L'Aisne avec DSK

31 août 2007

La politique autrement.

Bonsoir à toutes et à tous.

J'avais rendez-vous ce matin avec Pierre André, sénateur-maire UMP de Saint-Quentin, pour lui présenter les activités de la Fédération des Oeuvres Laïques de l'Aisne, que je préside. Très vite, nous en sommes venus à la politique. Que voulez-vous, quand deux militants se rencontrent, on n'y échappe pas! J'ai été séduit par son analyse (locale, pas nationale) et son projet: développer Saint-Quentin, faire d'une ville pauvre une ville moyenne, rendre leur fierté aux saint-quentinois. Ca ne lui a pas trop mal réussi jusqu'à maintenant, électoralement. Humainement, je le trouve ouvert, lucide, modeste. Quel dommage que ce gaulliste ne soit pas socialiste!

En l'écoutant, je ne pouvais pas m'empêcher de penser que dans quelques mois, à l'approche des municipales, nous serons peut-être adversaires, lui menant la liste de droite et moi la liste de gauche. Quoi qu'il en soit, il faut qu'il y ait entre nous, et je crois que c'est le cas, respect et estime réciproques. La politique est une chose sérieuse, et je dirais même grave, car nos décisions touchent la vie de dizaines de milliers de saint-quentinois, qui attendent de leurs représentants locaux une bonne tenue, de la dignité dans le débat politique. On peut s'affronter loyalement, honnêtement et intelligemment, j'en suis certain. La gauche ne regagnera en crédibilité que si elle est capable de faire des propositions, tout est là. Sinon, c'est fichu pour elle.

Je m'informe sur l'ouverture de l'université d'été des socialistes à La Rochelle, avec la traditionnelle réunion des élus. J'apprécie les discours qui soutiennent que la rénovation doit commencer dès les municipales et les cantonales de l'an prochain, en aidant une nouvelle génération à accéder aux responsabilités. Ca ne réglera pas tout, loin de là, mais il faut bien commencer par un bout, et le renouvellement des équipes ne pourra apporter que du sang neuf, de l'air frais.


Bonne soirée.

30 août 2007

Ne pas oublier.

Bonsoir à toutes et à tous.

Faire de la politique, c'est commencer par se souvenir, ne pas oublier. Je suis souvent surpris de voir à quel point les gens ont la mémoire courte. Prenez, au hasard, Sarkozy. Certains de ses adversaires socialistes, à la veille de notre université d'été, disent: il faudrait faire comme lui, rénover et rassembler notre propre camp, ce que nous n'avons pas su faire et ce qui nous a conduit à la défaite.

Mais c'est faux, archi-faux! Ne tressons pas involontairement des lauriers au chef de l'Etat, n'inventons pas sa légende. Nicolas Sarkozy n'a pas rénové la droite, à aucun moment. Il a simplement assumé, notamment en matière fiscale, des idées que la droite, en accord avec les catégories sociales qu'elle défend, traîne depuis trente ans et plus. Avez-vous vu un seul colloque dans lequel la droite s'est modernisée, avez-vous lu un seul ouvrage dans lequel Sarkozy ait fait preuve d'audace intellectuelle, d'ingéniosité théorique?

Sarkozy rassembleur? Là encore, "y'a la mémoire qui flanche", comme dit la chanson. En 1993-1995, Sarkozy trahit son propre parti en soutenant Balladur contre Chirac, manquant totalement d'intuition politique. Pendant des années, il sera accueilli par les siens dans les meetings sous les sifflets. En 1999, à la tête de la liste de droite aux élections européennes, il réalise le plus mauvais score. En 2004, malgré ses efforts pour soutenir aux régionales et cantonales les candidats de son parti, ceux-ci sont la plupart du temps battus. C'est la "vague rose", contre laquelle il se casse les dents. En 2005, rebelote: il soutient le oui à la Constitution européenne mais ne réussit pas à l'imposer dans le pays.

Sarkozy est plus un diviseur qu'un rassembleur. A partir de 2006, sinon avant, il décide de ne pas attendre la position du chef de l'Etat dont pourtant il dépend et avance sa propre candidature à la présidentielle. Du jamais vu! Alors, la droite se déchire, Villepin ne renonce pas à être candidat, l'affaire Clearstream montre à quel point on est à couteaux tirés dans la majorité. Bref, Sarkozy n'a rien rénové, son programme, c'est de la vieille droite réchauffée, et il n'a pas rassemblé, son adage, c'est diviser pour mieux régner. N'avez-vous pas remarqué que c'est sa stratégie à l'égard des socialistes?


Bonne nuit.

La gauche paresseuse.

Avez-vous entendu ce matin Claude Allègre chez Apathie, à RTL? Avez-vous lu son entretien dans Libération? François Hollande est comparé à Guy Mollet, traité de menteur et de "magouilleur". Ségolène Royal, Allègre la trouve courageuse mais incapable. Quand à la "jeune garde", Montebourg, Peillon, etc, ce sont des "hyènes" et des "chacals". La rhétorique de l'ancien ministre socialiste hésite, dans la forme, entre les diatribes de l'extrême droite sous la IIIème République et les belles heures du stalinisme. Et il annonce un livre "La défaite en chantant", qui s'inscrit dans un genre littéraire dont je vous ai déjà parlé: les socialistes qui critiquent les socialistes, les démolisseurs qui se veulent des bâtisseurs. Encore Allègre, à la différence d'autres, est-il logique avec lui-même: il ne renouvellera pas son adhésion au PS et s'avoue "impressionné" par Nicolas Sarkozy.

Pourtant, Allègre est loin d'être bête. Il est dommage que sa violence, ses excès et ses injustices dévalorisent certains de ses propos qui mériteraient d'être écoutés et pris en compte. Moi même, dans ce blog, je suis critique à l'égard des socialistes, parce que c'est dans la critique de soi et des siens qu'on progresse. Mais je ne rabaisse pas le parti, j'essaie au contraire de l'élever, et je ne suis nullement "impressionné" par la droite. Parmi les reproches que nous fait Allègre, un me semble viser juste, et j'en parle parce que personne n'en parle: la paresse.

Oui, la paresse! Le grand tort des socialistes (excusez-moi pour cette généralisation bien sûr hâtive) est de ne pas assez travailler. Je ne leur demande bien sûr pas de devenir hyperactif comme qui vous savez, mais il ne suffit pas d'attendre que l'opinion change automatiquement d'avis pour espérer, sans rien faire, sans rien proposer de très nouveau, reconquérir le pouvoir. Ce phénomène a existé à partir de 2004, victoires socialistes massives aux régionales et cantonales), s'est poursuivi avec le triomphe du non au référendum européen en 2005 et s'est intensifié avec les bons sondages en faveur de Ségolène Royal en 2006. L'idée s'est peu à peu installée que la droite était fichue et qu'il suffisait d'attendre la défaite. Chez certains à gauche, l'usure du pouvoir est un prêtexte à la paresse, avec cette idée complétement farfelue que "c'est maintenant notre tour". Non, en démocratie, il n'y a pas de tourniquet électoral.

Ce défaut est inscrit profondément dans les mentalités du parti. Je discutais il y a peu avec un socialiste local, m'inquiétant de notre absence de propositions et de compétences en vue des élections municipales. Quelle n'a pas été ma surprise de m'entendre dire que ce n'était pas si grave, qu'il y avait dans l'administration locale des techniciens chargés de prendre les décisions! C'est tout un état d'esprit qui est à changer. Pour beaucoup, la politique est moins considérée comme un travail que comme un jeu (ne dit-on pas d'ailleurs, dans le langage courant, le "jeu politique"?).

A quoi reconnaît-on que nous sommes dans une réunion de travail? Quand les participants prennent des notes et posent des questions. Combien de fois ai-je assisté à des réunions d'instances locales ou départementales durant lesquelles la plupart arrivait, écoutait, parfois répétait ce qu'un autre avait déjà dit ou contestait systématiquement un camarade d'une autre sensibilité, sans rien noter, sans poser aucune question! J'ai inventé une expression pour les qualifier, je les appelle "les socialistes mains dans les poches". Ils me font penser à ces élèves en classe qui gardent ostensiblement leur blouson, observent vaguement le professeur, prononcent quelques mots de protestation et repartent comme ils sont venus, en oubliant tout de ce qui s'est dit. Je sais que je vais paraitre austère, "professoral" comme disent ceux qui détestent le monde de l'enseignement. Mais je crois que la politique est une chose sérieuse, un vrai travail, et pas une activité de représentation, de commandement et d'arbitrage (même si elle est aussi cela).


Bon après-midi, bon travail!

Une rencontre amicale.

Bonjour à toutes et à tous.

J'ai rencontré hier une amie, qui voulait discuter politique. Son esprit est vif, sa volonté forte, son enthousiasme très grand. Elle a une envie: "agir". Notre discussion part dans un peu tous les sens. Je me rends compte combien il est difficile d'expliquer la politique à quelqu'un qui n'en a qu'une vision externe, qui n'a jamais vécu, comme moi, de l'intérieur d'un parti, la politique. Comment expliquer le PS, ses tendances, son histoire, ses règles, ses comportements, sa culture, en une heure de temps! J'invite toujours à la prudence, à la patience, à la réflexion personnelle, à quelques lectures de base. J'ai tellement vu de nouveaux adhérents quitter le parti... au bout de six mois!

J'ai aussi une crainte: voir des qualités, curiosité, fraîcheur, disponibilité, gâchées, manipulées et finalement découragées. La politique, au PS ou ailleurs, est un monde à part, noble et terrible, où les échanges intellectuels ne sont pas toujours à la hauteur des enjeux, où les rapports humains n'ont pas la richesse qu'on pourrait attendre. Il y a une formule du moraliste Chamfort, au XVIIIème siècle, qui vaut encore aujourd'hui et dont on comprend toute la vérité en politique: "dans chaque ami, il y a la moitié d'un traître". Je n'exagère pas et ne sombre pas dans le pessimisme. Ce n'est qu'un banal et triste constat. La politique favorise les réflexes courtisans, les allégeances personnelles, les ambitions médiocres, les querelles mesquines. Comme dans la vie? Oui, mais pire que dans la vie, parce que la quête d'un bout de pouvoir, d'une place quelque part, d'un titre souvent dérisoire, tout cela renforce des sentiments bas, des attitudes médiocres.

Ne croyez pas que je baisse les bras, c'est tout le contraire! La politique est la plus belle chose au monde: se battre pour des convictions, essayer d'être utile aux autres, s'ouvrir à des problèmes souvent passionnants, rencontrer des personnes très différentes de soi, être persévérant, ambitieux au bon sens du terme, tout cela est formidable, et je crois qu'hier, avec mon amie, je n'ai pas assez insisté sur cette dimension-là. J'aurais bien du mal à renoncer à l'activité politique, qui pourtant, là où je suis, dans la situation qui est la mienne, est difficile, ingrate et même désespérante. Mais pas une seconde je ne suis désespéré! Peut-être parce que la politique, c'est la vie (mais ma vie ne se réduit pas à la politique, heureusement!).


Bonne matinée.

29 août 2007

Histoire de plumes.

Je vous conseille la lecture de la tribune de Bernard Poignant, qui a une plume alerte, dans Le Monde de cet après-midi. C'est plein de belles et bonnes remarques pour la refondation du socialisme, que je vous cite en vrac, et de façon non exhaustive: arrêter d'être complexé à l'égard de l'extrême gauche donneuse de leçons, assumer pleinement l'économie de marché, revendiquer le magnifique terme de "libéral", s'ouvrir au MoDem si le MoDem s'ouvre à nous, soutenir le nouveau traité européen pour réconcilier le oui et le non à la Constitution européenne au sein du PS (là, j'ai un peu plus de mal, mais ça va, j'accepte; reste à savoir si Fabius et Mélenchon feront de même),...

Poignant est un ancien et, je suppose, toujours rocardien. Or, Rocard vient d'accepter une mission, dans une commission, sur le métier d'enseignant. A t-il eu raison d'accepter la proposition de Sarkozy? Pour la France, pour les enseignants, bien sûr que oui. Rocard fera passer des idées de gauche, qui peut s'en plaindre quand on est de gauche? En revanche, pour le PS, c'est la cata. Nous nous faisons déplumer en beauté. Mais ne nous inquiétons pas trop, les plumes, parait-il, ça repousse.


Bonne nuit.

La retraite des patrons.

Bonsoir à toutes et à tous.

La patronne des patrons a fait sensation aujourd'hui en proposant de rallonger le temps de travail, pourquoi pas jusqu'à 65 ans. En soi, la mesure est une régression sociale évidente. La retraite à 60 ans, décidée par les socialistes en 1981, était un incontestable progrès. Fin du commentaire? Oui, si on refuse de réfléchir, de voir que la société a changé, que la durée de vie a augmenté, que les comptes sociaux se sont dégradés. On laisse les choses en l'état ou on fait quelque chose? C'est bien sûr la deuxième réponse qui s'impose. Mais faire quoi?

Il y a trois variables pour redresser le déficit des caisses de retraite et pour maintenir le système actuel, la répartition: augmentation des cotisations, diminution du montant des retraites, allongement de la durée de cotisation. Si j'avais un choix à faire entre les trois, en l'absence de tout autre paramètre d'intervention, je choisirais sans hésiter la troisième alternative, qui me semble socialement la plus supportable.

Mais je l'assortirais de deux conditions:
- Assurance absolue de ne pas toucher au système de répartition, c'est-à-dire la solidarité entre générations et catégories sociales.
- Modulation de la durée de cotisation selon les métiers, plus pour les uns, moins pour les autres, selon le degré de pénibilité de l'activité.

A quoi j'ajoute la mise en cohérence du patronat à l'égard de ses choix: c'est très joli de demander aux salariés de travailler plus longtemps et pendant ce temps-là de licencier, ne pas recruter ou mettre en pré-retraite les quinquagénaires. Que les patrons fassent leur travail, créent des entreprises et de l'emploi, après on verra.

En attendant l'indispensable grande réforme des retraites (et pas les demi-mesures de Fillon en son temps) que seule une majorité social-démocrate procédant par négociation et compromis conduira à bien, il faut défendre l'acquis social de la retraite à 60 ans.

Personnellement, je dis bien personnellement, enseignant de Terminales dans un lycée de province situé au centre-ville, travailler jusqu'à 65 ans ne me dérangerait pas, pourvu que le montant de la retraite soit préservé. Mais un collège qui a de nombreuses classes de quatrième dans une ZEP difficile, je suis sûr que lui n'a pas envie de prolonger trop âgé le métier, parce que surveiller, éduquer et instruire des gamins qui s'agitent dans tous les sens, c'est une forme réelle de pénibilité.


Bonne soirée.

L'ultra gauche.

Tout le monde connaît l'extrême gauche, aujoud'hui dominée par les trotkystes, avec sa petite frange anarchiste. L'ultra gauche, en revanche, est méconnue, et pour cause, étant essentiellement groupusculaire. Il n'empêche que ce courant est politiquement intéressant, et assez original, puisqu'il tente un retour radical à Marx en l'expurgeant du léninisme. Christophe Bourseiller en retrace les différentes tendances dans son Histoire générale de l'ultra gauche, parue chez Denoël, en 2003.

L'ultra gauche apparaît vers 1920, à travers la critique et le rejet de la société soviétique, donc du léninisme. Par la suite, l'ultra gauche refuse tout ce qui s'en inspire, trotskysme, stalinisme ou maoïsme. Pour autant, elle ne rejoint pas l'anarchisme, qui est originellement anti-marxiste, mais elle prend souvent des allures libertaires. L'ultra gauche va tenter de concevoir un marxisme radical, ouvert, basé sur les conseils ouvriers (ancêtre de l'autogestion). Son point commun avec la social-démocratie, mais qui s'arrête là, est dans le rejet du léninisme et l'appui direct sur l'oeuvre de Marx.

Deux phénomènes de l'ultra gauche méritent aujourd'hui encore notre attention intellectuelle: le groupe Socialisme ou barbarie dans les années 50 et surtout les situationnistes, qui ont fortement influencé Mai 68. La critique de la société du spectacle, devenue de nos jours une banalité sociologique, nous leur devons. Les situationnistes reprennent le concept marxiste d'aliénation et l'appliquent à la vie quotidienne, alors que Marx le cantonnait essentiellement au monde du travail. Ce qui nous donne le mot d'ordre de 68, repris quelques années après par le PS: "changer la vie", et pas seulement la société, comme le promettait le socialisme traditionnel.

Je pense que toutes ces pistes de réflexion sont utiles à une redéfinition du socialisme contemporain, en faisant bien sûr le tri. Il faut arrêter de croire que tout serait constamment à inventer. La nouveauté est un joli papillon, mais l'ancien est une valeur sûre.

L'ultra gauche n'a pas donné que de bonnes choses. Ultra, elle veut choquer, déconstruire, être à la pointe de l'anticonformisme. C'est ainsi que la Vieille Taupe, librairie d'ultra gauche, va dériver vers l'odieux négationnisme, remettant en cause l'existence des chambres à gaz hitlériennes. Comme quoi la raison n'est pas immunisée contre la folie criminelle.


Bon après-midi.

Deux choses incroyables.

Bonjour à toutes et à tous.

D'après Le Canard Enchaîné de ce matin, le gouvernement étudie le projet d'un impôt-plancher pour les contribuables des tranches supérieures... non imposables. Nicolas Sarkozy va s'en prendre aux plus riches! On débouche le champagne? Tout compte fait, non. D'abord parce qu'il est incroyable que le système fiscal français permette à certains très fortunés d'échapper à l'impôt. C'est fou, vous ne pensez pas? Et puis, je me dis que la décision du gouvernement n'est pas gratuite. Elle ne prouve pas sa générosité sociale mais tout le contraire: ayant multiplié les niches fiscales et, ces dernières semaines, les exonérations, c'est la fiesta pour les privilégiés, à tel point qu'il faut mettre le holà. Cet impôt-plancher signifie que la droite, en matière d'aide aux catégories aisées, a dépassé les bornes et qu'électoralement, à six mois des municipales, ça pouvait être compromettant.

Bertrand Delanoë estime que le problème du PS vient de ce qu'il est "un parti de notables"? Plus que l'UMP, qui a remporté les présidentielles? Je ne pense pas. De tout façon, le PS a toujours été un parti de notables à travers ses cadres, même si, dans les années 70, la vogue militante lui apportait quelque chose d'autre et de neuf. Je ne sais plus qui disait, Rocard peut-être, que la moitié du PS est constituée d'élus et l'autre moitié d'adhérents qui veulent être élus. Du coup, et Delanoë a parfaitement raison, le débat d'idées s'appauvrit et le conformisme s'installe. Car pour avoir des chances d'être élu, il faut d'abord être désigné par le parti. Et pour être désigné par le parti, il faut être soutenu et présenté par quelqu'un d'influent, c'est-à-dire par un élu. Dans ce but, le postulant devra faire ses preuves de fidélité, pour ne pas dire de soumission, à l'élu en question. Conséquence: pas d'échanges authentiques, pas d'opinions sincères, mais des interventions en vue de se faire remarquer par l'élu, de lui signifier que vous êtes parmi ses partisans, c'est-à-dire ses courtisans. Attention, je ne fais que décrire le système dénoncé par le Maire de Paris, je n'encourage pas mes lecteurs adhérents socialistes à le pratiquer!

Le problème du PS, c'est que le pouvoir y engendre le pouvoir, que le haut détermine les positions d'en bas. Le haut, ce n'est pas nécessairement la direction du parti, je ne fais pas de démagogie contre ceux "d'en haut". Le haut commence très bas, si j'ose dire, dans une section, quand un maire par exemple pèse sur les adhérents qui suivront spontanément ses consignes. Des sections peuvent basculer entièrement dans un nouveau courant si les élus le décident. Bien sûr, il y a parfois des difficultés et toujours des récalcitrants, mais en gros, le PS fonctionne ainsi. Ce qui signifie cette chose incroyable, la deuxième dont je vous ce matin: on connait à peu près le résultat d'un vote interne avant même... le vote! Voilà ce qu'il faut "faire péter", selon l'expression que je reprends à Manuel Valls. Y'a du boulot, camarades socialistes, courage!

A tous, bonne matinée.

28 août 2007

L'hyperéveillé.

Bonsoir à toutes et à tous.

A Paris, il y a l'hyperactif Sarkozy. Nous, à Saint-Quentin, on a l'hyperéveillé, Ministre du Travail. Le Courrier Picard du 25 août est venu l'interviewer au ministère: "il nous recevait pour un déjeuner sans façon" (le ministre est un homme simple). Que nous dit-il de sa rentrée? "J'ai retrouvé mes habitudes: un petit trois heures et demi de sommeil par nuit". Vous apprécierez la précision: un "petit" trois heures "et demi".

Si je vous cite ce passage, en soi inintéressant (tout le monde se moque du nombre d'heures de sommeil de Xavier Bertrand et de la couleur de ses pyjamas), c'est qu'à presque chaque entretien avec la presse, ce détail de sa vie qui lui tient manifestement à coeur revient sans cesse. Le ministre est obsédé, fasciné par son peu de sommeil, il s'en vante, le répète. Pourquoi pas, ce n'est pas grave. Mais je suis inquiet pour la suite, car à chaque interview, le nombre d'heures indiqué diminue! Il y a quelques mois, il dormait cinq heures par nuit, ce qui déjà relevait de l'exploit. Jusqu'où va-t-il aller?

C'est d'autant plus embêtant que Bertrand a été dans un précédent gouvernement Ministre de la Santé. Or, n'importe quel médecin vous dira que dormir "un petit trois heures et demi", c'est trop peu, c'est même dangereux pour l'état de veille. A moins bien sûr que le ministre ne soit un être exceptionnel, un surhomme (ne dit-on pas que Napoléon passait peu de temps au lit?). Non, un homme qui reçoit la presse picarde pour "un déjeuner sans façon" ne peut pas avoir cette vanité.

Xavier Bertrand a une autre formule qu'il aime répéter: "je ne suis pas aux 35 heures". Sous-entendu: je travaille beaucoup, pas comme ces paresseux qui sont en RTT. Toujours ce syndrome du temps, qui une fois de plus m'inquiéte. Car ce qui est important dans la vie, tout le monde le sait sauf lui, manifestement, ce n'est pas de travailler comme un fou et de dormir très peu, c'est de travailler bien, utilement, et de dormir correctement, sainement, sans se priver. Un écolier vous le dira: ce qui compte, c'est la qualité, pas la quantité.

Et puis, je vais vous dire: un petit trois heures et demi, ça fait combien sur une semaine? 24,5 heures. Et sur un mois? 98 heures. Vous vous rendez compte: en un mois, Xavier Bertrand dort 98 heures! C'est énorme, une vrai marmotte. Allez, Monsieur le Ministre, vous dormez mensuellement beaucoup trop. Encore un effort pour nous épater!


Bonne nuit (mais pas trop).

27 août 2007

La fin du capital.

Bonsoir à toutes et à tous.

J'exposais hier, en citant Jacques Attali, la théorie de la plus-value chez Marx. Je terminerai ce soir les extraits de son ouvrage en évoquant la théorie découlant de la précédente, et tout aussi complexe et discutable: la baisse tendancielle du taux de profit. Pour le dire autrement, la création de la plus-value, à la base de l'exploitation des salariés, va épuiser l'économie capitaliste et la conduire à sa perte. Voilà les explications que donne Attali (il faut un peu s'accrocher...), aux pages 353 et 354 de son ouvrage:

"Du fait de la concurrence, les entreprises utilisent de plus en plus de capital, sans dégager proportionnellement plus de profit, ce qui veut dire que le rapport entre la quantité de capital et la quantité de travail utilisées dans la production, la "composition organique du travail", augmente, entraîne mécaniquement une baisse du "taux de profit". Il devient alors économiquement impossible d'assurer aux propriétaires du capital la plus-value qu'ils peuvent politiquement exiger. C'est la crise."

Attali souligne alors une limite de cette pensée:

"La vérification empirique de sa théorie est impossible, car elle supposerait de pouvoir mesurer la valeur-travail, la plus-value et la composition organique du capital. Or ces grandeurs se mesurent, selon lui, en durées de travail, qui ne sont ni égales ni proportionnelles aux prix de ces biens, en raison des monopoles et de tout ce qui fausse la concurrence. Le profit n'est donc pas identique à la plus-value; la composition organique du travail n'est pas non plus égale à la rentabilité du capital, et le salaire n'est pas égal à la valeur d'échange de la force de travail."

Bon, il faut jouer avec les concepts, ce n'est pas évident. Marx, conscient de cette limite, va tenter en vain d'y remédier:

"Pour tenter de mesurer cet écart entre prix du marché et valeur d'échange, il griffonne des équations et imagine deux grandeurs intermédiaires entre la valeur d'échange d'un bien et son prix de marché: sa "valeur sociale" et son "prix de production". Il s'aperçoit alors que le "prix de production" n'est pas proportionnel à la "valeur sociale", et que les biens produits dans les industries utilisant le plus de capital ont un prix de production plus élevé que leur valeur sociale. De surcroit, il constate que les prix du marché diffèrent des prix de production parce que le marché n'est pas en concurrence parfaite. Il n'y a donc jamais,il ne peut y avoir proportionnalité entre le prix de marché d'un bien et sa valeur-travail. Et les prix, seules grandeurs mesurables, restent donc sans relation directe avec les valeurs-travail, seules grandeurs obéissant aux lois économiques qu'énonce Marx."

Je vous laisse digérer tout ça et je retiens très sommairement trois réflexions:

1- Le marxisme n'est pas le romantisme révolutionnaire à quoi on le réduit trop souvent. Qu'on l'approuve ou le conteste, c'est une analyse économique d'un système de production.

2- La contradiction de ce système, c'est l'écart entre le prix d'un produit et le coût de sa production.

3- Le capitalisme, aussi formidable soit-il, ne trouve pas l'équilibre, la parfaite adéquation entre ses moyens et ses fins. Il ne peut pas se maintenir en l'état, il est voué à se transformer.

Ne peut-on pas s'accorder là-dessus?


Bonnse soirée.

Nos amies les bêtes.

L'actualité dramatique d'une enfant qui meurt sous les morsures d'un chien, d'autres enfants violemment agressés, nous rappellent que la présence de centaines de milliers de ces animaux dans la société française pose un véritable problème politique, j'irai plus loin: un problème de civilisation. A Paris, les déjections canines constituent le dossier politique n°1. Les nuisances sont multiples: manquement à l'hygiène, aboiements intempestifs et le pire, les agressions multiples. L'existence massive de chiens, souvent en liberté, fait régner un climat d'inquiétude et de peur. J'avoue ne pas pratiquer certains sentiers de randonnée, de crainte de me retrouver face à des molosses surgissant d'une cour de ferme. Mais les villes, le soir, dans certains parcs, ne sont pas mieux protégées.

Je disais: problème de civilisation. Ce n'est pas excessif. Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, des millions de personnes remplacent les enfants et les compagnons par des êtres à quatre pattes qui sont, tournant hallucinant des sociétés occidentales, humanisés. Les panneaux "chien méchant"à l'entrée d'une maison, qui surprennent tellement les visiteurs étrangers, détruisent la civilité la plus élémentaire. Quoi de plus désagréable et discourtois que de voir un chien renifler vos fesses et parties génitales?

Contre ce mal contemporain, il est difficile de lutter. La vanité des maîtres leur fait dire qu'un chien "bien éduqué" ne mordra jamais personne. Leur perversité les fait sourire quand ils constatent que leur bête fait peur: "n'ayez pas peur et il ne vous mordra pas", comme si la peur était maîtrisable! En vérité, les hommes de notre temps ne savent plus ce qu'est un animal, c'est-à-dire une créature qui peut devenir dangereuse, surtout en présence d'enfants.

Alors que faire? Beaucoup de municipalités se sont dotées de motos-crottes, bacs à sable pour les besoins, ramasse-crottes pour la promenade du soir. C'est manifestement insuffisant, les merdes augmentent et les mâchoires se referment autant sur les mollets. Je suggère quelques pistes: les pénalités pourraient être alourdies et multipliées, mais le flagrant-délit de défécation n'est pas simple à établir. Le port obligatoire de la muselière dans les endroits publics serait une mesure radicale pour stopper les attaques, y compris pour les petits chiens, qui sont souvent les plus hargneux (les caniches par exemple). L'école a son rôle à jouer. l'instruction civique se doit de rappeler les droits et devoirs de chacun vis à vis des autres citoyens, la biologie enseigner la nocivité des bêtes en matière d'hygiène, l'histoire rappeler la lutte ancestrale des hommes pour se défendre des animaux, la philosophie exposer la dignité de l'homme et l'inconscience pulsionnelle de la bête. On pourrait même aller jusqu'à délivrer un permis de propriétaire de chien, comme pour la conduite ou la chasse, afin de dissuader les mauvais maîtres en les soumettant à des épreuves.

Pour finir, j'aimerai, après avoir parler de la protection des enfants et des hommes, exprimer une pensée pour nos amies les bêtes. Dans sa grande marche pour l'émancipation de l'humanité, le socialisme ne devrait-il pas songer aussi à l'émancipation des chiens et des chats? Combien sont-ils à vivre malheureux dans les petits appartements des grandes villes? Combien souffrent-ils des coups et hurlements de ceux qui osent se dire leurs "maîtres"? Le comble de l'indignité, c'est de voir une bête au bout d'une laisse ou s'aplatir aux pieds de quelqu'un qui la siffle. Ces comportements sont humiliants, et pour l'homme, et pour le chien. Laissons donc tranquilles les bêtes, qui se sont passées de nous pendant des millénaires.


Bon après-midi.

Je ne comprends pas.

Bonjour à toutes et à tous.

Tout s'explique parce que chaque chose a ses raisons. Il y a une rationalité évidente de nos actes. Laissez une liasse de billets sur le banc d'un jardin public très fréquenté, il est mathématiquement certain que les billets vont disparaitre dans l'heure. Ce qui signifie qu'il est anormal de ne pas comprendre un phénomène (sauf s'il est absolument inconnu). C'est ce qui m'arrive avec le vandalisme des gens du voyage.

Chez moi, à Saint-Quentin, une aire d'accueil a été aménagée pour les gens du voyage. C'est pour eux un grand progrès, voulu par une loi récente. Avant, en France, ils stationnaient dans un bout de champ, quand ce n'était pas près d'une décharge publique. Or, que se passe-t-il? Les installations électriques et sanitaires sont systématiquement détruites (et rien n'indique que ces méfaits soient causés par des personnes extérieures), les réparations sont financièrement lourdes, la police, la justice, la municipalité, malgré leurs efforts, ne parviennent pas à régler le problème. L'affaire tourne à l'absurde: les familles refusent d'occuper un endroit dévasté, s'installent ailleurs, sont chassées par la police et se réinstallent... une heure après. Pourquoi ne se sort-on pas de ce problème? Parce qu'on ne l'explique pas.

Le vandalisme des gens du voyage (tous ne sont pas responsables, évidemment) n'est pas comparable à celui des banlieues, quand les voitures, les bus, les écoles sont dévastés, pour quatre raisons:

1- Les banlieues sont en proie à la misère, à un environnement souvent délabré et inhumain, à une population atomisée, culturellement déstructurée, qui provoquent une rage sociale aux aspects irrationnels mais parfaitement explicables (quoique, pour moi, injustifiables).
Les gens du voyage forment une communauté forte, soudée, qui a préservé ses traditions et qui n'est pas nécessairement misérable. Souvent, des églises évangéliques puissantes encadrent cette population. Aucune rage sociale, aucun désespoir ne sont à l'origine du vandalisme.

2- Les banlieues brûlent un bus, une école, un bureau de Poste parce que ceux-ci représentent l'Etat, qui est devenu la cible de leur vengeance sociale. Aux yeux des vandales, l'école ne mène à rien, le bus est le symbole du pauvre qui n'a pas les moyens de s'acheter une voiture et qui vit dans un ghetto, la Poste est la banque des petits revenus et le travail du salarié faiblement rémunéré. S'en prendre à ces symboles qui jurent avec une société promettant à tous l'enrichissement n'est pas dépourvu de sens.
En revanche, une aire d'accueil pour nomades ne symbolise rien du tout, elle n'a qu'une fonction d'utilité, au seul service de ceux qui... la saccagent. C'est là où je ne comprends pas.

3- Les violences des banlieues résultent souvent d'interventions policières jugées provocatrices, visant des voyous qui ont intérêt à susciter un climat de peur afin de préserver leur commerce illicite.
Rien de tel chez les gens du voyage, qui sont les seules victimes d'acte générés par des membres de leur communauté.

4- Beaucoup de jeunes de banlieues sont chargés d'un passé douloureux. Leurs parents souvent immigrés ont connu la colonisation, puis l'humiliation des sales boulots dans une France en plein développement. Que les fils et petits-fils aient aujourd'hui des problèmes d'identité et d'héritage, c'est évident. Qu'ils les réglent (très mal) par la provocation (parfois islamiste) et la violence, c'est un fait désolant.
Mais les enfants du voyage vivent dans un tout autre milieu, une histoire entièrement différente. Certes, eux aussi ont été et sont parfois encore victimes de préjugés défavorables (le manouche voleur de poules), mais c'est sans commune mesure avec la condition des jeunes issus de l'immigration. Au contraire, dans une période de mondialisation qui prône la mobilité, les valeurs nomades sont au goût du jour.

Bref, je ne comprends pas, je n'explique pas et, par conséquent, je ne propose aucune solution à ce pourtant épineux problème de politique locale.


Bonne matinée.

26 août 2007

La fin des courants?

Bonsoir à toutes et à tous.

A tout bien réfléchir, en cette fin de week-end, je suis un peu plus optimiste sur l'avenir du PS, et ce faisant, je réponds aussi aux commentaires de Michel et de Val.

En relisant l'entretien de Vincent Peillon au Nouvel Observateur, je ne vois plus très bien, à quelques détails près, ce qui distingue le NPS (Nouveau Parti Socialiste) du courant strauss-kahnien (Socialisme et Démocratie).

A Frangy-en-Bresse, lors de sa traditionnelle fête de la Rose, Arnaud Montebourg s'est montré très ouvert, sans déclaration de guerre contre la direction du parti (un peu comme Ségolène hier), et surtout il avait convié ce que la presse appelle "les jeunes pousses", qui ne sont pas si jeunes que ça (la quarantaine), des camarades de tous courants: Gaëtan Gorce, fabiusien, Manuel Valls, jospiniste, Sandrine Mazetier, strauss-kahnienne, entre autres.

Arnaud et son courant "Rénover maintenant" organiseront comme chaque année, juste avant l'université d'été de La Rochelle, leur réunion à Fouras, avec parmi les invités notre camarade strauss-kahnien Pierre Moscovici. Cela aurait été inimaginable les années précédentes.

La situation évolue donc au PS, mais le chemin est encore long. Allons-nous vers la fin, du moins la relativisation des courants? Nous verrons bien.


Bonne soirée.

Le secret du capital.

Dans tout oeuvre philosophique foisonnante, on cherche le coeur, le centre, l'essentiel, le principal, le réacteur atomique du système. Pour Marx, selon Attali mais bien d'autres avant lui, c'est la théorie de la plus-value. Je sais que ce n'est pas très sexy d'évoquer cela un dimanche après-midi où le soleil enfin brille sur toute la France. Tant pis. Cette "découverte majeure", il la fait en 1855, et Jacques Attali la résume ainsi,page 235: "le salarié produit plus de valeur qu'il n'en gagne". Ce surplus, c'est la plus-value, le profit qu'empoche le capitaliste. C'est le secret du capital, c'est le ressort de l'exploitation. La marge que réalisent les entreprises ne provient pas des prix et de la vente, mais du travail et de sa rémunération (de sa sous-rémunération).

Il faut attendre 1866 pour que Marx mette par écrit cette théorie dans Le Capital. Je cite Attali dans son explication de celle-ci (pp 324-325):

"L'ouvrier ne vend pas le produit de son travail [...], mais la faculté pour un patron de disposer de sa force de travail pendant un certain temps [...]. Le temps est donc le véritable étalon de l'échange."

"La valeur d'usage du travail est égale à ce qu'il est capable de produire par son travail; sa valeur d'échange est égale [...] au nombre d'heures de travail nécessaires pour fabriquer ce dont il a besoin pour vivre. Sa valeur d'usage, c'est sa force de travail. Sa valeur d'échange, c'est ce qu'il reçoit pour la reconstituer."

"Là vient l'essentiel que nul n'avait exprimé ainsi avant Marx: un travailleur peut produire plus que ce qu'il coûte à produire. Sa valeur d'usage est alors supérieure à sa valeur d'échange. La différence - mesurée en heures de travail - entre ce que coûte au capitaliste le travail de l'ouvrier et ce qu'il lui apporte est la plus-value que s'approprie le capitaliste. Elle mesure l'ampleur de l'exploitation."

Saint Paul affirmait que si Christ n'était pas ressuscité, le christianisme s'effondrait. Il en va de même avec la plus-value: si cette théorie est inopérante, le marxisme est vain.


Bon après-midi.

La gauche se cherche.

La gauche se cherche, dans différentes directions, mais elle se cherche. Ce week-end l'atteste:

- La LCR se cherche en voulant disparaitre dans un grand parti anticapitaliste, qui réunirait tous les antilibéraux. C'est un serpent de mer, mais je souhaite qu'il se réalise, pour clarifier le paysage politique à gauche. Et si Besancenot pouvait entraîner dans son grand parti anticapitaliste tous les anticapitalistes du PS qui empêchent celui-ci de devenir une force sociale-démocrate, je lui en serai très reconnaissant.

- La LCR se cherche aussi du côté de ... Che Guevara, dont le portrait domine sa réunion de ce week-end. Pourquoi pas Trotsky? Mais pourquoi Che Guevara? Celui-ci a renversé une dictature et participé à la création d'une autre, puis s'en est allé en Afrique et en Amérique du sud pour susciter des révolutions qui ont échoué. A quoi sert-il de se référer aujourd'hui à Che Guevara, sinon sous forme de poster rouge dans une chambre d'adolescent? Pour la gauche, il n'y a rien à chercher de ce côté là.

- Lutte Ouvrière se cherche, timidement, du côté de la ... LCR. Arlette Laguiller, sur le site du Journal du Dimanche, affirme s'intéresser au grand parti anticapitaliste prôné par Besancenot. Je suis un peu surpris, je pensais cette obédience trotskyste un peu plus raide. Preuve qu'eux-aussi se cherchent ...

- Les radicaux de gauche cherchent les radicaux de droite. C'est en tout cas la reprise d'une rumeur corroborée tout de même par des faits, la rencontre cordiale Baylet-Sarkozy après les présidentielles, et maintenant les propos de Borloo qui reconnait qu'une tentative de réconciliation existe. La gauche qui se cherche à droite, ce n'est pas bon. J'espère que le PRG va réagir. Mais pourquoi ne le fait-il pas?

- Les Verts se cherchent à Quimper et semblent pour une fois ne pas s'engueuler. Mais attendons la fin de leur réunion, dimanche soir. Les 1,5% de Voynet à la présidentielle ont été une douche froide. Je leur conseille de se chercher du côté de l'un de leurs invités, Daniel Cohn-Bendit.

- Lienneman cherche Royal, au sens où elle veut lui régler son compte. Beau début dans le JDD d'aujourd'hui et dans un livre à paraître, "Au revoir Royal". Notre camarade Lienneman est une spécialiste de ce genre littéraire, les bouquins qui sortent après une défaite pour dire tout le mal qu'on pense des perdants. Elle avait fait de même contre Jospin. Cette néo-fabiusienne intervient dans le même sens que Mélenchon hier: critiquer, répéter que le PS n'a rien compris et proposer de mettre la barre à gauche. C'est simple, efficace et ça ne mange pas de pain. Sauf que ça n'apporte rien. La gauche ne doit pas se chercher des boucs-émissaires.


Bon après-midi.

8 septembre 1871.

Bonjour à toutes et à tous.

A propos de la social-démocratie, une question se pose souvent: quelle est sa date de création? Les socialistes français évoquent régulièrement le congrès de Bad Godesberg, en 1959, où le SPD allemand abandonne ses références marxistes. Certains souhaitent un "bad godesberg" à la française. Ce n'est pas la bonne date et ce n'est pas pour nous un rappel éclairant. En 1959, la social-démocratie allemande ne se constitue pas, elle existe depuis fort longtemps, politiquement et idéologiquement. Bad Godesberg est une formalité qui nous apporte peu.

Plus généralement, nous savons que la social-démocratie est une réalité et un courant ancien en Europe du nord, et nous situons confusément son origine au début du siècle dernier, certains voyant l'acte de naissance dans la séparation et la confrontation avec le communisme soviétique. En vérité non, la social-démocratie est plus ancienne, le mot autant que la chose. Jacques Attali propose une date très précise: le 8 septembre 1871. Ce jour-là, Karl Marx réunit l'Internationale communiste à Londres. Les discussions vont porter sur la Commune de Paris et sur son échec. C'est par rapport à cet événement (que la mémoire de la gauche française retient moins que 1789 ou 1936, hélas) que la social-démocratie va se constituer. 1871 est l'aboutissement de plusieurs décennies d'agitation révolutionnaire en Europe, qui n'ont pas vu la victoire du socialisme. Pour Marx, il faut en finir avec les barricades, sur lesquelles on meurt mais qui ne font pas vivre une société nouvelle:

"Cette confirmation de son légalisme et de son refus de la révolution violente en démocratie est acceptée par les dirigeants de l'Internationale. La social-démocratie est née. Cette réunion de Londres restera dans l'Histoire comme le moment où, à l'initiative de Marx et contre l'air du temps, le mouvement socialiste choisit clairement la voie parlementaire, même s'il ne dit pas encore aussi clairement que le pouvoir acquis par les urnes peut être aussi perdu par les urnes" (page 383).

Karl Marx est donc le premier social-démocrate, à une époque où le mouvement communard va réactiver dans les années qui suivront l'anarchisme. En 1883, Marx meurt et c'est Engels, le meilleur ami, qui poursuit son oeuvre philosophique et politique, dans un sens sans doute moins favorable à la social-démocratie (Engels reste attaché au rôle de la violence dans l'Histoire). En 1895, Engels meurt et son exécuteur testamentaire est Edouard Berstein, admirateur et critique de Marx, dont il va "réviser" la pensée, c'est-à-dire l'adapter au nouvelles circonstances de son époque. C'est là, autour de 1900, que se constitue véritablement, conceptuellement, la social-démocratie (qu'on appellera et qui s'appellera elle même "révisionnisme").

Pour me résumer: Marx est le premier social-démocrate et Berstein est le fondateur de la social-démocratie. Lénine et Trotsky, bien que se référant à Marx, inventent autre chose, donnent une nouvelle version, qui est plus du léninisme que du marxisme. Les différences entre les deux seraient très faciles à établir. Dans sa pratique politique, Lénine ne cessera de se référer à la Révolution française de 1789 et aux jacobins, qui trouvent peu leur place chez Marx, pour qui 1789 est un mouvement bourgeois. Quant à Trotsky, c'est une variante du léninisme qu'il va théoriser, lui qui a une origine... anarchiste. Bref, le léninisme, qui est le fond et la tragédie du communisme, est une interprétation imparfaite, impure, du marxisme, un mélange incongru de marxisme, d'anarchisme et de jacobinisme.

A ce propos, il est intéressant de noter que l'ultra gauche, qui émergera après et en réaction à 1917, prétendra renouer avec le marxisme authentique en critiquant le léninisme, alors que l'extrême gauche (trotskyste puis maoïste) assumera totalement le léninisme, les maoïstes allant encore plus loin et englobant le stalinisme (mais ne sont-ils pas d'une rigoureuse cohérence intellectuelle et historique?). Je vous reparlerai un peu plus tard de cette ultra gauche, puisque Christophe Bourseiller lui a consacré un ouvrage.

Pour conclure en ce dimanche matin décidemment très conceptuel, je vous dirais que le marxisme, de part sa philosophie de l'Histoire, est condamné à être interprété, révisé constamment, à la différence des pensées de Platon ou de Spinoza, qui sont fixes, définitives. Il ne peut pas y avoir d'orthodoxie marxiste puisque cette doctrine s'inscrit dans le cours de l'Histoire, qu'elle est appelée à le suivre et à s'adapter. Il reste cependant les concepts fondamentaux que Marx a élaborés, qui demeurent valides pour autant qu'on les adapte à leur temps, sinon ce ne sont que des pièces de musée, des curiosités historiques et non pas des idées vivantes.


Bonne matinée.

25 août 2007

Un début de rentrée.

Bonsoir à toutes et à tous.

Je n'ai pour l'instant que de simples échos de la rentrée politique de Ségolène Royal à Melle, qui était annoncée comme un événement important. Son discours ne contient semble-t-il rien de très nouveau. Mais peut-il y avoir, à l'heure où nous sommes, quelque chose de neuf sous le soleil socialiste? Les débats collectifs n'ont pas encore commencé. Ségolène a manifestement confirmé son orientation social-démocrate, avec cette formule banale mais toujours choquante pour bien des socialistes: "le marché nous est aussi naturel que l'air qu'on respire". Tactiquement, notre ancienne candidate à la présidentielle n'a lancé aucune offensive interne, elle que certains camarades soupçonnent de vouloir créer son propre courant et préparer la conquête du parti au prochain congrès. J'ai l'impression que les fortes personnalités se détournent du PS. Que va-t-il nous rester?

Il y a au moins un socialiste qui a réagi à cette rentrée, qui s'est fendu d'un communiqué pour critiquer, mais Jean-Luc Mélenchon, puisque c'est de lui dont il s'agit, a fait de la protestation une profession et presque une seconde nature. C'est vivant mais ça débouche sur quoi? Jean-Luc nous dit que le discours de Ségolène est "irréel" et qu'il n'ira pas à l'université d'été de La Rochelle parce que ça ne sert à rien. Et son communiqué, à quoi sert-il? Si le débat entre socialistes commence par une absence de débat, nous ne sommes pas très bien partis.

Michel Rocard exprime ses doutes dans Le Parisien, renforcés par un sondage qui montre à quel point le PS a perdu de sa crédibilité auprès de l'opinion. Je le cite: "il faut des lieux où on pense et cela ne peut pas être dans les partis [...]. On ne peut pas réfléchir dans des conditions soumises à des votes". C'est hélas très vrai, et encore plus vrai à la base, dans les sections, qu'au sommet du parti, dans les instances nationales. La vie de ma section est édifiante: du bla-bla à décourager les meilleures volontés, des positionnements purement personnels, la soumission à ceux qui ont un bout de pouvoir, des clans qui s'interdisent d'être à la même table,... Lamentable! Il faut bousculer tout cela. Je compte beaucoup sur les nouveaux adhérents, pas encore atteints par le cynisme et la manipulation, les jeux de pur pouvoir. Tout serait tellement plus simple si chacun était pleinement socialiste, libre, réfléchi, guidé par les seules convictions! J'en rêve et je crois que c'est possible. Le parti doit changer de culture politique. C'est pour nous tous une question de vie ou de mort. L'époque du militant qui obéissait aveuglément à la première consigne téléphonée, qui avalait des couleuvres avec le sourire, est terminée. Du moins je l'espère et je le veux.

Demain, il faudra être attentif au discours de rentrée d'Arnaud Montebourg, qui en dira peut-être plus que Ségolène, dont il est proche. Le club des Gracques, d'inspiration social-démocrate, tiendra une réunion à La Villette, avec parmi les invités Philippe Val et Michel Rocard. A suivre aussi.


Bonne soirée.

La vérité des anars.

Revenons au Marx d'Attali, qui nous rappelle que l'idéologie dominante à gauche tout au long du XIXème siècle et jusqu'à la fin de la 1er guerre mondiale, ce n'est pas le communisme mais l'anarchisme, depuis totalement marginalisé. Le grand adversaire philosophique de Marx, c'est l'anarchiste Proudhon, et son grand adversaire politique, c'est un autre anarchiste, Bakounine. Sur l'image que nous nous faisons de Marx et de sa pensée, le XXème siècle communiste a apporté un filtre qui nous les rend aujourd'hui difficilement lisibles. En son temps, par comparaison avec les anarchistes, Marx est un brave social-démocrate, politiquement modéré (je dis bien: par rapport aux anarchistes, qui sont à tout point de vue des radicaux).

Ses propositions n'ont rien d'extravagantes ou d'utopiques, il y a du réalisme en lui. Les moyens qu'il préconise ne sont pas exceptionnels. Je me demande même si, à la fin de sa vie, Marx est encore révolutionnaire (au sens d'un renversement du pouvoir par la violence). La société sans classes? Il ne l'évoque qu'en quelques pages, très vaguement, comme si l'essentiel n'était pas là.
Où alors? En fait, la radicalité de Marx, car elle existe, sinon l'Histoire n'aurait pas retenu son nom, est philosophique, elle réside dans son analyse fondamentale (c'est-à-dire qui descend jusqu'aux fondements) du capitalisme. Il en décrypte comme personne et surtout pas les anarchistes le mécanisme et le devenir. Marx est même l'inventeur d'une nouvelle catégorie de pensée, la philosophie économique. Avant lui, il y a eu la philosophie morale, la philosophie politique, la philosophie esthétique.

La radicalité politique des anarchistes les condamnait à disparaitre. Pourtant, ils ont eu une terrible lucidité à propos de Marx et de ses idées. On se demande à partir de quand le communisme est devenu liberticide. La réponse est chez Bakounine, au IIème congrès de la Ligue pour la paix et la liberté, à Berne, en fin septembre 1868 (cité par Jacques Attali, page 348):

"Je déteste le communisme parce qu'il est la négation de la liberté et que je ne puis concevoir rien d'humain sans liberté. Je ne suis point communiste parce que le communisme concentre et fait absorber toutes les puissances de la société dans l'Etat, parce qu'il aboutit nécessairement à la centralisation de la propriété entre les mains de l'Etat." (c'est moi qui souligne)

Et certains intellectuels oseront dire, bien plus tard, qu'ils ne savaient pas? Et toute une partie de la gauche devra attendre plus d'un siècle après ce texte pour enfin ouvrir les yeux?

Je vous laisse méditer tout cela en cet après-midi où le soleil nous revient.


A tout à l'heure.

Le temps des fusées.

De Pierre Boulle, tout le monde connaît Le pont de la rivière Kwaï et La planète des singes, parce que ces romans ont été adaptés au cinéma. Le jardin de Kanashima, que j'avais lu adolescent et que j'ai relu cette semaine, est un bon roman peu connu qui conduit aussi à une réflexion politique. Au sens propre du terme, c'est une oeuvre d'anticipation puisque Boulle imagine en 1964 ce que sera la conquête de la Lune, qu'il fixe pour 1970 (au lieu de 1969, pas mal!). La grande différence avec la réalité, c'est que le premier homme sur notre satellite naturel n'est pas américain mais... japonais. Je ne vous en dis pas plus, le dénouement est surprenant. Techniquement, Boulle a bien saisi le problème d'un voyage lunaire: c'est celui du retour et du carburant nécessaire.

Politiquement, le roman me conduit à plusieurs réflexions:

- Nous devons très largement la conquête de l'espace aux travaux de... l'Allemagne nazie, avec ses fusées V1 et V2. Le personnage de Von Schwartz n'est autre que Von Braun, savant allemand récupéré par les américains et père de leur programme spatial.

- Dans les années 50, les pionniers de l'espace sont les soviétiques, qui mettent en orbite le premier satellite, font voyager un homme autour de la planète et atteignent la Lune. C'est la grande époque, oubliée aujourd'hui, du communisme triomphant. L'Amérique est alors perçue comme une nation retardataire et juste bonne à balancer des bombes atomiques.

- Dans les années 60, les américains prendront leur revanche grâce à un homme qui ne verra pas le résultat le plus spectaculaire de sa politique, Kennedy, qui comprend très vite une chose maintenant évidente mais à l'époque discutable: la nation qui mettra le pied sur la Lune accomplira un acte que l'humanité n'oubliera plus jamais et qui effacera des mémoires le rôle initial des russes.

- Et ce sera le début d'une incroyable course à la Lune entre les deux superpuissances, mobilisant des budgets faramineux, usant de la désinformation. On a aussi oublié qu'à l'époque la Lune provoque le scepticisme des politiques, des financiers, des scientifiques. A quoi bon tant d'argent pour une expédition incertaine et inutile? Pour Kennedy, la Lune est avant tout un objectif politique et idéologique.

- J'en termine avec une considération plus générale. L'ordinateur sera sans doute la technique majeure du XXIème siècle, tout comme le moteur au XIXème siècle. Pour le XXème, et on ne le dit pas assez, c'est la fusée. D'abord parce qu'elle a réalisé ce prodige d'atteindre la Lune et d'ouvrir un nouveau cycle dans l'histoire de l'humanité, la conquête de l'espace et des astres. Ensuite, et c'est moins réjouissant, parce que la fusée a bouleversé la stratégie militaire avec l'invention du missile nucléaire et le concept de la dissuasion. La fusée nous fera vivre en allant vers les étoiles ou nous fera mourir dans la guerre atomique.


Bon appêtit et à plus tard.

Les pauvres et les fous.

Le maire UMP d'Argenteuil est gêné par la quinzaine de SDF qui perturbent par leur odeur et leur présence la vie de sa commune. Un arrêté anti-mendicité, pris en 2005, n'a pas découragé les indésirables. Monsieur le maire a donc opté pour une autre stratégie, combattre le mal par le mal, l'odeur par l'odeur. Un puissant répulsif, habituellement utilisé pour chasser les animaux aux comportements nuisibles, est répandu dans les endroits fréquentés par les SDF afin de les dissuader des les occuper.



Le président UMP de la République française a décidé de bouleverser le droit national. L'un des principes fondamentaux de celui-ci, jusqu'à ce jour, affirmait solennellement qu'un fou, aussi abominables que soient ses actes, était déclaré irresponsable, par conséquent n'était pas traduit devant la Justice. Un procès ne peut en effet, c'est la base même du droit, que traduire devant les juges un individu responsable de ses faits et gestes, un esprit normalement raisonnable. Sinon, la procédure perd tout son sens. Nicolas Sarkozy a rompu avec cette tradition au nom d'une nouvelle juridiction, dont il est l'inventeur depuis hier, le "droit des victimes". Dans une société dont la particularité est que chacun se sent victime de quelqu'un ou de quelque chose (lisez à ce sujet La société des victimes, de Guillaume Erner, La Découverte, 2006), ce nouveau droit est promis a un grand succès. Je crois même que c'est la raison principale pour laquelle Sarkozy tente de le promulguer. Nous verrons bien ce qu'en dira la magistrature française.

Dans les deux cas que je viens de citer, aucun problème n'est réglé, ni la mendicité, ni la folie perverse et meurtrière. Ils sont déplacés. Les clochards chassés par le répulsif iront ailleurs, le fou retournera en hôpital psychiatrique. C'est la méthode Sarkozy: le déplacement, qui généralement est de nature médiatique. Prenez le problème de l'insécurité dans certains quartiers: Sarkozy, ministre de l'Intérieur, le règlait à coups de descentes de police spectaculaires et télévisées. Rappelez-vous le centre de rétention de Sangatte, une plaie pas très belle dans la République française. Sarkozy a trouvé la solution: fermer le centre. Cet homme est génial! Il est hyperactif et hypersimple dans ses raisonnements. Maintenant, les clandestins errent dans tout le Pas-de-Calais, mais ça ne se voit pas au journal télévisé de 20h00, donc le problème n'existe plus. Le camarade UMP d'Argenteuil adopte le même raisonnement. Ce que le président et le maire proposent aux français, ce n'est pas la résolution de leurs problèmes, c'est la consolation. Voilà pourquoi, depuis sa rentrée de lundi dernier, Nicolas Sarkozy ne passe pas une journée sans s'afficher aux côtés d'une victime. Il y a des mots à la mode qui désignent ce comportement: l'empathie, la compassion.

Permettez-moi d'adopter un tout autre comportement et raisonnement. Je crois que le degré d'humanité d'une société, son niveau d'évolution ou de régression, se mesurent à son attitude envers les plus faibles, les pauvres et les fous. S'en prendre aux uns ou aux autres, même pour d'excellentes raisons (et l'élu d'Argenteuil comme l'élu de la France n'en sont pas dépourvus), n'est pas un signe de haute civilisation. Hier soir, je vous parlais de Marx et de son attitude à l'égard du travail des enfants. Ceux-ci font aussi partie des faibles, c'est donc également dans la façon dont nous les traitons qu'on juge une société.


Bonne suite de matinée.

Raymond Barre.

Bonjour à toutes et à tous.

J'apprends ce matin la mort de Raymond Barre et je me reporte en août 1976. J'ai alors 16 ans, je suis bêtement de gauche, il fait très chaud mais les vieux ne meurent pas, on ne parle pas de "canicule" et seuls les agriculteurs se plaignent. Chez moi, la télévision a été installée depuis quelques semaines seulement. Je suis devant le petit écran. Qui va succéder à Chirac? "Le meilleur économiste de France", proclame Giscard. Je suis dégoûté par tant de prétention. Et puis, pour moi adolescent, l'économie, c'est l'argent, le commerce, les patrons, l'exploitation: beurk! Plus tard, Barre parlera d' "austérité": re-beurk! Traduction de mon grand-père communiste: "il va falloir se serrer la ceinture".

Aujourd'hui, je suis toujours de gauche mais j'ai complétement changé. Ce qui est important en politique, c'est l'économie. Les belles idées ne sont rien sans leurs moyens financiers. L'austérité, que Jacques Delors appellera moins sévèrement la "rigueur" en 1983, est une nécessité: vivre avec une dette extérieure gigantesque et des comptes sociaux totalement déséquilibrés, ce n'est pas sain et ça ne permet pas de mener une politique de gauche.

Je n'en suis pas devenu pour autant barriste, même en ce jour où je rends hommage à celui qui nous a quitté. Raymond Barre était fondamentalement un homme de droite, ce qui n'est pas une tare mais un choix. Il se trouve que je suis fondamentalement un homme de gauche. Ses propos ambigüs lors de l'attentat de Copernic, aggravés par la suite, son assimilation des fonctionnaires à des "nantis", son populisme distingué lorsqu'il dénonçait le "microcosme" politique, tout cela n'entre pas dans ma culture.

Barre, dans la forme, c'était l'anti-Sarkozy. Celui-ci fait tout pour plaire, celui-là faisait tout pour déplaire. Je pourrais apprécier une telle attitude qui tranche avec la démagogie vulgaire de la droite actuelle. Mais je me demande si, chez Barre, être impopulaire n'était pas une forme paradoxale de populisme! Car ne pas vouloir être populaire (à mes yeux une qualité en politique) n'exige pas son contraire, rechercher l'impopularité et s'en délecter.

Je terminerai sur ce qui aura été le dernier grand combat politique national de Raymond Barre, les présidentielles de 1988. Face à Mitterrand, il aurait été le meilleur candidat de la droite, le plus digne, le plus compétent. Mais déjà, la démagogie était la plus forte et c'est Chirac qui l'emportera... pour faire perdre son camp au second tour.


Bonne matinée.

24 août 2007

Deux mensonges.

Hier, je dénonçais le mensonge de Borloo à propos de la situation climatique, le ministre de l'environnement établissant un lien, selon moi erroné, entre l'été pluvieux et le dérèglement climatique. Je suis allé voir du côté de Météo France et des climatologues. Confirmation du mensonge: l'été 2007 a été très pluvieux, mais c'était déjà le cas en 1977 et 1954, avec ces année-là des températures encore moins clémentes. Les spécialistes rappellent qu'un été pluvieux de temps en temps est dans l'ordre des choses.

Passons maintenant au mensonge de Sarkozy. Après son élection, il promettait personnellement que la déduction d'impôts sur les intérêts des prêts immobiliers toucherait tous les propriétaires, y compris rétroactivement à la mesure. Promesse impossible à tenir, tellement injuste qu'elle en devenait anticonstitutionnelle. Donc Sarkozy, l'homme qui peut tout, a reculé, n'a rien pu faire. Ah si: au lieu des 20% de crédit d'impôts pour ceux qui y auront droit, ce sera 40%. Voilà ce que Sarkozy appelle "tenir malgré tout sa promesse". Il ne tient rien du tout et fait preuve d'une drôle de logique, donnant plus aux uns parce qu'il n'a rien pu donner aux autres!

Tout cela est carnavalesque. Nous sommes entrés dans ce que Platon appellait le "régime populaire", où le pouvoir est prêt à tout pour faire plaisir au peuple, en matière économique, sociale ou judiciaire. Chirac, dans son bon sens, avait une formule pour qualifier cette politique: "plus c'est gros, mieux ça passe". Jusqu'au jour où ça ne passera plus.


Bonne nuit.

Les enfants de Marx.

Bonsoir à toutes et à tous.

Dans l'ouvrage de Jacques Attali sur Karl Marx, un point retient mon attention: l'attitude de Marx à l'égard du travail des enfants. Pages 337 et 338, Attali se réfère à un congrès de l'Association internationale des travailleurs, du 3 au 8 septembre 1866, à Genève. Alors que le travail des enfants est combattu par les syndicats, voilà ce que l'AIT, avec l'approbation de Marx, adopte:

"L'industrie moderne nécessite le travail productif des enfants, limité à deux heures par jour à partir de neuf ans, quatre heures à partir de treize ans, et six heures à partir de seize ans [...]. Nous considérons la tendance de l'industrie moderne à faire coopérer les enfants et les adolescents des deux sexes dans le grand mouvement de la production sociale comme un progrès et une tendance légitime et raisonnable, quoique le règne du capital en ait fait une abomination." (c'est moi qui souligne les deux termes)

Plus loin, Attali revient sur la question (pages 415 et 416), en citant un texte de Marx rédigé en 1874, connu sous le titre de "Critique du programme de Gotha":

"Une interdiction générale du travail des enfants est incompatible avec l'existence de la grande industrie et est donc un souhait pieux et vide" (idem). Cependant, Marx défend l'éducation gratuite du peuple: "le fait de combiner de bonne heure le travail productif avec l'instruction est un des plus puissants moyens de transformation de la société actuelle."

Quelques réflexions à propos de ces extraits:

- Je regrette à nouveau l'absence de renvois précis aux oeuvres originales. Il faudrait, si on veut faire un travail sérieux, vérifier la traduction et surtout le contexte. Les phrases dégagées du corps du texte peuvent occasionner des contresens. Ceci dit, partons de ce que nous donne imparfaitement Attali.

- Vous êtes sans doute, comme moi, surpris de voir, sous la plume d'une organisation révolutionnaire influencée par Marx, la non condamnation du travail des enfants. On se demande classiquement d'où vient la tragédie du communisme, s'il faut en exonérer Marx et accabler son plus proche compagnon, Engels (certains attendent Staline pour repérer une dérive mortelle). Avec cette position sur le travail des enfants, le ver est dans le fruit, si j'ose dire. Récusant toute réforme, soutenant tout processus révolutionnaire, y compris et surtout celui du capitalisme productiviste, Marx en vient à défendre le travail des enfants dans les usines.

- Sans renier mon propos précédent, il faut le nuancer (Marx voudrait l'émancipation de l'humanité mais pas des enfants?!). Au XIXème, le travail des enfants est considéré par beaucoup comme normal. Les paysans, pendant longtemps (encore aujourd'hui?), se feront aider par leurs enfants dans le travail des champs. Notez bien que Marx encadre ce travail, limite sa durée, et précise, c'est toute l'ambiguïté du texte et, au-delà, peut-être du marxisme entier, que ce travail des enfants est "abominable" en l'économie capitaliste. On pourrait penser que cet adjectif vaut condamnation, mais non. Il laisse supposer qu'en économie communiste, ce travail couplé à l'éducation aura du bon.

La vérité du marxisme sortant non de la bouche mais du travail des enfants? A réfléchir...


Bonne soirée.

Zorro est arrivé.

Un ami me fait remarquer que je parle trop de Nicolas Sarkozy sur ce blog, que c'est lui fait trop d'honneur, que je me transforme en agent publicitaire, que j'entre dans son jeu qui consiste à se placer constamment au centre du jeu, etc. Je réponds à mon ami qu'on me faisait le même reproche il y a quelques années en dénonçant Le Pen et le danger de l'extrême droite. Chut, n'en parlez pas, ne leur faites pas de publicité.

J'avoue ne pas comprendre cette critique. Si ce n'était pas un ami, je ne serai pas loin de le soupçonner de lâcheté. Faire de la politique, c'est avoir des opinions et les exprimer, quand on a la chance de vivre en démocratie. Le reste, les conséquences, les avis des uns et des autres, je m'en fiche. Sarkozy aime qu'on parle de lui, je parle de lui, et alors? Mon but est de convaincre que sa politique est néfaste, en argumentant mes objections, voilà tout. Pour ce faire, il faut bien que j'en parle, je ne vais pas rester muet ou allusif. Je vais même plus loin. Sarkozy a choisi de se placer au centre de la vie politique. Eh bien, rajoutons-en, parlons de lui jusqu'au dégoût, insistons chaque jour sur la responsabilité qui est la sienne, puisqu'il l'a voulu ainsi.

De fait, nous soulignerons une grave maladie de la société française. Car un peuple qui croit que la résolution de ses problèmes passe par l'action d'un seul homme vit un état infantile, régressif. Aucune société normale, pacifique, démocratique dans le monde ne fait reposer son sort sur un unique individu, aussi énergique et talentueux soit-il. J'aurais même tendance à croire qu'une société ne surmonte ses difficultés que par une mobilisation collective, pas dans une aventure personnelle.

Prenez les déclarations de Sarkozy, mais oui, encore lui, ce matin au pays basque. En commentant un fait divers tragique où le criminel a été rendu irresponsable par la médecine, le chef de l'Etat a dit, en substance, qu'il ne fallait plus désormais penser aux délinquants mais se préoccuper du "droit des victimes". Ces propos, qui ne sont pas nouveaux dans la bouche du premier magistrat de France, sont proprement odieux, indignes d'un président de la République. On ne joue pas ainsi, par démagogie, pour plaire, pour satisfaire les bas instincts qui sont en chacun, avec des crimes abominables. Je ne sais pas ce qu'est le "droit des victimes", je ne connais que le droit tout court, la loi égale pour tous. Parler d'un "droit des victimes", c'est supposer qu'il y aurait un "droit des bourreaux", ce qui est tout aussi faux, absurde, inintelligent.

Bien sûr, je ne suis pas naïf, Sarkozy est un malin, qui veut faire croire qu'avant lui, moderne Zorro, les victimes étaient abandonnées et les délinquants acquittés, du moins moralement. Comme si, avant Zorro Sarkozy, il n'y avait pas de procureurs, de juges, d'avocats, bref de justice et de lois chargés de défendre la société, de protéger et d'indemniser les victimes, de punir et d'emprisonner les coupables! Comme s'il n'existait pas des sciences, la psychiatrie, la psychanalyse, qui ont des informations pertinentes à donner sur l'état mental des accusés. Qui est-il, lui, Sarkozy, pour prétendre tout savoir, tout faire, tout être, justicier, médecin et le reste? Je continuerai donc à en parler, à le critiquer, à dénoncer ses faits et gestes, à démonter sa politique, jusqu'à ce qu'il parte, et même après.


Bon après-midi.

Maoïsme.

Bonjour à toutes et à tous.

Comme je vous l'ai dit à mon retour de Paris, je vais vous parler de quelques lectures qui ont retenu mon attention et suscité parfois ma passion. Je commencerai par le livre de Christophe Bourseiller, Les maoïstes, la folle histoire des gardes rouges français, paru en 1996, chez Plon. Bourseiller est un journaliste de qualité, remarquable spécialiste de l'extrême gauche française. Ce n'est pas un historien mais ses travaux ont des qualités universitaires. Je ne sais pas s'il est l'inventeur du concept de "micro-histoire" mais il utilise ce terme, qui désigne l'intérêt historique qu'on peut avoir pour des groupuscules, des noms, des dates, des lieux, des épiphénomènes que ne retient pas la grande histoire et qui pourtant l'influencent partiellement. C'est le cas du maoïsme français, oublié aujourd'hui de tous, le seul courant d'extrême gauche qui a totalement disparu, dont l'histoire mérite cependant rappel et réflexion. Je vous en résume les traits les plus saillants et les plus originaux:



1- Le maoïsme est un socialisme total (et bien sûr totalitaire) qui trace une continuité idéologique entre Marx, Engels, Lénine, Staline (mais oui!) et évidemment Mao.



2- Il est accompagné en 1966-1967 par une mode vestimentaire et culturelle (col Mao, film de Godard, chanson de Dutronc, etc). Le Grand Timonier exalte les militants et les midinettes!



3- Il se divise en prochinois orthodoxes et "maos" très intellos, ces derniers réunis dans la mythique "Gauche prolétarienne" qui recrute essentiellement... rue d'Ulm, à Normal Sup!



4- Les prochinois, par anti-impérialisme, appellent à voter de Gaulle en 1965 et soutiennent, par antisoviétisme, Giscard à la fin des années 70. Bourseiller évoque même, en annexe, une tentative de l'extrême droite de créer un "nazi-maoïsme".

5- Le maoïsme français est l'inventeur d'un populisme d'extrême gauche, en soutenant par exemple le néo-poujadiste Gérard Nicoud, défenseur des petits commerçants et en menant une campagne passablement délirante, à Bruay-en-Artois, contre le juge Pascal.

6- Le pire du maoïsme, c'est sa postérité terroriste dans les années 70, qui n'a cependant pas atteint le degré de violence des Brigades Rouges ou de la bande à Baader.

7- Le meilleur, et le plus surprenant, c'est l'inspiration des divers mouvements de libération (femmes, prisonniers, homosexuels, immigrés, etc), c'est l'évolution des moeurs, que l'on doit notamment au groupe de Roland Castro, "Vive la Révolution", et son journal "Tout".

L'an prochain, nous fêterons les 40 ans de Mai 68. N'oublions pas l'apport paradoxal du maoïsme à un événement fondateur de la société et des mentalités contemporaines.


Bonne journée.

23 août 2007

La République des Idées.

Bonsoir à toutes et à tous.

Je vous recommande vivement, dans notre objectif de refonder une social-démocratie pour notre temps, la lecture de tous les ouvrages de la collection "La République des Idées". Ce sont des livres très courts (une bonne centaine de pages), très denses et qui donnent à réfléchir pour qui veut moderniser le socialisme. Le directeur de collection est Pierre Rosanvallon, un rocardien historique, sociologue et politologue de renom (ses travaux sur la représentation politique, la légitimité du pouvoir démocratique et l'histoire de la République sont remarquables). Si vous passez par la librairie parisienne Gibert, comme je l'ai fait la semaine dernière, allez au rayon "philosophie politique", vous aurez la plus belle exposition que je connaisse, dans la capitale, des ouvrages de cette collection. Tous les thèmes centraux de l'époque (insécurité, questions sociales, femmes, immigration, etc) sont abordés.

Je vous donne un exemple d'un livre de la République des Idées (titre au demeurant fort bien choisi, car la République se meurt de ne pas avoir suffisamment d'idées) dont j'ai lu certains passages et qui m'a semblé utile à mes réflexions sociologiques: La fatigue des élites, sous-titré Le capitalisme et ses cadres, de François Dupuy, paru en 2005. Je résume la thèse, qui corrobore certaines idées que j'ai développées sur ce blog: les cadres, qui représentaient 4% des actifs en 1960, sont passés aujourd'hui à 15%. Ils forment une véritable classe sociale, en crise, ni dirigeants de l'entreprise, ni purs exécutants. Ils traversent une crise d'identité qui est aussi une crise d'expansion, de transformation de leur fonction, de fragilisation de leur condition. Pour Dupuy, les ferments d'un changement social, d'une contestation efficace du capitalisme, ce sont eux, les personnels d'encadrement, et non pas la classe ouvrière traditionnelle. Je vais vite dans la synthèse, mais lisez, c'est stimulant pour l'esprit.

A cette collection, qui doit être la référence et la lecture de base de tout bon social-démocrate, le vade-mecum du réformiste authentique, j'opposerai une autre collection qui, étrangement, lui ressemble dans le format (livres courts, très maniables, sujets polyvalents): la collection "Raisons d'agir", d'inspiration radicale, gauchiste, extrême gauche, gauche de gauche, altermondialiste, antilibérale, prenez l'expression qui vous convient, vous m'avez compris. Je prends là aussi un exemple d'un titre tout à fait éloquent, feuilleté chez Gibert la semaine dernière: Le mythe du trou de la Sécu, par Julien Duval, chercheur au CNRS. Pour lui, il n'y a pas de déficit de la Sécurité sociale, pourvu qu'on revienne sur toutes les exonérations de charges sociales accordées ces dernières décennies aux patrons. Je me souviens d'une blague pas très finaude dans mon enfance: si ma tante en avait, on l'appellerait mon oncle. C'est un peu le même raisonnement conditionnel de Duval. Autre formule de mon enfance: avec des "si", on mettrait Paris en bouteille. J'aimerais tellement que le "trou" de la Sécu soit un mythe! Politiquement, l'avenir de la société française serait plus serein. Hélas, je suis persuadé, comme tout le monde sauf Duval et les tracts lambertistes que je reçois dans mon lycée, que le déficit des comptes sociaux est un réel et cruel problème. Quand aux exonérations patronales, elles ont leur utilité pour inciter à la création d'emplois.


Bonne soirée.

Le Marx d'Attali.

Quand un non marxiste se penche sur l'oeuvre de Marx, c'est intéressant. Le livre de Jacques Attali, Karl Marx ou l'esprit du monde, paru en 2005 et aujourd'hui disponible au Livre de Poche, est une première approche, une vulgarisation utile, avec des limites: pas de notes, pas de références précises, contrairement à un bon travail universitaire, et quelques erreurs. Par exemple page 107, Attali nous explique que Marx était lecteur de Frankenstein, ce qui est vrai, et que c'est ce roman de Mary Shelley qui lui inspira l'analogie entre le capitaliste et le vampire, ce qui est faux. Attali confond Shelley et Bram Stoker, Frankenstein (où il est question d'un monstre mais pas de vampire) et Dracula.

De la lecture générale de l'ouvrage, je retiens cinq points:

1- Marx était politiquement un libéral, un pragmatique. On a retenu le théoricien, il ne faudrait pas oublier le journaliste qu'il a été, étudiant les faits beaucoup qu'il n'élaborait des idées, des doctrines. Marx était un réaliste dénonçant les idéologies, surtout les idéologies de gauche.

2- Marx a combattu les radicaux de son temps, anarchistes saboteurs, poseurs de bombes, rêveurs utopistes. Il se voulait "scientifique", au sens des sciences sociales.

3- Le coeur de son oeuvre, c'est l'analyse économique, son plus grand ouvrage, Le Capital. On retient trop souvent Le Manifeste du parti communiste parce que c'est le plus célèbre et le plus facile à lire. C'est un tort. L'épicentre de sa pensée économique, c'est la théorie de la plus-value, c'est à dire de la "valeur travail". Par un retournement de l'Histoire, Sarkozy s'est emparé (mais sans rapport avec l'analyse de Marx) de ce thème.

4- Marx devient célèbre sur un malentendu, au moment de la Commune de Paris, en 1871. On l'accuse faussement d'être l'instigateur des événements, alors qu'il n'en est pas le plus chaud partisan, même s'il les salue et les soutient (les anarchistes sont beaucoup plus impliqués).

5- Attali estime que Marx n'est pas responsable du marxisme tel qu'il va ensuite se développer théoriquement et surtout s'appliquer politiquement, dans les régimes communistes. Qui est alors le coupable? Son copain Engels, qui aurait caricaturé les idées du maître et introduit la violence dans un système qui ne l'impliquait pas nécessairement.

Je vous reparle de tout cela, plus précisément, dans les prochaines heures.


Bon après-midi.

La gauche bouge un peu.

La presse de cette semaine montre quelques timides réactions de la gauche, trois mois après sa lourde défaite. C'est peu, mais contentons-nous de ces quelques signes, qui manifestent le début d'une prise de conscience, le commencement d'un long chemin de refondation. Ce que je retiens aussi, c'est que cette prise de conscience touche toutes les sensibilités du parti.

Manuel Valls, dans Le Figaro d'hier, reconnaissait lucidement qu' "une grande partie de nos idées se sont épuisées". Vincent Peillon, dans Le Nouvel Observateur, demande que les socialistes mettent fin "au mur de Berlin dans leur tête". Belle image, assortie d'une proposition: réunir des assises de toute la gauche avant le congrès de fin 2008. Je ne sais pas si la proposition est judicieuse mais je sais que les choses doivent bouger au PS sans attendre la fin de l'an prochain. François Rebsamen, dans Le Point, conseille des alliances avec le MoDem en vue des élections municipales. Je suis entièrement d'accord. Il n'y a pas que nos idées qui s'épuisent, pour reprendre l'expression de Valls, il y a aussi nos alliances, qui datent de plus d'un quart de siècle.

Je ne résiste pas au plaisir (les derniers jours de vacances, n'ai-je pas le droit de me faire plaisir?) d'évoquer le sondage de Libération de mercredi, plaçant DSK à 30% auprès des français dans le rôle du meilleur leader de la gauche. Ségolène fait 15%, Delanoë 7%, Fabius 4%. Et quand on demande aux électeurs la priorité pour la gauche, ils répondent à 36%: "un programme clair". Tout est dit: Strauss-Kahn comme leader, et un bon programme, précis, concis, mobilisateur pour les prochaines échéances électorales.

Je sais que mon camarade de Crouy, Pierre, fervent social-démocrate, pense que DSK au FMI ne peut plus tenir son rôle de leader national. Cela se discute. Le mandat de DSK, qui est de 5 ans, n'est pas électif. Aucun devoir moral, aucune obligation politique ne le contraignent à demeurer jusqu'au bout à Washington, à la différence d'un mandat qu'on détient du peuple et auquel, en toute honnêteté, on ne peut pas renoncer aussi facilement. Je vois très bien, pour ma part, DSK nous revenir avant les prochaines présidentielles, conforté et crédibilisé par son expérience internationale. Il nous faudra à la tête de l'Etat un homme qui aura su affronter la mondialisation, qui en aura une connaissance pratique, qui saura protéger la société française de ses conséquences néfastes, qui nous permettra non de la récuser mais de s'y insérer avec toutes les compétences et les performances dont la France est capable.

La gauche bougera encore un peu plus dans les prochains jours. Samedi, c'est la rentrée de Ségolène Royal, dimanche, le traditionnel discours d'Arnaud Montebourg et surtout, le dernier week-end du mois, l'université d'été du PS à La Rochelle, où je me rends traditionnellement, mais pas cette année (j'ai des peintures à faire chez moi!). C'est Gérard Blanquart qui représentera les strauss-kahniens de l'Aisne. Dominique aura des choses à nous dire, c'est certain, et Pierre aura les réponses aux questions qu'il se pose, j'en suis sûr.


Bonne fin de matinée.

Un été pourri.

Bonjour à toutes et à tous.

Je viens d'entendre sur RTL, ce matin, Jean-Louis Boorlo. C'est un ministre qui plaît à l'opinion. Avec sa tignasse, ses gros mots et sa tête fatiguée de fêtard, il ne ressemble pas à un homme de droite. Il a l'air sympa. Ok, mais il est surtout ministre, et pour ma part, je ne le trouve pas très sérieux, très crédible, du moins dans son ministère, l'environnement. En tout cas, ce matin, en prenant mon chocolat chaud (en fin de matinée, je prends un café), j'ai failli renverser ma tasse. Je vous raconte:

Après avoir parlé ours et abeilles (sans très bien comprendre ce que le ministre voulait dire), Boorlo a évoqué, comme tout le monde, le mauvais temps. Et il a mis ce mauvais temps sur le compte d'un "dérèglement climatique" causé par les activités humaines (gaz à effet de serre, etc). C'est là où je dis que cet homme n'est pas très sérieux. Le dérèglement climatique est une réalité qu'il faut combattre, la responsabilité humaine est évidente, mais rien ne peut établir scientifiquement que la période de pluies et de basses températures que nous subissons depuis quelques semaines soit la conséquence d'un dérèglement climatique.

Boorlo a utilisé ce matin une image ahurissante qui a m'a fait échapper ma tartine dans mon chocolat: "le mauvais temps, c'est comme la bronchiolite des enfants." Vous avez bien lu. Le mauvais temps, c'est une maladie dont on peut guérir pourvu qu'on s'y prenne à temps et qu'on administre le bon remède. Eh bien non! Nous vivons ce qu'on appelle un "été pourri", expression aussi vieille que le climat, et qui signifie que le temps ne répond pas nécessairement à nos désirs, qu'il peut fort bien pleuvoir et faire frisquet l'été. Est-ce d'ailleurs si dramatique, hormis pour l'économie touristique, mais ce sont les risques du métier? Bien sûr, j'ai dû annuler, à Paris, pas mal de promenades, dont la visite du bois de Meudon. Est-ce que je m'en porte moins bien?

Quand il faisait mauvais temps dans les années 60, mon grand-père disait que c'était "à cause de la bombe atomique". Boorlo a réactualisé la remarque: c'est "à cause du dérèglement climatique". Pourquoi un homme aussi intelligent que vous et moi dit-il de pareille bêtise? Parce qu'à la différence de vous et moi, il veut plaîre, aller dans le sens de l'opinion, qui ne supporte pas que le temps, même le temps, ne se plie pas à ses volontés. Bêtise pour bêtise, je pose une question au ministre: que fait Sarkozy? Lui, l'actif, l'hyperactif, le réactif, n'est pas capable de remettre le climat à l'endroit! Ca ne m'étonne pas que sa cote de popularité se soit effritée de 5 points ces derniers jours!


Bonne matinée pluvieuse.

22 août 2007

Récidive.

Bonsoir à toutes et à tous.

De retour de ses vacances américaines, Nicolas Sarkozy s'est empressé d'exprimer sa colère devant le crime d'un pédophile récidiviste et d'annoncer de nouvelles mesures contre de tels actes. Vous pensez peut-être que l'indignation du chef de l'Etat est exemplaire, qu'il n'y a rien à redire à sa réaction. Détrompez-vous, le comportement de Sarkozy est contestable à plusieurs titres:

1- Le nouveau président de la République a une méthode, réagir à chaud à l'actualité, faire de l'action un mode de gouvernement. Non, ce n'est pas ce que nous sommes en droit d'attendre. L'action n'est valable que si elle est précédée par la réflexion, l'anticipation. S'il faut qu'un crime ait lieu pour que les pouvoirs publics prennent les mesures adéquates, j'affirme que ce n'est pas sérieux.

2- En vérité, Sarkozy sait cela aussi bien que moi. Mais à la différence de moi, il veut plaire à l'opinion, hurler avec ceux qui hurlent. Les cris de douleur restent des cris. Un chef de l'Etat doit demeurer maître de lui, prendre de la hauteur face à l'événement, surtout lorsque celui-ci est tragique. Le comportement de Sarkozy est l'exemple même de ce qu'il ne faut pas faire.

3- Mais il nous dit se mettre "à la place des victimes" et que c'est bien ainsi. Non, non et non, un chef de l'Etat doit rester un chef de l'Etat, garder la tête froide, réfléchir et ne pas se laisser aller à ses sentiments. Je vais vous faire un aveu: si quelqu'un faisait du mal à l'un de mes proches, je serai capable de le tuer. Normal, humain. Mais ce qui est compréhensible au niveau de la victime, dans le coeur meurtri qui est le sien, ne l'est absolument pas au niveau du chef de l'Etat. Lui, sa fonction, sa mission, c'est d'incarner la justice, la défense et la protection de la société, et ne pas se laisser prendre à des actes de vengeance personnelle, aussi légitimes soient-ils. Car tuer un pédophile ne fera hélas pas disparaitre ce mal abominable qu'est la pédophilie. J'attends donc autre chose du chef de l'Etat que son assimilation empathique à la famille de la victime. Au nom de l'efficacité et de la justice, je demande qu'il prenne de la hauteur, s'il en est capable.

4- Sarkozy a brandi la "castration chimique" contre les pédophiles. C'est un abus démagogique de langage. Quand on entend castration, on se dit, à juste titre: on va leur couper les couilles. C'est la pulsion la plus populaire contre le violeur d'enfant. Mais ce n'est pas la réalité désignée par cette expression, qui vise seulement à administrer des médicaments diminuant les pulsions du malade, sans nullement lui enlever sa capacité sexuelle. Là encore, l'objectif est de plaire à l'opinion, peu importe la crédibilité des propos qu'on tient.

5- Il y a quinze jours, une loi a été votée contre la récidive. Aujourd'hui, Sarkozy en rajoute par rapport à cette loi. Mais pourquoi? Etait-elle insuffisante? Ce serait la preuve que le gouvernement a été incompétent. Est-ce cela que veut nous dire Sarkozy? Ce serait alors étrange... Non, ce qu'il suggère, sans le dire ouvertement, c'est que les lois sont peu de choses, que ce qui compte fondamentalement, c'est agir, agir, agir, qu'importe les conséquences, quelles qu'en soient les causes, agir jusqu'à l'épuisement, agir parce cela plaît, pour un temps, aux français. Comme s'il était le premier à agir, comme si personne avant lui ne le faisait!


Bonne nuit.

Prime de rentrée scolaire.

Bonjour à toutes et à tous.



Enfin rentré! Je devais vous recontacter hier, mais un problème de connexion m'en a empêché. C'est réparé, la vie reprend son cours normal, je vais pouvoir à nouveau vous soumettre confortablement mes réflexions. J'ai répondu aux derniers commentaires. J'aurai, dans les jours qui viennent, plusieurs notes de lectures à vous soumettre. Les vacances, c'est l'occasion idéale, et pour moi assez rare, de pouvoir lire abondamment.



Mais je veux commencer par autre chose dont on parle beaucoup à la radio ces derniers temps, la prime de rentrée scolaire (272,57 euros). Quel déchaînement dans la haine de classe! Les classes moyennes, du moins les protestations qui en proviennent et qui s'expriment sur les antennes, reprochent aux classes populaires d'empocher la prime et d'en faire tout autre chose que des achats scolaires mais des dépenses de confort et de loisirs. L'argent qui passerait dans l'écran plasma devient un reproche quasi rituel, un symbole de la soi-disant débauche de consommation des classes populaires.



Les contempteurs de la prime scolaire n'osent évidemment pas assumer leur égoïsme de classe, au demeurant parfaitement naturel, quoique profondément injuste. J'en connais certains, charitables (et pourquoi pas de gauche, tant qu'à faire), qui proposent de remplacer la prime par des bons d'achat, pour éviter le gaspillage. Autrefois, on marquait les gueux qui avaient mal agi au fer rouge. Aujourd'hui, on est cool, on fait soft, le bon d'achat suffira pour que les uns expriment leur mépris et que les autres subissent la honte.

Je n'ignore pas que la polémique traduit un vrai problème politique, auquel les socialistes sont confrontés depuis 2002: le reproche adressé à Jospin d'en faire trop pour les pauvres et pas assez pour les autres. Voilà quelques pistes pour surmonter ce problème:

1- Un socialiste digne de ce nom doit récuser toute soupçon malveillant envers les catégories populaires. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas beaucoup d'argent qu'on le dilapide au détriment de ses enfants!

2- Les achats scolaires, sous l'influence de la société de consommation, n'ont plus grand chose à voir avec les fournitures scolaires. La trousse Harry Potter, les chaussures trucmuche et le cartable machinchose ne sont pas des instruments de travail et ne rendent pas plus intelligent. Il faut le dire, il faut le dénoncer, il faut regretter que les classes populaires se laissent prendre au piège de la vanité sociale, privilège et tare auparavant de la seule bourgeoisie.

3- C'est à l'école publique, laïque, obligatoire et gratuite de fournir aux élèves ce dont ils ont besoin pour travailler. A cette condition, l'allocation de rentrée scolaire pourrait être supprimée puisqu'inutile, et ainsi la polémique effacée.


Bonne journée.

18 août 2007

Rue Frédéric Le Play.

En me promenant dans les jardins du Champ de Mars, je me suis souvenu que Françoin Mitterrand avait fait dans ces allées ses derniers pas. Je me suis rendu devant sa dernière demeure, rue Frédéric Le Play. Je ne parlerai pas de pélerinage, ce serait excessif, mais l'émotion était présente. J'ai beaucoup admiré Mitterrand, j'ai longtemps été fasciné par son personnage, je suis aujourd'hui plus critique sur son parcours politique. La lecture de Michel Rocard, Si la gauche savait, me renforce dans ce point de vue. Il y avait chez Mitterrand une jouissance du pouvoir fort contestable quand on se réclame de la gauche. Il y a eu surtout des erreurs politiques que nous avons tendance à sous-estimer ou à oulier et que Rocard nous remet utilement en mémoire (en particulier le coût monstrueux des nationalisations en 1981, qui ont abouti à un échec total). Je tâcherai d'y revenir la semaine prochaine ou plus tard.

Mes excuses à Michel et à Val, le temps me manque pour répondre à leurs interventions. Là aussi, nous reverrons à mon retour.

Bon week-end à tous, je reprendai contact avec vous mardi.

Carte postale.

Chère lectrice, cher lecteur,

Il est de tradition d'envoyer une carte postale de son lieu de vacances et d'ajouter quelques mots, qui seront bien sûr, pour moi, touristico-politiques.

Paris, où je séjourne depuis 18 jours, c'est Bobo City. Les bobos, je vous jure, sont partout, même si la moitié d'entre eux sont en vacances quelque part dans le monde. On les reconnaît surtout à la tombée de la nuit, sur les bicyclettes du système Vélib, qui remporte ici un succès fou. Le vélo, jadis instrument du prolo allant à l'usine, est devenu l'objet-culte des bourgeois bohèmes, artistes dans l'âme, qui vous transforment un ustensile ouvrier en une activité chic. Bertrand Delanoë, qui est à l'origine du système, sera récompensé par les bobos et réélu maire l'an prochain, j'en suis certain.

Moins tendance mais toujours un peu dans l'air du temps que le bobo hume à pleins poumons, il y a les petites trotinettes qui rendent si léger, si mobile (la mobilité, valeur bobo par excellence). J'ai même vu un bobo au cinéma avec sa trotinette repliée sous son bras! Le vendredi soir, les bobos chaussent leurs rollers et sillonnent Paris en une véritable démonstration de force et de masse. Pas de doute, Paris leur appartient.

Le dimanche, dans la "coulée verte" (ce nom est horrible mais c'est ainsi qu'on appelle ici une promenade plantée d'arbres) qui relie la Bastille au périphérique est, j'ai vu un nombre incroyable de bobos faire du jooging. Rester mince, bronzé, sportif, ventre plat, dents blanches, voilà l'éthique et la diététique du bobo, qui en valent bien d'autres.

Le soir, je les ai retrouvés au "cinéma en plein air", encore une opération de la mairie de Paris, encore un bon point pour Bertrand. Ce soir, je le sais, ils seront là à la projection de d' A bout de souffle de Godard, dans les jardins des Champs Elysées.

Lundi soir, je quitterai Paris pour retrouver Saint-Quentin. Les bobos me manqueront, c'est sûr. Il faudra que je me contente des quelques uns qui habitent dans ma ville.


Amitiés à toutes et à tous.

17 août 2007

Paroles de sages.

Bonjour à toutes et à tous.

Je vous disais hier, sur la foi d'un sondage paru dans le JDD, que la mesure la plus populaire de Sarkozy (et parmi les plus conservatrices puisqu'elle avantage les propriétaires, qui ne constituent pas la partie la plus malheureuse de la population) était le crédit d'impôts sur les intérêts des prêts immobiliers. J'apprends ce matin que le Conseil constitutionnel, qui n'est pas une instance pourtant foncièrement de gauche, vient d'invalider ce dispositif, qui accorde des avantages fiscaux à des personnes qui ne les ont pas revendiqués et ne semblent pas en avoir besoin. Car vous vous souvenez que le fameux crédit d'impôts n'avait pas pour tâche de faciliter l'accession à la propriété pour ceux qui n'y parviennent pas, auquel cas le bien fondé de la mesure pouvait se discuter. Non, Sarkozy tenait, il a bien insisté auprès de son premier ministre, que le crédit concerne tous propriétaires, y compris ceux qui le sont déjà. Ce qui change tout, ce qui rejoint les fondamentaux de la droite du XIXème siècle: quelqu'un de bien est forcément quelqu'un qui a du bien, en l'occurrence un propriétaire.

J'en parle avec d'autant plus de facilité que je suis propriétaire depuis 6 mois et endetté pour 27 ans. La mesure Sarkozy me profitait, j'aurais pu applaudir comme beaucoup. Il se trouve que je fais, à mon modeste niveau, de la politique, que je suis engagé, que je me fais une certaine idée de la justice qui ne recoupe pas nécessairement mes intérêts personnels. La preuve.

Pour être complétement honnête, et c'est cela aussi la politique, une autre mesure gouvernementale a été, elle, acceptée par le Conseil constitutionnel. Il s'agit de la loi sur le service minimum dans les transports, que j'ai qualifiée de loi pour la grève minimum. Cette mesure est tout aussi conservatrice (dissuader les salariés de faire grève) et tout aussi populaire que la première (un peu moins populaire que la première, quand même). Les sages considèrent qu'elle ne porte pas atteinte au droit de grève. Moi même, sur ce blog, je m'étais refusé à contester juridiquement ce texte, laissant les spécialistes du droit faire leur travail. J'en profite pour rappeler que l'opposition de gauche doit être certes énergique et offensive mais tout autant argumentée, intelligente et nuancée. Je continuerai à penser et à dire que cette loi est politiquement et socialement inutile et néfaste, même si elle est constitutionnellement valable.


Bonne journée.