et nous aurions un kaléidoscope passionnant de l'opinion saint-quentinoise, qui ne doit pas être très différente de toute opinion dans les villes de même dimension et de la France entière.

Le 25 octobre, c'est Charline Renaud, 24 ans, agent d'accueil, habitant à Vendeuil, qui s'exprime. Je vous livre la totalité de son intervention, car elle me semble significative de quelque chose dont j'aimerais vous parler:

"Je suis assez peureuse, alors le soir, à Saint-Quentin comme dans mon village, je ne m'aventurerai pas toute seule. On voit tellement de faits divers dans les médias que même s'il ne m'est jamais rien arrivé à Saint-Quentin, je fais toujours attention. Par ailleurs, je ne m'intéresse pas beaucoup à l'actualité. J'ai quelques échos des gens que je rencontre dans mon travail et beaucoup sont en colère après l'Etat".

Pourquoi le message de Charline a retenu mon attention? Parce que je l'entends, peu ou prou, très souvent autour de moi, parce que je le crois très représentatif de l'état d'esprit de millions de Français, que je décompose ainsi:

1- La peur. Oui, une bonne partie de la France a peur. De quoi? De tout, d'un rien, de n'importe quoi. Et la crise financière ne va pas arranger ça.

2- L'irrationnel. Il y a une bonne peur, justifiée, celle qui répond à un danger réel. Mais chez Charline, rien de tel: il ne lui est jamais rien arrivé, elle a peur quand même.

3- Les médias. La source de sa peur, c'est ce qu'elle voit sur l'écran de télévision, les images, des "faits divers" loin de son quotidien, de sa réalité à elle.

4- L'apolitisme. Bien qu'influencée par la télévision, Charline n'est pas influencée par n'importe quoi à la télévision puisqu'elle ne s'intéresse pas vraiment à l'actualité, alors qu'elle pourrait capter aussi ses images-là. Ce n'est manifestement pas son choix.

5- L'anti-Etat. Le canal d'information de Charline, ce sont les gens comme elle, son entourage, sous la forme de "quelques échos", probablement de rumeurs. Qui disent quoi? Qui s'en prennent à l'Etat! Pourquoi? Parce que l'Etat, c'est le très haut, le plus haut de la France d'en haut, que la France d'en bas ne peut que contester.

Si j'avais à rencontrer Charline et les millions de Charline de France et de Navarre, je leur dirais ceci:

a- Il ne faut pas avoir peur, la vie n'est pas faite pour ça. La peur est mauvaise conseillère. Et puis, l'humanité a connu pire que ce que nous traversons aujourd'hui. Il faut se laisser aller à l'optimisme. Ce n'est pas difficile! Je livrerais bien sûr à Charline un petit message politique (on ne se refait pas!): la peur est de droite, l'espoir est de gauche. Avec la peur, on ne fait rien, on ne construit rien.

b- La télé, c'est très bien, il faut la regarder. Mais la réalité, l'expérience, le vécu, le quotidien, c'est encore mieux. Et puis, tant qu'à regarder les images, autant jeter un regard sur l'actualité de la France et du monde, rien qu'un peu. Les faits divers, ce n'est pas toute la vie, toute la société.

c- Pourquoi s'en prendre à l'Etat? C'est notre bien à tous, il représente l'intérêt général, il permet de communiquer (la Poste), de se déplacer (la SNCF), de se former (l'école publique), de se soigner (les hôpitaux). Critiquez le gouvernement de droite si vous êtes de gauche, critiquez le gouvernement de gauche si vous êtes de droite, mais ne vous en prenez pas à l'Etat.


Bon dimanche,
Charline que je ne connais pas.

25 octobre 2008

12 jours!

Bonsoir à toutes et à tous.

Première journée de vacances assez chargée pour moi! Le matin à Vervins, assemblée générale de motion, autour de Jean-Pierre Balligand, premier signataire de la motion D dans l'Aisne. Pas mal de monde et de détermination, avec la conviction très forte que le congrès va se jouer autour des propositions et du positionnement de Martine Aubry. Nous avons choisi nos candidats pour le Conseil fédéral et calé les dernières interventions dans les réunions de section. Plus que 12 jours de campagne interne. Tout va aller maintenant très vite. Il faut mettre les bouchées doubles. Chaque camarade de la motion doit se donner pour objectif d'en convaincre au moins deux autres, ce ne serait déjà pas si mal.

De retour de Vervins, je mange vite fait pour filer à Soissons, au meeting de Benoît Hamon. S'enfermer dans sa motion, c'est idiot. Il faut aller voir ailleurs, sur place, chez les camarades des autres sensibilités. Il y a bien sûr les textes, mais l'ambiance d'une réunion publique, la spontanéité d'un discours, la température de la salle, les réactions et questions des participants, tout ça est important pour comprendre ce qui se passe. En plus, je devais animer un café-philo dans la même ville en fin d'après-midi, j'ai donc fait d'une pierre deux coups.

A la Mutualité, il devait bien y avoir une centaine de personne. C'est sûr, Claire Le Flécher a réussi son affaire. Elle se débrouille d'ailleurs très bien dans cette campagne. Comment j'ai trouvé Hamon? Je suis assez partagé. Il a incontestablement un côté très pragmatique dans ses propositions, qui l'éloigne de toute logique de rupture ou de toute radicalité. Il ne défend pas par exemple le protectionnisme pur et dur mais plutôt des restrictions douanières sur certains produits. Il ne prône pas une véritable nationalisation du crédit comme la gauche en 1981 mais plutôt un pôle financier public au sein d'un système bancaire demeurant privé. C'est du moins comme ça que je l'ai compris.

Ceci dit, j'ai eu le sentiment, peut-être trompeur, que son discours s'adressait à l'aile gauche du Parti, qu'il y avait dans tout ça des relents de culture minoritaire, protestataire. Hamon souhaite-t-il vraiment s'allier avec Aubry? Par moments, il semble émettre cette préférence, mais à d'autres moments, je doute, en l'écoutant, qu'il soit prêt à franchir le pas. Le peut-il d'ailleurs, avec Mélenchon, Filoche et Dolez comme alliés? Ce que Fabius et Vidalies ont fait il y a quelques mois, Hamon lui aussi pouvait alors le faire. Il ne l'a pas fait. Pourquoi changerait-il d'avis? A l'occasion d'un rapport de force? Il faudrait que celui-ci lui soit très favorable. C'est guère vraisemblable.

Quand on est hors rapport de force, on peut discuter des idées, et pas partage du pouvoir. Montebourg par exemple ne pèse sans doute pas énormément. Mais au sein de la motion Aubry, il a su faire entendre sa voix, faire passer ses idées, se faire une place. Dans un rapport de force, il aurait été marginalisé. Hamon aurait pu choisir cette stratégie-là. En déclarant sa candidature au poste de premier secrétaire, il ferme toute négociation possible, confirme son rôle d'animateur de l'aile gauche, c'est-à-dire se condamne à la marginalisation (même confortable).

La vraie question politique que je pose à ces camarades, la seule à mes yeux qui soit fondamentale pour nous et pour eux: sont-ils prêts à travailler avec des sociaux-démocrates sur une ligne réformiste? Car personne ne me fera croire que Martine Aubry n'est pas social-démocrate ou se serait convertie aux idées de l'aile gauche du Parti. Je vois mal nos camarades de cette sensibilité renoncer en partie à ce qu'ils sont et entrer dans une solution de compromis. Des strauss-kahniens avec des mélenchonistes, ça ferait bizarre, non? Mais comme tout est possible en politique... On a bien vu en 1994 les socialistes les plus à gauche réclamer à corps et à cris la candidature de Delors à la présidentielle!


Bonne soirée.

24 octobre 2008

La mort et l'éternité.

Bonjour à toutes et à tous.

Depuis dix ans, je crois avoir une bonne expérience de ce qu'on appelle les débats publics ou privés. J'ai assisté, participé, organisé, animé ce type de manifestations, dans tous les milieux, selon différentes règles. Je connais bien. Au PS, à chaque congrès, je fais le tour des sections. Généralement, ça se passe bien, l'accueil est excellent, le climat fraternel. Il y a une exception, Saint-Quentin. Ailleurs j'y vais avec plaisir, chez moi avec crainte. Hier, je n'ai pas dérogé à ce sentiment. Revenir d'une rencontre entre camarades, c'est toujours partir avec un bon souvenir. Hier soir, en rentrant, j'avais la tête comme une citrouille, assommé par ce que j'avais entendu, atterré par le climat duquel je sortais.

Encore une fois, j'insiste sur mon expérience. Je sais que tout débat est difficile, qu'il faut beaucoup d'organisation pour le rendre intéressant, fructueux, utile à ceux qui sont présents. C'est un art, un fragile équilibre. Dans ma section, c'est mission impossible. Chacun parle pour lui-même ou pour les siens, rarement pour les autres, il n'y a pas questions, échanges, débats, mais pures et simples répétitions, rengaines en boucle. Chaque intervention aspire à la confrontation, au rapport de force, à l'épreuve de force. Dans ces conditions, la prise de parole est inutile, les remarques passent à côté. C'est pourquoi je me suis tu, presque assoupi (mon voisin aussi, j'ai l'impression), pris dans une sorte de torpeur, un terrible accablement.

A qui la faute? J'ai cru longtemps (parce que cette situation est ancienne) qu'Odette en était responsable, avec son autoritarisme qui générait des crispations, portait aussi aux réactions violentes. Et puis je me rends compte aujourd'hui qu'il n'en était rien, puisque partie, la situation n'a pas changé, elle s'est même aggravée. C'est pourquoi je me garderai bien maintenant de désigner des responsables. C'est plutôt une ambiance collective, assez détestable, stérile pour tout le monde, avec des dimensions absurdes, des "discussions" surréalistes. Je vous jure que je ne vois ça dans aucune autre section. Comment serions-nous prêts à exercer des responsabilités municipales quand nous ne sommes pas capables de nous entendre, de nous comprendre?

Je reviens sur la réunion d'Anizy, mercredi. Je n'étais pas en terrain conquis, c'est le moins qu'on puisse dire. Mais le climat était très bon. J'ai écouté attentivement Alain et Sylviane, et j'ai appris, j'ai compris certains choses. Nous savons bien, les uns et les autres, que nous n'allons pas nous convaincre mutuellement. Il ne reste donc plus qu'à chercher à se comprendre. Voilà comment j'entends une bonne réunion: quand on sort, on a appris, on a un peu mieux compris. Hier soir, j'en suis sorti avec du bruit dans la tête, rien d'autre. J'avais envie de me barrer avant la fin, je suis resté, je ne sais même pas pourquoi, par devoir peut-être, parce que je sais qu'en politique, ceux qui partent ont toujours tort. Notre section sent le désespoir et la mort, alors que la droite locale semble avoir l'éternité devant elle.

Ce soir, réunion de présentation de motions à Guise, chez Thierry. Tant mieux, le plaisir va revenir, hier n'aura été qu'un mauvais moment à passer.


Bon après-midi.

23 octobre 2008

Au tour d'Anizy.

Bonjour à toutes et à tous.

Troisième présentation de motion pour moi, hier soir à Anizy: sûrement la réunion la plus décontractée depuis le début. Je ne suis pas certain de pouvoir en dire autant ce soir... à Saint-Quentin. Ce que je retiens d'Anizy, c'est la prise de conscience de nos divergences, sans que ce constat soit un drame. Oui, il y a des ressemblances entre nous. Encore heureux! Sinon, serions-nous dans le même parti? Mais il y a aussi des lignes politiques qui ne sont pas les mêmes. Un congrès est fait pour en débattre. Débattre n'est pas se battre, a dit une militante. Exact. Ce que j'ai souvent remarqué, c'est que les conflits naissent rarement des convictions, mais plutôt des problèmes de personnes, des enjeux de pouvoir.

J'ai un peu changé mon angle de présentation de la motion D, mais les points forts ne changent pas. J'ai divisé cette fois en trois mon exposé:

1- La méthode: tout commence par là en politique, le choix d'une méthode. Les personnes, c'est important, mais secondaire. A vouloir mettre en avant les personnes, on crée des problèmes de personnes, ce qu'il faut fuir comme la peste en politique. Quelle est la méthode Aubry? Le collectif, le travail d'équipe, lancé il y a un an, à travers le mouvement des Reconstructeurs. Avec la volonté de dépasser les clivages internes, devenus en partie inopérants.

2- L'orientation: c'est la définition de la ligne politique, qui doit être ancrée à gauche, pour que les Français nous distinguent parfaitement de la droite, pour que nous ne soyons pas électoralement assaillis par les deux menaces, Bayrou et Besancenot.

3- La personne: oui, je termine par Martine Aubry, car une politique s'incarne toujours dans une personne, qui doit représenter au mieux ce que nous sommes. C'est pourquoi le choix des candidats est fondamental en politique. On ne peut pas se permettre de mandater n'importe qui. D'autant que notre société médiatique accorde une grande importance à l'image. Aubry est un symbole fort de ce que nous voulons: elle est l'élue d'une grande ville du nord, en terre ouvrière et de vieille tradition socialiste, elle représente l'héritage de la gauche au pouvoir, elle est fidèle et moderne.

Pour finir, j'exprime une inquiétude et un espoir: l'inquiétude, c'est que les principales motions auront des scores très proches, que la majorité ne s'imposera donc pas d'emblée, qu'il faudra la trouver. L'espoir, c'est que Martine Aubry sera la première (je n'ai pas la prétention de dire la seule) à pouvoir rassembler, parce que sa motion, notre motion constitue un axe central autour duquel d'autres peuvent venir s'agréger. Lesquels? J'ai ma petite idée, je ne suis pas le seul, mais il faut laisser les camarades libres de leurs choix, ne jamais anticiper les résultats. Après, on avisera.


Bon après-midi.

22 octobre 2008

Tout un art.

La politique n'est pas une science, sinon elle serait prévisible. Or, il est flagrant qu'on ne peut rien anticiper, sauf après coup, par frime. Que va-t-il se passer à Reims, lors de notre congrès? Nul ne le sait, tout est possible. C'est pourquoi, en politique, il ne faut jamais lâcher le morceau, et pour ma part, je le tiens bien, très fermement. Ce n'est pas une science, c'est un art.

Mais il ne suffit pas de dire cela, car nous encourageons la paresse. Certains vont se croire autorisés à ne rien faire, à attendre leur heure, qui ne sonne évidemment jamais. Il faut au contraire forcer le destin, autant qu'il est possible, mettre son empreinte sur les évènements. Comment faire? En se plaçant au centre. Dans la marge, même confortable, on n'arrive à rien. C'est pourquoi s'enfermer dans un courant n'est jamais bon, vous condamne.

Pourquoi vous dire tout ça que vous savez déjà, si vous lisez attentivement ce blog depuis deux ans? Parce que Martine Aubry me semble aujourd'hui la mieux engagée pour occuper cette place centrale (et non "centriste"). Pour être au centre, il ne faut pas d'abord être au centre, il ne faut pas d'emblée se mettre en avant. Les Reconstructeurs ont travaillé pendant un an sur un projet, qui a conduit à notre motion, sans faire appel à Aubry, qui était alors une parmi d'autres. Royal et Delanoë, en revanche, ont choisi le chemin inverse: ils ont d'abord fait acte de candidature, imposé leur personne pour ensuite solliciter des soutiens. C'est un choix que je respecte, ce n'est pas le mien, ce n'est pas le nôtre.

Ensuite, pour être au centre, il faut se positionner... au centre, et tout de suite rassembler. C'est ce qu'a fait Aubry: elle a montré ses capacités de rassemblement... en rassemblant, de même que le mouvement se prouve dans la marche. Et il en fallait, de ces capacités-là, pour réunir autour d'une même table, dans un même texte, Cambadélis et Fabius, Montebourg et Vidalies. C'était loin d'être gagné d'avance. Ce sera vraiment gagné à Reims.

Quel sera demain le centre de gravité, la force d'attraction au Parti socialiste? Qui sera capable de s'ouvrir, de rassembler, de composer, parce qu'elle l'a déjà fait, parce qu'elle pourra donc le refaire? Martine Aubry. Discutez avec les camarades qui soutiennent Hamon, qui voteront pour sa motion. Les plus lucides, les plus réalistes vous le diront: c'est avec Aubry qu'il faut aller. Ce sera difficile pour certains? Comme il n'a été pas évident pour le strauss-kahnien que je suis de rejoindre les fabiusiens. Mais la politique est à ce prix: ce qui compte, ce ne sont pas les intérêts de chapelle, ni les préférences personnelles. Ce qui compte, c'est l'intérêt général et supérieur du Parti. Tout un art, je vous dis...


Bon après-midi.

Une soirée à Braine.

Bonjour à toutes et à tous.

Je n'ai pas eu encore le temps de vous raconter ma présentation de motion à Braine, lundi soir, ma 2ème réunion de section dans le cadre du congrès. Comme à Gauchy, nous sommes dans une petite section, une bonne douzaine de camarades, autour d'une table, avec cependant une démarche plus "officielle": chacun a défendu son texte dans un temps imposé, 8 à 10 minutes. L'ami Pierre, strauss-kahnien delanoïste, était présent, et je crois bien que je lui ai refilé le virus de la politique active et des virées nocturnes dans les sections!

J'aime beaucoup Pierre, même si nos chemins divergent pour ce congrès: il est pur, sincère, authentique, il veut, il aime agir, il ne se contente pas de suivre quelqu'un ou d'assurer un rôle de représentation, il ne vise pas une place, un strapontin, même si, comme nous tous, moi le premier, il aimerait exercer une responsabilité importante dans le Parti, était reconnu et porté par l'électorat. Mais il le fait sans opportunisme, dans le respect de ses convictions. C'est pourquoi je l'aime beaucoup. C'est tellement facile, tellement bas, d'aller vers les puissants du moment (qui ne le sont jamais éternellement, en démocratie et surtout au Parti socialiste).

Ce que j'apprécie dans ces petites sections (c'est pourquoi j'aime m'y rendre, comme ce soir à Anizy), c'est que la parole est libre, les échanges sont cordiaux, l'ambiance est fraternelle, les clivages sont moins marqués que dans les grandes sections, il n'y a pas de chefaillon de courant qui donne le ton et que les affidés reprennent servilement. Du coup, le débat est beaucoup plus vrai, moins artificiel, sans positionnement factice. C'est ainsi que je rêve le Parti socialiste, mais Gauchy et Braine ne sont hélas pas tout le Parti.

Présenter une motion, c'est un défi, plutôt compliqué. On ne peut pas tout dire du texte qu'on défend, c'est beaucoup trop long, et il suffit de le lire. Il faut donc, en quelques minutes seulement, aller à l'essentiel, avec l'objectif de convaincre. Pas facile du tout. Chez moi, c'est devenu une routine, à force de le faire. Le métier est rentré, rien ne vaut l'apprentissage sur le tas. C'est tout de même ma 5ème tournée des popotes depuis 2003!

L'ami Pierre s'est par moment un peu perdu dans les détails de sa motion, mais il est redevenu convaincant quand il a laissé de côté la lecture du texte, quand il a parlé avec son coeur et avec ses tripes. Peut-être plus efficacement que moi d'ailleurs, qui ai le défaut d'être trop maîtrisé, trop organisé. Je ne laisse rien à l'improvisation, à la spontanéité. C'est sincère, mais paradoxalement trop rationnel, trop sec. Les défauts de Pierre l'humanisent et le rendent accessible, mes qualités m'éloignent parfois des autres. On ne se refait pas, que voulez-vous!

J'attaque ma présentation de la motion D en rappelant ce qu'est un congrès. Autant commencer par le commencement. Le congrès sert à dégager une majorité pour diriger le Parti, autour de grandes orientations générales. Puis je structure l'exposé en quatre points:

1- L'ancrage à gauche du Parti, pour éviter la fuite infidèle vers le centre ou l'enfermement dans une aile gauche stérile.

2- Le refus de la présidentialisation, ce défaut de la droite que la gauche doit s'interdire de reproduire.

3- Le dépassement des clivages internes du passé, qui n'ont plus grand sens aujourd'hui, notamment sur l'Europe.

4- La volonté d'une démarche collective, d'une consultation du Parti dans l'élaboration de notre programme, à travers 5 conventions nationales.

A partir de ce canevas, j'adapte selon la section, le temps qui m'est imparti. Ce soir, à Anizy, je ne sais pas encore comment je procéderai, on verra.


Bonne matinée.

21 octobre 2008

La femme de nos rêves.

Bonjour à toutes et à tous.

Dans les années 70, quand j'étais adolescent, il y avait un personnage détesté entre tous, auquel personne ne voulait ressembler, dont on se moquait volontiers: la "bonne soeur". Le terme lui-même était péjoratif: traiter quelqu'un de "bonne soeur" n'était pas un compliment. On stigmatisait à travers cette expression une personne grise, coincée, bigote, à rebours de l'époque marquée par le grand vent d'émancipation de Mai 68. La "bonne soeur" était la femme de nos cauchemars. Serait-elle devenue, trente ans plus tard, la femme de nos rêves?

Il semble bien, si j'en crois le déferlement médiatique et le concert d'éloges qui ont suivi la disparition de soeur Emmanuelle, "notre soeur à tous", comme l'a présentée Nicolas Sarkozy, avec ce zèle comique des nouveaux et des faux convertis. Soeur Emmanuelle! Outre que ce prénom soit le plus beau du monde, qu'il signifie "Dieu avec nous" (quel autre prénom peut en dire autant?), comment ne pas songer, puisque ma pensée vaque dans les années 70, à la belle Emmanuelle qu'incarnait au cinéma Sylvia Kristel, Dieu merci toujours en vie?

Quand le film est sorti, une nouvelle image de la femme s'est imposée, libérée, gentiment dominatrice, faisant de la beauté de son corps une supériorité assumée, exhibée. Souvenez-vous de l'affiche: Sylvia dans son fauteuil en rotin, les cheveux à la garçonne, rompant ainsi avec la féminité traditionnelle de la chevelure abondante, jambes haut croisées, son collier de perle à la bouche, méditative, presque philosophe, et surtout très naturelle. Toute ma jeunesse!

Si on m'avait dit à l'époque que passé l'an 2000, l'opinion mettrait en tête de ses personnages préférés une "bonne soeur", je n'y aurais franchement pas cru! C'est fait, mais qu'est-ce qui a bien pu se passer pour que notre société en arrive là? Je ne juge pas, je cherche à comprendre une sorte d'anomalie, un choix à contretemps, en contradiction flagrante avec l'état d'esprit actuel, où le film "Emmanuelle" n'est plus qu'une bluette érotico-romantique. Pourquoi l'hyper-femme, Emmanuelle, a-t-elle été chassée par l'anti-femme, soeur Emmanuelle?

Pendant longtemps, les sociétés se sont données des héros et des héroïnes qui leur ressemblaient, les guerriers sous l'Antiquité, les saints au Moyen-Age, les savants au XIXème siècle. Aujourd'hui, en se donnant soeur Emmanuelle comme emblème, la société moderne se ment à elle-même, sur au moins trois points:

1- Nous n'avons jamais été autant déchristianisés, les religions sont tournées en dérision, la plupart des églises sont vides, et c'est une religieuse que l'on se choisit. Contradiction.

2- La France sarkozienne n'aime pas les pauvres, se méfie des chômeurs, rmistes et allocataires sociaux, qu'elle appelle avec mépris "les assistés", et elle craint les immigrés. Et c'est cette France-là qui porte au pinacle la petite soeur des déshérités du Caire. Contradiction.

3- L'opinion a peur de tout, ne croit plus en rien, est d'un pessimisme foncier. La plupart des discussions que nous pouvons avoir autour de nous l'attestent. Or, soeur Emmanuelle, c'est la vie, l'optimisme, l'espérance, des valeurs qui ont cessé d'être cardinales. La souffrance, la vieillesse, la mort, que nos contemporains détestent par dessus tout, elle les accepte, elle s'en réjouit! Contradiction.

Le bon vieux Hegel nous explique qu'une contradiction trouve sa solution à un degré supérieur. Soeur Emmanuelle, l'opinion l'admire parce qu'elle ne lui ressemble absolument pas, parce qu'elle est son opposé. Soeur Emmanuelle nous sert de bonne conscience, nous qui avons tellement mauvaise conscience de ne plus croire en rien, de ne plus espérer de personne, de n'éprouver aucune indulgence envers les pauvres. Mais chacun de nous, au fond de lui-même, là où il n'y a plus que la sincérité, mettra la femme de ses rêves, la femme de son choix, soeur Emmanuelle ou Sylvia Kristel.


Bonne matinée.

20 octobre 2008

DSK, plus que jamais.

L'affaire DSK, appelons la comme ça, a occupé les médias pendant le week-end, et moi m'a plutôt fait rigoler. Mais comme la politique est une chose sérieuse, il faut répondre sérieusement, ce que je vais faire avec d'autant plus de plaisir que c'est extrêmement facile, et fort instructif. Quel est le fond de l'affaire? Une histoire de galipettes en pays puritain dont certains font une exploitation politique. Je vous explique:

L'Amérique est obsédée par trois choses, qu'elle proscrit strictement: le mensonge, l'adultère et la corruption. Passons en revue chacune, et voyons si Strauss mérite l'enfer:

1- Le puritanisme, comme beaucoup d'autres courants religieux, exalte la vérité et honnit le mensonge. Un homme politique qui ment, même sur une bagatelle, est déchu: menteur un jour, menteur toujours, menteur une fois, menteur pour quoi que ce soit. DSK a-t-il menti? Non, il a reconnu une aventure d'un soir quand on lui a posé la question.

2- L'adultère est condamné par le puritanisme, Strauss l'a commis. Et alors? Je suis français, laïque, socialiste, et je n'aime pas qu'on mélange vie privée et vie publique. Moralement, individuellement, chacun pense ce qu'il veut des relations extra-conjuguales. Pour ma part, n'ayant jamais été marié (ce qui est encore la meilleure façon d'échapper à l'accusation d'adultère), je n'en dirais rien, et je garderais pour moi ce que j'en pense. Mais la République n'a pas à se mêler de ça. Je suis pour une République laïque, pas pour une République puritaine (qui pourrait se transformer très vite en dictature des moeurs).

3- La corruption est le seul point sur lequel j'approuve l'Amérique, qui réprouve sans faiblesse ce vice de la démocratie, et que la France a tendance à minimiser. Le vrai scandale serait là: que DSK ait favorisé sa maîtresse dans le cadre de ses fonctions. Ce n'est pas le cas. Strauss ne s'est pas dérobé à l'enquête intérieure du FMI, il apporte sa contribution à la vérité. Tout ça est donc du vent, du flan.

Cette affaire, comme j'ai choisi de l'appeler, est éminemment politique. Car à qui profite le crime? C'est le délégué russe qui a suscité l'enquête, celui-là même qui s'est violemment opposé à DSK quand il a fallu désigner le directeur général du FMI, ne lui reconnaissant pas les compétences nécessaires pour le poste (il est bien le seul!). Les autorités américaines ont laissé faire. Au moment où DSK critique les dérives du capitalisme financier, défend l'idée de régulation, il y en a plus d'un qui ont intérêt à ce que le nouveau patron du FMI soit mis en difficulté, afin de préserver l'orthodoxie libérale.

Tout ça va passer, très rapidement, mais nous n'oublierons pas que DSK gêne, et que c'est pour nous tous, qui soutenons sa candidature à la présidentielle de 2012, un très grand encouragement.


Bonne fin d'après-midi.

Retour de manif.

Bonjour à toutes et à tous.

Il y a deux catégories de personnes dans la vie: celles qui sont toujours satisfaisantes de tout, surtout de ce qu'elles font, celles qui sont rarement satisfaites, même quand il y aurait lieu de l'être. Je me classe dans cette dernière catégorie. C'était un préalable nécessaire avant de faire le bilan de la journée de mobilisation d'hier dans l'Education Nationale.

Un chiffre d'abord: 80 000 manifestants dans les rues de Paris, ce n'est pas si mal. En remontant le cortège, je n'ai pas pu atteindre la tête avant qu'elle ne se disperse à la Bastille. Dans l'Aisne, nous avons organisé quatre cars, c'est correct. Mais tout est relatif: une manif sans grève est plus facile, on ne perd pas d'argent. Et puis, une manif nationale, rassemblant tous les syndicats (sauf FO), on pouvait faire mieux. Ne peut-on pas toujours faire mieux?

Dans le car, ce sont les militants qui se sont mobilisés. Il reste encore des pans entiers de la profession que nous ne touchons pas, alors qu'ils sont au plus haut point concernés. Bref, nous avons assisté hier à une belle mobilisation militante, sans aller vraiment au-delà. Mais en ce sens-là, c'était une réussite, qui me faire dire que le monde de l'enseignement demeure un bastion fort contre la droite. Quel corps de métier pourrait se targuer de mobiliser aussi massivement et aussi efficacement? Je n'en vois pas beaucoup...

Il y a un autre facteur, qui permet d'apprécier à sa juste mesure ce qui s'est passé dimanche: c'était tout le contraire d'une réaction corporatiste, puisque aucun manifestant ne sera touché par les mesures du gouvernement, c'est-à-dire la suppression de quasiment 100 000 emplois pendant ce quinquennat. Ce sont des départs en retraite non remplacés, qui concernent donc les futurs candidats aux concours.

Connaissez-vous un seul secteur de notre société qui fasse défiler 80 000 personnes, sans que celles-ci soient directement touchées par les mesures qu'elles dénoncent? Je n'en vois aucun. Hier, c'était bien l'avenir de l'école et du service public qui était au coeur de la manifestation, et pas les intérêts particuliers et individuels des enseignants. Rien que pour cette raison, cette mobilisation était exceptionnelle.


Bon après-midi.

19 octobre 2008

Loin de mon ordi.

Bonsoir à toutes et à tous.

Pas de billet hier, et très peu ce soir. J'ai beau être assez organisé, il y a des moments où l'impossible est infaisable, ce week-end par exemple, trop chargé, trop loin de mon ordi. Samedi matin, j'étais à Paris, pour une réunion de la Ligue de l'enseignement: il y a un peu le feu à la maison, au niveau national. Malgré les promesses et les compliments, le gouvernement réduit nos subventions. On va faire comment pour de nombreuses activités péri-scolaires? Ce pouvoir manifestement ne s'en préoccupe pas, tout occupé à une autre politique.

Après-midi, de retour de Paris, j'ai à peine le temps de manger un morceau que je me rends vite fait à Hirson, pour la traditionnelle "rentrée fédérale" des socialistes. C'est surtout un moment d'amitié et de convivialité, où il est finalement peu question de politique, sauf à rappeler les modalités de notre congrès. En soirée, nous avons apprécié le groupe musical Ticho, dont le chanteur n'est autre que notre camarade Philippe Mignot... directeur de cabinet du président du Conseil général!

Aujourd'hui, retour à Paris, pour la journée, dans la grande manif de l'Education Nationale. J'y reviendrai demain, comme je vous parlerai de "l'affaire" qui a, me dit-on, occupé les médias tout le week-end: les problèmes de DSK. Mais avant de vous quitter, je veux vous confier une pensée, et je suis certainement le seul socialiste saint-quentinois à l'avoir eu à l'esprit aujourd'hui: c'était, ce 19 octobre, le funeste anniversaire de nos choix municipaux quand, lors d'une réunion de section, il y a exactement un an, je renonçais à ma candidature, faute de soutiens suffisants, et qu'un processus conduisait à la désignation d'une tête de liste ayant encore moins de soutiens que moi.

Un an après, non seulement je ne regrette rien, mais la suite des évènements, dont je me serais bien passé, m'aura donné raison. Tout ce que je dénonçais, tout ce que je voulais éviter, tout ce que ma candidature et surtout ma méthode auraient pu éviter, tout cela est hélas arrivé: la division, la défaite, l'absence d'avenir. Un an après, je suis renforcé dans mes convictions d'alors, je n'en ai pas changé d'une miette, d'un pouce, je continuerai, vaille que vaille, coûte que coûte, à combattre ce qui s'est passé et qui l'a finalement emporté: les méthodes, les alliances, le projet, celles et ceux qui les portent.


Bonne nuit.

17 octobre 2008

Un courrier d'Aubry.

Martine Aubry vient de faire parvenir un courrier à chaque adhérent du Parti socialiste. Sa lecture me renforce dans mon engagement à ses côtés, dans le refus de suivre Pierre Moscovici dans le sillage de Bertrand Delanoë. Ce qui n'enlève rien à l'estime que je leur porte: nous nous retrouvons un jour ou l'autre, ensemble. Mais aujourd'hui, c'est le congrès, et si en France tout paraît-il se termine par des chansons, en politique tout se termine par des choix. Le mien est clair, cohérent, certain: Aubry, c'est la meilleure, parce que son positionnement, sa méthode, ses orientations sont les meilleurs.

La lettre commence évidemment par la crise financière. Pas question de colmater le système; il faut en changer. Pas en faisant la révolution, à laquelle personne de sérieux ne songe, mais en modifiant les règles au niveau national et international (Strauss, on compte aussi sur toi!). Ce changement de système est inéluctable puisque ses promoteurs eux-mêmes, la droite, n'en veulent plus. Mais ils sont très mal placés pour le changer. On ne va pas confier à une entreprise de démolition le soin de construire une nouvelle maison!

Que propose Aubry? Simple: le contraire de ce que propose et fait (ou plutôt défait) la droite. "Nous devons réarmer la puissance publique, mais aussi la moderniser pour être plus efficace et plus apte à prendre en compte les aspirations individuelles". Tout est là. Ce qui signifie remettre la question sociale au coeur de nos préoccupations, en augmentant les salaires, en engageant une grande réforme fiscale (qui tourne le dos au fameux "paquet fiscal" de Sarkozy, en réalité joli paquet-cadeau pour les plus fortunés).

Et l'Europe, une plaie encore vive pour beaucoup de socialistes, après les divisions autour de la Constitution? "Elle fait partie de l'identité socialiste". Oh que oui! Et Aubry milite "pour une Europe politique, sociale et humaniste". Très bien.

Voter Aubry, c'est aussi assumer ce que nous avons fait, qu'elle incarne fortement: les 35h bien sûr, mais aussi la parité, le PACS, la CMU, l'APA,... Car j'en ai marre, depuis longtemps, depuis toujours, de ces camarades qui trouvent à redire sur ce que nous avons fait, qui se plaignent qu'on ne soit jamais assez à gauche. Les faits sont là, les réformes sont encore fécondes aujourd'hui, la droite les attaque, alors défendons-les! Personne ne ferait confiance à un parti qui regretterait ce qu'il a fait. Il faut assumer, avec fierté!

Maintenant, il faut préparer les futures victoires, malgré et à cause de ce constat: "Cela fait 20 ans que nous n'avons pas gagné une élection présidentielle et 11 ans une élection législative!" Comment gagner? En fonctionnant autrement que nous ne l'avons fait, en dépassant les anciens clivages, en remettant le Parti au travail, en organisant 5 grandes conventions nationales pour construire notre projet, en inventant une alliance de toute la gauche, en instaurant des primaires ouvertes pour la présidentielle. C'est ça la motion D. Et j'y crois!


Bon après-midi.

Les choix d'Hamon.

Bonjour à toutes et à tous.

Mélenchon sera dans l'Aisne demain, à Soissons, pas pour défendre sa motion, mais participer à la réunion des élus de l'ARG, Alliance républicaine de gauche, qui se situe à la gauche du PS et en concurrence avec lui. Samedi prochain, ce sera au tour d'Hamon d'être présent, dans la même ville, pour une réunion publique, cette fois dans le cadre de notre congrès.

Hamon peut-il être la surprise de ce congrès, comme le suggérait le Nouvel Observateur? Je ne le crois pas. Si les fabiusiens l'avaient rejoint, oui, l'aile gauche prenait de la consistance. Mais là, non. Si cette aile gauche s'est historiquement réunie, alors que ses habitudes sont de maximiser le rapport de forces, c'est parce qu'elle se sent et se sait en danger de marginalisation. Elle a perdu la main. L'heure est à la social-démocratie, version Aubry, Delanoë ou Royal.

La seule issue de l'aile gauche, c'est de faire jouer la différence, et si possible de la surjouer. Elle sait faire. En vérité, son avenir est ailleurs. En politique, on a toujours de l'avenir quand on a des convictions. Hamon n'en manque pas. Son heure viendra, pas maintenant, pas le 6 novembre au moment du vote, mais à Reims, pendant le congrès. Que fera-t-il? Poursuivre la marginalisation ou passer des compromis? S'enfermer dans sa spécificité (il a le droit) ou se rassembler avec d'autres (c'est peut-être son devoir)?

Hamon a suivi un temps la démarche des Reconstructeurs, dans laquelle il avait toute sa place. Il peut encore participer à ce rassemblement majoritaire. Par sa contribution, il serait utile à tout le monde, à lui-même, au Parti. Aubry l'a dit dans une formule qui résume tout: l'objectif n'est pas de faire une gauche du Parti mais de faire que le Parti soit à gauche.

Pour cela, Hamon doit résister à ses "amis", Mélenchon, Dolez et, dans une moindre mesure, Lienemann, adeptes de la pureté idéologique, du "plus à gauche que moi tu meurs", de la pratique du rapport de forces. Quel que soit le résultat qu'obtiendra la motion d'Hamon, tout pour elle, tout pour lui se jouera après, dans le choix qu'il fera. Dans l'isolement, il se condamne, dans l'alliance, il retrouve un rôle, une influence.

Avec les strauss-kahniens, avec les fabiusiens, avec les rénovateurs de Montebourg, avec les poperénistes de Vidalies, Martine Aubry a lancé une dynamique, une synergie, une alchimie qui peuvent se révéler fécondes, productives. Benoît Hamon, dans la clarté et la cohérence des orientations idéologiques, y a toute sa place. Ce qui ne s'est pas fait hier peut se faire demain. Ca ne dépend pas de nous, motion D, ça ne dépend plus que de lui.


Bonne matinée.

16 octobre 2008

Du bon usage de la crise.

Bonjour à toutes et à tous.

Comment va le congrès du PS? Couci-couça. A ce qu'on m'en dit, à ce que je constate, les réunions ne font pas vraiment le plein. Le débat semble un peu en rade. Mais il va peut-être s'animer, question de temps. La cause? La crise sûrement, qui a surpris, qui gêne aux entournures. Les votes de la gauche à l'Assemblée face au plan Sarkozy d'aide aux banques manifestent le désarroi de la gauche: le PRG pour, le PCF contre, le PS s'abstient mais Valls nous dit que c'est une erreur.

Et puis, il y a l'incertitude quant aux résultats du congrès. On sent une petite avancée de Delanoë, mais Royal demeure populaire et Aubry pourrait créer la surprise. Mieux vaudrait un enjeu plus clair, moins dispersé, entre une option carrément réformiste et une autre relevant de la gauche traditionnelle. Dans la situation présente, tout le monde regarde tout le monde en se posant une seule question: qui va faire quoi? Pas bon tout ça.

A propos de la crise financière, je vois deux écueils dans lesquels il ne faut pas tomber, ce que Jean-Christophe Cambadélis a rappelé sur BFM il y a quelques jours:

1- Le déni de la crise: face à son ampleur (encore largement inconnue), face à la peur de la population, face au décalage (inévitable) de nos motions, nous serions tentés d'effacer la crise de nos réflexions en repoussant la date du congrès. C'est l'idée défendue par Malek Boutih et Julien Dray. Je crois que c'est une mauvaise idée. Au contraire, la crise vient nourrir nos réflexions, confirme en partie nos analyses et doit être au coeur de notre congrès.

2- L'instrumentalisation de la crise: c'est le comportement inverse du précédent. On utilise la crise pour des enjeux strictement internes, pour marquer artificiellement sa différence. Alors, la crise efface tous les autres thèmes, ce qui est un tort. Nous n'avons pas à nous soumettre ainsi à l'actualité, même si nous devons nous en inspirer. C'est la tentation de l'aile gauche, c'est le petit jeu bien connu du "plus à gauche que moi tu meurs". Certaines sections pourraient ainsi détourner les assemblées générales de présentation de motions en les orientant vers un débat sur la crise financière, ce qui n'est évidemment pas conforme à nos règles. Le rythme et les principes du congrès doivent être respectés.

La crise, nous devons en parler, le congrès doit être maintenu à la date prévu. Mais n'oublions pas que les Français nous regardent, nous observent, et que certains espèrent, attendent beaucoup de nous. Ne faisons donc pas comme s'ils n'existaient pas, ne nous laissons pas aller aux délices mortifères des affrontements internes. Sur la crise financière, montrons au contraire notre unité, si nous voulons nous opposer à Sarkozy. Et débattons normalement de tout le reste.


Bon après-midi.

15 octobre 2008

Le retour de Coluche.

Bonsoir à toutes et à tous.

Moi qui ne vais pas souvent au cinéma, j'irai sûrement voir le film d'Antoine de Caunes sur la candidature de Coluche en vue de la présidentielle de 1981. Je m'en souviens très bien, j'avais 20 ans, j'étais chez moi, dans le Berry, sans travail, et j'ai suivi de près cette tentative du comique de percer en politique. Je m'intéressais à la politique depuis plusieurs années déjà, mais cette fois, j'ai pu suivre vraiment une élection, j'avais hélas le temps. Un peu comme aujourd'hui sur ce blog, je consignais mes réflexions et mes notes de campagne sur des petites fiches cartonnées, j'en ai rempli plusieurs boîtes à chaussures, tout ça a aujourd'hui disparu.

J'étais de gauche, je n'aimais pas Marchais, j'espérais la victoire de Mitterrand, je n'y croyais pas, j'étais très hostile à la candidature Coluche. Le comique me plaisait beaucoup, le politique pas du tout. N'oublions pas qu'à l'époque, c'est-à-dire essentiellement à l'automne 1980, Coluche prenait très au sérieux sa candidature, et les médias aussi. Et c'est ce que je n'aimais pas: un grand comique qui se prend au sérieux, qui se voit jouer un rôle politique. Finalement, pendant quelques mois, Coluche avait cessé d'être drôle.

Surtout, je n'aimais pas son message: les politiques tous pourris, et on va "leur foutre dans le cul" (du Coluche dans le texte!). Comme beaucoup d'autres, je n'ai pas apprécié cette disqualification de la politique, cette dérision de la démocratie, ce renvoi dos-à-dos de la droite et de la gauche. Moi, cette année-là, je n'avais qu'un objectif: après 23 ans de domination de la droite, voir la gauche l'emporter. Coluche, mine de rien, venait briser ce rêve, en poursuivant ce qu'avait été le poujadisme, en annonçant ce que serait le populisme.

Ce que je retiens de cet épisode, c'est que la politique connaît des moments de "creux", de dépression, au sens atmosphérique du terme, dans lesquels toutes les démagogies viennent faire leur nid. Celle de Coluche n'était pas la pire, et elle était talentueuse. "Tous pourris", "Droite et gauche pareilles", "Vive moi", on a entendu ça tellement de fois. Coluche aura incarné un moment, pas le plus glorieux de sa carrière, parmi tous ces moments-là. Je n'adhérais pas. Bernard-Henri Lévy, la même année, publiait "L'idéologie française", un ouvrage que j'ai aimé, et qui sans le vouloir dénonçait le "phénomène" Coluche, cette France râleuse, qui critique tout et ne propose rien.

Je dis bien le "phénomène" Coluche, parce que Michel Colucci a été très vite dépassé par l'évènement autour de son nom, quand des intellectuels prestigieux, tels que Deleuze et Bourdieu, l'ont soutenu, quand des sondages lui donnaient plus de 10% à la présidentielle, score énorme qui le transformait en faiseur de roi. Mais cet automne, je m'en rappelle, était gris, triste et froid: les socialistes étaient déchirés entre mitterrandistes et rocardiens, les communistes avaient rompu l'union de la gauche et ne cessaient de critiquer le PS, Giscard était au plus haut dans les sondages, le chômage augmentait, la sidérurgie s'écroulait, aucun espoir ne semblait concevable. Ce que je reproche le plus à Coluche, c'est d'avoir surfé sur ce désespoir. Il me semble même que la candidature d'Yves Montand, elle aussi mais avec beaucoup moins de succès, avait couru.

Bref, le désespoir en politique, ça ne date pas d'aujourd'hui. Le nihilisme non plus. Malgré tout, l'espoir est le plus fort. Mitterrand candidat, entrant activement en campagne à partir de février 1981, tout a changé, tout a basculé, jusqu'à l'apothéose, le 10 mai. Coluche a été vite oublié, emporté par l'Histoire, et il s'est rallié à Mitterrand, est devenu ami avec Attali, a renouvelé quelques années plus tard, en le modernisant, le concept de charité, avec la création des "restaurants du coeur". Fin de d'une histoire qui avait commencé avec le professeur Choron et qui finissait avec l'abbé Pierre. Gardons à l'esprit cette leçon: la dérision en politique ne dure jamais longtemps, l'espoir finit toujours par l'emporter.


Bonne soirée.

Et j'entends siffler...

Les sifflets contre la Marseillaise lors du match France-Tunisie sont devenus un drame national. On en oublierait presque la crise financière mondiale. Y a-t-il outrage à la nation? N'exagérons rien. Quelques centaines de conards sifflent, que voulez-vous faire contre ça? On rencontre partout des comportements idiots. En s'en scandalisant, on leur donne paradoxalement de l'importance, on parle d'eux, ils voulaient choquer, ils ont réussi leur coup, prêts à recommencer après tant d'impact et d'efficacité.

Soyons un peu raisonnables, prenons de la distance, ne nous emballons pas. Les conards osent tout, ils sont insensibles au langage de l'intelligence et du raisonnable. Ce sont toujours les plus forts, on n'y peut rien. Vouloir raisonner un conard, c'est peine perdu. Un solide mépris est plus probant. Ils continueront, quoi que vous fassiez.

Le gouvernement propose de suspendre les matches. C'est idiot, infaisable et injuste. Sur des milliers de spectateurs, les "siffleurs" ne sont que quelques centaines. On ne va pas pénaliser tout le public à cause d'eux. Sachant cela, les provocateurs vont continuer de plus belle, rien ne les arrêtera. Au contraire, le plaisir de la transgression sans risque leur sera très délectable. Je ne vois pas les autorités sportives procédant à répétitions à l'évacuation de stades entiers.

Il ne faut alors rien faire? Non pas. L'hymne national n'est-il pas sacré, ne mérite-t-il pas le respect? Sûrement, comme le drapeau et tout ce qui touche à la symbolique nationale. Je tiens d'autant plus à la Marseillaise que c'est un chant républicain, révolutionnaire, progressiste, et très beau. Lors de la commémoration du centenaire de la loi de 1905, organisant une fête laïque dans le gymnase Marcel-Bienfait, j'ai fait chanter la Marseillaise, tout le monde debout. Alors on fait quoi?

D'abord une petite réflexion: le sacré n'a de sens que dans les endroits, les situations, les cérémonies sacrés. La Marseillaise lors d'une journée patriotique a sa signification, et toute sa place. Tout ce qui a trait à la nation, à l'armée, à la République, à la politique, ce chant joue son rôle, produit son effet. Mais sur un stade, avant une compétition sportive? Non, je ne crois pas, c'est une symbolique dévoyée, détournée. Se passer une balle qu'on veut mettre dans un but, c'est une occupation très louable, un loisir distrayant, un métier respectable, mais ça n'entre pas dans la mythologie nationale.

Ce faisant, je ne vois pas pourquoi il faudrait entonner les hymnes nationaux au début des compétitions sportives. Ce n'est pas le lieu, les raisons invoquées ne sont pas valables. Et puis, le sacré attire le sacrilège comme le miel attire les mouches. Ne tentons pas le diable! Il n'y a pas de chants grégoriens au départ d'une course cycliste. Il n'y a pas de drapeau tricolore pour un concours de plongée sous-marine. Pourquoi y aurait-il les hymnes nationaux avant un match de football? Ce qui compte, c'est la performance de l'équipe, la valeur des hommes, pas leur appartenance nationale. Je propose qu'on supprime cette cérémonie à l'ouverture des épreuves sportives. Le sport y gagnera, le nationalisme y perdra et le patriotisme authentique sera préservé.


Bon après-midi.

La grande tétée.

Bonjour à toutes et à tous.

Non, je ne vais pas vous parler d'un film comique avec Louis de Funès, ou d'un porno avec Rocco Zifredi. Il sera plus prosaïquement question d'une très étrange manifestation qui a eu lieu samedi à Saint-Quentin, en plein centre-ville, sur les marches du théâtre: plusieurs dizaines de femmes donnant le sein à leur petit enfant. J'ai connu beaucoup de manifs dans ma vie, pour toutes sortes de causes, mais l'allaitement maternel, je ne savais même pas que c'était l'objet de revendications.

Pour tout vous dire, je suis surpris, et même un peu choqué, mais c'est probablement à mettre sur le compte de mon ignorance. Allaiter au sein, c'est pour moi un choix et une attitude strictement personnels, privés et même intimes, pudiques. En faire l'objet d'une démonstration ostentatoire, au vu et au su de tous, m'étonne, me laisse un peu coi. Spontanément, mais j'ai certainement tort parce que je n'ai pas tout compris (l'allaitement maternel n'est pas le premier de mes soucis), le geste me fait penser à la brave Margot dans la chanson de Brassens, aux nourrices du Moyen Age ou aux femmes africaines dans leurs villages. Bref, un truc pas très moderne.

Surtout, ce que je ne saisis pas, c'est qu'on puisse en faire un objet de militantisme et de prosélytisme, car ce choix, encore une fois, est purement individuel. Militer, c'est se battre pour quelque chose qui semble positif à une majorité sinon à la totalité des citoyens. Une revendication a une portée universelle, c'est pourquoi on se permet de la brandir publiquement. Je ne vois pas en quoi l'allaitement au sein rentre dans cette catégorie. Qu'on puisse informer sur cette pratique, soit, j'en conviens, c'est probablement nécessairement, et moi-même ai besoin d'être éclairé. Mais prôner cette "méthode", en faire en quelque sorte une attitude préférentielle, supérieure, ça me semble bizarre.

Pour aller au fond de ma pensée, je suis inquiet, mais je ne demande pas mieux qu'à être rassuré. Je crains que tout cela, mine de rien, ne soit très réac. C'est la défense de la nature, du bon lait qui vient du bon gros sein, contre le lait du biberon, produit de la méchante civilisation. C'est une façon de réduire la femme à un corps. Je ne me sens pas à l'aise dans cette conception. Et puis, il y a le titre même de l'opération: "La grande tétée", qui a quelque chose de burlesque. Après les "vaches à lait", les femmes à lait? Etrange, bizarre...


Bonne matinée.