L'Aisne avec DSK

31 janvier 2009

La Paix maintenant.

Bonsoir à toutes et à tous.

A l'heure où Gaza s'éloigne tout doucement de l'actualité, j'aimerais revenir sur ce qui s'est passé, en constatant une fois encore que le journal qui reflète le plus mon opinion est Charlie-Hebdo, numéro du 21 janvier. Je note d'abord un entretien avec David Chemla, président du mouvement "La Paix maintenant", dont je partage absolument les positions (voir leur site: www.lapaixmaintenant.org ): rendre les territoires occupés, démanteler les colonies, permettre la création d'un Etat palestinien.

Ce mouvement ne s'est reconnu ni dans les manifestations du CRIF, ni dans les cortèges propalestiniens. En matière de méthode, il revendique un même discours quel que soit l'interlocuteur, il estime que les belligérants ne trouveront une solution qu'en présence d'un tiers, il défend "une approche rationnelle et non émotionnelle" et veille "à ne pas importer le conflit ici".

Historiquement, Chemla fait remarquer qu'il y a trente ans, l'idéologie du Grand Israël était dominante, alors qu'aujourd'hui le retrait des colonies et l'acceptation d'un Etat palestinien sont majoritaires dans l'opinion israélienne. Où est alors le problème? Dans l'absence d'une majorité politique, le système parlementaire conduisant à l'émiettement. Côté Palestinien, la difficulté est similaire: la faiblesse de l'Autorité palestinienne face au Hamas terroriste. On croit parfois que la violence est le fait de la trop grande force. Elle est ici la conséquence d'une grande faiblesse.

L'illusion de la force, c'est aussi, dans le pouvoir israélien, la croyance en la solution militaire, alors que celle-ci ne pourra aboutir qu'au renforcement politique du Hamas. Il faut alors soutenir les partisans du compromis, et rappeler que c'est Sharon, qui n'était pas un tendre, qui décida de se retirer de Gaza en 2005 et que les dirigeants israéliens mènent depuis deux ans des négociations avec l'Autorité palestinienne.

Dans ce même numéro de Charlie, un article de Charb est sans concession pour la politique israélienne, mais là encore j'approuve. Non, cette guerre n'en est pas vraiment une: d'un côté, israélien, une armée ultra-moderne, de l'autre, palestinien, une résistance assez dérisoire. Que veut Israël? Non pas "détruire la Palestine, mais l'empêcher de se construire". Pour cela, le Hamas, "parti fasciste", est un allié de choix, le bon prétexte afin de poursuivre cet objectif. Le Fatah, corrompu et fragilisé, est un interlocuteur de façade. Bref, pas très optimiste, l'analyse de Charb, c'est le moins qu'on puisse dire. Heureusement qu'un Chemla nous redonne espoir.


Bonne nuit.

A mes camarades ségolénistes.

Mes camarades ségolénistes se réunissent à Paris ce samedi, au sein de leur courant "L'Espoir à Gauche". Ségolène publie la semaine prochaine son dernier ouvrage, "Femme debout", où elle dit franchement ce qu'elle pense des socialistes et de Sarkozy, traité de "petit garçon" qui joue au cow-boy. Ses amis sont plutôt critiques envers le "plan de relance" proposé par le PS. Malek Boutih parle de "régression", le juge "coûteux" et craint qu'il n' "hypothèque nos chances pour les échéances à venir". C'est sévère. Julien Dray, autre ségoléniste, n'est pas plus tendre: il fustige "une conception misérabiliste", une "gauche de compassion et d'aigreur", des "mesures-rustines".

Que faut-il penser de ces réactions? D'abord, je comprends mes camarades ségolénistes, leur amertume, peut-être même leur rage: quand on a failli gagner mais qu'on a perdu, c'est rageant, je sais, je connais. Mais j'ai toujours pensé qu'entre socialistes, il ne devait y avoir ni gagnant, ni perdant, ou plutôt que nous devrions tous, dans une configuration idéale, nous sentir gagnant. Comment vaincre la droite si certains d'entre nous se sentent exclus?

La situation n'est pas simple, quand deux forces d'à peu près même importance coexistent, et doivent par conséquent cohabiter. Le schéma satisfaisant dans toute structure démocratique, c'est majorité-minorité, et pas deux blocs à égalité. Mais nous en sommes là, il faut faire avec, et le mieux possible. Il faut donc "s'arranger". J'aime bien ce mot, si difficile à mettre en oeuvre: s'arranger!

Ségolène a son style, qui n'est pas le mien, mais que je respecte. J'admets qu'on puisse se laisser aller, même contre ses camarades. Nul n'est complètement maître de soi, moi le premier. Mais l'écrire dans un livre d'entretien, qu'on relit, qu'on médite, qu'on corrige, dont on connaît la portée politique, pourquoi? S'il n'y avait que Ségolène, ça ne me dérangerait pas. J'aime la liberté, et la polémique fait partie de la vie.

Mais ce qui m'inquiète, c'est le mauvais exemple donné aux militants, qui à leur tour se croiront autorisés à tout critiquer. Ségolène n'est bien sûr pas la seule, ni la première à tomber dans ce travers. Tout a commencé en 2005, où pour la première fois dans son histoire, le PS a permis, à mon avis à tort, à des camarades de militer contre la décision prise par sa majorité de voter oui au référendum européen.

Le plan de relance, j'admets qu'il n'est pas très original mais banalement keynésien. Ceci dit, il a le mérite d'exister, et la situation exigeait l'efficacité, pas l'originalité. Et que n'aurait-on pas reproché à Martine Aubry si elle n'avait pas pris cette initiative collectivement élaborée? Ce plan de relance est une réponse immédiate à la crise financière, une riposte urgente et nécessaire à la politique de droite. Il le fallait, c'est fait. Ce n'est pas parfait? S'il fallait attendre la perfection en politique, on ne proposerait jamais rien.

Et puis, le projet plus original que réclament Julien Dray et Malek Boutih, il viendra en son temps, et ça ne peut pas être maintenant. Nous devons en discuter tous ensemble, organiser des conventions thématiques dans cet objectif. Cela se fera, Martine l'a promis. Ce projet devrait être pertinent, mobilisateur, attractif, ce sera le socialisme des prochaines années, le socialisme pour ce début de siècle, un projet dans lequel chacun se reconnaîtra parce que chacun aura apporté sa pierre à l'édifice. Je ne connais que cette méthode-là pour rassembler et pour gagner.

A tous les niveaux, national, fédéral, local, cette unité est nécessaire. Elle ne doit pas être un mot pour faire beau, mais une pratique, l'ouverture des responsabilités à tous. On ne fera rien sans les ségolénistes, eux ne feront rien sans nous. Tournez la question dans tous les sens, vous tomberez sur la même réponse, celle que je viens de donner.


Bon après-midi,
et bonne réunion de courant
à mes camarades ségolénistes.

Un néo-maoïsme.

Bonjour à toutes et à tous.

Je l'ai dit, le mouvement de jeudi fera date, parce que pour la première fois depuis de longues années, sa "coloration" est plus réformiste que radicale. Mais la radicalité, évidemment, n'a pas disparu. Elle est, pour moi, une impasse politique, elle est même parfois dangereuse. C'est du moins ce qui me vient à l'esprit lorsque je lis, dans Libération du 27 janvier, les propos d'Alain Badiou, le philosophe de la radicalité depuis la disparition de Pierre Bourdieu. Cette radicalité intellectuelle est contestable et inquiétante pour plusieurs raisons:

1- Badiou n'a pas vraiment rompu avec le maoïsme de sa jeunesse. Il rêve à un spontanéisme des masses, un soulèvement populaire au seul cri de "Sarkozy démission", hors organisations, syndicats et partis. Même le NPA n'a pas ses faveurs. Vieux mépris maoïste envers les trotskystes...

2- Badiou rejette autant la gauche que la droite, qu'il ne distingue pas, qu'il accable très durement: le PS est complice du capitalisme, la droite est pétainiste. Tout sauf de la dentelle!

3- Badiou critique fortement la démocratie parlementaire, qui n'a guère de vertus à ses yeux: ce régime repose sur le profit et exporte la violence par la guerre, dit-il. Comment ne pas être en désaccord! La démocratie, c'est le règne du droit, pas du profit, et la guerre a bien d'autres origines. La démocratie parlementaire est un système politique minoritaire dans le monde. Badiou l'attaque, il faut le défendre.

4- Badiou reste très indulgent envers les régimes autrefois communistes. Il regrette certes leurs moyens violents, centralisés, mais défend leur projet: la suppression de la propriété privée. Que cet objectif ait produit un totalitarisme inédit, ça ne semble pas fondamentalement le déranger, il n'y pense même pas. Badiou croit malin d'adresser un coup de chapeau à Staline, sous le prétexte que celui-ci aurait fait peur aux capitalistes. Non, c'est à son peuple que ce tyran a fait peur, en le plongeant dans la terreur.

Il est stupéfiant de constater que cet intellectuel, avec son néo-maoïsme inquiétant, fascine une partie de la gauche radicale. C'est d'autant plus préoccupant que Badiou n'est pas n'importe qui, mais un chercheur de haute volée, un philosophe de qualité. Dans le même genre, mais en même temps très différent, je préfère de très loin un autre philosophe, Toni Negri, qui lui aussi pense à une nouvelle radicalité, réfléchit à la spontanéité de l'action politique contre le conservatisme des organisations et institutions.

Mais Negri ne critique pas la démocratie, ne justifie pas le communisme, s'inscrit dans une perspective plus positive, plus lumineuse, plus prometteuse, dont la social-démocratie peut faire son miel. J'ajouterais, clin d'oeil professionnel, que Badiou est platonicien et Negri spinoziste, ce qui est pour moi une raison supplémentaire de soutenir le second et pas le premier...


Bonne matinée.

30 janvier 2009

Les voeux du PCF.

Bonsoir à toutes et à tous.

Il y a une semaine, c'était les voeux du Conseil Général de l'Aisne, une cérémonie très socialiste. Ce soir, c'était les voeux de la section communiste de Saint-Quentin, dans leur local, rue de la Pomme Rouge (ça ne s'invente pas!). Depuis dix ans, quand je peux, j'y vais, j'en suis. Jean-Luc, Corinne et les autres, je les connais tous et je les aime bien, mieux parfois que mes camarades socialistes (je sais, ce n'est pas bien, mais que voulez-vous, je n'ai jamais eu le sens de la famille). Le communisme, pourtant, ce n'est pas mon truc, vous le savez bien. Et le communisme tendance Gremetz, encore moins... Alors quoi? Et pourquoi cette attirance qui me conduit toujours à revenir vers eux, dont je ne partage pas, c'est le moins qu'on puisse dire, les idées?

D'abord parce qu'ils sont sympas, francs, directs. Avec eux, je m'amuse. Ceux d'entre eux qui me liront sauront ce que je veux dire. Il y a chez eux une "convivialité" (mot horrible, très à la mode, que j'emploie ici par commodité) que je ne vois dans aucun autre milieu politique (mais il est vrai que je n'ai jamais fréquenté les bals de l'UMP). En fait, ce qui me plaît avec les communiste, c'est cette ambiance populaire, sans chichi, à la bonne franquette.

Et puis, ce sont des militants, des vrais, comme on n'en fait plus, prêts à se lever le matin pour distribuer devant l'usine MBK, à se coucher tard le soir après avoir collé des affiches. Ne souriez pas, il en faut, des hommes et des femmes de cette trempe, pour lutter contre la droite. Avec eux, je me sens bien, parfois plus dans mon monde qu'avec des socialistes. Parce que les communistes sont aussi convaincus que moi, social-démocrate, je le suis. Au-delà des fortes divergences idéologiques, c'est ça qui nous rapproche. Comme eux, je ne cherche pas le pouvoir. Les uns et les autres, nous nous battons pour des idées, mêmes si ce ne sont pas les mêmes.

J'ai beau contester le communisme, je suis obligé de reconnaître que leur ancrage est populaire. Et quand on est de gauche, c'est quand même essentiel. Le PS, c'est de la petite bourgeoisie, fort sympathique, et politiquement dans le vrai. Mais j'aurais toujours cette dette envers les communistes: ils ne sont sans doute pas dans le vrai, mais ils sont les plus proches du peuple.

Du discours de Jean-Luc Tournay, je retiens cette résistance à la droite, aux valeurs de droite. Je retiens aussi la force de proposition: à la différence de l'extrême gauche, les communistes, depuis toujours, depuis au moins l'après-guerre, ont voulu contribuer à l'effort industriel de la France, ne se sont jamais contentés de condamner le "système". J'ai bien sûr apprécié le long passage de Jean-Luc en faveur du 3ème aéroport, combat dans lequel je me reconnais complètement.

Toute la gauche était là, sauf le PRG, toute l'extrême gauche aussi, sauf Lutte Ouvrière. Je souligne la présence discrète de Laurent Elie, représentant du MRC, qui intervient régulièrement sur ce blog (tu vois, Jean-Luc, comme tu le craignais, en voilà un que tu as oublié de citer!). Ne nous voilons pas la face: au milieu de cette assemblée, j'étais le grand perdant, celui qui a refusé l'alliance avec l'extrême gauche, celui qui souhaitait que les socialistes partent aux municipales sous leur propre drapeau, et ne fassent l'union qu'au second tour. J'ai perdu, oui, mais ai-je perdu pour toujours? Comme mes camarades communistes, je sais que l'obstination, seule, paie. Demain, plus tard, un autre jour.


Bonne soirée.

Et maintenant?

Bonjour à toutes et à tous.

Un million, deux millions, plus? Peu importe: c'était hier un immense succès des organisations syndicales. La droite intelligente le reconnaît, la droite qui finasse fait remarquer que le pays n'a pas été bloqué. Hypocrite! Le pays aurait été paralysé, elle s'en serait plainte, elle aurait protestée sur l'irresponsabilité des syndicats. Et puis, "bloqué", ça veut dire quoi? Pas besoin de tout arrêter pour montrer que le mécontentement est massif.

Que va faire, que peut faire Sarkozy? Ne rien faire, c'est politiquement dangereux, pour lui, pour le pays. La démocratie, c'est le peuple, c'est un régime qui ne tient que par le peuple. Si celui-ci est dans la rue, il faut réagir, faire quelque chose. Quand on est hyperactif comme notre président, ça ne devrait pas poser de problème.

En tant que socialiste, je lui demande quoi? Pas de devenir socialiste, de se dédire, d'autant que le peuple l'a mandaté jusqu'en 2012. Je lui propose simplement de revenir sur quelques mesures de ce qu'on appelle le "paquet fiscal", par exemple celles qui sont les plus injustes, les plus inégalitaires, celles qui avantagent, sans contrepartie, les catégories déjà privilégiées.

Ce n'est bien sûr qu'une suggestion parmi de nombreuses. En tant que syndicaliste, je lui demanderai, autre exemple, d'augmenter, d'une façon ou d'une autre, le pouvoir d'achat des catégories modestes et moyennes, ou bien de cesser les suppressions massives d'emplois dans la Fonction Publique. Ce ne sont pas les idées qui manquent. Je n'exige pas qu'il les appliquent toutes, je lui suggère seulement de faire un geste significatif, de prendre une décision concrète dans une matière qui lui est largement étrangère: la justice sociale.

En écho involontaire aux nombreuses et imposantes manifestations d'hier en France, il y a eu ce coup de colère de Barack Obama, qui a dénoncé les profits que continuent à empocher les financiers, en pleine crise mondiale, alors que l'Etat subvient à leurs difficultés. Le sentiment de l'injustice sociale, le voilà! L'argent public qui alimente le profit privé!

Attention: Obama n'est pas moraliste (il ne dit pas que l'argent, c'est mal) ni révolutionnaire (il ne conteste pas le profit); il est simplement politique, cohérent et légitimement critique: les financiers ne peuvent pas réclamer le soutien de l'Etat et poursuivre comme si de rien n'était à percevoir des primes colossales que rien ne justifie.

Le problème avec Sarkozy, c'est qu'il n'a pas pris la mesure réelle de ce qui est en train de se passer. Ce capitalisme qui est en crise, il veut le "refonder" alors qu'il faudrait le réformer, le transformer. Sur des marécages, on peut "refonder" autant qu'on voudra, la maison ne pourra que s'effondrer.


Bon après-midi.

29 janvier 2009

Une belle manif.

Bonsoir à toutes et à tous.

Une bien belle manif, cet après-midi, dans les rues de Saint-Quentin. Beaucoup de monde, d'autant que le rassemblement n'était pas départemental. La droite minimisera, c'est sûr, c'est normal. Les chiffres, toujours manipulables, on leur fait dire ce qu'on veut. Moi, j'en reste aux faits, à la réalité observable: quand la tête de la manif arrive en haut de la rue d'Isle, la queue est encore place du 8 octobre. Ça vaut tous les comptages. Mais pour ce coup d'oeil, il faut être un habitué. La droite, évidemment, n'est pas accoutumée à ce genre de promenade revendicative. Son seul appui, ce sont les agents des Renseignements Généraux.

Autre constat qui ne trompe pas: je parcours le cortège sans pouvoir voir ni saluer toutes les connaissances, preuve d'une participation exceptionnelle, avec tous ces visages qu'on ne voit pas d'ordinaire dans les défilés. Bon signe, très bon signe. La droite va être furax. Bertrand va tenter d'enrober ce succès dans son miel trempé de vinaigre. Mais rien n'y fera, le mouvement est là, et de fond.

Satisfaction aussi de constater le retour des socialistes dans les manifestations. Soyons précis: nous n'avons jamais été absents, mais dispersés sous les différentes bannières syndicales. Etant partout, on ne nous voyait nulle part. Le problème, c'est que les socialistes, présents, n'étaient pas visibles. Aujourd'hui, ils l'étaient, sous leurs calicots. Et ça change tout. C'est notre devoir, d'être officiellement au côté des salariés en lutte, en respectant l'indépendance des organisations professionnelles, en ne cherchant pas à les récupérer, mais en soutenant leurs revendications (c'est d'ailleurs la démarche social-démocrate traditionnelle).

Cette manifestation fera date pour une autre raison. Jusqu'à maintenant, et depuis plusieurs années, le "mouvement social" était livré à lui-même, ou bien courtisé par l'extrême gauche. Le Parti socialiste se devait de retrouver son rôle historique, celui qu'il tient dans toute social-démocratie: offrir un débouché politique au "mouvement social". C'est ce qui a été fait, par la présentation d'un "plan de relance" et le dépôt au Parlement d'une motion de censure. J'insiste: il ne s'agit pas de détourner ou canaliser des revendications sociales libres de toute attache partisane, mais de proposer une issue politique. Après tout, c'est le job d'un parti politique!


Bonne soirée.

Ségobama?

Pour en revenir à la page "Rebonds" de Libération du 21 janvier consacrée à Barack Obama, l'analyse du strauss-kahnien Olivier Ferrand était accompagnée d'une autre, celle du ségoléniste Benoît Thieulin, ancien responsable de la Net-Campagne de Royal. Les deux se recoupent très largement. Chez Thieulin, j'ai retenu ceci, également profitable pour notre PS:

1- Le tractage dans la rue est devenu obsolète. A la rigueur pour la photo dans la presse du lendemain ou pour montrer aux électeurs que les socialistes sont là... Mais ce n'est plus cette méthode qui "fait" des voix. Solution préférée? Le contact direct, l'appel téléphonique, le porte-à-porte (mais dans son quartier).

2- Les militants ne peuvent plus être recrutés parmi les bonnes volontés, ensuite lâchés en pleine nature politique, qui est comme chacun sait une jungle inhospitalière. Combien de fois ai-je vu des militants qui doutaient d'eux-mêmes, qui ne savaient pas vraiment répliquer aux attaques de la droite, qui redoutaient finalement la confrontation avec l'adversaire et la conversion des hésitants? La solution, c'est la formation, solide, et son suivi.

3- Le militantisme à la carte et affinitaire: fini le militant qui faisait n'importe quoi, qui prenait ce qu'on lui donnait à faire, sans aucun souci d'efficacité et de résultat. En vérité, il faudrait procéder à une inversion: le modèle, ça ne peut plus être le militant pur et dur, en voie de disparition, mais le sympathisant dont l'engagement est ponctuel, provisoire mais performant.

4- La préparation très en amont: la campagne d'Obama a été mise en place quatre ans avant. Je trouve totalement ahurissant qu'une campagne, par exemple locale (nationale, c'est sans doute plus compliqué), se décide, dans le meilleur des cas, dans les derniers mois. C'est carrément se condamner à la défaite! Le mal français, en la matière, c'est une sorte d'amateurisme sous couvert de fausse démocratie.

Sinon, faut-il que je m'engage à mon tour dans la petite polémique de la semaine dernière (j'aime bien laisser aux polémiques le temps de se refroidir, pour les étudier plus sereinement)? Ségolène a-t-elle inspiré Barack, au regard des méthodes que j'ai exposées dans ce billet et dans le précédent? Franchement non. L'écart entre les deux est important, nous sommes dans des dimensions incomparables. La campagne participative et électronique de Ségolène n'est qu'un pâle reflet de l'expérience américaine. Surtout, celle-ci s'enracine dans une tradition démocratique locale très forte qui n'a pas d'équivalent en France.

Hormis la forme, le contenu de campagne est lui aussi très différent. Ségolène a joué sur la corde victimaire (qu'elle reprend dans l'ouvrage paru cette semaine), alors qu'Obama était dans une stratégie beaucoup plus conquérante. Ségolène doit une partie de sa popularité à sa paradoxale critique du Parti socialiste, à son positionnement en dehors de celui-ci, tandis qu'Obama colle totalement à l'appareil démocrate. Le seul rapprochement, mais ce n'est pas rien, est dans la ligne politique, celle d'une gauche très modérée, qui parfois réutilise des thématiques conservatrices, notamment sur les questions sociétales.


Bon après-midi.

Obama chez nous.

Bonjour à toutes et à tous.

Profitons de cette journée de grève pour rattraper les lectures en retard, avant bien sûr d'aller manifester cet après-midi. L'élection d'Obama, oui, j'y reviens. Pas pour reparler de l'élection (tout le monde le fait, et très bien), mais de sa campagne. C'est peut-être ce qui m'a intéressé le plus dans l'événement. Libération du 23 janvier y revient aussi. Mon camarade Olivier Ferrand, président du think tank Terra Nova, la qualifie de "campagne révolutionnaire" et même de "plus grande campagne du XXIème siècle" (là, il va un peu loin, ce siècle ne fait que commencer...).

Ferrand, qui est allé sur place, repère quatre caractéristiques dans la campagne d'Obama:

1- Une "campagne de cause", de type caritatif, genre Téléthon, où le leader s'efface devant les militants (alors que nous croyons, vu de France, tellement marqués par le monarchisme, que le charisme d'Obama a tout fait!). Les citoyens se sont "appropriés" la campagne.

2- Les nouvelles technologies ont joué le rôle principal dans la mobilisation, les supporters ont été recrutés sur le net. En France, malgré les velléités en ce sens, nous en sommes encore loin. Moi-même, j'ai été longtemps sceptique, vieille méfiance sûrement envers la technique. C'est ce blog qui m'a converti, quand j'ai constaté, stupéfait, sa formidable (et finalement excessive!) influence.

3- Le financement populaire, qui a couvert les deux tiers de la campagne, les dons étant collectés sur le net. C'est une innovation totale, très américaine sans doute, l'argent permettant le lien et l'intégration dans la communauté militante. En France, avec le problème récurrent des cotisations, nous avons de gros progrès à faire.

4- Une campagne locale à la dimension d'un immense pays, qui joue essentiellement sur la proximité. C'est la grande leçon applicable chez nous: on ne réussit à convaincre que les proches, pas besoin d'actions militantes étrangères au terrain.

Cette campagne fortement décentralisée n'est possible que fortement encadrée, à travers une organisation pyramidale, très professionnelle. Olivier Ferrand conclut: "Obama a apporté à l'Amérique une formidable revitalisation démocratique. La France peut s'en inspirer. Elle en a besoin, tant notre système politique a vieilli". Comment ne pas être d'accord avec lui?


Bonne matinée,
bonne manif.

28 janvier 2009

Demain.

Bonsoir à toutes et à tous.

C'est demain le grand jour de la mobilisation sociale. La droite, malgré Bertrand plus chafouin que jamais, a du mal à se contenir. Génétiquement, elle craint la rue, parce qu'elle ne la contrôle pas. Sarkozy a déjà reculé devant les lycéens. Peut-il continuer? Il a le pouvoir, il saura ruser, c'est un spécialiste. Mais que pourra-t-il devant un fleuve? Car c'est toute une société qui va probablement se réveiller et se soulever, parce qu'elle ne supporte pas cet indécent hyper-présidentialisme.

Le ressort du mouvement est là, qui permet à des catégories professionnelles très dissemblables de malgré tout se retrouver côte à côte. Sarkozy a attaqué et méprisé la plupart des corps intermédiaires. Cet homme ne croit qu'en lui et à son agitation, il désespère de la société. Celle-ci, demain, va lui faire comprendre qu'elle existe, qu'elle est pleine de vitalité. Pour que Sarkozy n'ait plus que ses yeux pour pleurer...

Pour ma part, je manifesterai pour deux raisons principales:

1- D'abord protester contre ce "paquet fiscal" qu'il faut abroger, puisqu'il est le socle de la politique d'injustices, privilégiant fiscalement les catégories aisées. Justice, égalité, voilà demain ce qui sera demandé dans les cortèges.

2- Ensuite dénoncer les coupes sombres, des dizaines de milliers d'emplois supprimés dans la Fonction Publique. Les services publics sont l'armature sociale de la République, et on les affaiblit. Il faut que le gouvernement renonce à son rouleau compresseur.

J'entends certains dire qu'ils manifesteront "contre l'argent donné aux banques". Pas moi. Ce n'est pas mon angle d'attaque, ça me semble démagogique. Face à la crise financière, il fallait bien réagir, et donc se porter au secours du système bancaire. Sinon, on aurait fait comment? Et puis, cet argent n'est pas donné mais prêté, à des taux élevés. Non, j'en reste à ce que j'ai dit: justice fiscale, services publics, voilà tout ce que je demande. Voilà ce dont la droite ne veut pas entendre parler.


Bonne soirée.


Rendez-vous demain 15h00, place du 8 octobre, à St Quentin.

27 janvier 2009

Après-demain.

Bonjour à toutes et à tous.

C'est après-demain la grande manif de tous les salariés contre la politique gouvernementale. La droite balise. Raffarin choisit de minimiser: "une poussée de fièvre", dit-il. Woerth préfère culpabiliser: en ces temps de crise, il faut s'unir et pas manifester (bin voyons! Et on va manifester quand tout ira bien?). Lefebvre, porte-parole de l'UMP, menace: il veut sanctionner "l'abus du droit de grève". Marrant. Un homme de droite restera un homme de droite: faire grève, manifester, ce n'est pas dans leur culture, ça leur reste en travers la gorge.

Mais le pompon, c'est à leur chef qu'on le doit, Xavier Bertrand, très malin dans son commentaire (c'est pourquoi il a été désigné chef), plein de menteries, dont trois aussi grosses que lui:

1- Il nous explique, dans son communiqué à l'AFP, que le mouvement de jeudi sera important (jusque là, tout va bien, même si on sent le sale coup se préparer) et qu'il exprimera les craintes des salariés face à la crise mondiale et leur demande de respect (ça y est, c'est là!). Bref, Bertrand annonce d'avance que les millions de grévistes n'auront strictement rien à voir avec ni contre la politique que mène Sarkozy. Si j'étais lui, j'irais encore plus loin (plus c'est gros, mieux ça passe): je prétendrais que les manifestants de jeudi vont défiler dans les rues pour soutenir Sarkozy dans sa lutte contre le capitalisme!!! Malin, le chef...

2- Xavier Bertrand, pour son électorat de droite que dérouterait sa mansuétude, refait le coup des "otages", un grand classique de la droite. En visant implicitement le syndicat SUD, comme l'a déjà fait le chef du chef. Je ne partage pas les revendications et les méthodes de SUD, mais Sarkozy l'a bien cherché, à nous dire qu'avec lui plus personne ne se rendrait compte en France de l'existence d'une grève!

3- Dernière menterie, certes subtile puisque le chouchou devenu chef est très malin: les grévistes ne seront pas payés, nous dit-il avec un air entendu, sur le ton du bon sens et de la sagesse. Sauf que je n'ai jamais vu un gréviste payé pour avoir fait grève, moi le premier. Bertrand est pardonnable, il n'a sûrement jamais fait grève de sa vie, il ne sait pas.


Bon après-midi,
et tous prêts pour jeudi!

26 janvier 2009

Dans le vent.

Bonsoir à toutes et à tous.

On n'a parlé que de ça pendant tout le week-end. Non, pas la nomination de Xavier Bertrand à la tête de l'UMP, mais la tempête dans le sud-ouest. Son récit dans les multiples médias a pris des allures d'apocalypse. Une dame sur RTL annonçait quasiment un retour au Moyen Age, aux temps barbares. Pas d'eau, pas d'électricité, pas de chauffage, pas de train, pas de voiture, pas d'école, seulement ce mauvais vent qui soufflait fort sans qu'on sache pourquoi. Bref, plus de civilisation.

Pour une fois, l'opinion n'a pas cherché de boucs émissaires, de victimes sacrificielles. Les services publics n'ont pas été attaqués (la leçon de 1999, nous a-t-on expliqué), l'Etat n'a pas été accusé (Nicolas Sarkozy est allé sur place et s'est inquiété de l'approvisionnement en électricité). La météo n'a pas été montrée du doigt, ayant prévu la tempête quelques heures avant qu'elle n'arrive. Il y a tout de même eu huit morts.

Quand on parle de tempête, on dit, image convenue, que "les éléments se déchaînent". C'est vrai: l'eau, l'air, la terre, le feu, tout concoure, à sa façon, au dramatique événement. A tel point que nous avons déclenché la guerre, faute de s'affronter aux êtres humains: l'armée a été mobilisée. On se sent rassuré, protégé. Après la neige au début du mois, qui était glaciale, c'est le vent, aujourd'hui violent, qui nous pose des soucis.

Qu'est-ce que toutes ces réactions, parfois excessives, signifient? Que nous avons tout oublié de la nature, que nous nous faisons des illusions sur elle, qui tombent au moindre coup de vent. Non la nature n'est pas bonne, généreuse, non elle n'a aucune amitié pour nous, non elle n'est pas une harmonie dans laquelle l'homme aurait sa place. La nature est souvent cruelle, toujours puissante. Nous devons la combattre. Il faudrait s'en souvenir, ne plus jouer aux faibles. Apocalypse veut dire aussi révélation.


Bonne soirée.

La faute de Vincent Savelli.

Bonjour à toutes et à tous.

Je le lui ai dit ce matin, quand je l'ai croisé au lycée Henri-Martin, où nous travaillons tous les deux: "Vous avez commis une erreur politique". Je n'ai pas pu m'expliquer devant lui, les élèves m'attendaient, je lui ai dit que j'en ferais un billet sur mon blog. Il s'agit bien sûr de Vincent Savelli et de sa décision de quitter l'UMP, le jour même, samedi, où Xavier Bertrand accédait à la tête de ce parti.

Savelli, ce n'est pas n'importe qui dans la droite saint-quentinoise. C'est ce qu'on peut appeler un "gaulliste historique", la génération UJP, Union des Jeunes pour le Progrès, à laquelle Pierre André a aussi participé. Depuis 40 ans, Vincent Savelli est une figure locale de premier plan, très actif, plusieurs fois élu, exerçant des mandats importants, un personnage médiatique aussi, qui s'est inventé un style, avec ses cravates invraisemblables mais porteuses de messages. Cherchez, vous n'en trouverez pas beaucoup, celles ou ceux qui arrivent à ça.

Si j'étais bêtement de gauche, je me réjouirais du mauvais coup porté à la droite quand l'un des siens la quitte, et je me satisferais dans l'illusion que la gauche y gagne, ce que je ne crois pas. Non, ce que je veux maintenant vous expliquer, c'est que Vincent Savelli s'est trompé en rompant avec l'UMP. Si je tiens à cette explication, c'est aussi pour une autre raison, presque freudienne: je me sens un peu responsable du geste de Vincent Savelli. C'est moi qui est donné son numéro de portable à Jacques Trentesaux, rédacteur en chef-adjoint de L'Express, qui recherchait un "contestataire" à droite. J'ai tout de suite pensé à Savelli.

A partir de là, il y a eu ses propos très durs dans le magazine contre Xavier Bertrand et sa "semi-dictature", et tout s'est emballé. Mais je crois, sans vouloir me disculper, que Savelli, avec ou sans moi, aurait un jour ou l'autre franchi le pas de la dissidence, dont je vous dis enfin pourquoi elle est une faute politique:

1- Vincent Savelli, parti de l'UMP, se retrouve seul. Qui va le suivre? Je ne vois pas qui. Ce n'est pas avec son score devant les instances départementales de son ex parti qu'il pourra peser. Or on ne fait pas de politique dans la solitude.

2- Quitter l'UMP, pourquoi pas, mais pour faire quoi? Rejoindre une autre formation? Ce pourrait être une solution, une nouvelle perspective politique, mais Vincent Savelli la refuse. La gauche, il n'en veut évidemment pas, le MoDem, ce n'est pas non plus son truc. Que lui reste-t-il? Le récent parti de Dupont-Aignan? Non, pas assez européen pour lui. Bref, rien, plus rien pour mon collègue.

3- Ce départ n'est pas politiquement très clair, et c'est peut-être le plus embêtant. Pourquoi finalement Vincent Savelli s'en va? Ses explications donnent l'impression d'un rejet personnel de Xavier Bertrand, jugé ambitieux, inconstant et arriviste. Franchement, s'il fallait s'arrêter à ça, qui d'entre nous feraient encore de la politique? Des Bertrand, il y en a partout, y compris au Parti socialiste. Ce n'est pas une raison suffisante pour quitter nos organisations. La faute politique de Vincent politique, c'est qu'il y a plus du personnel que du politique dans sa décision, qu'il prend le jour même où Bertrand devient le patron de l'UMP, ce qui veut tout dire...

4- J'ai de la sympathie pour Vincent Savelli: comme moi, c'est un militant, quelqu'un qui a son franc parler (sauf que moi, je suis discipliné et je ne quitterai jamais le PS) et qui ne se courbe pas devant les puissants. Je partage avec lui ses combats pour l'euthanasie et pour le 3ème aéroport. Pour le reste, nous sommes en total désaccord. C'est un homme de droite, et de la droite la plus traditionnelle, parfois même plus à droite que Xavier Bertrand. Comment pourrais-je, par exemple, accepter sa vision de la franc-maçonnerie, très polémique et injuste, qu'il met en avant pour critiquer Bertrand?

Sur celui-ci et son engagement maçonnique, je ne veux pas préjuger de sa sincérité. Je constate simplement que la politique qu'il mène, les positions qu'il prend ne me semblent pas spécialement marquées par l'influence maçonnique. Je sais aussi, parce que les obédiences le déplorent, que certains frères sont moins attirés par la quête symbolique que par la constitution d'un utile carnet d'adresses. Ce n'est pas un crime, c'est même une forme d'habileté, dont je ne sais pas si le chef de la droite y a, autrefois, succombé. Ce que je sais, c'est que Vincent Savelli a tort d'attaquer sur ce plan-là.


Bon après-midi.

25 janvier 2009

Vrai-faux réformateur.

Bonsoir à toutes et à tous.

Xavier Bertrand est devenu hier le secrétaire général de l'UMP. Puisque je suis républicain et poli, je lui adresse tout d'abord mes félicitations. Puisque je suis aussi Saint-Quentinois, je me permets de lui faire remarquer qu'il ne pourra plus, si cette fiction pouvait encore subsister, se présenter comme un aimable gestionnaire local étranger aux clivages idéologiques: le voilà chef du premier parti politique de droite. Puisque enfin je suis socialiste, dans l'opposition (plus très longtemps je l'espère), je me dois d'accueillir cette nomination à ma façon, en rappelant le bilan du déjà ancien ministre.

Ce bilan, je ne vais pas le chercher dans une brochure partisane, encore moins socialiste. Trop facile. Ce ne serait pas du jeu, comme disent les enfants. Je le trouve, ce bilan, très objectivement exposé par deux éminents journalistes, Christophe Jakubyszyn et Muriel Pleynet, dans cet ouvrage qui en annonce d'autres, et que l'intéressé n'a pas apprécié: il s'agit bien sûr du "Chouchou". S'il vous manque du temps pour le lire, je vous conseille vivement d'aller au chapitre XI, de ne lire que lui (27 pages sur 257, je vous facilite le travail!). Son titre: "Le vrai-faux réformateur". Xavier Bertrand au gouvernement, secrétaire d'Etat ou ministre, à la Santé ou au Travail, c'est cinq grandes réformes. Voyons un peu ça:

1- L'équilibre de l'assurance-maladie: en 2004, le déficit est de 12 milliards d'euros. Bertrand promet alors le retour à l'équilibre pour 2007. Résultat cette année-là: 9,4 milliards d'euros de déficit. Objectif raté, en touchant à un principe de la Sécurité Sociale, la gratuité: un euro devra être déboursé par feuille de soins. Petit sacrifice, petit résultat. Pas convaincant du tout.

2- L'interdiction du tabac: Evin y avait songé, Bertrand l'a réalisée, dans tous les lieux publics. C'est la seule réforme pour laquelle il faut saluer le ministre. Son utilité sanitaire n'est contestée pas personne, les modalités d'application sont certes toujours discutables, mais le fait est là: une bonne mesure a été non seulement adoptée mais appliquée. Il a fallu à Bertrand un certain courage politique, son propre camp, au niveau le plus élevé, n'était pas entièrement convaincu par cette radicalité. Il l'a fait!

3- Le service minimum: Xavier Bertrand l'a instauré dans les transports. Mais il existait déjà. Et celui qu'il met en place n'a pas les moyens véritables de fonctionner, on l'a encore constaté récemment. Ceci dit, le but n'est pas celui-là, c'est de décourager la grève, puisque le salarié doit informer sa direction 48 heures à l'avance, et l'échelonnement de la retenue de salaire est supprimé. Comme Sarkozy, Bertrand veut des grèves indolores et invisibles. Un rêve d'homme de droite qui ne dort pas assez!

4- Les régimes spéciaux de retraite: Xavier Bertrand ne les a pas supprimés (tout comme les 35 heures), il a harmonisé les durées de cotisations avec la Fonction Publique. Symboliquement, il réalise là encore un point idéologique très fort de la droite. Mais le bilan chiffré de cette réforme est aujourd'hui impossible à dresser.

5- Les 35 heures: elles restent la durée légale, mais chaque entreprise est libre de faire ce qu'elle veut. Bref, c'est politiquement illisible. Pour les 35 heures, on les garde, éventuellement on les adapte. Contre, on les supprime. Bertrand ne choisit pas et complique tout.

Le bilan de Xavier Bertrand est-il mauvais? Non, pas du tout. Pour un homme de droite, c'est même un bilan plutôt bon, à quelques hésitations près. C'est surtout un bilan marqué d'une grande habileté, vertu principale chez Bertrand. Mais pour un homme de gauche, aucun doute: c'est un bilan à combattre.


Bonne soirée.

Tout nouveau tout beau.

Bonjour à toutes et à tous.

Certains, le dimanche matin, lisent le missel. Moi, c'est la presse, les articles que je n'ai pas eu le temps de consulter dans la semaine. Ainsi ce papier paru dans Libération de mercredi, en dernière page, dans la rubrique "portrait", consacrée à Leïla Shaibi, une jeune femme que je ne connaissais pas. Qui est-elle? Ce qu'on appelle une "nouvelle militante"*. En quoi consiste cette jeune génération politique? Quatre caractéristiques:

1- La dérision: Shaibi a fondé un mouvement au nom étrange, l'Appel et la pioche, pour "enterrer la faucille et le marteau", au profit d'une nouvelle radicalité qui se substitue à l'ancienne.

2- L'activisme: le but est de lutter contre "la vie chère" en organisant des pique-niques sauvages dans les supermarchés, en se servant dans les rayons, bien sûr sans payer.

3- La dimension médiatique: tout action politique de ce genre devient un événement répercuté par les médias et programmé pour les médias.

4- Le zapping: "On ne s'engage pas corps et âme. Tout se fait au coup par coup. Dans six mois, ça nous aura saoulés", explique Leïla Shaibi, pour justifier la spontanéité et la confiance.

Je ne doute pas que ces "nouveaux militants" seront ceux de demain, qu'ils sont donc des précurseurs. A ce titre, il faut observer de près ce qui se passe, et si possible s'en inspirer. Mais, en tant qu'ancien militant, j'ai des questions et des doutes:

a- Le militantisme traditionnel était sérieux et même austère. Un peu d'humour ne fait pas de mal, mais j'ai tendance à croire que la politique ne s'y prête pas trop, sinon au risque du malentendu, car l'humour est souvent sujet à diverses interprétations.

b- L'activisme, pendant longtemps, a été dénoncé comme étant un gauchisme qui aurait mal tourné. Le terme d'ailleurs est péjoratif, mais aujourd'hui revendiqué. Sarkozy lui-même a un côté activiste. L'action comme finalité de la politique, je n'y crois pas: faire oui, mais agir c'est autre chose. Des gens qui agissent, j'en connais pas mal; mais font-ils quelque chose? Pas nécessairement.

c- Les médias, c'est important, et ce n'est pas moi qui dirais le contraire. Mais le tout médiatique n'est pas bon. Et puis, une radicalité qui se moule dans la logique médiatique d'une société qu'elle est censée dénoncer, ça m'interroge...

d- Le zapping, je veux bien. Moi-même j'aime la diversité des initiatives. Mais faire quelque chose sur un coup de tête, parce que ça nous "branche", non, ce n'est pas concevable, l'action politique exige la durée.


Nouveaux et anciens militants,
bon dimanche.


* "Jeudi noir ou les Nouveaux militants", de Simon Cottin-Marx.

24 janvier 2009

Un maçon qui déçoit.

Bonsoir à toutes et à tous.

Je suis allé écouter le Grand Maître du Grand Orient de France, Pierre Lambicchi, qui donnait cet après-midi une conférence sur "Dépendance et fin de vie", à la Maison des Arts et Loisirs de Laon. J'y suis allé parce qu'une manifestation maçonnique est toujours profitable et parce que le sujet m'intéressait tout particulièrement (j'ai consacré, pendant les vacances de Noël, plusieurs billets à l'euthanasie, je prépare une réunion publique sur ce thème).

Autant le dire tout de suite: j'ai été déçu. Je n'ai pas retrouvé, dans l'intervention du Grand Maître, la profondeur maçonnique qui pouvait éclairer la question. Je ne dis pas que c'était inintéressant, loin de là; je dis que ça n'était pas formidable. Et puis, la sonorisation rendait péniblement audible le propos et j'avais la lumière de deux projecteurs en pleine gueule. Pierre Lambicchi s'exprime sans charisme, ne donne pas de souffle à sa réflexion. J'ai vu et entendu un ancien Grand Maître, Alain Bauer: ça dépotait!

L'exposé souffrait d'un manque de construction. De quoi exactement l'orateur voulait-il nous entretenir? Je crois que la planche péchait déjà par là, son imprécision, sa dispersion. Car la dépendance, la fin de vie et l'euthanasie sont trois choses différentes. Il n'a presque pas été question de la troisième (alors que je venais pour ça!), il a surtout été abordé le problème économique et social de la dépendance (les soins aux personnes très âgées ou très malades).

Pourtant, la conférence avait bien commencé, en évoquant la bio-éthique, la nécessité de légiférer, l'influence discutable des religions, le droit à la mort comme droit de l'homme, la tartufferie de la loi Leonetti. Puis le commentaire s'est orienté vers la dépendance, qui est philosophiquement moins cruciale que l'euthanasie, dont le mot n'a été pratiquement pas prononcé.

Oserais-je une explication? Même les maçons prennent cette question avec précaution, enveloppent l'euthanasie dans le problème plus général (et pourtant complètement différent) des soins palliatifs. Pour ne pas heurter les consciences, pour faire progresser doucement les mentalités? Peut-être. C'est une divergence que j'ai avec la méthode maçonnique, trop tranquille à mon goût: pour penser, il faut provoquer.


Bonne soirée.

La comédie humaine.

Je suis allé aux voeux du président du Conseil général de l'Aisne, hier soir à Soissons. A côté de la cérémonie du sénateur-maire de Saint-Quentin, offensive, polémique, très politique, le discours d'Yves Daudigny est très sage, sans aspérité, presque bon enfant, un bilan de la politique départementale, pas de pique, pas de coup d'éclat. Eh oui, Saint-Quentin, c'est un peu "Dallas", son univers impitoyable. On s'étonne parfois de mes saillies, de mes réactions vives, écrites ou orales. Que voulez-vous, je suis de Saint-Quentin! Pierre André et Xavier Bertrand ne sont pas des enfants de choeur et je n'aime pas porter les burettes. Ma ville est une jungle urbaine, sa politique aussi.

Revenons à Soissons. Bonne idée du Conseil général d'avoir délocalisé sa présentation des voeux: pourquoi toujours Laon? Soissons est tout aussi centrale. Et puis, la municipalité est socialiste. Tant qu'à faire... Pas mal de gens de gauche dans l'assistance, élus, responsables d'associations. C'est marrant, ce genre de rencontre: au bout d'une heure ou deux, cocktails aidant, les langues se délient, les conversations deviennent moins conventionnelles, la dimension officielle, protocolaire, guindée, s'estompe. On apprend plein de choses, politiques et privées, les unes et les autres bien souvent s'entremêlant.

Mais chut! Je ne dirais rien, vous ne saurez pas. D'abord parce que j'aurais trop à dire et que je ne veux pas être bavard, ensuite ce que j'aurais à dire serait parfois aussi explosif que certains cocktails qu'on nous a servis, enfin et surtout parce que je ne suis pas sûr que tout ça soit fondamentalement intéressant. Mais c'est amusant à voir et à attendre.

De véritables chorégraphies s'organisent. Il y a ceux qui viennent pour voir et qui regardent partout, il y a ceux qui sont là pour être vus et qui font semblant de ne regarder personne, il y a les virtuoses qui font les deux. Il y a ceux qui font tout pour en éviter d'autres, d'autres qui font tout pour en rencontrer certains. Il y a ceux qui restent sur place, attendant qu'on vienne les saluer, il y a ceux, comme moi, qui sont plutôt mobiles, allant d'un groupe à l'autre pour être certains de voir à peu près tout le monde. Sauf que j'ai raté les maires de Soissons et Laon! Nobody is perfect.

Sinon, tout cela est moins léger qu'il n'y paraît. A bien réfléchir, les individus ont peu d'occasions de se rencontrer. Il y a bien sûr le téléphone et l'internet. Mais la rencontre physique, c'est tout de même autre chose, irremplaçable. Mine de rien, sans le vouloir, sans forcer, j'ai mis hier vaguement en route deux ou trois projets, au milieu d'échanges qui n'y prédisposaient pas nécessairement. On verra bien sûr la suite, mais des voeux sont faits aussi pour ça.

Pas de traversée triomphale de la salle sous les flashes des photographes, comme Pierre André, suivi à vingt centimètres par Xavier Bertrand, savent si bien les orchestrer. La foule mais pas de bain de foule. C'est plus modeste, presque intime. Les officiels vont de groupe en groupe. Repérer qui n'est pas là est peut-être plus important que savoir qui est là. Je suis complètement présent à ce qui se passe et en même temps, paradoxalement, très étranger.

Un peu comme Socrate dans le Banquet de Platon: il boit avec les autres sans jamais être ivre, il se laisse frôler par les danseuses sans jamais se laisser séduire. Mais je n'ai pas énormément bu hier (il y avait la route) et je n'ai pas remarqué de femmes recherchant mon contact. En rentrant, avant de m'endormir, j'ai relu quelques pages de Balzac, La Comédie humaine. Mieux vaut ça, après tout, que la tragédie humaine.


Bon après-midi.

Objectif centre gauche.

Bonjour à toutes et à tous.

La scène politique saint-quentinoise bouge un peu ces derniers temps. Le PS a tenu une conférence de presse il y a une semaine, le PCF a organisé un rassemblement pour le Proche Orient et présentera ses voeux la semaine prochaine, le NPA s'installe, avec un concert, un débat sur les services publics et un prochain sur l'école, Lutte Ouvrière étend la vente de son journal et de ses distributions de tracts, les lambertistes ne font rien de particulier puisqu'ils militent constamment.

Qui manquent à l'appel? Les Verts, malgré leur présence au Conseil municipal, ne proposent aucune manifestation particulière. Le départ du conseiller régional Franck Delattre les a sans doute privés d'un représentant de poids. Le PRG, absent, lui, du Conseil municipal, n'a jamais eu une véritable existence politique à Saint-Quentin ces dernières années. Tout ça m'inquiète. Qu'est-ce que ça peut bien faire à un socialiste, me direz-vous? Si je n'étais pas dans une stratégie de conquête municipale, non, je ne m'en préoccuperais pas plus que ça. Mais ça n'est pas le cas.

La gauche ne pourra l'emporter à Saint-Quentin, c'est une banalité de le rappeler, que si toutes ses sensibilités sont rassemblées, chacune apportant ses forces à la victoire commune. Or, notre centre gauche est à découvert. Les élections municipales ont déplacé notre axe politique vers la gauche de la gauche. C'est un choix, que j'ai contesté, dont je ne discute plus puisque telle est la ligne qui s'impose désormais à tous, et pour six ans. Mais je constate que l'espace électoral, au centre gauche, n'est occupé par personne, et que la politique, comme la nature, a horreur du vide.

Normalement, c'est le PRG et les Verts qui pourraient s'installer dans ce créneau, ancrer à gauche l'électorat progressiste modéré. Ce n'est pas le cas, on vient de le voir. Or, il n'y a pas que la gauche qui bouge ces derniers temps à Saint-Quentin, il y a aussi le MoDem. Aux dernières législatives, un parachutage n'avait pas convaincu l'électorat. Monique Ryo, première adjointe, aurait pu donner de la crédibilité au parti de Bayrou; elle a préféré rejoindre le Nouveau Centre. Aujourd'hui, c'est avec des Saint-Quentinois du cru que le MoDem se met en place. Avec des chances de réussir?

C'est ce qui m'inquiète. Le MoDem pourrait, à Saint-Quentin, s'emparer de ce centre gauche, comme Bayrou l'a fait au niveau national lors des dernières présidentielles. Entre bourgeoisie UMP et catégories sociales radicalisées, il y a une marge politique, sociologique et donc électorale en déshérence. Une partie du centre gauche a certes déjà été récupérée par Pierre André (anciens radicaux de gauche, ex-MRC, socialistes réformistes). Mais une autre partie restera toujours rétive à adhérer à une équipe municipale aussi engagée à droite, avec la présence du secrétaire général de l'UMP. Faute de l'absorber, il faut la neutraliser, la vitrifier, geler cet électorat, le rendre indisponible à la gauche classique.

Le MoDem saint-quentinois est-il sous influence de la droite? Parmi ses animateurs, il y a Stéphane Monnoyer, ancien MPF, longtemps proche d'Alexis Grandin aujourd'hui maire-adjoint, Paul Gironde, conseiller municipal. Jean-Robert Boutreux, écologiste actif, est aussi de l'aventure. On comprend mieux la configuration, la nasse électorale se prépare. Objectif centre gauche! Au profit de la droite. L'avenir dira ce qu'il en sera de cette opération, dont les promoteurs assurent qu'elle regroupe pour le moment une trentaine d'adhérents. C'est beaucoup plus inquiétant, pour le PS, que la constitution du NPA.


Bonne matinée.

23 janvier 2009

Une fois, deux fois.

Ça pourrait n'être qu'un détail, une anecdote, comme on en trouve beaucoup en marge des grands événements. C'est à mon avis plus et mieux que ça, une indication, une révélation sur la nature profonde de la démocratie américaine. Je veux parler, vous l'avez peut-être deviné, de la répétition du serment d'Obama à défendre la Constitution, une première fois raté. Pas pour grand-chose, et pas par sa faute: le magistrat devant lequel il prêtait serment s'est trompé, il a déplacé un mot, "fidèlement". Le sens n'en était absolument pas altéré, mais il a fallu quand même recommencer. Incroyable, non?

Obama s'est plié à l'exercice avec décontraction, s'amusant de ce couac institutionnel, qui en dit cependant long sur cette immense démocratie, qui ne plaisante pas avec les serments, qui ne sont pas perçus ici comme des formalités mais des engagements solennels, dans lesquels aucun mot ne doit déroger à l'ordre des phrases. Imaginerait-on pareil incident en France? Je ne crois pas. La démocratie américaine est scrupuleuse quand il s'agit de la loi, du droit. La démocratie française est moins juridique, plus politique. Je ne sais laquelle préférer, de ces deux grandes Républiques. Un mixte serait peut-être préférable, idéal.

Ce n'est pas, paraît-il, la première fois que se produit cette perturbation, et on a connu pire dans la confusion. Mais il semblerait que la reprise du serment soit inédite (à vérifier). Toujours est-il qu'on peut s'interroger sur le lapsus. En buttant sur "fidèlement", le juge n'a t-il pas laissé parler ce satané inconscient, qui joue des tours aussi bien à un psychisme américain qu'européen. L'élection d'un noir à la tête de l'Amérique n'est-elle pas, dans ce pays fortement marqué par le racisme, une forme de traumatisme, auquel l'inconscient se fait difficilement? Que la "fidélité" d'Obama envers les Etats-Unis en fasse les frais, malgré tous ses efforts pour se présenter comme un bon Américain, c'est une interprétation légère, que je vous soumets cependant.


Bonne fin d'après-midi.

Le cas Malek.

Bonjour à toutes et à tous.

J'aime beaucoup Malek Boutih. Comme moi, il a fait ses classes politiques à SOS-Racisme au milieu des années 80 (voir mon billet d'hier sur "Les heighties"). Ce n'est pas un cacique ou un notable du PS, il ne parle pas la langue de velours de certains cadres et élus, il a son franc parler, il dit ce qu'il pense, il ne s'encombre pas de préjugés. Je l'aime surtout pour ça. C'est une personnalité nouvelle.

Pourtant, je m'interroge sur ses récentes déclarations, qui ressemblent à une offre de service au gouvernement. En aucune façon (ce serait malhonnête) je n'associe Malek à ceux des nôtres, quelques-uns, quelques rares, qui ont rejoint le gouvernement ou une équipe municipale. D'autant que la proposition lui a été faite, qu'il aurait pu occuper un ministère: il a dit non, il a eu raison.

Mais il veut tout de même quelque chose, autre chose, la présidence de la HALDE par exemple (c'est lui qui l'a confessé). Je le comprends: faire de la politique et ne pouvoir rien faire, ce n'est pas une vie (politique). L'ambition est une grande et belle vertu, il en faut, et une très forte, en politique. J'apprécie que Malek en fasse part, ouvertement. C'est plus honnête que ceux qui affirment n'être "candidats à rien" parce qu'en vérité ils sont candidats à tout et à n'importe quoi (j'en connais un paquet...).

Ceci dit, je suis un peu gêné. D'abord parce que la nomination de Malek à une haute responsabilité de la République nous priverait, au Parti socialiste, d'un camarade de talent. Il en faut tout de même quelques-uns pour s'opposer à la droite! Ils ne peuvent pas tous partir vers d'autres horizons. Je pense aussi, bien évidemment, à mon cher Strauss. Je suis heureux pour lui, pour la France, pour le monde, qu'il soit allé là-bas, à Washington, à la tête du FMI. Mais je suis triste pour mon courant, pour mon parti, pour la gauche. Moscovici nous aurait-il quittés pour rejoindre Delanoë si DSK était resté? Je ne pense pas.

Ensuite, ma gêne, plus profondément, vient de ce que révèle cette intention de Malek. On recherche un poste auprès des autres quand on sait qu'on n'est pas près d'en obtenir avec les siens. La démarche de Malek, complètement légitime, signifie aussi qu'il ne croit pas à un retour rapide de la gauche à la tête de l'Etat. Sinon il attendrait. C'est surtout cette implication-là qui m'embarrasse.


Bonne matinée.

22 janvier 2009

Vive la vélorution!

Bonsoir à toutes et à tous.

Lire un livre en une heure et qui vous fait réfléchir des heures, c'est rare mais ça existe. Et je m'en réjouis, parce que j'en ai marre des bouquins bavards de 400-500 pages qui mobilisent au moins quinze jours de votre existence. L' "Eloge de la bicyclette" de Marc Augé, 88 pages, chez Manuels Payot, paru en 2008, est un vrai petit régal. C'est bourré d'idées, c'est très politique, malgré le titre. Je suis en terrain connu: en 2005, lors de l'étape du Tour de France à Saint-Quentin, j'avais organisé un après-midi théâtro-philosophico-culturel autour du vélo.

Le vélo! Il a été pendant longtemps le symbole de la classe ouvrière, qui l'enfourchait pour aller à l'usine. La voiture, c'était pour les cadres et le patron. Aujourd'hui, c'est fini: le bobo s'entiche du vélo et l'ouvrier veut sa bagnole sur le parking, pour faire la nique au patron (voyez un peu où va se nicher la lutte des classes!).

Le vélo, c'est aussi l'enfance, plus exactement le passage à l'adolescence. On a oublié la révolution qu'a entraînée dans nos vies notre première bicyclette: terminé le parcours à pattes, avec les pédales on se déplace, on devient autonome, on va loin. Mon premier vélo, je l'ai eu à douze ans, un cadeau de communion, avec un beau stylo, un appareil-photo Polaroïd et une montre de plongée (alors que je ne sais même pas nager!). Je l'ai gardé quinze ans, puis il s'est cassé dans un accident quand j'étais facteur à Pantin.

Augé, qui est l'un des sociologues français les plus originaux, fait remarquer que le vélo est l'une des rares activités que l'usage du téléphone portable n'a pas pollué. On y reste soi-même, dans l'instant présent de l'effort et des paysages. En parlant de paysages, c'est ce qu'a fait découvrir le Tour de France quand la télévision s'en est emparée. Après la classe ouvrière et l'enfance, le vélo, c'est la France!

Et puis, il y a la révolution bourgeoise, boboïste, du Vélib', à laquelle j'ai personnellement assisté, étant à Paris en août 2007, un peu comme si j'avais vu la prise de la Bastille en direct (reportez-vous aux archives de ce blog, à cette date). C'est là où le vélo devient politique, où son utilisation subvertit l'organisation de la cité. Je vous cite Augé, p. 52:

"L'enjeu du recours à la bicyclette n'est donc pas mince. Il est de savoir si, face à la montée d'un urbanisme galopant qui menace de réduire la ville ancienne à une coquille vide, de la transformer en décor pour touristes ou en musée de plein air, quelque chose peut lui être restitué de sa dimension symbolique et de sa vocation initiale à favoriser les rencontres les plus imprévues".

Bref, la bicyclette est un enjeu de civilisation, rien moins que ça! Dans son chapitre 3, intitulé "L'utopie", Marc Augé se lance dans la description d'une société transformée par le vélo, le cyclisme devenant pour lui la 3ème voie entre le libéralisme et le socialisme (p. 80)! Et un peu plus loin (p. 86), il va encore plus loin, le vélo prenant quasiment une dimension métaphysique: "Je pédale, donc je suis". C'est lui qui le dit!

La bicyclette devient une expérience philosophique, une épreuve existentielle, qui met en jeu la responsabilité individuelle et notre conscience de l'espace, du temps et de la réalité. Avec ces derniers mots qui achèvent le livre: "Le cyclisme est un humaniste". Pas de doute, Marc Augé est le Jean-Paul Sartre du vélo, après en avoir été le Descartes!


Bonne soirée.

Les heighties.

Bonjour à toutes et à tous.

Pendant longtemps, j'ai cru que les années 1965-1975 avaient été charnière entre deux mondes, l'ancien et le contemporain. A ma grande déception personnelle, puisque je n'ai pas vraiment connu cette période, étant enfant, et ayant eu 20 ans dans la décennie suivante. Aujourd'hui, je révise mon jugement. Et si le basculement de notre société dans la modernité s'était produit dans les années 1975-1985? Et si elles avaient été révolutionnaires et pas, comme je les ai vécues, réactionnaires (même si j'avais quelque raison de le penser)?

Qu'est-ce qui me fait maintenant penser ça? D'abord une émission sur les années 1980, sur France 3, le 29 décembre, dont je n'ai pas eu encore le temps de vous parler et qui m'a remis, avec la distance, plein de choses en tête. Et puis une lecture, celle de "La France morcelée", de Jean-Pierre Le Goff, qui écrit ceci, p. 16, en poche, chez Filio: "la seconde moitié des années 70 et dans les années 80, moment charnière où les changements en oeuvre dans la société ont déstabilisé nombre de repères collectifs antérieurs".

Les années 80 surtout sont celles des premières fois, heureuses et malheureuses:

1- Les premières radios et des télés privées. Ce monde des médias qui influence tant l'opinion s'est mis en place à ce moment-là.

2- La première femme à présenter un journal télévisé, Christine Ockrent. Une grande victoire du féminisme, apparu dans la décennie précédente.

3- L'apparition du sida, qui va limiter la libération sexuelle, réintroduire du tragique dans une émancipation jusque là heureuse.

4- La réapparition de l'extrême droite, sous les traits du soudard Le Pen, une famille politique qui était marginalisée depuis la Libération et à laquelle plus personne ne croyait.

Les valeurs d'aujourd'hui sont apparues à cette époque, les heighties:

a- L'argent, que je croyais définitivement dévalué après 1968, qui revient alors en force, avec Tapie et Fabius pour défendre les vertus de l'entreprise et de "la France qui gagne" (de l'argent bien sûr).

b- Le sport, que je croyais définitivement moqué avec l'insulte de Coluche ("sportif!") et qui devient à la mode, encore aujourd'hui avec notre président qui fait son jogging.

c- Le sexe, que le "carré blanc" des années 70 bannissait de la télévision, envahit le petit écran dans les années 80.

e- La dérision, par laquelle des émissions de plus en plus nombreuses vont s'attaquer aux grands et aux petits de ce monde.

Je comprends mieux pourquoi ces années 75-85 m'ont déplu: elles rompaient avec l'héritage soixante-huitard (l'extrême droite, le sport, l'argent). Mais elles sont ambivalentes, puisqu'elles poursuivaient et accomplissaient une partie de l'inspiration contestataire (les médias libérés, la femme promue, le sexe sans complexe, la dérision généralisée).


Bon après-midi.

21 janvier 2009

Un événement américain.

L'investiture de Barack Obama a été essentiellement un événement américain. Qu'est-ce que j'entends par là? Que tout, dans le déroulement de la cérémonie, l'usage des symboles, le contenu du discours s'adressait à l'Amérique et aux Américains. Or, le monde entier, y compris la France, pourtant réputée pour son vieux fond d'anti-américanisme, a été fasciné, toute la journée d'hier, par un événement qui n'était pas le sien. Je me demande même si, chez nous, nous n'en aurions pas fait autant pour un président français nouvellement élu.

Bien sûr, l'élection d'un métis à la tête d'une puissance fortement marquée par le racisme est, pour elle, un extraordinaire événement. Mais pas vraiment pour la République française, universaliste, qui a toujours répugné, à tort ou à raison, au communautarisme. Bien sûr ce président américain aura une influence sur le monde. Mais est-il bon de placer notre avenir dans les décisions d'un autre pays, aussi positives soient-elles? En regardant, fascinés, l'Amérique, c'est l'Europe qu'on ne regarde plus et le multilatéralisme qu'on oublie.

Certains se sont étonnés que le nouveau président ne disent rien, ces derniers jours, de ce qui se passe à Gaza. Mais que croient-ils? Que l'opinion américaine se passionne pour cela? Evidemment non, pas plus que l'opinion française ne s'est émue en août dernier que la Russie envahisse la Géorgie (qui s'en souvient?). Obama n'est pas un citoyen du monde, il est moins ouvert à l'Europe que Clinton, il parle en héros américain. Son discours s'est référé à Dieu et à la Bible, à l'histoire américaine, il a appelé à "la refondation de l'Amérique", il a rappelé que "notre nation est en guerre" et que "nous sommes prêts à jouer à nouveau notre rôle dirigeant".

Comme toute la gauche, je me réjouis de la tonalité de son discours économique et social, cependant moins à gauche, par exemple sur la santé et sa protection, qu'Hillary Clinton. Je suis satisfait d'entendre que Guatanamo va sans doute fermer et que les troupes vont quitter l'Irak. Mais ça ne modifie substantiellement pas le fond de son message, lors de cette cérémonie où aucun chef d'Etat étranger n'était invité. Preuve s'il en est que l'Amérique s'est adressée à elle-même, ce qui est bien normal. Mais ce qui est moins normal, c'est que les médias, les classes dirigeantes et les opinions publiques du monde entier se soient à ce point, excessif, démesuré, sentis concernés et mobilisés. C'est à mon avis la première fois depuis je ne sais plus quand, et peut-être comme jamais.


Bonne nuit américaine.

Article 13.

Bonsoir à toutes et à tous.

Avez-vous vu cette histoire à l'Assemblée Nationale? Il faut remonter parait-il à 1947 pour connaître pareil incident, qui est tout sauf anodin: les députés de gauche quittent l'hémicycle en chantant la Marseillaise et ne reviennent pas cet après-midi en séance. Tout ça pour quoi? Pour quelque chose d'essentiel à la démocratie, mis à mal par la majorité actuelle: le droit d'amendement.

Un article 13, qui porte ici malheur à la République, est ainsi libellé: "Les amendements déposés par les membres du Parlement peuvent être mis aux voix sans discussion". Ce droit est certes maintenu (encore heureux!), mais vidé de sa substance, la discussion. Car qu'est-ce qu'un amendement qu'on ne soumet pas à la discussion? Rien, absolument rien. On ne peut plus le combattre, on ne peut plus le défendre.

Le comble, et le détonateur de l'incident, c'est que la discussion autour de l'article 13 a été clôturée par le président de l'Assemblée alors que tous les députés inscrits ne s'étaient pas exprimés. Une façon d'anticiper les conséquences de cet article, des adoptions d'amendement sans discussion.

Vous me direz: et l'obstruction parlementaire, qui est contraire à l'efficacité, et parfois quelque peu ridicule, quand des centaines d'amendements sont déposées pour freiner l'adoption d'une loi? Je vous réponds: DEMOCRATIE. Il faut savoir ce qu'on veut: en démocratie, l'obstruction, qui n'est certes pas la stratégie la plus intelligente au monde, fait partie du jeu, il faut l'accepter, bon gré mal gré. Surtout, il faut se demander pourquoi il y a obstruction, car ce petit jeu ne plaît à personne, pas même à ses initiateurs.

Avec Nicolas Sarkozy, les textes de lois se sont multipliés, parfois mal ficelés tellement la précipitation était grande. Si on laisse le Parlement faire son travail, discuter tranquillement des projets de lois, il n'y aura pas obstruction. Mais le problème de fond, c'est que le chef actuel de la droite, Nicolas Sarkozy, n'a pas de vraie culture parlementaire. D'abord, René Dosière a rappelé qu'en tant que député il n'avait guère été présent et actif. Surtout, devoir "parlementer", c'est-à-dire discuter collectivement du devenir de la France n'est pas dans la culture du président. Il lui faut agir personnellement, voilà ce qu'il ne cesse de nous faire comprendre. Amender, discuter, passer des compromis, c'est sûrement pour lui, qui ne voit que lui pour changer la France, une perte de temps.

Voilà pourquoi cette Marseillaise inhabituelle qui a retenti dans les travées du Palais Bourbon avait toute sa raison d'être. Le droit d'amendement suivi d'une discussion, c'est une règle sacrée, à laquelle jamais les républicains n'ont dérogé. Pourquoi aujourd'hui Sarkozy? Qu'on rationalise le travail parlementaire, pourquoi pas. Qu'on le réduise, non! La Vème République nous a habitués à un rabaissement du Parlement, mais là, les bornes sont franchement dépassées...


Bonne soirée républicaine.

20 janvier 2009

Paix à Gaza.

Bonjour à toutes et à tous.

Paix à Gaza? Oui, semble-t-il, puisqu'il y a cessez-le-feu, et promesse de retrait des troupes israéliennes. Mais c'est autant un voeu qu'un constat, car cette partie du monde n'a-t-elle jamais cessé, depuis plusieurs décennies, d'être en guerre? Le conflit, vu de France, a souvent été mal perçu, déformé et parfois manipulé par les passions, quelquefois les fanatismes. Des irresponsables ont voulu transférer ce drame dans notre pays, ce qui a provoqué plusieurs actes antisémites, qui n'ont rien à voir avec la défense sincère de la cause palestinienne.

On a assisté à des manifestations "obscènes" (c'est le dernier Charlie-Hebdo qui le dit, en relatant celle du 10 janvier à Paris): drapeau israélien brûlé, soutien assumé au Hamas et au Hezbollah, slogan de Le Pen "Gaza=camp de concentration" (eh oui, les nationalistes des deux bords peuvent se retrouver), manifestants déguisés en kamikazes, mannequins en forme de martyrs... Une manifestation qui sentait la haine, la guerre et la mort. En plein Paris, avec des dizaines de milliers de personnes! Et des casseurs pour couronner le tout...

Et puis, il y a eu l'habituel défoulement sur internet, la propagation des rumeurs. A ce propos, la responsabilité est partagée. Israël, en interdisant Gaza à la presse, faisait le black-out sur le territoire, laissait l'information (et la désinformation) entre les mains et sur les images des médias islamistes. C'est une grave erreur, une faute profonde. Même pendant la guerre américaine du Viet-Nam, les médias étaient là. Boucler un territoire, le plonger dans le silence et le noir, l'isoler du reste du monde, c'est encore plus condamnable que la guerre défensive qu'on prétend mener. Car tout devient alors possible, quand les caméras et les journalistes ne sont pas là. Toute guerre est atroce, mais une guerre muette et aveugle l'est encore plus.

Parmi les réactions françaises, j'ai apprécié le reportage de Bernard-Henri Lévy dans le Journal du Dimanche, informé et équilibré. J'ai été très déçu, ce même dimanche sur France-Inter, par la formule déplacée d'un grand intellectuel que je lis pourtant avec intérêt, Emmanuel Todd, traitant Israël d' "Etat-voyou". Mais pourquoi tant de passions (au sens négatif du terme)? Quand on a la chance de vivre en France, d'avoir un peu d'intelligence et la volonté de contribuer à la justice et à la paix, à quoi sert-il de s'exprimer ainsi? Je ne comprendrais jamais pourquoi les hommes disent et font ce dont ils pourraient très bien se dispenser, surtout quand leurs propos sont d'aucune utilité pour la justice et la paix.


Bonne matinée.

19 janvier 2009

10 ans et maintenant.

Bonjour à toutes et à tous.

J'étais samedi soir l'invité du journal de France 3 Picardie, pour les 10 ans du Café-Philo. Le lien est à la fin du billet. Je vais de temps en temps à la télé, c'est une expérience intéressante. Le direct vous met le trac, c'est certain, mais sur la route, jusque dans la salle de maquillage (une sorte de boule qui se balade entre la gorge et l'estomac et qui n'est pas vraiment agréable). Après, une fois entré dans le studio, c'est fini, plus rien, la décontraction (oui, j'irai jusqu'à dire ça). Allez comprendre pourquoi...

Intéressant aussi ce qu'est aujourd'hui une chaîne de télévision. Vous vous attendez à voir du monde partout, des grosses caméras, un peu une fourmilière. C'est pas du tout ça. Le grand hall d'entrée est vide, et à part l'hôtesse d'accueil et la maquilleuse, on ne voit personne. Dans le studio, c'est pire, si j'ose dire: la présentatrice, un technicien et moi, c'est tout. La numérisation a bouleversé l'ambiance de la télévision. C'est paradoxal: on se sent seul alors qu'on est en compagnie de centaines de milliers de téléspectateurs. Et on ne le ressent absolument pas.

J'en viens au contenu de l'émission. Il y a 10 ans, la télévision était déjà là, pour le lancement du Café-Philo à Saint-Quentin. Le reportage a été samedi rediffusé. J'expliquais alors que le succès de la formule venait de la perte des repères, moraux, religieux, politiques, qui conduit à s'adresser à cette réflexion fondamentale qu'est la philosophie. Dix ans plus tard, c'est toujours vrai, plus que jamais, avec cependant de fortes nuances:

La crise morale, je n'y crois pas trop. Là, les valeurs essentielles n'ont jamais périclité. L'honnêteté, la loyauté, la générosité et autres vertus n'ont pas diminué, elles appartiennent au fond humain, immuable, éternel. Je pense même que notre société est plus moralisatrice qu'il y a 10 ans. J'en veux pour preuve l'engouement devenu quasi obligatoire pour certains attitudes morales: la compassion, la repentance, le devoir de mémoire, par exemple.

Sur ce blog, il y a quelques jours, un commentateur s'en est pris à moi parce qu'il me reprochait mon manque de "compassion" envers le peuple palestinien, alors que j'avais condamné fortement l'intervention israélienne. Mais manifestement, ça ne lui suffisait pas: il lui fallait la "compassion". Souvent, les commentaires sont un mélange de psychologie et de moralisme, très caractéristique de notre époque, et moins influent il y a 10 ans.

La crise religieuse, je n'y crois pas du tout. Au contraire, les religions sont aujourd'hui beaucoup plus présentes dans l'espace public qu'il y a 10 ans: l'Islam, bien sûr, mais aussi les sectes protestantes, conquérantes en Amérique du sud et dans l'Europe de l'est. La religion, incontestablement, se porte bien, et même mieux qu'il y a 10 ans.

La crise politique, en revanche, est la plus flagrante. Quand la journaliste de France 3 m'a demandé un exemple de perte des repères, j'ai spontanément cité la politique. Socialisme, libéralisme, que sont devenues aujourd'hui ces idéologies? Il y a 10 ans, nous connaissions en France une expérience réformiste, menée par Lionel Jospin et la "gauche plurielle". Comme cela nous semble loin! Jospin a été disqualifié en 2002 par Le Pen, événement incroyable, et Sarkozy s'est fait élire en récupérant certaines références, puis certains hommes de gauche. Qui l'aurait cru il y a 10 ans!

Et dans 10 ans, qu'en sera-t-il? Je vous donne rendez-vous sur ce blog en 2019, et nous en reparlerons.


Bonne fin d'après-midi.



http://jt.france3.fr/regions/popup.php?id=c80a_1920

Cliquer samedi 17 janvier.

Début: 6 minutes et 53 secondes
Fin: 12 minutes et 21 secondes

18 janvier 2009

Les arbres et la forêt.

Bonsoir à toutes et à tous.

J'entends parfois des camarades me dirent que le PS n'en ferait pas assez en matière de représentation des "minorités visibles" dans les élections, notamment municipales. Certains regrettent même que l'UMP, sur ce point, fasse mieux que nous. J'ai à l'esprit une conservation avec un ami, passé sur la liste de droite à Saint-Quentin parce que, selon lui, la "France de la diversité" dont il fait partie n'aurait pas reçu un bon accueil dans les rangs socialistes, au moment des investitures.

C'est moi qui suis au regret de dire à tous, avec un peu de colère, qu'ils se trompent lourdement, que la gauche n'a pas ici à recevoir de leçons, qu'elle serait plutôt en situation d'en administrer, et de sévères, si j'en crois le rapport publié par le Haut Conseil à l'Intégration (HCI). Une vérité d'abord globale: 6,8% des élus municipaux sont issus de l'immigration dans les villes de plus de 9 000 habitants. C'est peu mais il y a du mieux, puisqu'en 2001, ils étaient 3,18% . Insuffisant mais en progrès.

Prenons maintenant les chiffres par grands partis politiques:

- PS: 8,71
- PCF: 6,95
- UMP: 3,44

Est-il besoin de commenter? C'est la vieille histoire de l'arbre qui cache la forêt. Mais ce n'est pas une Rachida Dati ou une Rama Yade en France, un Karim Saïdi ou un Jean-Claude Natteau à Saint-Quentin qui nous feront oublier la réalité. La "diversité" est du côté des socialistes. Reconnaissons-le, répétons-le, et tant qu'à faire, soyons-en fiers!


Bonne soirée.

Notre devoir d'opposition.

Bonjour à toutes et à tous.

Les conférences de presse, ça n'existe plus, ça fait trop élyséen. On parle désormais de "point presse", c'est plus bref, moins lourd. Hier matin, la section socialiste de Saint-Quentin a fait un point presse, pour présenter ses voeux. J'étais bien sûr présent, j'en ai retenu trois mots-clés: unité, solidarité, opposition.

1- Unité. Je ne sais même plus quand a eu lieu ce genre de point presse de la section. Peut-être bien à l'époque où l'on employait encore l'expression de "conférence de presse", c'est vous dire si c'est loin! Un point presse pas évident, pour moi en tout cas, après une année de conflits entre nous. Il fallait que ça cesse. C'est fait. Ce n'est pas seulement l'unité qui fait gagner, mais on ne gagne pas sans elle. Aujourd'hui, il n'y a plus qu'une seule ligne au PS local, et un seul leader. Et moi dans tout ça? Je ferai ce que je peux et ce qu'on me demandera. Une page de notre Histoire est tournée.

2- Solidarité. C'est la raison d'être de la gauche: le soutien, la défense des catégories sociales qui peinent, des plus faibles jusqu'aux classes moyennes qui se sentent précarisées. La gauche, c'est d'abord une sociologie, seulement après des idées. Il faut que nos idées soient conformes à notre sociologie. C'est d'autant plus vrai et nécessaire dans une ville comme Saint-Quentin, "ville pauvre", comme aime à le répéter son sénateur-maire.

3- Opposition. C'est le devoir de la gauche de s'opposer. C'est un devoir très difficile à accomplir. Il est plus facile, plus confortable, plus gratifiant d'avoir la majorité et de gouverner (un jour, de notre côté, ça viendra, j'en suis certain). En attendant, il faut nous opposer à la droite locale. Pas par esprit partisan ou sectarisme: par esprit républicain. Une démocratie, c'est une majorité qui dirige et une opposition qui critique. Sinon, nous entrons dans un autre système, dont personne ne veut, ni la droite, ni la gauche.

Plus la majorité est puissante, plus l'opposition doit être énergique. C'est le bon équilibre d'une démocratie, c'est une règle sacrée. J'irai plus loin: une majorité intelligente doit écouter son opposition, une opposition intelligence doit comprendre la majorité. On n'en est pas encore vraiment là à Saint-Quentin. S'opposer, ce n'est pas tout critiquer, ça n'aurait aucune efficacité. S'opposer, ça commence par interpeller la majorité, lui poser des questions, sur des faits précis, que nul ne peut contester, dont les trois suivants, développés par notre secrétaire de section:

a- L'augmentation de la fréquentation des Restos du Coeur de 8 à 10% cet hiver, selon les bénévoles de l'association. Ce qui représente 900 familles en tout.

b- Le dernier recensement de la population montre une nouvelle baisse des habitants, d'environ 2 000 personnes.

c- Le chômage est de 11,8%, le taux le plus élevé de Picardie.

La municipalité fait son possible en matière de solidarité, de développement économique et d'emploi, je n'en doute pas. Mais pourquoi ces trois paramètres indiscutables (caritatif, démographique et économique) sont-ils très négatifs, d'autant qu'un ministre influent fait partie de l'équipe municipale? C'est le devoir de l'opposition de mettre en avant ce qui ne va pas, comme elle l'a fait samedi lors de ses voeux, c'est le jeu de la majorité de souligner que tout ne va pas si mal, comme l'a fait le sénateur-maire lors de ses voeux. Qui croire alors? Les électeurs! Ce sont eux qui ont le dernier mot et toujours raison en démocratie. Un jour viendra où le devoir d'opposition sera aussi un devoir de proposition: montrer qu'une autre politique est possible.

Une dernière chose: le sénateur-maire a raison d'être fier de Saint-Quentin et de vouloir faire partager cette fierté dans la ville et bien au-delà. Pendant longtemps, certaines cités ont été identifiées à un savoir-faire de sa population, leur prospérité et leur notoriété dépendaient d'un produit, dans lequel la classe ouvrière, les artisans ou petits commerçants reconnaissaient le fruit de leur travail: la bêtise de Cambrai, l'andouille de Vire, le nougat de Montélimar, les mouchoirs de Cholet, Manufrance à Saint-Etienne, Michelin à Clermont-Ferrand, etc. Chez moi, dans le Berry, à Saint-Amand-Montrond, il y a eu la petite industrie de l'or et la grosse imprimerie Bussière.

Prenez n'importe quel livre, allez à la dernière page, vous avez une chance sur trois de tomber sur l'adresse de l'imprimerie Bussière. Saint-Quentin, longtemps, c'était Motobécane. Je n'idéalise pas, je n'éprouve pas de nostalgie, je remarque simplement que la pérennité d'une cité, et son identité, ne se construisent que sur un produit durable (ce qui ne veut pas dire éternel). La plage de notre centre-ville ou telle commémoration ne remplaceront jamais un objet, un art, une production, une industrie. Je ne dis pas que c'est facile à trouver et encore moins à réaliser, je dis que c'est un devoir d'opposition de le faire remarquer. Car si elle ne le fait pas, personne ne le fera à sa place.


Bonne matinée.

17 janvier 2009

Les leçons d'une distribution.

Bonsoir à toutes et à tous.

C'était aujourd'hui la journée d'action de l'Education Nationale (hors temps de travail, je le fais remarquer aux anti-profs). A Saint-Quentin, nous avons distribué des tracts devant la Maison de la Presse. Occasion pour moi d'un petit exercice de psychologie, de sociologie ou de simple amusement. J'ai repéré cinq profils parmi les passants rencontrés:

1- Le courtois. Il prend le tract en souriant et dit merci. Je ne sais pas s'il est d'accord ou pas avec notre combat, je ne sais même pas s'il lira notre papier. Mais son comportement est normal: on lui tend une feuille, il la prend et sourit.

2- L'indifférent. Il passe devant vous comme si vous n'existiez pas, comme si vous étiez invisible. A la limite, il serait prêt à vous bousculer (puisque vous êtes invisible!). Je sens en lui une sourde hostilité, qui ne s'exprime pas.

3- Le contradicteur. Il comprend tout de suite qui nous sommes: des enseignants, et de gauche. Et il n'est pas d'accord avec nos revendications. Il s'explique, on discute, aucun ne change d'avis mais on échange des arguments. Je l'aime bien: c'est un comportement démocratique.

4- L'étonné. Il vous regarde comme si vous étiez un extra-terrestre, il ne comprend pas qu'on puisse lui donner un papier en pleine rue, il se sent agressé par cette main tendue, il vous regarde bizarrement en reculant de deux mètres, il ne pige rien à la situation, il n'est pas habitué à la démocratie.

5- L'agressif. Quand il vous voit, il fait une sale gueule. Il baisse les yeux (vous regarder serait déjà pour lui se déshonorer) et vous jette quelques mots à la figure. Ce matin, par exemple, un quidam m'a attaqué parce que je lui proposais pour la deuxième fois mon tract. Je lui ai répondu qu'il n'était pas encore une personnalité pour que je me souvienne de lui. Autre exemple: un drôle m'apostrophe en gueulant qu'il faudrait que la gauche soit élue pour faire aussi bien que Sarkozy. Argument évidemment tordu: je rétorque qu'il faut battre la droite pour que la gauche l'emporte, et que ce n'est pas avec des gens comme lui qu'on y parviendra. Car ce genre d'individu, je conseille vivement de leur rentrer dedans, et bien fort. C'est tout ce qu'il mérite! Mort aux cons, telle est ma devise (y'a du boulot!).

Combien représente chaque modèle de cette typologie? Je vous donne ça au pif:

- Le courtois: 50%.
- L'indifférent: 30%.
- L'étonné: 10%.
- Le contradicteur: 5%.
- L'agressif: 5%.


Bonne soirée.

16 janvier 2009

Les oies sauvages.

Bonsoir à toutes et à tous.

Qu'est-ce que je retiens de cette incroyable histoire de l'avion devenu bateau, au large de l'Hudson, tout près de New-York? Tout le monde a retenu la prouesse, a salué la performance. Oui bien sûr, mais je crois aussi qu'on peut en dire autre chose:

1- Comment ne pas songer à une forme de revanche sur le 11 septembre? Les deux événements ont eu lieu dans des endroits très proches. L'un est une manifestation de fanatisme, l'autre d'héroïsme. L'un est une tragédie, l'autre est un bonheur. L'avion sur les flots rachète l'avion dans les tours.

2- Je me suis souvent demandé, sur ce blog, si nous n'étions pas entré dans un monde sans héros. La preuve que non. Mais nos héros sont provisoires et ne finissent plus en idéal, en modèle. Le commandant de bord qui a sauvé tous les passagers restera un peu dans nos mémoires mais pas éternellement.

3- Qu'est-ce qui a provoqué l'accident qui aurait pu tourner au drame? Un vol d'oies sauvages qui ont perturbé un réacteur. Dans notre société où la technique est hyper-puissante, voilà qui nous ramène à la modestie. Quelques volatiles peuvent endommager une merveille de la technologie moderne!


Bonne nuit.

15 janvier 2009

N° 6 s'est évadé.

Bonsoir à toutes et à tous.

Il y a des journées qui commencent mal, celle d'aujourd'hui par exemple. Ce matin, sur France-Inter, avant de partir au boulot, une nouvelle m'a tout gâché: j'ai appris la mort de Patrick McGoohan. Ça m'a foutu un coup! Patrick McGoohan, alias le Prisonnier, le fameux n°6. Cette fois-ci, plus aucun doute, il s'est pour toujours évadé.

A ceux que mes propos ne disent rien et semblent mystérieux, je rappelle l'histoire: c'était à la fin des années 60, début 70, je découvre à la télé une série OVNI, qui ne ressemble à aucune autre, "Le Prisonnier". C'est un mélange d'espionnage et de fantastique, le tout saupoudré de métaphysique. Je n'y comprends pas grand-chose, et ça me fait réfléchir.

Rien à voir avec mes séries-cultes de l'époque, Les Mystères de l'Ouest, Chapeau Melon et bottes de cuir, et autres. Le Prisonnier, c'est un homme, agent secret, qui se retrouve dans un drôle de Village de nulle part, où les individus sont des numéros. Pourquoi est-il là? Mystère. Que veut-on lui faire avouer? Mystère. Va-t-il pouvoir s'échapper? Il essaie, il rate constamment.

Le générique, je l'ai toujours en tête, avec son entraînante musique, son formidable condensé de l'histoire. Ça commence comme Zorro, un ciel nuageux et le tonnerre, ça se termine par cette formule qui résume tout: "Je ne suis pas un numéro, je suis un homme libre". Car la série est très politique, anticonformiste, très sixties. Les deux derniers épisodes en révèlent la philosophie: éloge de l'individu, dénonciation de l'uniformisation contemporaine, critique de la tyrannie douce.

Adieu McGoohan,
bonne nuit à tous,
et comme disait le n°6:
"Bonjour chez vous!"

14 janvier 2009

Hyperactifs contre fainéants.

Bonsoir à toutes et à tous.

Nicolas Sarkozy s'en est pris, avec l'élégance coutumière des gens qui nous gouvernent, aux "rois fainéants", c'est-à-dire les présidents qui l'ont précédé. Même à droite, surtout à droite, on a été choqué. En vérité, Sarkozy ne respecte rien, pas même les siens. Mais il paraît que c'est ainsi qu'on réussit en politique... En attendant, puisque notre président nous montre l'exemple, soyons à notre tour hyperactif et surtout pas fainéant, y compris quand on n'est pas roi mais simple militant. Je vous donne deux rendez-vous, quasiment en même temps, vous choisirez selon vos disponibilités, l'important étant d'agir:

Samedi à Laon, le PS, le PCF et le PRG manifesteront contre l'intervention militaire israélienne dans la bande de Gaza, pour une solution politique au Proche Orient, pour la reconnaissance mutuelle des Etats palestinien et israélien. Le rendez-vous aura lieu devant la Préfecture, à 10h00. Très bien. Voilà qui répond à ma demande de manifestation unitaire. Ce qui n'est pas possible à Saint-Quentin l'est à Laon, tant mieux.

Samedi aussi, journée d'action pour la défense de l'Education Nationale, qui a bien besoin d'être défendu. Des distributions de tracts auront lieu à Laon, place Victor Hugo à 10h30 et à Saint-Quentin, même heure, devant la Maison de la Presse. Tout cela pour préparer la grande manifestation interprofessionnelle de la fin du mois. On va voir de ce qu'on va voir: des rois fainéants, je ne sais pas, mais des militants actifs, oui, il y en a!


Bonne soirée hyperactive.

Clarté et crédibilité.

Bonjour à toutes et à tous.

Dans l'année qui a précédé mon renoncement à me présenter aux municipales, parce que les conditions n'étaient pas réunies pour une candidature et une campagne sérieuses, je me suis souvent demandé à quoi pouvait servir un conseiller municipal d'opposition. Et j'ai été souvent tenté de répondre brutalement: rien! Je m'explique:

1- Le pouvoir d'un conseiller municipal d'opposition est quasiment inexistant puisqu'il ne peut pas vraiment influer sur les décisions municipales, surtout à Saint-Quentin.

2- Il n'a pas une réelle et complète connaissance des dossiers, ce qui rend difficiles les interventions pertinentes.

3- Les débats et décisions en conseil municipal sont majoritairement techniques, administratifs. Difficile d'y mettre une dimension proprement politique.

4- A Saint-Quentin, mais ce n'est pas une exception, le sénateur-maire en reste aux questions purement locales, ce qui interdit, là aussi, de politiser les enjeux.

A partir de ces constats, une opposition municipale est nécessairement dans un rôle ingrat, frustrant, limité. Elle ne peut s'en sortir qu'en s'adressant à l'opinion, la prenant à témoin, lui montrant une image qui devra la rendre crédible afin de la faire accéder, un jour, aux affaires. C'est pourquoi la communication est une dimension fondamentale.

Je prends l'exemple qui a agité les esprits il y a quelques jours, l'enneigement de la ville et ce qui a été considéré comme des contre-performances des services techniques. Je ne reviens pas sur ce que j'ai écrit hier (voir le billet "Feu de tout bois"). Sans accabler la Ville, il y avait un moyen de faire des propositions afin de répondre aux demandes légitimes des plaignants (des lecteurs, dans leurs commentaires, ont avancé quelques idées).

En ce qui concerne la cérémonie des voeux (la maintenir ou pas?), la critique semble plus crédible et plus politique. D'abord parce que cette cérémonie relève d'un choix (la neige, on n'y peut rien et les services font ce qu'ils peuvent). Ensuite parce que son coût (combien, d'ailleurs?) pourrait parfaitement être affecté ailleurs (mais où, à quoi?). Enfin parce que l'argument économique (on fait marcher le commerce du champagne) est contestable: une municipalité doit utiliser l'argent des contribuables à bon escient, dans l'intérêt de ses habitants, et pas en vue du développement de Pommery ou Moët§Chandon.

Qu'il y ait une cérémonie des voeux, c'est normal. Qu'elle soit suivie d'un cocktail bien achalandé, c'est discutable. Ma conception est austère? Oui, pourquoi pas, je le revendique. Et puisque le sénateur-maire s'est moqué, à juste raison, du râleur qui refuse de nettoyer son trottoir, je me sens autorisé à me moquer du pique-assiette, du profiteur et du picoleur, personnage répandu dans les cérémonies de ce type.

J'ajoute que ce n'est pas la crise financière mondiale qui me conduit à contester les cérémonies des voeux aussi bien que les cartes que nous envoient les élus, de droite comme de gauche, surtout il est vrai quand l'année est électorale. Non, c'est un principe d'utilité, et aussi d'économie: alors qu'on ne cesse de faire la chasse au gaspillage, dans les administrations et les entreprises, voilà me semble-t-il une belle économie à réaliser!

Une opposition crédible doit être aussi une opposition claire. L'Aisne Nouvelle d'hier consacre sa "une" à la transformation du bureau de poste de Saint-Martin en agence postale municipale, afin de montrer que la population, consultée par la municipalité, est d'accord avec cette mesure. Le journal rapproche la contestation de cette décision avec la pétition que le PS a fait nationalement signer samedi, contre la privatisation de la Poste. Sauf qu'on ne peut pas confondre les deux, ce sont deux combats bien distincts.

Les agences postales municipales existent, alors que la Poste n'est pas aujourd'hui privatisée (et les socialistes se battent pour qu'elle ne le soit pas). Les deux questions (faut-il créer une agence postale municipale à Saint-Martin? Faut-il privatiser la Poste?) sont complètement disjointes. A la première question, je n'ai pas de réponse, je ne connais pas le dossier. Je ne suis pas hostile par principe à ce genre d'agences, qui remplissent à peu près les fonctions d'un bureau de poste.

Le problème politique est ailleurs: cette structure sera soutenue financièrement par la municipalité (les charges, le salaire des agents). Là encore, le financier n'est pas loin du politique. A combien s'élève ce choix? Pouvait-on procéder autrement? Voilà comment je conçois une opposition municipale: clarté et crédibilité, critiques ciblées assorties de propositions. On ne s'oppose bien qu'en montrant qu'on ferait autrement et mieux si on accédait aux responsabilités. En attendant d'y accéder vraiment...

A la deuxième question, ma réponse est évidemment non: je refuse que la Poste devienne une société anonyme, c'est-à-dire une entreprise privée. A partir du moment où une activité a une portée universelle, qu'elle s'adresse absolument à tous, comme le courrier qu'on reçoit, elle doit relever d'un service public. Celui-ci bien sûr doit s'adapter aux évolutions de la société (la création d'agences postales municipales ou de points-poste vont dans ce sens) mais son statut doit demeurer celui d'un service public.


Bon après-midi.

13 janvier 2009

Feu de tout bois.

Bonsoir à toutes et à tous.

La glace a beau fondre, la neige a beau cesser, la pluie a beau l'avoir remplacée (elle, on ne peut rien lui reprocher, sauf d'exister), la polémique autour de l'entretien des rues et trottoirs à Saint-Quentin continue de plus belle dans la presse locale de ce début de semaine. J'ai donné mon avis (voir les billets "L'argument de la neige" et "Show et froid"), je voudrais y revenir, puisque l'actualité saint-quentinoise nous y ramène:

1- Peut-on imputer aux services techniques de la Ville la situation de ces trois journées enneigées et des inconvénients qu'elles ont suscités? Je ne pense pas. Cette question est d'ailleurs technique, pas politique. Je ne vois pas pourquoi je soupçonnerais les responsables de la voirie de mal faire leur travail. Si c'était le cas, le problème serait purement professionnel, et son règlement aussi.

2- Peut-on reprocher au sénateur-maire d'avoir rappeler les citoyens à leur devoir (l'entretien du trottoir est de leur ressort, une victime de chute pourrait se retourner judiciairement contre l'habitant)? Non. A la limite, on peut regretter la forme (le style comique), mais pas le fond.

3- Ceci dit, le leader de l'opposition a raison de souligner un problème: les personnes très âgées, malades ou handicapées ne sont pas en capacité de nettoyer leur trottoir. On ne peut donc pas leur faire porter la responsabilité d'une quelconque négligence.

4- Reste à faire une proposition pour remédier à ce problème. Les agents municipaux auraient-ils pu se charger de ce travail (qui normalement ne leur revient pas)? Peut-être. Mais une autre piste est à réfléchir: le recours aux entreprises d'aide à la personne, sollicitées directement par les personnes en difficulté. Je pense notamment à Polyv'Alex, qui se charge du nettoyage de terrasse, ramassage de feuille, débroussaillage et autres travaux d'entretien extérieur. Pourquoi pas le déblayage des trottoirs sous la neige?

5- Une opposition politique doit-elle faire feu de tout bois (c'est le cas de le dire, pour une histoire de neige et de glace!)? Il y a deux écoles: l'une qui prétend qu'un opposant est un procureur pour lequel toutes les occasions sont bonnes de charger la majorité (c'est l'école Mitterrand), l'autre qui juge sur pièces et ne s'interdit pas de dédouaner la majorité de telle responsabilité (c'est l'école Rocard). Vous connaissez ma préférence, ai-je besoin de la rappeler?


Bonne soirée.