L'Aisne avec DSK

31 mai 2010

Verbalement correct.

Bonjour à toutes et à tous.


Me voilà encore obligé de dénoncer le puritanisme ambiant, la police de la pensée et du langage, qui nous imposent ce que doit être le bon ton. Je veux bien sûr parler de la dérisoire agitation autour du propos de Martine Aubry ce samedi, rapprochant Sarkozy de l'escroc financier Madoff. Je n'ai pas à juger si sa formule est opportune ou pas. La question est seulement de savoir si en République on est libre d'utiliser les mots de son choix : évidemment oui !

Je m'inquiète de voir une partie de la presse jouer ce matin les vierges outragées. Fillon s'est fendu d'un communiqué moralisateur et Raffarin exige même des excuses. Ces cris de putois (ça aussi, ai-je le droit de l'écrire ou faut-il que je me censure ?) ne doivent pas nous impressionner. Mitterrand a dit pire de De Gaulle et l'a aussi écrit (relisez "Le coup d'Etat permanent"). Qui à l'époque s'en offusquait ? Personne. Contre Giscard, les noms d'oiseaux ont volé sans déclencher des réactions pudibondes.

Notre société a changé et je m'en désole. Nous sommes entrés dans l'ère du verbalement correct, où l'on ne peut plus dire grand-chose d'un peu vert sans qu'on vous le reproche. Pourtant, aux grandes heures du parlementarisme, sous la Troisième République, insultes et bons mots fusaient. C'était riche, tonique, très sain. A côté, les piques de nos politiciens contemporains, c'est du pipi du chat, de la roupie de sansonnet. Quand comprendra-t-on que la violence verbale a un effet catharsique, qu'elle nous évite la violence physique ?

Prenez la vie politique locale. C'est plutôt gentillet. Au conseil municipal (tiens, il y en a un ce soir), malgré la présence de l'extrême gauche, les échanges ne sont pas violents. Le seul qui soit resté un politique à l'ancienne, c'est Pierre André, qui n'hésite pas à attaquer très durement ses adversaires. Vous préférez Xavier Bertrand, un mot pas plus haut que l'autre, de la guimauve plein la bouche ? Moi pas.

Attention : si la vie politique se contentait de violences verbales et métaphoriques, elle ne vaudrait rien. Mais elle n'est pas que ça. Laissons donc la forme, ne retenons que le contenu : c'est là-dessus que doit se faire le débat, pas sur les mots ou les images qu'on emploie. Aubry a eu raison de dire ce qu'elle pensait, d'autant qu'elle s'adressait à une assemblée de militants, qui a inévitablement besoin d'être surchauffée. Que l'hypocrite indignation atteigne jusqu'au sommet de l'Etat, c'est consternant.


Bonne journée.

30 mai 2010

Le destin d'Odette.

Bonsoir à toutes et à tous.


Il m'arrive parfois de penser à elle. Dix ans parmi nous, tout de même. J'aime comparer avec ce qui se passe aujourd'hui. Qui se souvient que la gauche locale était représentée, il n'y a pas si longtemps, par deux députées ? Qu'Odette (puisque c'est elle dont il s'agit), Jean-Louis, Martine, accompagnés parfois d'Alix, formaient délégation dans la plupart des manifestations de la ville, donnaient corps et visages à l'opposition locale ?

C'est à la fois très proche et très loin. Qui se rappelle qu'en ce temps-là des personnalités nationales, ministres, secrétaires d'Etat, hauts responsables du Parti, faisaient le détour par Saint-Quentin, honorant ainsi notre section ? Que notre patronne passait régulièrement à la télévision ? Qu'elle avait réussi à tisser une forme de familiarité avec les Saint-Quentinois ?

Vous me direz peut-être que tout cela s'est mal terminé. Sans doute, mais le passé est le passé, que rien ne peut effacer, surtout quand il est récent. On lui doit respect et vérité. Vous me ferez aussi remarquer que les tensions existaient déjà à cette époque-là. Oui, mais pas plus que dans la droite locale aujourd'hui : les problèmes, et j'en ai connus quelques-uns, restaient en règle général internes, aussi douloureux pouvaient-ils être. On parle beaucoup de devoir de mémoire. L'histoire ne doit pas seule en bénéficier, mais la politique aussi.

Pourquoi je vous raconte tout ça ? Serait-ce le spleen du dimanche soir, la nostalgie comme ultime recours quand rien ne va ? Pas du tout, je n'ai pas l'âme mélancolique, mes fins de week-end sont très actives, je m'excite à l'idée qu'une nouvelle semaine va commencer. Non, c'est le pur hasard, et une grande surprise. Vous savez peut-être que CAP 21, le petit parti de Corinne Lepage, réunissait ce samedi ses maigres troupes. J'aime la politique, mais pas au point de m'intéresser aux activités de Lepage et son club de supporters. Sauf que j'ai un peu de conscience professionnelle et que je suis allé jeter un coup d'oeil sur leur site : et là, devinez qui j'ai vu parmi les responsables ? Oui, elle, Odette !

Ce n'est pas un événement, mais c'est intéressant : qu'est-ce qui fait qu'une députée socialiste, qui a connu la vie d'un grand parti, peut se retrouver dans une modeste structure écologiste qui n'a pas vraiment le vent en poupe, qui est plutôt marginale ? Les Verts ou Europe-Ecologie, j'aurais à la rigueur pu comprendre. Mais CAP 21 ! Même le nom est inconnu ! On croirait le titre d'une association, pas d'un parti. Et puis, le parcours de Lepage est sinueux : ministre de Juppé, lieutenant de Bayrou et maintenant alliée potentiel de Cohn-Bendit. Faut suivre ! Comment Odette Grzegrzulka peut-elle faire partie d'un groupe politique qui se situe ambigument ni à droite ni à gauche ?

Au-delà d'Odette et de son parcours, c'est tout le problème des destins politiques qui est posé. Qu'est-ce qui fait qu'on change, qu'on évolue, qu'on tourne la page ? Être et avoir été ... S'interroger sur le rôle des rencontres, des ruptures, des coïncidences. C'est bizarre, j'ai l'impression, en même temps, que tout cela ne me concerne pas personnellement : je suis, je resterai socialiste, social-démocrate, saint-quentinois. Je ne me vois pas aller ailleurs, changer, alors que pas mal de camarades changent autour de moi, à donner parfois le tournis. Je ne sais pas si j'ai tort ou raison, si c'est un bien ou un mal.

Ma perplexité s'accroît quand je remonte dans le passé : Odette, je l'ai connu fan d'Aubry, responsable de son petit courant "Réformer". Si elle était restée à ses côtés, nulle doute qu'aujourd'hui elle serait très en cour dans le Parti. C'est étrange la vie. En vérité, je crois que le mieux est de ne pas bouger. Ceux qui poursuivent l'événement ne le rattrapent pas. Il faut attendre qu'il vienne à vous. Et s'il ne vient pas, tant pis, c'est qu'on ne le mérite pas !


Bonne soirée.

Les leçons de l'Eurovision.

Bonjour à toutes et à tous.


J'ai deux rêves avant de mourir : voir l'homme retourner sur la Lune et la France gagner l'Eurovision de la chanson. Pourquoi ? Parce que je commençais à devenir une créature consciente et pensante quand Armstrong a planté son drapeau, parce que j'étais ado quand Marie Myriam chantait L'oiseau et l'enfant. En bonus, j'en ai un troisième : voir la gauche l'emporter à Saint-Quentin. Je ne sais pas des trois lequel est le plus difficile à réaliser, je n'ose pas y penser.

Donc, hier soir, vous vous en doutez, j'étais devant ma télé. Croyez-vous que ce sont les chansons de l'Eurovision qui m'intéressent ? Non, à vrai dire je m'en fous. Ce qui me passionne, c'est le vote qui suit, parce que tout vote me passionne. S'il fallait élire à Saint-Quentin un préposé à l'entretien des toilettes publiques, ça retiendrait mon attention. Parce que dans tout vote il y a quelque chose à retenir, parce que quelque chose se révèle.

Le vote, c'est l'essence de la politique. Même sous les rois, quand le suffrage universel n'existait pas, il y avait des votes, des choix collectifs. Certes tout scrutin n'est pas politique, mais il y a du politique dans tout scrutin. Pour l'Eurovision, c'est flagrant. En 1977, au moment de la victoire française, l'Europe était riquiqui. Aujourd'hui, elle va de l'Atlantique à l'Oural, selon le voeu de De Gaulle. Qui l'aurait cru alors ?

Je tire trois leçons de l'Eurovision, qui sont aussi communes à la politique :

1- Ce n'est pas le meilleur qui gagne. L'Allemagne n'était pas mauvaise, mais il y avait mieux. En politique, si le meilleur l'emportait, Rocard, Delors ou DSK à gauche, Juppé, Seguin ou Villepin à droite auraient depuis longtemps gagné.

2- Les battus sont toujours contents. La France est arrivée douzième mais les commentaires se satisfont de cette défaite "honorable". Idem en politique : j'ai rarement vu un battu reconnaître son échec et en tirer les conséquences. J'en ai même entendu dire que leur défaite, tout compte fait et à bien y regarder, était ... une victoire. Bin voyons.

3- Les votes reposent sur la complicité, le copinage. Les pays ne votent pas toujours pour la qualité de la chanson mais pour la proximité géographique. Ainsi les régimes ex-soviétiques soutiennent la Russie, et la Belgique, la Suisse, l'Espagne sont sensées apporter leurs suffrages à la France. La politique, dans les désignations internes, fonctionne de cette façon, tacticienne, complaisante, intéressée.

Bref, regardez l'Eurovision, vous comprendrez mieux la politique.


Bon dimanche.

29 mai 2010

Foutu foot !

Bonjour à toutes et à tous.


La presse de ce matin s'extasie sur l'Euro-2 016 dont l'organisation a été attribuée à la France. Et dans quelques jours nous allons entrer dans un mois de Coupe du monde de football ! Je n'aime pas jouer les rabat-joie, car toute joie est bonne à prendre. Mais tout de même, ce foot dont on nous assomme devrait nous faire prendre un peu plus de recul et éventuellement réfléchir.

D'autant que l' "événement" d'hier est mis en partie au profit de Sarkozy et que les commentaires très politiques vont bon train sur le registre : voilà qui tombe bien, qui va redonner à la France le moral. Misère ! Avons-nous oublié que ce sont les civilisations décadentes ou les pays du Tiers-Monde qui trouvent dans les jeux et le sport un dérivatif, un substitut, une compensation à leurs malheurs ?

Nous devrions nous inquiéter et nous interroger qu'une société se donne comme héros et modèles non plus des saints, des savants, des explorateurs, des sages, des artistes mais des tapeurs de ballon, aussi géniaux soient-ils. Quant au débat sur leurs pharamineux salaires, je le trouve très vulgaire et ne m'en mêle pas : une société qui leur donne autant de fric n'a que ce qu'elle mérite. Nos grandeurs ou nos bassesses ont toujours un prix.


Bonne journée.

28 mai 2010

Aubry parle des retraites.




27 mai 2010

La bataille des retraites.

Bonsoir à toutes et à tous.


La mobilisation sur les retraites a été réussie sans être pour autant massive. C'était mieux qu'en mars dernier, mais on a connu, sur le même sujet, des réactions plus amples. D'autant que c'est une conquête sociale, la retraite à 60 ans, d'une teneur fortement symbolique, qui est attaquée au canon par la droite . En effet, Sarkozy aurait pu se contenter d'argumenter sur les nécessités démographiques. Non, il a aussi dénoncé en la matière l'héritage de Mitterrand.

Ce qui confirme que nous sommes dans une logique de revanche sociale, certains diraient, sans avoir complètement tort, de lutte de classes. En tout cas, le positionnement de l'UMP est fortement idéologique. Les prédécesseurs de Sarkozy, Chirac en tête, n'avaient jamais osé, à ma connaissance, s'en prendre de cette façon à la retraite à 60 ans.

Et maintenant ? Il ne faut pas croire et laisser dire que la journée a été un échec. La fin des 60 ans n'est pas officialisée, sa certitude ne date que d'il y a quelques jours. La suite n'est pas condamnée. Un mouvement social surgit rarement d'un coup. La prise de conscience est à venir, et progressive.

En attendant, les socialistes auraient tort d'en rester à la défense de la retraite à 60 ans. Certes légitime et nécessaire, elle n'est pas suffisante ni seule pertinente. Ce qu'il faut mettre en avant, c'est la globalité de notre projet, avec son ressort fondamental et inédit : la contribution des hauts revenus et du capital. Et là-dessus, nous sommes tellement pertinents que la droite essaie de nous copier ! Nous devons aussi montrer que nous savons nous adapter aux nouvelles aspirations de la société, que nous ne nous contentons pas de maintenir à l'identique le système : c'est la revendication d'une retraite choisie et personnalisée.

Dans les semaines et les mois qui viennent, la bataille des retraites sera essentielle. Le Parti socialiste organisera des réunions publiques pour présenter, expliquer et populariser notre projet. A nouveau, je propose qu'à Saint-Quentin un débat avec Xavier Bertrand puisse être organisé. Après tout, celui-ci avait bien accepté de débattre avec Gremetz et Chevènement. Pourquoi, sur les retraites, refuserait-il la confrontation avec un socialiste ?


Bonne soirée.

26 mai 2010

5 ans de Courrier.

Bonsoir à toutes et à tous.


Le Courrier Picard, édition de Saint-Quentin, fête ses cinq années d'existence. Cinq ans déjà ! Bon anniversaire ! Il est important que le pluralisme soit respecté en démocratie, et en particulier dans la presse locale. A Saint-Quentin, nous avons la chance inouïe d'avoir trois journaux. Ce n'est pas nécessairement le cas ailleurs en France. Sachons nous en réjouir.

Entre les trois, je n'établis aucune hiérarchie, je ne dispense aucun privilège, je les lis tous avec un égal intérêt. Chacun a son identité, son originalité, et c'est très bien comme ça. Le Courrier se concentre souvent sur les articles de fond, les sujets de société. Je l'aime beaucoup pour cette raison-là.

Autre particularité de ce journal : il donne très souvent la parole aux simples citoyens, ce qui le rend très vivant, très proche. Et puis, à l'égard de la municipalité en place, il cultive son indépendance, son impertinence, et c'est une excellente chose. Certains me font parfois remarquer qu'il n'existe plus dans notre ville qu'une seule opposition à la droite : le Courrier Picard ! C'est bien sûr exagéré, mais ce journal ose ce que d'autres n'oseraient pas, c'est évident.

Ai-je tout de même des reproches à lui faire ? Oui évidemment ! D'abord j'aimerais que les pages consacrées à Saint-Quentin soient plus nombreuses, plus fournies. Surtout, je regrette l'absence de rubrique confidentielle, les potins de la ville. L'Aisne Nouvelle dispose de Noir sur blanc et du Petit carillonneur, L'Union de la Parole de Bouffon, mais le Courrier rien, alors que les lecteurs sont très friands de ce genre d'informations. Alors ?


Bonne soirée.

25 mai 2010

Bertrand met fin aux 60 ans.

Bonjour à toutes et à tous.


Xavier Bertrand, ce matin chez Apathie, a été le premier homme de droite à être aussi clair : la retraite à 60 ans, c'est fini. Comme il avait mis fin aux 35 heures, il met aujourd'hui un terme à une autre conquête sociale obtenue par le Parti socialiste. Et il ajoute dans Le Parisien d'aujourd'hui : "La capitalisation ne doit pas être chez nous un tabou ..." Même s'il précise qu'il ne s'agit pas de copier les pays anglo-saxons, comment ne pas être très inquiet ?

Toujours chez Apathie, il met les points sur les i : "Je ne veux pas que les classes moyennes supérieures soient concernées" par une quelconque contribution fiscale. C'est quoi les "classes moyennes supérieures" ? Les catégories populaires n'en sont évidemment pas, mais les classes moyennes non plus. Parce que c'est "supérieurs" qui compte dans l'expression, qui désigne sans le dire les personnes aisées (au sens propre : qui sont financièrement à l'aise).

Le plus surprenant, c'est qu'en même temps Bertrand n'est pas loin de vouloir faire payer les riches ! En effet, comme le Parti socialiste, il songe taxer le capital et les hauts revenus (mais oui !) : stock-options, retraites chapeau, dividendes et valeurs immobilières, revenus financiers des entreprises sont dans le viseur. Mais comme aucun chiffrage ne vient à l'appui (contrairement au PS), tout ça ne vaut pas grand-chose et ressemble plutôt à un enfumage pour faire passer la seule certitude : la fin de la retraite à 60 ans.

En attendant, je vous invite à manifester jeudi prochain, pour défendre les retraites, rendez-vous à 17h00, place du 8 Octobre, à Saint-Quentin. Après ce coup-là, et faisant suite à sa défense du bouclier fiscal, si Xavier Bertrand est élu maire en 2 014, c'est qu'il est vraiment très bon ou que nous sommes vraiment très mauvais.


Bonne journée.

24 mai 2010

Nous sommes tous ...

Bonsoir à toutes et tous.


La France est un pays formidable : nous sommes de moins en moins une grande puissance industrielle et commerciale et nous rêvons de redevenir une grande puissance agricole comme il y a quelques siècles. Preuve en est le colossal succès ce week-end des Champs-Elysées recouverts d'herbes et de produits de la terre, comme il y a vingt ans au même endroit l'immense champ de blés. Pour marquer l'importance de l'événement, le président et madame sont allés faire un tour.

Il fallait aussi une parole officielle et éternelle, bref une formule historique. C'est bien sûr le ministre de l'agriculture qui s'est sacrifié : "Nous sommes tous des agriculteurs" a lancé Bruno Le Maire. Tous ? Non, pas moi. Je ne suis pas, je ne me sens pas, je ne veux pas être agriculteur. Du mépris ? Pas du tout, je viens du Berry profond, rural. Mais je m'inscris dans le cours de l'Histoire et du progrès social qui nous viennent des deux derniers siècles : un paysan est quelqu'un qui veut rejoindre la ville et qui, devenu ouvrier, souhaite que ses enfants s'intègrent aux classes moyennes, dans les professions de bureau, les métiers intellectuels. Le travail de la terre est un enfer, notre société qui perd la mémoire a aussi oublié ça. La nostalgie, non merci.

Vous me direz peut-être que le ridicule "Nous sommes tous des agriculteurs" est un geste légitime de solidarité. Je veux bien mon cousin ! Mais pourquoi les ministres ne s'exclament-ils jamais "Nous sommes tous des chômeurs" ? A tout prendre, s'il y avait une solidarité à exercer, je choisirais les sans emploi. Car je ne vois pas pourquoi il faudrait privilégier, dans notre compassion, les agriculteurs. De toute façon, Le Maire aurait mieux fait de se taire : le "Nous sommes tous ..." est une resucée qui a perdu son sens à force d'être réutilisée.

La première fois, c'était en Mai 68, "Nous sommes tous des juifs allemands", après que Marchais ait dit une connerie plus grosse que lui. Dans les années 80, je me souviens avoir gueulé le slogan qui sonnait juste à l'époque et encore aujourd'hui : "Première, deuxième, troisième génération, nous sommes tous des enfants d'immigrés". Et puis il y a eu le 11 septembre 2 001, et Colombani dans Le Monde qui écrit : "Nous sommes tous américains". Oui, jusque là j'adhère, mais le mot de Le Maire aujourd'hui, c'est la goutte de trop. Nous sommes tous ... nous-mêmes et rien d'autres, voilà tout, et ne détournons plus jamais ce slogan devenu ridicule.


Bonne soirée.

23 mai 2010

Un proverbe chinois.

Bonjour à toutes et à tous.


Trois jours après la "rumeur" d'un départ de Xavier Bertrand de Saint-Quentin pour poursuivre son avenir politique à Paris, où en sommes-nous ? L'intéressé a fortement démenti, précisant tout de même qu'on le demandait ici ou là, à Lille et à Reims, demain à l'Elysée pourquoi pas. C'est une coquetterie politique bien connue : on est candidat à rien mais tellement bon qu'on vous supplie quand même de l'être. Les hommes politiques aiment à montrer qu'ils sont désirés mais maîtres d'eux-mêmes, désintéressés, et ne succombant pas. C'est amusant : il y a dans cette fausse dérobade et cette vraie envie d'être l'élu des coeurs quelque chose de féminin chez des individus au profil pourtant viril.

Dans le microcosme politico-journalistique, l'avis très majoritaire est que Bertrand restera : quand on tient Saint-Quentin dans sa main, on la garde ! Il y a bien sûr le contre-exemple de Philippe Séguin quittant Epinal pour tenter sa chance dans la capitale, ou Renaud Dutreil laissant le sud de l'Aisne pour le département voisin : mais on a vu aussi leur échec. Quelques-uns pensent que le mauvais coup pourrait venir de la bande à Copé, qui laisserait ainsi entendre que Bertrand est un papillon prêt à se déposer sur n'importe quel fleur.

Ne nous cassons pas trop la tête à vouloir chercher la vérité là où il n'y en a sans doute pas. Certains échos viennent de nulle part et se diffusent un peu partout. La seule explication, c'est que ceux qui ne savent pas, et ils sont nombreux en politique, ont besoin de parler, de dire quelque chose et donc d'inventer n'importe quoi. Si je me reporte dix ans en arrière, qu'entendait-on à Saint-Quentin ? Que Pierre André était sérieusement menacé par Odette Grzegrzulka (le Figaro annonçait dans une estimation la victoire de la gauche aux municipales), que Xavier Bertrand avait pour seule ambition de devenir président du Conseil Général de l'Aisne, que le futur député serait Bernard Testu, un énarque forcément brillant et conseiller général (qui se souvient encore de son nom aujourd'hui ?).

Ainsi va la politique, au gré des rumeurs qui rarement se confirment. Je crois qu'un proverbe chinois dit à peu près ceci : "Celui qui parle ne sait pas, celui qui ne parle pas sait".


Bon dimanche sans rumeurs.

22 mai 2010

TOUT notre projet.


En complément au document précédent, voici le résumé de notre texte sur les retraites. C'est un excellent argumentaire, qui permet d'apprécier la totalité de nos propositions, trop souvent réduites au seul maintien de l'âge légal de départ. Vous pouvez ainsi constater que les quatre piliers concernent tout autre chose : de nouvelles ressources, l'emploi des seniors, la pénibilité et la retraite choisie. De quoi relativiser ce qui se dit en ce moment et évacuer les fausses oppositions que la droite se plaît malignement à creuser entre socialistes.

Juste, efficace, durable.


Un condensé de la position socialiste sur les retraites : à diffuser sans modération !

Histoire de dogme.

Bonjour à toutes et à tous.


La politique française a le chic pour lancer de faux débats, qu'on appelle pudiquement "polémiques". DSK, de passage à Paris, est l'invité d'une grande émission télévisée. Ses fonctions au FMI l'obligent à un devoir de réserve : il ne se prononce pas sur la politique intérieure française. Sauf qu'à une question générale sur les retraites, il donne un point de vue général : le départ à 60 ans n'est pas un "dogme", parce que la vie est plus longue, parce que certains arrivent à cette date sans retraite complète (l'entrée dans la vie active, donc la durée de cotisation, commence plus tard), parce que d'autres se sentent la force et l'envie de continuer au-delà leur activité professionnelle.

Ce sont des remarques de bon sens, que tout un chacun, de bonne foi, peut partager. Comment d'ailleurs un homme de gauche, laïque, serait-il soumis à un quelconque dogme, même profane ? Et puis, quand on est un social-démocrate comme Strauss-Kahn, on fonctionne au compromis, que Ségolène appelait autrement : le donnant-donnant. Rien là-dedans qui ne soit nouveau ni choquant, sauf pour Mélenchon et l'extrême gauche, mais c'est chez eux normal. La droite, elle, se félicite de ces propos : logique, elle a compris que DSK était son pire ennemi, elle cherche donc à le compromettre, le décrédibiliser aux yeux de la gauche. Et ce n'est pas fini ...

Tout ça est-il contradictoire avec le projet socialiste sur les retraites, comme le croient certains journaux ? Aucunement. D'un côté vous avez un homme qui donne un avis personnel sur un point très précis, de l'autre vous avez tout un programme général. Les deux ne peuvent pas être en opposition puisqu'ils sont incomparables. Défendre le départ légal à la retraite à partir de 60 ans est une protection, une garantie, un droit. Ça ne signifie pas que l'évolution de la société ne conduira pas à un prolongement de l'activité, volontaire et individualisé.

Le PS comme DSK estiment que le débat sur les retraites ne doit pas tourner autour des 60 ans, que le problème est ailleurs, qu'il faut aller vers un système à la carte, indexé sur la pénibilité, les uns partant avant 60 ans parce qu'ils le méritent, les autres partant après parce qu'ils le désirent. Évidemment, en réfléchissant ainsi, on sort du dogme, on entre dans la pensée rationnelle, argumentée, prospective. C'est ce à quoi nous invitent le PS et DSK. Au grand dam de la droite.


Bonne journée ensoleillée.

21 mai 2010

Strauss fait du Kahn.

Bonjour à toutes et à tous.


Rien de bien nouveau après le passage de DSK sur France 2 hier soir : mon champion a été égal à lui-même. Sera-t-il candidat ? Tout le monde se pose la question ... sauf lui. Je crois le connaître un peu, par mes lectures et mes fréquentations. Strauss est tout le contraire du présidentiable classique français, prédestiné depuis le plus jeune âge à la tâche suprême, ayant un rapport quasi mystique à la fonction d'Etat, y pensant même en se rasant.

Non, DSK ne mange pas de ce pain-là, et ça se voit : son approche de la politique est rationnelle, il n'en fait pas une affaire personnelle, il ne recherche aucune reconnaissance de ce côté-là, en bénéficiant suffisamment par ailleurs. Certains pensent que la réussite vient en se présentant systématiquement à n'importe quelle élection. Strauss n'est pas dans ce truc : comme Delors en 1995, il sera candidat que s'il se sent utile, que s'il pense que c'est son devoir, que si la situation politique l'exige. Sinon il se fout du pouvoir, il l'a déjà.

C'est un homme d'idées et d'action, pas un affamé d'honneur, de prébende ou de gloire. DSK est cool, détaché, collectif, rassurant, hédoniste, compétent, ce sera le meilleur pour 2 012 comme ça l'était déjà en 2 007. Mais la France et mon Parti préfèrent-ils les meilleurs ? Ils les admirent c'est certain, comment faire autrement ? Au moment du choix, ne vont-ils pas incliner pour celui ou celle qui d'abord leur ressemble ? C'est le syndrome du premier de la classe : apprécié par ses profs, jalousé et détesté par ses camarades. Au demeurant, DSK ne cherche pas à plaire, étant naturellement séducteur. Pour le moment, il veut qu'on le laisse bosser. Le reste viendra en son temps. Et si ça ne vient pas, il n'en fera pas un drame.

Dans un prochain billet, je vous parlerai de son propos sur les retraites, qui a été très commenté, même si ça n'est pas pour moi l'essentiel de son intervention. Je vous laisse, je dois filer à Tergnier.


A plus tard.

20 mai 2010

XB nous quitte ?

Bonsoir à toutes et à tous.


Si un militant UMP ne m'en avait pas ce soir parlé, je ne l'aurais peut-être pas su, pas tout de suite en tout cas. C'est dans Paris-Match paru aujourd'hui, à la rubrique des indiscrétions politiques. L'information est de taille pour Saint-Quentin : notre député Xavier Bertrand se présenterait en 2 012 dans une circonscription parisienne et en 2 014 ... aux municipales dans la capitale. Bertrand possible successeur de Delanoë, rien que ça ! Paris-Match en parle au présent, sur le ton du constat, de la certitude.

Ma première réaction, c'est que je n'en crois pas un mot. Pourquoi d'ailleurs Xavier Bertrand se dévoilerait-il maintenant ? 2 014, c'est encore loin. Surtout, il doit son succès politique à son enracinement saint-quentinois, et la direction de la mairie lui ouvre les bras pour la prochaine fois. Pourquoi aller se perdre dans une aventure parisienne incertaine ? Et puis, Bertrand n'a pas un tempérament de parisien. C'est un provincial dans l'âme et fier de l'être.

Maintenant, il ne faut jurer de rien en politique. Et si c'était tout de même vrai ? Alors la donne changerait peut-être sur Saint-Quentin. Succéder à trois mandats de Pierre André, ce ne sera pas une tâche facile. Qui aujourd'hui à droite pourrait s'en acquitter ? Alexis Grandin, comme me le suggérait ce militant UMP que j'ai rencontré ? Ca ne tient pas une seule seconde ; Alexis est très gentil mais trop léger. Monique Ryo ? Pourquoi pas, mais je ne la vois tout de même pas dans le fauteuil de maire. Et parmi tous les autres ? J'ai beau chercher, je ne trouve pas. Car les compétences n'y suffisent pas, il faut le charisme.

La gauche serait-elle la grande gagnante d'un tel départ ? Dans un premier temps oui, car Xavier Bertrand est pour nous un adversaire redoutable, qui exige de notre part beaucoup de pugnacité pour le combattre. Mais son retrait ne réglerait pas les problèmes d'unité, de méthodes, d'alliances, de ligne et de leadership qui sont les nôtres. La gauche doit compter sur ses propres forces pour l'emporter, et pas sur la faiblesse de l'adversaire. C'est quand nous aurons soldé nos difficultés que l'espoir reviendra. Ne nous faisons donc pas d'illusions, celles du proche passé ont été trop cruelles.

De toute façon, le problème ne se posera sans doute pas, Xavier Bertrand restera le redoutable adversaire qu'il nous faudra combattre, nonobstant Paris-Match. La question, c'est de savoir pourquoi cette rumeur a pris corps. Ce n'est pas anodin. Le bruit vient-il de Bertrand lui-même, pour se hisser à un niveau supérieur tout en montrant qu'il n'en sera rien ? Il est capable de ce genre d'entourloupe. A moins que la fausse information ne vienne de ses adversaires à l'intérieur de l'UMP, qui sont nombreux à aimer le voir trébucher ? C'est possible. Il n'y a que l'intéressé qui pourrait le dire. Peut-être le fera-t-il ...


Bonne soirée.

La retraite, c'est capital !



Bonsoir à toutes et à tous.


La réforme socialiste des retraites a suscité de nombreuses réactions à droite et beaucoup d'espoir à gauche. Très bien. Mais peu ont remarqué à quel point cette réforme rompait avec tout ce qui a été envisagé jusqu'à maintenant sur ce sujet, et qui se résumait à trois paramètres : augmenter les cotisations, baisser le montant des retraites ou rallonger le temps de travail.

Le Parti socialiste, sans rompre avec le système par répartition qui repose sur les cotisations des ayant droit, l'ouvre désormais à la contribution du capital. Ce n'est pas conforme avec ce que voulaient les pères fondateurs, mais c'est devenu aujourd'hui indispensable. D'où la fureur de la droite, qui ne trouve qu'à faire des reproches techniques, sans contester vraiment la philosophie de notre projet.

Sa riposte me confirme que le PS est dans la bonne voie. Pourquoi ? Parce que la droite ressort l'épouvantail de la taxation des classes moyennes, toujours électoralement payant puisque beaucoup d'entre nous se reconnaissent dans ces fameuses classes. Mais c'est un hommage involontaire, car c'est la preuve que le projet socialiste épargne les classes populaires (sinon la droite se serait empressée d'en parler et de nous accuser !).

Et puis, ces classes moyennes, quelles sont-elles exactement ? Entre la classe moyenne inférieure, la petite fonction publique par exemple, et la classe moyenne supérieure, les ingénieurs et grands cadres d'entreprises, les disparités sont fortes, ce n'est pas le même monde. Alors oui, appeler à la contribution des classes moyennes, pourvu qu'on précise de qui il s'agit, c'est aussi une mesure de justice sociale, de solidarité nationale. N'en déplaise à la droite !


Bonne soirée.

19 mai 2010

Appel à débat.

Bonsoir à toutes et à tous.


Je l'attendais, c'est fait, plus rapidement que prévu : le projet socialiste sur les retraites. Désormais, plus personne, ni droite ni extrême gauche, ne pourra dire que nous n'avons pas de réforme à proposer. On pourra certes toujours critiquer ; c'est la démocratie. Faire de la politique, c'est choisir. Aucun choix n'est parfait. L'essentiel est de faire des choix. C'est à partir du nôtre que les autres devront maintenant se déterminer.

Autre grand sujet de satisfaction pour moi : ce projet a été adopté à la quasi unanimité (trois abstentions seulement, pas un socialiste contre). On nous disait déchirés, incapables d'une ligne commune sur ce sujet. La preuve que non. Toutes les sensibilités se sont retrouvées, et c'est heureux. La maturité politique entre membres d'un même parti, c'est la recherche et la réussite du consensus. L'immaturité politique, c'est le recours infantile et gamin au rapport de force, généralement alimenté par des intérêts et des querelles peu politiques et très personnels.

D'où vient le plus grand hommage rendu à ce projet socialiste sur les retraites ? De la droite bien entendu ! Elle a passé toute la journée, Premier ministre et patron de l'UMP en tête, à s'attaquer à nos propositions. N'ont-ils pas mieux à faire ? C'est la preuve que notre texte a fait mouche, qu'il dérange. La droite serait restée indifférente, je m'en serais inquiété.

Quelle est la première qualité de notre projet de réforme ? C'est qu'il aborde le problème essentiel des retraites, celui de leur financement. Je ne doute pas qu'on puisse le contester, mais reconnaissons que ce plan a le mérite d'exister, chiffres à l'appui. A ceux qui le rejettent, je demande : qu'avez-vous de mieux à proposer ? Et j'attends leur réponse. On verra bien ...

Quelle est la philosophie de ce projet ? D'abord sauver la retraite à 60 ans, un acquis de la gauche menacé par la droite, que tous les syndicats et partis progressistes défendent. Ensuite soumettre à contribution les revenus du capital, pour que les caisses ne soient pas seulement alimentées par les cotisations des salariés. C'est une évolution capitale, qui se justifie par le besoin de solidarité.

A quoi s'ajoutent des propositions en faveur d'une retraite individualisée, pour ceux qui voudraient partir plus tard. Et aussi la prise en compte de la pénibilité, pour ceux qui aimeraient pouvoir partir plus tôt. Notre projet est pragmatique, pour tout dire réformiste : il s'appuie sur les hypothèses du Conseil d'Orientation des Retraites, il prend en considération le fait que la réforme doit être évolutive. Par exemple, l'allongement de la durée de cotisation n'est pas fondamentalement exclu, mais il n'est pas érigé en dogme, contrairement à ce que fait la droite. Il faudra attendre 2 020 pour reconsidérer la situation.

De ce texte socialiste, il faut faire un moyen de militantisme, une arme de guerre politique, le brandir haut et fort contre la droite, le défendre devant l'opinion publique. Et puisque nous sommes à Saint-Quentin, je suggère que soit organisé très vite un débat sur le thème des retraites entre Xavier Bertrand et le Parti socialiste, dans la presse ou à travers une réunion publique. Il paraît que le secrétaire général de l'UMP aime débattre. Nous verrons bien.


Bonne soirée.

18 mai 2010

La fin d'un monde ?

Bonjour à toutes et à tous.


Le débat autour de la "rigueur" est stupide. C'est une vaine querelle de mots, qui a même fait sortir le Premier ministre de ses gonds, c'est vous dire ! Ceux qui défendent la "rigueur" expliqueront qu'elle est une vertu, ceux qui la dénoncent l'appelleront "austérité" frappant les plus faibles. Il faut sortir de ce faux débat qui ne mène à rien et aller à l'origine du problème. C'est ce que tente de faire Jacques Julliard dans son éditorial de cette semaine dans le Nouvel Observateur, que j'ai beaucoup aimé et dont je vous recommande la lecture. Voilà ce que ses propos m'inspirent :

La vérité, c'est que les civilisations sont mortelles, que tous les empires par le passé ont fini par s'effondrer. Le monde occidental domine aujourd'hui la planète. Il repose sur deux piliers : l'économie et la technologie. Jamais dans l'histoire de l'humanité les biens matériels n'ont pris une aussi grande importance dans notre existence, jamais notre environnement n'a été à ce point saturé par les machines, appareils, objets. Mais aujourd'hui, un siècle et demi après l'apparition de la civilisation occidentale, son avenir est compromis (alors que les empires d'autrefois survivaient plusieurs siècles).

C'est notre mode d'existence qui mine le système : la prospérité menace la prospérité. J'en viens à Julliard, voilà ce qu'il dit :

"Nous allons cesser de vivre au dessus de nos moyens. En temps de crise, quand les marchés attaquent, impossible de financer plus longtemps par l'emprunt la prospérité paradoxale que nous venons de vivre. Des économistes sérieux (Eric Le Boucher, Slate.fr) estiment qu'à l'instar de la Grèce, les particuliers des autres pays européens pourraient connaître une baisse de leur pouvoir d'achat de 20 à 30% dans les années à venir. S'ils disent vrai, il faut s'attendre à des explosions sociales majeures, aux conséquences politiques imprévisibles". (c'est moi qui souligne)

C'est bien vu, toute la question est là, tellement lourde qu'on n'ose la poser. Cette civilisation occidentale menacée de dislocation a engendré deux idéologies adverses : le libéralisme et le socialisme, qui ont du mal à répondre à cette crise de civilisation. Toutes les deux ont en commun l'idée de progrès, qui part du postulat que le présent est meilleur que le passé et que le futur ne pourra être lui aussi que meilleur. L'histoire ne confirme pas cette théorie et l'actualité la conteste sérieusement. Culturellement, nous avons des difficultés à admettre que l'avenir puisse être sombre. Une nouvelle idéologie essaie de relever ce défi et d'y apporter des solutions : l'écologie. Que nous dit de son côté Julliard :

"Il va falloir se résigner à soigner le dérèglement fou du capitalisme à l'intérieur même du système capitaliste. La question n'est donc déjà plus de savoir s'il faut ou non faire une politique d'austérité mais bien de concevoir à quelles conditions l'austérité ne débouchera pas sur une catastrophe majeure".

Pour ma part, j'appelle ça le réformisme, qui ne peut s'adapter à son époque qu'en mariant le socialisme et l'écologie. Pour Julliard, il y a trois conditions à une politique d'austérité :

1-"Il faut impérativement que les restrictions annoncées épargnent l'investissement, c'est-à-dire le seul vrai moyen de sortir de la crise".

2- "Il faut non moins impérativement que les sacrifices soient justement répartis, qu'au lieu d'accroître les inégalités comme actuellement, ils les réduisent".

3- "La troisième condition, un consensus politique minimal, elle, relève de l'impossible".

Voilà des bases sérieuses pour une discussion sérieuse.


Bonne et sérieuse journée.

17 mai 2010

La droite sort sa retraite.



Bonsoir à toutes et à tous.


Le gouvernement a abattu une partie de ses cartes en ce qui concerne la réforme des retraites. Mais on est loin de tout savoir. Ce sont les principes qui ont été posés, dans deux directions sans surprise : d'un côté l'allongement de la durée d'activité (sans préciser s'il faudra cotiser plus longtemps pour avoir une retraite complète ou si l'âge légal de départ va être reculé), de l'autre la taxation des hauts revenus (mais lesquels, pour combien et de quelle façon, mystère ...). Manifestement, la droite veut donner une impression d'équité, qui demeurera une impression tant que les mesures précises resteront inconnues.

Les regards se tournent maintenant vers le PS, qui a annoncé un "plan d'ensemble" pour bientôt. L'avantage, c'est que nous n'avons plus à assumer l'allongement puisque la droite s'est engagée dans cette voie. Il nous reste à peser sur la contribution du capital, ce qui est pour nous politiquement plus confortable. L'inconvénient, c'est que nous sommes dans le réactif, obligés à nous déterminer par rapport aux propositions de la droite, qui plus est des propositions incomplètes. C'est le défaut de la tactique, on en sort jamais complètement vainqueur. J'aurais préféré l'inverse, la droite forcée de se définir par rapport à nos positions sur les retraites.


Bonne soirée.

16 mai 2010

Gare au "care" !

Bonsoir à toutes et à tous.


En rédigeant hier un billet sur et contre la "société du soin" prônée par Martine Aubry, je ne m'attendais pas à voir aujourd'hui une autre réaction, assez similaire à la mienne, venant d'un camarade mais pas celui auquel on pouvait penser. Car ce concept de "care", issu du libéralisme compassionnel américain, aurait pu susciter la critique de l'aile gauche du Parti. Mais celle-ci existe-t-elle encore ?

Pour la première fois dans son histoire, trop peu le remarquent, le PS n'a plus de courant de gauche fortement et idéologiquement structuré. Hamon n'a jamais appartenu à cette mouvance, sa fonction actuelle de porte-parole lui interdit tout rôle protestataire. Filoche est à la tête d'un micro-groupe, Démocratie et Socialisme, trop peu influent. Emmanuelli pousse quelques coups de gueule de temps en temps, mais n'est pas à proprement parler organisé.

D'où ma surprise à la lecture du Monde de ce week-end : c'est Manuel Valls, le social-libéral, qui sonne la charge contre le "care" ! Je n'y vois d'autres explications que le souci de se différencier par rapport à la direction du Parti. C'est un vrai problème chez les socialistes : les débats de fond faussés par des positionnements de circonstance. Ceci dit, je prends les propos de Valls pour ce qu'ils sont, je les approuve et j'oublie les arrière-pensées tactiques. Voilà un extrait de sa réflexion :

"L'individu n'est ni malade ni en demande de soins. En tous cas, il n'appartient pas aux politiques d'en statuer. Non, il demande à pouvoir agir en toute liberté car partout il est empêché. Un chômeur en fin de droits, par exemple, n'est pas malade de ne pas avoir de travail, il est empêché dans sa capacité d'agir et de répondre aux besoins essentiels de sa famille. Cette distinction n'est pas superficielle, elle est primordiale car elle fonde tout le rapport démocratique que l'individu entretient avec la société."

Tout est dit. Gare au "care" !


Bonne soirée.

15 mai 2010

Parlons idéologie.

Bonjour à toutes et à tous.


A ma dernière réunion de section, un camarade, à propos du débat sur notre projet économique, a déploré les "postures idéologiques". Ah bon. Moi l'idéologie j'aime ça. Si je suis socialiste, ce n'est pas par intérêt, par éducation, par hasard ou par goût, mais par idéologie. Ce gros mot est un beau mot, qui me plaît. Remplacez-le par un autre, ça ne change rien. Certes l'idéologie ne suffit pas, mais l'engagement politique commence par là. C'est un socle dont un parti a besoin. Sarkozy n'a jamais cessé de faire de l'idéologie.

Alors parlons aujourd'hui idéologie. Quel soubassement philosophique le PS doit-il donner à ses orientations économiques ? La tendance actuelle, dont je vous ai déjà parlé, ne me convient pas. C'est la société du "care", qui était l'objet d'un intéressant débat dans Libération d'hier, en confrontant les points de vue opposés de deux philosophes. Pour ma part, j'y vois une montée, au sein du PS comme au sein de la société moderne, du moralisme, du sentimentalisme et du maternalisme (dans la continuité du paternalisme). Ségolène a ouvert la voie, Martine semble la poursuivre.

J'ai retenu deux extraits significatifs, pour et contre le "care", l'un de Sandra Laugier et l'autre de Ruwen Ogien :

"Chacun y est confronté dans la vie quotidienne. Qui ne se fait pas du souci car il ne sait comment, ni qui va s'occuper d'un parent, de son enfant ou d'un ami ? Le care, c'est-à-dire le souci des autres, est une interrogation ordinaire et centrale dans la vie". S. Laugier.

Mon désaccord, c'est de transformer ce choix et cette préoccupation strictement privés en principe politique. J'ai souvent dénoncé sur ce blog la primauté abusive attribuée au "concret", qui relève de la même idéologie que le "care". L'intérêt particulier ne doit pas prévaloir sur l'intérêt général. Hier, lançant un débat sur la réforme des retraites avec propositions à la clé, un commentaire m'opposait la situation de sa maman de 92 ans ! Qu'est-ce que vous voulez répondre à ça ? Mon interlocuteur faisait du "care" sans le savoir. Et moi je ne pouvais plus rien dire : on était passé de la sphère politique à la sphère privée.

Voilà pourquoi je m'accorde avec les propos de Ruwen Ogien à propos du "care" :

"Finalement, cette morale se propose de prendre comme modèle de toute relation éthique la responsabilité envers les personnes les plus vulnérables et non la relation contractuelle entre personnes libres et informées".

Le "care" est la forme moderne, acceptable, douce, plaisante et laïque de la charité. J'attends autre chose de l'idéologie socialiste : qu'elle nous reparle d'exploitation, qu'elle s'intéresse aux revendications, qu'elle envisage de nouveaux droits, qu'elle soit conquérante et pas conciliante. Je comprends l'intention de mes camarades : à un libéralisme dur, ils veulent opposer, par contraste, un socialisme doux. Contre Sarkozy et pour mobiliser les Français, je ne crois pas aux vertus politique de la douceur et du "care".


Bonne et douce journée.

14 mai 2010

Ferrand et les retraites.

Bonsoir à toutes et à tous.


Comme promis hier soir, je vous parle maintenant d'Olivier Ferrand, un socialiste qui a des idées en matière de réforme des retraites (Martine Aubry a annoncé ce matin de prochaines propositions du PS). Il s'apprête à publier un rapport dont l'idée centrale est de faire payer les retraités actuels pour subvenir aux besoins des retraités futurs. Expliquons :

1- Le débat est aujourd'hui faussé. On redoute de devoir travailler plus, on s'inquiète de savoir si le système par répartition va être pérennisé. Ce sont des questions légitimes mais le vrai problème est ailleurs : à long terme, le niveau des retraites va baisser. C'est dramatique, les plus modestes vont en pâtir, mais personne n'en parle vraiment parce que ce n'est pas l'urgence, l'intérêt immédiat.

2- Autre donnée que personne n'ose vraiment évoquer et que Ferrand met à jour : le niveau de vie des retraités d'aujourd'hui est nettement supérieur à celui des actifs, quelle que soit l'échelle sociale. En caricaturant à peine, nous pourrions dire, toute chose égale par ailleurs, que les retraités sont les nouveaux privilégiés. Même s'il existe encore beaucoup trop de petites retraites, le progrès social de cette catégorie est stupéfiant ces quarante dernières années. Pour ceux qui se souviennent des années 60 (ces fameuses Trente Glorieuses que tout le monde porte au pinacle par conformisme et paresse intellectuelle, ces décennies étant socialement très contestables, Mai 68 en a donné la preuve), ils comprennent que Pierre Perret ne pourrait plus aujourd'hui chanter : "On l'appelle cuisse de mouche, fleur de banlieue, sa taille est plus mince que la retraite des vieux". Leur condition était alors terrible.

3- En toute logique, Olivier Ferrand propose d'aligner la fiscalité dérogatoire des retraités sur celle des actifs. Il suggère d'instituer une CRDS retraite provisoire, avec un point de plus sur dix ans. Pourquoi le bon vieux principe social-démocrate de la redistribution ne s'appliquerait-il pas aux retraites, les plus élevées contribuant à relever les plus modestes ? Ferrand demande aussi que chaque salarié soit informé, en début de carrière, sur le montant de sa future retraite.

4- De façon plus classique, Olivier Ferrand recommande d'allonger la durée de cotisation de 2 020 à 2 050 et d'organiser une retraite individualisée à la carte.

Ferrand, Le Guen, deux socialistes, deux sources d'inspiration pour une réforme socialiste des retraites, dont nous connaîtrons bientôt la teneur. Tant mieux.


Bonne soirée.

La fête barbare.


Bonjour à toutes et à tous.


En rédigeant mon billet d'hier matin sur les apéros géants, je ne savais pas le drame de Nantes. J' y reviens donc aujourd'hui, d'autant que le débat sur l'interdiction de ces manifestations est lancé, avec ce défaut bien français d'aborder un problème quand le pire a été atteint, dans l'urgence et l'émotion de l'événement. Je le déplore mais c'est ainsi. En tout cas, la pseudo-convivialité de ces rassemblements ne tient plus : un mort, des blessés, des hospitalisations et des CRS pour que ça ne dégénère pas, non ce n'est plus du tout une ambiance d'apéro !

Que se passe-t-il donc lors de ces "fêtes", qui puisse attirer autant de monde et pas seulement des jeunes ? C'est la foule aveugle qui se reconstitue dans l'anonymat, autour de rien, de personne, sans autre objectif que se bourrer la gueule. Parce qu'un apéro géant à base de jus d'ananas ou de carotte, j'attends pour voir !

Nous assistons en réalité à un recul de civilisation : c'est au repas, à la façon de l'organiser, de manger, qu'on juge une culture, une société. L'apéro joue dans ce rituel qu'est toute nourriture partagée un rôle spécifique : l'ouverture, la prise de contact entre les convives. C'est un moment léger, très doux, où rien n'a beaucoup d'importance, avant de passer à table, où les choses sérieuses commenceront. L'apéro aiguise l'appétit, prépare à ce qui va suivre. On s'y sent très libre, sans encore de voisins, on peut s'asseoir ou se lever, repérer ceux avec lesquels on va sympathiser, celles qu'on va peut-être draguer. Quand les plats seront servis, il sera trop tard. L'apéro nous donne les premières vapeurs d'alcool qui vont nous mettre en joie, obligeant aussi à mesurer et calculer notre consommation pour qu'elle ne se transforme pas en peine. Bref, l'apéro est un moment de haute civilisation, de grande humanité. A Nantes, à Montpellier et ailleurs, ils en ont fait une fête barbare.

Le ressort de ces apéros facebookés est à chercher du côté de la transgression : des milliers de personnes échappent pendant quelques heures à toute forme de lois. Il n'y a ni organisateur, ni organisation. C'est un courte période de sauvagerie. L'individu n'existe plus, se dissout dans la masse presque animale. Toute responsabilité est abolie. Quand on sait les démarches administratives, le luxe de précaution, les engagements de toute sorte qu'exige la mise en place de la moindre activité publique, on comprend qu'un apéro géant est aussi une forme de protestation, un rejet d'une société hyper-réglementée, tatillonne, sécurisée.

C'est pourquoi il faut se garder de juger trop rapidement et tenter tout de même de comprendre. La sauvagerie est en nous, l'élan barbare est une composante de l'humanité. Au début des années 60, les concerts de rock autour de Johnny Halliday faisaient peur à la bonne société, on y cassait des chaises, on hurlait, les braves citoyens avaient de quoi être inquiets. La musique était sensée adoucir les moeurs, pas les exciter ! Relativisons donc ce qui se passe aujourd'hui avant de brandir la menace de l'interdiction. Pas question bien sûr de transiger quand il est question de vie et de mort, mais allons plutôt vers une régulation et une responsabilisation de ces apéros géants, comme il s'est passé pour la rave party.

Et puis, n'oublions pas que l'humanité a connu d'autres fêtes barbares, il n'y a pas si longtemps, mais très organisées cette fois, bottées et casquées, hurlant des slogans de haine, prises dans des formes d'ivresse et de débordements autrement plus dangereux, sanglants et cruels. A tout prendre, je préfère, de loin, la barbarie anarchique à la barbarie totalitaire. Et si personne ne trouve de solution et n'arrive à se mettre d'accord, je propose d'organiser des cafés philo géants : la convivialité sera assurée par la discussion, le plaisir de boire sera équilibré par celui de réfléchir, vous aurez en même temps l'ivresse et la sagesse. Ce n'est pas une bonne idée ?


Bonne journée.

13 mai 2010

Le Guen et les retraites.

Bonsoir à toutes et à tous.


La première mouture du projet socialiste a une utilité : elle nous met tous d'accord. Mais elle a ses limites : c'est une auberge espagnole (il en faut, ça ne rabaisse pas sa valeur), chacun y trouve ce qu'il a apporté et s'en félicite à bon compte, moi le premier. Rien de bien nouveau : au PS, on a toujours procédé ainsi. Autrefois, on appelait cette astuce la "synthèse", mais c'est devenu un gros mot qu'on n'emploie plus.

Ce qui est certain, c'est que les Français ne vont pas nous juger sur un texte lisible qu'aux seuls militants chevronnés (et encore ...) et dont l'usage n'est qu'interne. En revanche, c'est lorsque nous aurons donné notre point de vue sur les retraites (qui n'est pas encore fixé) que nous gagnerons ou perdrons en crédibilité, selon les choix qui seront faits, le pire étant le non choix, le repli sur sur une posture syndicalo-protestataire.

L'opinion nous attend là-dessus parce qu'elle ne s'intéresse en ce moment vraiment qu'à ça. Je le constate dans le milieu professionnel qui est le mien. Il y a 20 ou 30 ans, la retraite n'était pas un sujet de préoccupation. Aujourd'hui, les trentenaires, loin pourtant de leur fin d'activité, se préoccupent de ce qu'elle sera, s'angoissent pour le niveau de leur pension. C'est que le temps de la retraite n'est plus, comme avant, les dernières années de l'existence, dans l'inactivité, la vieillesse et la maladie. Il est devenu une tranche de vie à part entière, d'une vingtaine d'années environ, qu'il faut donc organiser et garantir.

Deux socialistes viennent d'apporter leurs contributions sur le sujet, que je trouve remarquables. Mon Parti aurait tout intérêt à s'en inspirer au moment des arbitrages. Jean-Marie Le Guen est notre spécialiste santé. Il vient de publier une étude, "Retraites et vieillissement : pour un nouveau contrat social" et s'en explique dans Libération du 10 mai. Voilà ce que j'en retiens :

1- "Il y a urgence à nous exprimer (...) Il faut que nous soyons à l'offensive". Oui, oui et oui, contre les partisans de l'attente, de la tactique, de l'atermoiement.

2- "Il y a consensus sur la nécessité de mobiliser l'ensemble des ressources", en particulier les capitaux financiers, tout en reconnaissant que "cette ressource ne suffira pas". C'est essentiel, faire le point sur ce sur quoi nous nous accordons (c'est le contraire de l'auberge espagnole).

3- "Il faudra jouer sur d'autres critères, comme l'allongement de la durée de cotisation ou le départ retardé". Là, nous ne sommes pas tous d'accord. C'est pourquoi il faut forcer la discussion, voir jusqu'où on peut aller, s'il y a quelque part un point de rupture et en tirer toutes les conséquences.

4- Les critères susnommés ne sont acceptables, et ce pourrait être une façon de nous rapprocher et de nous entendre, qu'avec des contreparties financières et sociales, sur la pénibilité d'une part, le travail et l'emploi des seniors d'autre part.

5- Et la méthode ? Descendre dans la rue, établir un rapport de forces ? Mais lequel ? Non, c'est la tâche des syndicats, pas d'un parti politique. D'autant que c'est rarement une manif qui change la face du monde. Le Guen est clair : "N'ayons pas peur du compromis social ! (...) il faut aborder, sur les retraites, les négociations avec la droite, sans préalable".

Tout est dit, bien dit, et j'approuve. Merci camarade Le Guen ! Je vous réserve un prochain billet sur un autre point de vue très éclairé d'un socialiste sur les retraites : celui d'Olivier Ferrand.


Bonne soirée.

Le bouclier troué.

Pierre Lellouche, qui n'est pas n'importe qui à l'UMP, a évoqué lundi l'idée d'abandonner le "bouclier fiscal", pourtant une mesure-phare de Nicolas Sarkozy. L'objectif était de faire revenir les riches pour qu'ils n'aient plus peur de l'impôt jugé "confiscatoire". Mais les riches n'ont jamais peur de rien, ils ne sont pas rentrés à la maison. Depuis, le fameux "bouclier" protège très efficacement tous ceux qui sont restés (mais qui partiront quand leurs intérêts l'exigeront).

Lellouche pense qu'en ces temps de "rigueur" qui n'ose pas dire son nom et de grosses difficultés à pérenniser le système des retraites, le maintien du "bouclier" la fiche mal. Pourtant, ce n'est pas la somme récupérée qui va servir à grand-chose, mais c'est une question de symbolique, de solidarité. Sarkozy lui-même a compris, qui maintenant songe à une contribution des hauts revenus pour alimenter les caisses de retraites.

En politique, j'ai tendance à croire que les vraies victoires et les pires défaites sont symboliques (autrefois, il n'y a pas si longtemps, on disait idéologiques). Les réformes, elles, prennent du temps, sont conduites souvent par les gestionnaires et les spécialistes, c'est parfois la force des circonstances qui les impose malgré elles. Si la droite renonce à son "bouclier" (ce qui est loin d'être fait), elle aura symboliquement perdu et la gauche pourra pavoiser. De même que la droite avait remporté une victoire symbolique en supprimant les régimes spéciaux de retraites. Dans les deux cas, bouclier fiscal et régimes spéciaux, ça ne règle pas le problème du financement du système, mais symboliquement c'est-à-dire politiquement, l'enjeu pour les uns et les autres est essentiel.


Bon après-midi.

Apéros géants.

Bonjour à toutes et à tous.


C'est la mode des apéros géants relayés par Facebook. Cette nuit, à Montpellier, ils étaient 10 000 ! Même à Saint-Quentin, un projet est dans l'air. Le gars qui a eu l'idée veut bien faire à condition que ce soient les autres qui fassent ! C'est une réaction typiquement contemporaine, et devenue très fréquente. On verra ce que ça donnera.

En attendant, ce nouveau phénomène de société, comme on dit quand on ne sait pas trop bien de quoi il s'agit, inquiète les autorités publiques, qui craignent pour la santé et la sécurité des participants. Pour le reste, tout le monde trouve ça très bien puisque ça vient de Facebook. Donc c'est forcément bien !

Pourtant, je m'étonne et m'interroge : il paraît que l'apéro géant est convivial. La convivialité à 10 000, c'est un concept nouveau et étrange. J'ai une autre vision de l'apéro : entre amis, à quelques-uns, tranquille, au frais, à discuter de tout et de rien. Mais sur une place publique, pendant des heures, debout, au milieu d'une foule, non merci !

J'explique le phénomène par la passion moderne du chiffre, qui n'a pas seulement envahi l'économie mais toutes les activités humaines. C'est la sotte fierté d'être très nombreux sur le coup, d'établir une performance, où la quantité des présents prévaut sur la qualité des relations.

J'y vois aussi la vacuité du collectif à l'ère de l'individualisme : les citoyens ne sont capables de se mobiliser sur rien, les grands rassemblements d'autrefois ont quasi disparu, les manifs ne font plus trop recette. Les apéros géants viennent combler ce vide, cette désaffection du lien social. Sauf qu'ils ne sont qu'une caricature de vie collective, une parodie de sociabilité, le degré zéro de la communication humaine.

Tiens, c'est bientôt le déjeuner. Et si je vous laissais pour aller prendre un apéro ? Tout seul bien sûr, dans ma cuisine. J'aurais ainsi effectué aujourd'hui un geste à contre-courant, une manifestation d'anticonformisme, un acte révolutionnaire.


Santé,
et bonne journée.

12 mai 2010

Je suis en colère.

Bonsoir à toutes et à tous.


Il y a des jours où je ne devrais pas lire la presse. Hier par exemple. Pourtant j'adore, mais ma sérénité peut en pâtir. Dans L'Aisne Nouvelle, je tombe sur ce titre-choc : "Claude Gewerc accusé de discrimination". Je me dis : pas possible, un camarade, capable de ça, et président du Conseil Régional par dessus le marché ! Sauf que ce n'est pas ce qu'on croit, c'est même le contraire : Gewerc ne veut pas que les élus Front National, parti discriminateur, représentent le Conseil Régional de Picardie dans différentes instances de l'enseignement et de la santé. Il a parfaitement raison, il en a le droit, c'est un choix politique et pas de la discrimination. Qui d'ailleurs l'accuse d'une telle ignominie ? Guiniot, le guignol facho du FN. Et pourtant, le titre laissait croire, pour quelqu'un qui ne poursuivait pas la lecture, que Gewerc avait de graves démêlés avec la Justice.

Dans le Courrier Picard, le président du Conseil Général de l'Aisne répond à Pierre André, qui s'est livré il y a quelques jours à une attaque en règle contre sa politique fiscale (voir mon billet de dimanche). Très bien, j'attendais une riposte ... mais pas celle-là : un petit pavé illisible, sans paragraphes, bourré de chiffres et de termes techniques, dont on ne retient politiquement rien. Le topo est une fiche pour élus ou administratifs, le simple citoyen n'y pige pas grand-chose. Les arêtes politiques ne sont pas saillantes. Pierre André a lancé une offensive au canon, il fallait répondre au bazooka et pas à la petite cuillère.

Surtout, rien n'est dit du problème central que le sénateur-maire de Saint-Quentin exploite habilement : la hausse éventuelle des loyers par les bailleurs sociaux. Yves Daudigny en reste aux collectivités et au bénéfice pour elles de la taxe d'habitation. L'électeur s'en moque : son problème, c'est le montant de son loyer ! Dans quelques mois, il y aura des cantonales dans le nord de Saint-Quentin, incluant le quartier Europe et une bonne partie de l'électorat de gauche : c'est à lui qu'il faut s'adresser en lui expliquant la position du Conseil Général à propos de cette histoire de fiscalité et de loyer. Sinon la droite s'en chargera, évidemment contre nous (à Laon Nord, un candidat UMP potentiel a déjà commencé, et Pierre André a ouvert la voie), nous ne pourrons qu'y perdre des voix. Si on en envie de reprendre ce canton, et c'est possible, il est plus que temps de passer à l'offensive !

Dernière chose qui me fout en rogne : Pierre André ne s'est pas contenté de critiquer vertement la politique fiscale du département, il a dénoncé tout aussi violemment le syndicat Valor'Aisne, avec le même argument que pour les loyers : les Saint-Quentinois vont payer ... à cause des socialistes ! C'est le jeu politique, qui n'est pas un parcours de tendresse. Mais que fait le président du syndicat ainsi attaqué ? Le Courrier Picard et L'Aisne Nouvelle l'ont sollicité, il a refusé de s'expliquer ! Thierry Lefèvre répondra, j'en suis certain, il a des arguments. Mais c'est maintenant qu'il fallait les exposer. Plus tard, nos concitoyens auront oublié ; ils ne garderont en tête que la version de Pierre André. La communication n'attend pas : c'est sur l'instant qu'il faut réagir ; après l'heure, c'est plus l'heure !

Je suis en colère de constater que ces évidences ne sont pas admises : si nous ne ne faisons pas de politique, si nous ne communiquons pas, si nous ne ripostons pas à la droite, comment pourrons-nous un jour gagner dans le Saint-Quentinois ? Sauf à croire que la victoire résulte d'un effet mécanique, qu'elle tombe toute cuite dans l'escarcelle, ce que je ne crois absolument pas. Ou bien il y a un autre explication, la plus terrible de toute, à laquelle je ne veux même pas penser : c'est que Saint-Quentin est abandonné à l'UMP, rayé de la carte des conquêtes possibles. Ça, je ne m'y résous pas.

Oui, je suis en colère, j'en veux à un peu tout le monde, la gauche et la droite, mon Parti et l'UMP, à ce qui se passe et à ce qui ne se passe pas, aux autres mais aussi à moi, surtout à moi, d'être incapable de changer le cours inéluctable des choses. Ça me passera. Il aurait suffi que je ne lise pas hier les journaux locaux pour conserver ma sérénité. Une colère se retourne toujours contre soi-même.


Bonne et paisible soirée.

11 mai 2010

Nous avons un projet.

Bonsoir à toutes et à tous.


Le Parti socialiste discute en ce moment dans ses sections de son projet. Enfin ! La droite nous reprochait de n'avoir pas d'idées. En voilà, et un sacré paquet, parfois trop foisonnant. Personne ne pourra plus dire que le PS n'a pas de projet. A chacun maintenant de le lire, de se l'approprier.

La droite, et l'opinion publique, nous reprochaient aussi d'être divisés, de ne pas arriver à nous entendre. Ce n'était pas tout à fait faux. C'est désormais fini : le texte proposé à notre réflexion a été adopté à l'unanimité, toute tendance confondue. Ce n'est pas si fréquent, ça mérite d'être souligné et c'est de très bon augure.

Sur le fond, ce projet est excellent. Ce que j'attends depuis longtemps, la social-démocratisation de notre ligne politique, est ici acté. C'en est bien terminé avec la "rupture avec le capitalisme", la croyance aux "nationalisations", le recours à la "planification". Rien de nouveau évidemment, mais c'est écrit noir sur blanc, dans un projet qui parle de "social-écologie", d'individualisation des services publics, de renforcement de notre engagement européen. Tout ça n'est pas rien. Nous sommes en train d'inventer un "nouveau modèle" qui répond aux besoins d'aujourd'hui et pas aux illusions d'hier ou d'avant-hier.

La réaction de notre "gauche", passée chez Mélenchon, ne s'est pas faite attendre : allez voir ce que notre ancien camarade en dit sur son blog, dans son billet du 4 mai, et vous comprendrez. Il parle, avec sa modération coutumière, de "pitoyable foutaise". Cet anti social-démocrate est en la matière un expert. Mais pouvait-on espérer de sa part un autre jugement à l'égard d'un projet piloté par le très social-démocrate et toujours strauss-kahnien Pierre Moscovici ?

Ceci dit, ce projet n'est pas une Bible, il doit susciter parmi nous le débat, comme il se doit dans une organisation démocratique. Quand je constate que même ceux qui ne l'ont pas vraiment lu sont d'accord avec, je m'inquiète un peu. L'unanimité est une belle chose lorsqu'il s'agit de trouver des candidats qui portent au mieux nos couleurs, mais pas quand il est question d'idées. C'est pourquoi j'aurais préféré que ce texte puisse être amendé. A défaut, la discussion risque de tourner au concours d'approbations.

Pourtant, je crois qu'on ne peut pas être d'accord sur tout. Ce n'est pas tant ce qui est proposé que ce qui ne l'est pas qui me gêne. Par exemple sur les retraites : nos fondamentaux sont rappelés, des pistes sont évoquées mais aucune réforme n'est clairement exposée. Je sais que ça viendra, que notre Bureau national en discute ce soir. Mais c'est urgent : l'opinion publique nous attend là-dessus.


Bonne soirée,
bonne lecture.

10 mai 2010

Borloo et Mélenchon.

Bonsoir à toutes et à tous.


Aux prochaines présidentielles, j'aimerais voir se présenter Mélenchon et Borloo. Ce ne sont bien sûr pas mes candidats préférés, je ne partage pas leurs idées, et vous connaissez depuis longtemps l'élu de ma raison. Mais ces deux-là mériteraient d'être présents. Le scrutin y gagnerait en qualité. Ce sont l'un et l'autre des personnes de convictions, et chacun à leur façon des personnages, ce qui me les rend sympathiques. Et puis, sont-ils si différents que ça de ma sensibilité politique ? Mélenchon a passé quand même le plus clair de son temps au PS, et Borloo n'aurait pas besoin d'être beaucoup poussé pour se retrouver au centre gauche.

Ce sont des types sincères, qui expriment leurs idées sans détour. Ils apportent respectivement quelque chose à leur propre camp, qui ne peut pas ignorer leur différence et leur existence. La droite a besoin en 2 012 d'un candidat radical-centriste-écologiste qui lui ramène cette partie de l'électorat qui fuit chez Bayrou. Le Parti socialiste a besoin que la gauche de la gauche soit rénovée, renforcée et représentée par Mélenchon, pour que les électeurs ne soient pas tentés par la stérile extrême gauche.

Enfin, Borloo et Mélenchon sont la vivante démonstration que la démocratie ne peut pas se satisfaire d'un parti unique tel que l'UMP essaie de le constituer (les dernières régionales ont montré qu'elle avait tort). En revanche, il est normal et souhaitable qu'il y ait, à droite et à gauche, un parti majoritaire qui structure leur électorat.

Ces deux candidats potentiels iront-ils jusqu'au bout de leur trajectoire ? Rien n'est certain. Borloo, à la différence de Mélenchon, n'a pas une âme de leader et la stratégie unitaire de Sarkozy-Bertrand ne lui garantit pas un espace politique. Mais à choisir, je le considère infiniment supérieur à l'insipide Morin du Nouveau Centre. Quant à Mélenchon, il a fort à faire avec le PCF, qui ne peut guère s'effacer devant un ex-socialiste fondateur d'un petit parti dissident. Pourtant, je le redis : il serait bien que Borloo et Mélenchon apportent leur contribution à cette mère des élections qu'est la présidentielle.


Bonne soirée.


PS : j'ai promis samedi après-midi à Claudine Doukhan, conseillère régionale socialiste et fidèle lectrice de "L'Aisne avec DSK", de lui souhaiter aujourd'hui son anniversaire via ce blog. C'était un petit défi, le voilà relevé : bon anniversaire Claudine, et bon courage surtout dans tes nouvelles activités d'élue (Claudine habite dans un petit village près de Guise, dans l'Aisne ; son époux est un blogueur apprécié et connu).

09 mai 2010

Réponses à Pierre André.

Bonsoir à toutes et à tous.


Pierre André s'en est violemment pris, hier dans la presse, à la politique fiscale du Conseil Général de l'Aisne. Le dossier est très technique, mais le simple citoyen que je suis peut avoir, comme n'importe qui, son avis, et il est du devoir d'un militant socialiste de défendre ses camarades attaqués. Je souhaite le faire sans polémique, à l'aide d'arguments rationnels, en cherchant à comprendre autant qu'à convaincre, en essayant de répondre point par point au sénateur-maire de Saint-Quentin. Le sujet est important, les Saint-Quentinois sont concernés de près et les prochaines élections cantonales devraient l'aborder.

Le Conseil Général a besoin d'argent. Il lui en manque dans ses caisses. Sa gestion est-elle en cause ? Pas du tout, pas plus que n'était en faillite le Conseil Régional de Picardie, comme il avait été pourtant affirmé pendant la campagne. Le problème est simple : les recettes se réduisent et les dépenses augmentent, parce que la crise multiplie les allocataires de prestations sociales versées par le Département. La taxe professionnelle, dont profitaient les collectivités, a été supprimée et la réforme territoriale promet une réduction des compétences et de l'autonomie financière du Conseil Général.

Dans ces conditions, actuelles et à venir, cet échelon subit et est menacé par de sévères restrictions budgétaires, qui ne seront pas intégralement compensées par les dotations d'Etat, car celles-ci ne seront pas systématiquement réévaluées au rythme des besoins ou de l'inflation. Bref, le Département connaît des difficultés de trésorerie, et l'Aisne n'est pas le seul concerné : de droite ou de gauche, il y a des problèmes et des inquiétudes.

Face à cette nécessité dont il n'est absolument pas responsable, qu'a fait le Conseil Général de l'Aisne ? Augmenter les impôts locaux. Pouvait-on faire autrement ? Oui et son président Daudigny nous l'a dit : réduire les subventions aux associations, rogner dans les dépenses non obligatoires, abandonner le coûteux soutien au transport scolaire, laisser tomber le financement des bourses, négliger le développement économique, bref mener une politique anti-sociale dont auraient pâti les catégories les plus défavorisées. Le sénateur-maire de Saint-Quentin ne prend pas en compte qu'une multitude de petites communes rurales ne peuvent mettre en place de nombreuses activités, culturelles ou sportives par exemple, qu'avec le soutien du Conseil Général. Si celui-ci réduisait cette aide, les conséquences seraient socialement catastrophiques.

Voir ses impôts augmenter ne fait plaisir à personne. Mais il faut bien faire des choix. Et ceux du Conseil Général de l'Aisne sont justes et judicieux. Fallait-il relever de façon homogène tous les impôts locaux ? Pourquoi pas, mais la décision aurait fait porter l'effort sur tous sans tenir compte des moyens financiers, des conditions sociales des uns et des autres. Mes camarades du Conseil Général, cela vous surprendra-t-il, ont réagi et raisonné en socialistes, en baissant la taxe d'habitation pour soulager d'abord les locataires, en augmentant la taxe foncière parce qu'un propriétaire, en règle générale, a plus de moyens qu'un simple locataire. Cette logique est celle de la justice sociale la plus élémentaire. J'attends de pied ferme les commentaires qui soutiendraient le contraire.

Cette modulation des taux me semble équitable et habile. D'autant que les propriétaires qui verront leur foncier bâti augmenter bénéficieront par compensation de la baisse de leur taxe d'habitation. Mais il y a bien sûr le problème des bailleurs sociaux, sur lequel la droite a choisi de concentrer ses attaques, parce que les locataires risquent de voir augmenter leur loyer. Peut-être, mais cela invalide-t-il toute la politique fiscale du Conseil Général et ce que je viens d'en dire ? Bien sûr que non ! Les problèmes sont faits pour être réglés, et celui-ci le sera. Je rappelle quand même que si les loyers augmentent, la taxe d'habitation baisse aussi.

Je connais un peu Pierre André. C'est un homme charmant, soucieux de défendre les intérêts de sa ville, qu'il aime par dessus tout. Mais c'est un homme politique féroce, surtout à l'égard de ses adversaires. Mais c'est la politique qui veut ça. Le contraire serait surprenant. Il n'y a donc pas à se plaindre de cette situation. A mes camarades du Conseil Général, je demande de répondre comme j'ai tenté de le faire ici, avec des arguments certainement plus informés et plus convaincants que les miens, notamment à travers une approche chiffrée. L'avantage avec le sénateur-maire de Saint-Quentin, c'est qu'il nous oblige à faire de la politique. Et finalement j'aime ça !


Bonne soirée politique.

Des fleurs et des cactus.

Le week-end du 9 mai est toujours politiquement chargé en événements. Ce matin, c'était l'inauguration du Marché aux Fleurs. Hier, au milieu des drapeaux, on ne parlait que de Pierre André. Aujourd'hui, parmi les oeillets, rhododendrons et pétunias, il n'était question que de Colette Blériot, qui d'ailleurs était là (mais où n'est-elle pas ?). Le sénateur-maire a-t-il oui ou non désavoué son adjointe, conseillère générale ? Les avis étaient partagés.

Certains décrypteurs de la parole magistrale affirmaient que le verdict était sans appel : Pierre André laissait tomber Colette Blériot et un autre candidat allait être adoubé par la Municipalité. D'autres, qui se voulaient tout autant compétents en matière d'interprétation, se voulaient plus nuancés, affirmaient que c'était plus compliqué que ça : certes Blériot a été implicitement réprimandée mais son nom n'a pas été prononcé par le sénateur-maire, ce qui a valeur de sursis ou d'avertissement ; il ne la soutiendra donc pas ostensiblement aux cantonales mais ce sera bel et bien elle la candidate de la droite. J'avoue que je me suis un peu perdu dans ces conjectures, d'autant que la fanfare ne rendait pas toujours très audible les analyses stratégiques des uns et des autres.

Il y a peut-être un moyen plus sûr de juger de la disgrâce ou de la rédemption de la conseillère générale du canton centre : c'est de mesurer la distance qui la sépare du mètre-étalon Xavier Bertrand, évidemment présent (mais où n'est-il pas ?). Je n'ai pas été très attentif, je devais choisir des roses pour ma fiancée, mais une journaliste m'a assuré que Colette Blériot était nettement en retrait du cortège municipal. Idem pour Jérôme Lavrilleux, mon adversaire de la dernière fois au canton nord. En politique, les réprouvés se repèrent au nombre de centimètres qui les séparent du prince (au sens étymologique : princeps, le premier). Il faut militer avec un ruban métrique ou avoir un bon coup d'oeil.

Y avait-il plus d'élus que d'habitude ? Je ne crois pas mais une source sûre, observateur perspicace, m'a assuré que oui, qu'il planait dans l'air une odeur de fleurs, de printemps et de cantonales. Freddy Grzeziczak, il est vrai, m'a paru plus grand que d'ordinaire, semblant se redresser plus que de coutume, toujours impeccablement costumé. De mauvaises langues ou de bienveillants amis d'icelui me suggèrent qu'il se verrait bien aussi dans des habits d'élu départemental. Ils me le disent pour que manifestement je vous le répète sur ce blog. C'est fait mais ne prenons pas tout ça pour argent comptant. En politique plus qu'ailleurs, les conseilleurs ne sont pas les payeurs.


Bon dimanche ensoleillé et fleuri.

Jean-Claude Carrière.



Bonjour à toutes et à tous.


C'était hier au Salon du Livre et de la BD à Saint-Quentin, avec un beau plateau d'écrivains et de personnalités, dont une ancienne et toujours actuelle idole à moi : Jean-Claude Carrière. Quand j'étais ado, cet homme me fascinait. Sa voix très douce quand il passait chez Pivot, son élocution envoûtante, son immense savoir, tout ça, je le sentais, me rendait plus intelligent, me conduisait vers des domaines que j'ignorais et qui étaient fondamentaux. Carrière, comme beaucoup d'autres, a contribué à faire ce que je suis devenu. J'ai une sorte de dette envers lui.

Et puis, il y avait ses livres qui me passionnaient, ses scénarios avec Bunuel qui m'intriguaient, son étrange intérêt pour les hérésies chrétiennes dans le film La Voie Lactée. Jean-Claude Carrière représente pour moi le modèle de l'homme cultivé français, doté d'une curiosité et d'une culture universelles, tout le contraire du spécialiste borné, de l'universitaire rasoir ou de l'intellectuel pédant.

Donc hier il était là, à Saint-Quentin, dans le Palais de Fervaques, seul à son stand, devant ses ouvrages, et je n'osais pas aller le voir. Ce n'est pas que je sois particulièrement timide : j'aborde sans problème une personnalité politique ou une jolie femme, mais dans cette circonstance, à quelques mètres de Carrière, j'étais impressionné et par conséquent intimidé. Il y a une autre raison à mon hésitation : je n'aime pas faire le touriste, demander une dédicace. Carrière, je le connais sans avoir besoin de lui parler, par la lecture de ses ouvrages. Jouer à la midinette ou au fan, ce n'est plus de mon âge.

Mais je me suis dit : c'est quand même Jean-Claude Carrière, je n'aurais plus jamais l'occasion de le revoir, j'y vais. Et j'y suis allé ! Je ne l'ai pas regretté, c'était mon bonheur du week-end. Cette voix, ce visage, cette culture, c'était bien lui, pour de vrai comme disent les enfants. Toujours aussi charmant. Nous avons échangé quelques minutes. Je voulais savoir si ses investigations théologiques l'avaient entraîné vers une quelconque transcendance ou foi, cet athée m'a répondu que non mais que sa seule tentation pourrait être polythéiste, car plus conforme à la diversité du monde telle que nous la découvrons au fil de l'Histoire. J'ai pensé à ce mot de Bunuel, qui s'entend plus qu'il ne se lit : "Grâce à Dieu, je suis athée !" Carrière ne peut pas adhérer au monothéisme moralisateur chrétien, du moins tel qu'il le perçoit, mais il est attiré par la spiritualité (il m'a confié qu'il préparait un film sur le Dalaï Lama).

Je l'ai quitté en lui achetant un bouquin (en vignette). J'ai quand même bien fait de lui parler !


Bonne journée.

08 mai 2010

Pierre André n'a pas changé.

Bonsoir à toutes et à tous.


De quoi parlait-on ce matin dans le cortège patriotique du 08 mai qui descendait le boulevard Gambetta ? De la rentrée médiatique de Pierre André bien sûr ! Le sénateur-maire de Saint-Quentin, veste grise et polo noir, a montré une image de bonne santé et de force politique. C'était une façon de conjurer cette triste cérémonie des voeux de janvier, où l'annonce de sa maladie avait porté un coup à tous. Le premier magistrat de la ville est un homme debout, identique à lui-même, maîtrisant ses dossiers, politiquement combatif et parfois toujours aussi féroce.

Cette bataille de l'image, il l'avait gagné dès le début de l'année, quand sa maladie a été révélée, imposant le respect à tous, y compris à son opposition d'extrême gauche, qui aurait pu s'interroger publiquement sur cette "vacance" du pouvoir mais qui n'en a rien fait. Seul le Courrier Picard a osé, Nicolas Totet en faisant les frais lors d'une mémorable émission de télévision où il s'est fait rabrouer par Xavier Bertrand.

Pierre André a donc fait du Pierre André, c'est-à-dire de la politique, sachant qu'en la matière il faut se rappeler au bon souvenir de ses adversaires, frapper le plus fort possible et préparer l'avenir. Autant vous dire qu'il est passé maître depuis longtemps dans ce genre d'opération. L'adversaire, c'est bien sûr la gauche quand on est de droite. Mais pas l'opposition locale, beaucoup trop tendre à son goût : Pierre André boxe dans la catégorie supérieure, il lui faut s'attaquer à du gros, à du lourd. La Région, ce n'est pas le moment, ils viennent de gagner les dernières élections. C'est donc le Conseil Général de l'Aisne qui en prend pour son grade. Car les cantonales, c'est pour l'an prochain.

Le sénateur-maire attaque sur deux dossiers politiquement très sensibles : la politique fiscale du département et le traitement des déchets par le syndicat Valor'Aisne. Sa conclusion est simple et percutante : le Conseil Général est mauvais et les Saint-Quentinois vont trinquer ! J'espère que la gauche locale va s'expliquer et monter au créneau, sinon je ne donne pas cher de notre peau. La campagne des cantonales vient d'être lancée, sévèrement bordée par Pierre André : elle sera très politique et très violente, je souhaite bien du courage à mes camarades qui la conduiront.

Les cantonales justement, le maire de Saint-Quentin en parle explicitement, et en fin politique il n'est pas là où on l'attendait : on le disait fâché avec Jérôme Lavrilleux, il est prêt à le soutenir dans le canton nord ; la surprise en revanche vient du canton centre, où le soutien à Colette Blériot semble compromis : celle-ci a franchi la ligne blanche en s'abstenant lors du vote du budget au Conseil Général. Pierre André ne plaisante pas avec ces choses-là : en politique, le vote est le moment de vérité ; face à l'adversaire, on ne s'abstient pas. Il a d'ailleurs raison ; je partage avec lui cette intransigeance qui n'est que stricte cohérence.

De cette conférence de presse, je retiens aussi l'incertitude et le réalisme quant à son avenir politique, dont il décidera à l'automne prochain. Si sa santé l'exige, il laissera la place à Xavier Bertrand. Pour ma part, et je le lui ai dit, j'espère qu'il ira jusqu'au bout de son mandat, qu'il en aura la possibilité. Je souhaite bien sûr de tout mon coeur et de toutes mes forces que la municipalité de Saint-Quentin passe à gauche. Mais je sais gré à Pierre André d'avoir été à l'écoute de ses concitoyens et d'avoir oeuvré pour le bien public, même si je ne partage absolument pas ses opinions politiques. Le reconnaître est une question d'honnêteté. Quant à l'arrivée de Xavier Bertrand à la tête de la municipalité, je la redoute et je ferai tout pour l'empêcher.


Bonne soirée.

07 mai 2010

Jean-Marc Souvré.

Bonsoir à toutes et à tous.


Je n'ai pas pu aller cet après-midi à Soissons à l'enterrement de mon camarade Jean-Marc Souvré, étant pris à Laon par le lancement de la Quinzaine de l'Ecole Publique. Je veux ce soir lui rendre hommage. Je l'ai connu un peu il y a une dizaine d'années, m'installant dans l'Aisne. Nous nous croisions de temps en temps dans les réunions nationales du PS. Il était de conversation agréable, très ouvert, se tenant informé de la vie politique axonaise.

Ce que je retiens d'abord de lui, c'est son parcours, très classique, au sein de notre Parti, gravissant les échelons : attaché parlementaire, maire-adjoint, directeur de cabinet d'un secrétaire d'Etat, conseiller régional, c'est donc une vie politique assez riche, à laquelle il aura sans doute manqué la responsabilité à la tête d'un exécutif.

Je n'étais pas assez intime avec Jean-Marc pour savoir pourquoi il s'est éloigné de la politique active, sans la quitter totalement. Mais prendre ses distances alors qu'on n'a pas encore cinquante ans, que l'avenir vous tend les bras, ce n'est pas fréquent. Jean-Marc a privilégié sa vie professionnelle après son échec aux municipales de Soissons en 2 001. Il a occupé après de hautes fonctions dans de grandes entreprises.

Serait-il resté à Soissons, où il était le leader naturel de la gauche, sans doute l'aurait-il emporté en 2 008 et serait devenu maire à la place de Patrick Day. Comme le destin est étrange en politique. Comme il aura été cruel pour Jean-Marc, en lui faisant quitter la vie à l'âge de 55 ans. Je vous laisse ce soir sur ces tristes méditations.


A demain.

06 mai 2010

La preuve par la Grèce.

Bonsoir à toutes et à tous.


L'événement est passé relativement inaperçu. On en a bien sûr parlé, comment faire autrement, mais sans qu'il suscite les commentaires qui pourtant s'imposaient. Je vais essayer de remédier à ce défaut. De quoi s'agit-il ? Du soutien du PS au plan d'aide à la Grèce, adopté par mon parti lors du vote à l'Assemblée, décision qui nous a d'ailleurs valu les remerciements de la droite. Ce consensus inhabituel, je l'approuve bien entendu : on ne pouvait pas laisser l'économie grecque en l'état, proie de la spéculation, en se contentant de laisser faire. Il est normal que la France, l'Europe et le FMI interviennent massivement.

Mais le problème n'est pas là, ma surprise est ailleurs : c'est dans l'absence de réactions hostiles, de critiques, de refus parmi mes camarades. Je crois bien connaître le PS : pour un rien, une peccadille, nous nous chamaillons. Je ne m'en plains pas toujours, car c'est le charme indispensable de la démocratie. Je m'inquiète parfois quand les conséquences sont néfastes. Là, pour le plan d'aide à la Grèce, c'est stupéfiant : aucune voix discordante ! Je m'en félicite, mais c'est tellement rare que j'en viens à être troublé.

Un plan financier qui alimente une nécessaire mais terrible cure d'austérité, il n'y a pas si longtemps des socialistes auraient protesté. Je n'ai rien entendu. Le PCF, lui, a voté contre et l'extrême gauche évidemment enrage. Mais chez nous, c'est passé comme une lettre à la Poste, si j'ose dire. J'ai connu des divergences à propos d'engagements beaucoup moins lourds. Qu'est-ce que signifie cette unanimité ? Que devient notre aile gauche ? En lui confiant des responsabilités, Martine Aubry l'a-t-elle phagocytée ? Je ne sais pas, je ne m'explique pas. Tout laisse à penser que nous nous sommes convertis à la social-démocratie. Est-ce la raison pour laquelle la candidature DSK devient de plus en plus crédible ? Peut-être.


Bonne soirée.

05 mai 2010

Camarades sénateurs.

Bonsoir à toutes et à tous.


Les sénateurs socialistes ont fait part à Martine Aubry de leur opposition au projet de non cumul des mandats pour 2 011, qui pourrait selon eux leur interdire la conquête historique du Sénat. Je ne suis évidemment pas d'accord avec eux et je souhaite que Martine ne plie pas. Pour plusieurs raisons :

1- Le non cumul des mandats est réclamé par l'opinion. Si l'on veut redorer l'image de la politique, il faut en passer par là. Les cartes de visite en accordéon tellement s'y accumulent les mandats et présidences en tout genre sont devenues insupportables. La République, c'est la répartition des pouvoirs, pas leur concentration. Quant à l'efficacité de ces collections, inutile d'en parler.

2- Les adhérents socialistes ont tranché, ils veulent massivement le non cumul, cette décision est souveraine, irrévocable et s'impose à tous, même à nos camarades sénateurs. Sinon à quoi bon nous avoir fait voter ? Avec le système des primaires, l'interdiction du cumul des mandats est la mère des batailles de la rénovation. Les primaires vont dissoudre l'appareil par le bas (le déverrouillage des sections) et le non cumul par le haut (la fin des notables). Le socialisme a tout à y gagner.

3- "Les mandats sont des tremplins pour gagner", nous disent nos camarades sénateurs. Ce qui signifie que pour être élu il faut déjà être élu. Je ne sais pas si cette logique est vraie, mais je la crois bien peu socialiste ni même très républicaine. Et puis, si on la généralise, pourquoi ne pas choisir désormais n'importe quel candidat à n'importe quelle élection parmi les élus ? Mais n'est-ce pas déjà un peu le cas ? Enfin, personne n'en sait rien : il n'est pas certain que des briscards ne finissent pas par susciter le rejet et des novices emporter au contraire l'adhésion et se faire élire. D'ailleurs, on ne parle jamais des cumulards qui font perdre leur parti.

4- Adopter maintenant le non cumul à gauche ne serait-il pas suicidaire puisque la droite ne suivrait pas ? Nos camarades sénateurs parlent à juste titre de "désarmement unilatéral". Ne faudrait-il pas que la loi l'impose à tous et qu'on n'en reste pas à une disposition interne au seul PS ? C'est l'argument le plus sérieux, malgré tout je ne le suis pas. La gauche doit donner l'exemple, sans attendre, et s'appliquer d'abord à elle-même ce qu'elle prône pour les autres. Aux yeux de l'opinion, nous ne pourrons qu'en tirer un bénéfice immense.

5- Mais est-il bien judicieux d'appliquer le non cumul alors que nous sommes en capacité de remporter l'an prochain la majorité sénatoriale ? Je vais vous répondre brutalement : le Sénat, je m'en fous. A part quelques réformes institutionnelles qui exigent son aval, pour le reste la gauche peut fort bien jouer son rôle de transformation de la société, y compris quand la Haute Assemblée est de droite. Alors ... Et puis, s'il faut attendre qu'il n'y ait pas d'élection en vue pour adopter le non cumul, on peut attendre longtemps puisqu'en démocratie il y a toujours une élection en vue.

Camarades sénateurs, ne craignez rien, soutenez Martine Aubry dans sa volonté de lutter contre le cumul des mandats. Mais je reconnais que si j'étais sénateur, je ne tiendrais peut-être pas ce discours-là.


Bonne soirée.