L'Aisne avec DSK

31 octobre 2010

Borloo est-il social-démocrate ?

Bonsoir à toutes et à tous.


Jean-Louis Borloo s'est présenté aujourd'hui comme un "social-démocrate". Et comme je suis moi-même, comme vous le savez, social-démocrate, je devrais normalement être satisfait. Et pourtant je ne suis pas satisfait, quoique n'étant pas de tempérament grognon. Que se passe-t-il donc ?

1- Entre dire et être, il y a une distance, qui parfois peut être très grande. Bayrou aussi se prétend social-démocrate alors qu'il ne l'est absolument pas, mais plutôt démocrate-chrétien, une famille politique qui en Europe s'oppose généralement à la social-démocratie.

2- La citation de Borloo mérite d'être respectée : il se présente comme "radical, centriste, social-démocrate". Or, la formule est contradictoire, on ne peut pas être les trois à la fois, ce ne sont pas des synonymes : le radical est de centre droit (c'est le parti radical-valoisien, hier à l'intérieur de l'UDF, aujourd'hui de l'UMP), le centriste est à mi-distance de la gauche et de la droite (c'est l'actuel MoDem), le social-démocrate est à gauche (tous les partis sociaux-démocrates appartiennent à l'Internationale Socialiste).

3- Borloo est "radical" puisque membre depuis longtemps et aujourd'hui président du Parti radical. Pourquoi aller chercher ailleurs ? Politiquement, nous sommes ce à quoi nous appartenons, c'est tout.

4- Jean-Louis Borloo appartient à un gouvernement dont la politique s'est définie en opposition à la social-démocratie. Par exemple sur la réduction du temps de travail, très ancienne revendication de la social-démocratie. Comment pourrait-il être social-démocrate ?

5- Jean-Louis Borloo est sympa, chevelu, atypique, marrant, pas du tout la droite bon chic bon genre telle qu'on l'imagine. Humainement et en termes d'image, c'est l'anti-Fillon. Il a fait partie de Génération Ecologie, à l'époque où cette formation politique était proche de la gauche. Et c'est un pote de Bernard Tapie ! Est-ce que tout ça suffit à en faire un social-démocrate ? Évidemment non.

6- Si Jean-Louis Borloo se sent obligé de se définir par ce qu'il n'est pas, c'est pour une raison très simple, que tout le monde devine : il pourrait devenir Premier ministre. Normal : Sarkozy, après le mouvement sur les retraites, souffre d'un déficit social qu'il va tenter de combler, d'autant qu'il doit une partie de sa victoire en 2 007 à des voix ouvrières. Il lui faut donc nommer un social-démocrate d'apparence. C'est tout de même un bel hommage rendu à la social-démocratie et ses racines populaires ! Mais c'est faux, archi-faux : Borloo est un homme de droite que le social-démocrate que je suis ne soutiendra pas.


Bonne soirée.

Réponse à un camarade.

Bonjour à toutes et à tous.


J'ai reçu hier un long commentaire d'un camarade, que je n'ai pas publié, qu'il m'en excuse. La signature se laissait deviner, le propos était sujet à polémique, j'ai préféré le supprimer, comme beaucoup de commentaires que je reçois, trop personnels dans leur approche. Le débat d'idées oui, les querelles de personnes non, surtout entre socialistes .

Pourtant, je n'aime pas effacer un commentaire, mais j'y suis souvent contraint. Ceci dit, je ne veux pas donner l'impression de fuir les reproches que m'adressait ce camarade, qui a pris la peine de rédiger un long texte. Je vais donc me permettre de résumer en trois points les griefs qu'il m'a exposés, afin d'y répondre :

1- Je fais le jeu de la droite.

Depuis que ce blog existe, c'est-à-dire quatre ans, la plupart des billets ont été consacrés à critiquer la politique de la droite et à défendre les propositions du Parti socialiste. Est-ce faire le jeu de la droite ? Bien sûr, ma sensibilité est strauss-kahnienne, social-démocrate, réformiste. Est-ce que ça fait de moi un homme de droite ? Certes, je souhaite un parti socialiste rénové et je milite pour un socialisme moderne, en me montrant critique envers la gauche traditionnelle. Est-ce pour autant faire le jeu de la droite ?

Localement, je veux qu'une alternative de gauche se mette en place face à la politique de droite, et j'ai refusé de rejoindre Pierre André. C'est ça faire le jeu de la droite ? Et de reconnaître que le bilan de la municipalité n'est pas entièrement négatif, qu'il ne faut pas se montrer inutilement protestataire, que l'essentiel est quand même de proposer, est-ce que cette ligne de conduite fait le jeu de la droite ? Je demande à mon interlocuteur de se poser cette question : QUI à Saint-Quentin fait vraiment le jeu de la droite ? Ce n'est peut-être pas celui à qui il pense.

2- Je ne fais qu'écrire.

Drôle de reproche. Comme si se consacrer à l'écriture était un défaut ! C'est au contraire une qualité dont on pourrait éventuellement se réjouir. Mais laissons. J'ai une vie publique, je suis un responsable associatif : qu'on demande à mes amis, à mes partenaires ou aux témoins de la vie locale que sont les journalistes si je passe mon temps enfermé chez moi à taper sur un clavier. La réponse sera vite apportée.

3- Je suis seul.

Ah bon, je suis seul ? Il y a trois ans, quand la majorité des socialistes saint-quentinois ont refusé, avec moi, et la tête de liste, et la liste, et les alliances des municipales, est-ce que j'étais seul ? J'en reparle non pour me complaire dans le proche passé mais pour étayer ma défense sur une base crédible, chiffrée, le résultat d'un vote.

Mais aujourd'hui ? Quand je refuse l'alliance avec l'extrême gauche, est-ce que je suis le seul socialiste à penser ça ? Il ne me semble pas. Je vais même plus loin : je crois que la majorité de notre électorat est en phase avec mes analyses, qu'elle souhaite une autre gauche. Qu'est-ce qui me fait dire ça ? D'abord nos résultats électoraux médiocres, sur le plan strictement local, depuis une dizaine d'années. Ensuite, plus subjectivement, mes rencontres et discussions dans plusieurs milieux qui me font dire qu'il y a une insatisfaction et une attente de notre électorat. Enfin, il y a ma propre action : ferais-je ce que je fais, serais-je aussi déterminé et sûr de moi si j'estimais être un électron libre sans aucun soutien, sans aucune chance de l'emporter ? Bien sûr que non.

Mais au sein de notre section ? Soyons sérieux, je la fréquente depuis douze ans, j'ai vu se constituer les majorités au gré des circonstances, des intérêts et des coups de pot ! Les chutes y sont aussi rapides et inattendues que les érections. Où en est aujourd'hui le thermomètre ? Je n'en sais rien, je sais seulement que demain ne sera pas aujourd'hui puisque aujourd'hui est différent d'hier !

A ce camarade qui se tracasse pour pas grand-chose, je veux bien faire comprendre ceci : j'ai des convictions dont on pense ce qu'on veut mais qui sont là, avec leur cohérence ; j'ai une volonté qui demeure intacte au fil des années, qui se renforce même au fur et à mesure que les événements me donnent raison.

A partir de là, je l'assure que je ferai tout pour que la gauche l'emporte dans la ville de Saint-Quentin, sur la ligne qui est la mienne et de beaucoup d'autres parce qu'elle est la seule gagnante. Cette victoire ne pourra être que collective, avec moi au premier ou au dernier rang, peu importe, c'est très secondaire. Je ne fais pas de la politique une aventure personnelle ou une activité professionnelle. Est-ce clair ?


Bon dimanche.

30 octobre 2010

Recentrage ou radicalisation.

Bonjour à toutes et à tous.


Xavier Bertrand, le nouveau maire de Saint-Quentin, baguette de pain sous le bras et discutant avec des gens dans la rue, c'est dans la presse locale de ce matin, avec ces titres : "Xavier Bertrand maire tout terrain" à la une et "Xavier Bertrand règle vos problèmes" en page intérieure. Ça c'est de la communication !

C'était hier, dans le quartier Saint-Jean, l'équipe municipale a fait des visites et écouté la population. Puis à Matisse, elle a rencontré les associations et inauguré un type nouveau de réunion : le contact individualisé. Très fort ! Incontestablement, Xavier Bertrand va surprendre, bousculer les habitudes, élargir son audience.

La gauche elle aussi doit bouger, changer, ne pas rester inerte. Il n'y a pas d'immobilité qui tienne en politique, c'est un art du mouvement. Du changement à la tête de la Municipalité, faisons une occasion pour changer également. Le défi que nous pose involontairement le nouveau maire est le suivant : radicalisation ou recentrage ? Ça ne vous étonnera pas si je vous dis que mon choix est fait, et depuis longtemps : le recentrage.

Ça veut dire quoi ? Voyez ce que fait Bertrand, ce qu'est sa stratégie : déconnecter les problèmes locaux des problèmes nationaux, se recentrer sur les premiers et laisser les seconds au débat politique national. Cette stratégie est gagnante à Saint-Quentin : les habitants attendent de leur équipe municipale qu'elle les aide, les soutienne, règle leurs problèmes, à la limite peu importe la couleur politique. Ce n'est que dans les scrutins nationaux que les citoyens reprennent leurs billes et expriment alors des choix partisans.

Si la gauche ne comprend pas ça, elle va à la cata, en se radicalisant. Se recentrer, c'est municipaliser notre action, c'est écouter les doléances de la population, c'est construire un projet local crédible. Quand Stéphane Monnoyer, représentant local du MoDem, ne trouve rien d'autres à reprocher à Bertrand que la présence des caméras de France 3, il a tout faux. Quand Olivier Tournay, conseiller municipal communiste, manifeste devant Matisse contre la réforme des retraites en confondant les fonctions de maire de Saint-Quentin et de député, il a tout faux aussi.

Le recentrage de la gauche, c'est aussi rompre avec l'isolement de petits groupes militants ou sectaires, s'ouvrir à la société civile, au mouvement associatif, aux personnalités engagées dans la vie publique. C'est pourquoi j'ai été consterné en lisant la fin de l'article de L'Aisne Nouvelle consacré au départ de Lionel Josse de l'organisation du Téléthon, que je vous cite intégralement :

"Il [Lionel Josse] garde par contre un souvenir amer de son engagement aux élections municipales sur la liste d'Odette Grzegrzulka en 2001, où il était inscrit en tant que coordinateur du Téléthon "alors que ça n'avait rien à voir". "Les relations avec la municipalité ont été un peu plus compliquées ensuite". Alors, promis, il n'y "retournera pas". Dommage, la politique saint-quentinoise aurait bien besoin de personnalités engagées comme lui ..."

Eh oui, Jérôme Poinsu, le journaliste, a tout compris. Et ça me fait aussi penser que les conneries ne datent pas d'aujourd'hui !


Bonne journée.

29 octobre 2010

La guerre des cantons ?

Bonsoir à toutes et à tous.


Il y avait du monde hier soir à l'inauguration de l'exposition consacrée à l'histoire du quartier Saint-Martin, dans la mairie annexe rue de Ham. Je vous recommande la visite (mais dépêchez-vous, c'est ouvert seulement ce week-end). Les documents, cartes postales et articles de presse, sont exceptionnels.

Beau travail des bénévoles de l'association de quartier ! Saint-Martin, c'est l'histoire de la mémoire ouvrière, ses joies et ses malheurs, la crise du textile mais aussi la vitalité de toute une population. Vous verrez des photos étonnantes de la construction de l'église, le rappel de la fête de la Saint-Maurice, l'existence d'un bidonville à La Tombelle et bien d'autres choses ...

Le public se pressait entre les grilles caddies, curieux et enthousiaste. Au moment des discours, nous avons frôlé une petite guerre des cantons. Eh oui ! De quoi s'agit-il ? La mairie annexe se trouve dans le canton sud mais quelques mètres plus loin c'est le canton centre. La frontière, c'est la rue de Ham. A quelques mois des élections cantonales, les susceptibilités sont vives et le protocole vigilant. Dans l'histoire des peuples, les querelles frontalières sont à l'origine de nombreux conflits, jusqu'à la guerre. Mais rien de tel hier soir.

Le droit du sol a été respecté : Jean-Claude Cappèle, conseiller général de Saint-Quentin Sud, s'est exprimé le premier, en insistant à plusieurs reprises sur "mon canton". Mais aucun sous-entendu électoraliste là-dedans, puisque que "son" canton n'est pas renouvelable. A sa suite, Colette Blériot, conseillère générale de Saint-Quentin Centre, plus pimpante que jamais, a pris le micro pour se lancer dans une intervention simple, courte et lyrique. Car Saint-Martin, c'est aussi "son" canton.

Alain Gibout a terminé, en tant que représentant du maire de Saint-Quentin. Question discours, il a été le meilleur, en commençant par mettre en avant les autres élus (bien joué), en n'oubliant pas de rappeler que Pierre André était à l'origine de l'événement (c'est habile), en soulignant qu'il était né, lui, dans le quartier, rue de la Prévoyance (clin d'oeil). Au sud ou au centre, d'un côté ou de l'autre de la rue de Ham, voilà un homme qui ferait un bon candidat conseiller général ! Mais comment réagiraient Jean-Claude et Colette ? Ce n'est pas pour eux le moment de relancer la guerre des cantons ...


Bonne soirée.

28 octobre 2010

La gauche, c'est l'ordre !

Bonsoir à toutes et à tous.


Une vidéo sur le Net circule en ce moment, avec des commentaires qui accablent la police, accusée de pénétrer les manifestations et de provoquer la violence. Jean-Luc Mélenchon en a quasiment fait une affaire d'Etat. Il a raison : s'il dit vrai, ce serait évidemment scandaleux. Mais est-ce vrai ? Toute la question est là. Je me suis passé et repassé, comme tout le monde, la fameuse vidéo ; franchement, je ne vois pas en quoi on peut soupçonner, parmi ces manifestants violents, la présence cachée de policiers. Et pourtant, le Net n'a pas cessé de buzzer là-dessus depuis quelques jours. J'en tire quatre petites leçons :

1- Dans la société de l'image, nous sommes fascinés par elle comme le lapin par le cobra. Sauf qu'une image ne dit pas grand-chose, qu'on ne peut rien en tirer, sinon une multitude d'interprétations contradictoires. C'est le cas pour cette vidéo, qui alimente délires et fantasmes sans qu'on ne sache un traître mot de la vérité.

2- La police a-t-elle vraiment besoin de ce genre de provocation pour discréditer le mouvement contre la réforme des retraites ? Je ne crois pas. La violence existe par elle-même, générée par les voyous et l'ultra-gauche anarchisante, il n'y a pas besoin d'en remettre une louche, il suffit de laisser faire.

3- La police est un service public, intégré à la République, avec des missions éminemment respectables, une profession organisée en syndicats dont certains sont proches de la gauche. Qu'on cesse donc ce bad trip anti-flic, tout juste bon pour les junkies de la gauche radicale. Mais quand on se réclame de la gauche réformiste, on est quand même un peu plus sérieux, on ne voit pas derrière chaque policier un fasciste.

4- Bien sûr, les provocateurs ont toujours existé, comme les méthodes de basse police. Mais n'en faisons pas une généralité. Sachons reconnaître, quand on est socialiste, que la police fait un métier difficile, pas toujours très bien payé, que son combat contre la violence, la délinquance et le crime passe par des moyens à la hauteur de ce qu'elle combat, par exemple les indicateurs. Mais peut-on vraiment le lui reprocher ? Depuis Vidocq et sans doute bien avant, la police est ainsi. Comment faire autrement que de combattre le mal par le mal ? Oui des policiers en civil sont présents parmi les manifestants. Mais comment repérer et arrêter les ultra-violents, qui eux-mêmes infiltrent nos manifs ?

La gauche aurait tort de se laisser aller à un sentiment anti-flic, comme y conduit la vidéo qui circule. Nous devons au contraire montrer que l'ordre c'est nous, que nos manifestations sont légales, maîtrisées, qu'elles ne tolèrent aucun débordement, qu'un casseur n'est ni un militant, ni une victime. Nous n'avons pas besoin de la violence pour prouver que nous avons raison. Les arguments suffisent, pas les poings, les pierres ou les barres de fer.

Affirmons notre solidarité avec la police qui ne fait que son métier, chassons les voyous qui n'ont rien à faire avec nous, ne laissons pas croire un seul instant que leurs exactions seraient la légitime expression d'une révolte sociale. Nos rangs, ce sont ceux des salariés qui ont une famille à nourrir, un emploi à conserver, qui perdent de l'argent en faisant grève et qui s'exposent à des représailles en manifestant publiquement ; ce n'est pas le marginal, le délinquant qui vient là seulement pour casser.

Oui je suis pour une gauche d'ordre, sérieuse, responsable, qui n'accepte pas le n'importe quoi, le bordel, l'amateurisme et le laxisme. L'anarchisme petit-bourgeois, je déteste ça. A la grande époque, PCF et CGT savaient faire régner l'ordre. Les lambertistes eux-aussi n'étaient pas mal dans le genre. Mais les temps ont changé. En tout cas, il revient au PS d'incarner cette gauche d'ordre, face au désordre que produisent le capitalisme, la politique de la droite et les provocateurs de l'extrême droite.


Bonne soirée.

27 octobre 2010

Perdant-perdant.

Bonsoir à toutes et à tous.


Le Parlement a adopté aujourd'hui la nouvelle loi qui établit l'âge légal de départ à la retraite à 62 ans. Vous savez ce que j'en pense, je n'y reviens pas. Il reste maintenant à ce que le président de la République promulgue cette loi. Autant il était pensable d'imaginer que les représentants du peuple modifient, amendent sinon rejettent le projet, autant il semble difficile d'espérer que Nicolas Sarkozy ne promulgue pas ce qu'il a lui-même initié !

Faut-il arrêter de manifester ? Non, c'est notre droit de citoyens que d'exprimer jusqu'au bout des convictions, comme je l'ai expliqué dans un récent billet. C'est pourquoi nous nous retrouverons demain à 17h00 place Longueville à Saint-Quentin et le 6 novembre à 15h00 place Dufour-Denelle. Mais soyons réalistes : on nous parle d'un essoufflement du mouvement, c'est normal. Il y a chez les Français un fond républicain qui leur fait penser d'instinct qu'une loi qui a été adoptée s'impose désormais à tous, seul un changement de majorité politique pouvant revenir dessus.

Ces semaines de conflit social auront été négatives pour tout le monde, quand on en fait un bilan provisoire, hormis le fait que l'expression d'une opinion est toujours une bonne chose en démocratie :

1- Les syndicats ont mobilisé des millions de salariés dans des grèves et manifestations sans rien obtenir. Notre démocratie sociale en prend un sérieux coup. Chérèque, en réformiste conséquent, a arraché au patronat un espoir de négociation sur l'emploi des jeunes et des seniors. Ce n'est pas rien, c'est bien, mais on sent aussi que c'est pour effacer un terrible revers que rien ne pourra effacer.

2- Sarkozy et la droite ont le sentiment d'avoir gagné, mais à quel prix ? Celui d'une impopularité record ! On ne peut pas appeler ça une victoire. En politique, les plus belles victoires sont celles qu'on obtient par la persuasion, pas par la contrainte.

3- Le Parti socialiste lui non plus n'est pas franchement gagnant dans cette affaire. En se focalisant sur les 60 ans, le mouvement social a fait oublier l'essentiel de notre projet, qui n'est pas dans la fixation sur l'âge de départ mais les réformes structurelles : modes nouveaux de financement, prise en compte de la pénibilité, instauration d'un retraite à la carte. Et puis, les derniers jours ont révélé de fortes nuances entre nous sur la nécessité d'un allongement de la durée de cotisation.

4- La gauche radicale, dont on pourrait penser que c'est la seule à profiter du conflit, n'est pas plus avantagée : sa théorie du rapport de force, sa volonté de blocage, de grève reconductible ou générale n'auront absolument pas fait reculer le pouvoir.

A l'issue de ces journées, on comprend mieux combien la France et son système de relations sociales souffrent d'un manque de culture social-démocrate axée sur la négociation, le compromis, le donnant-donnant c'est-à-dire le gagnant-gagnant. Nous sommes fiers de notre tradition historique de luttes sociales et nous avons raison. Mais demandons-nous aussi quels en sont les conséquences et les résultats ? A l'heure qu'il est, on ne peut pas dire que le bilan soit vraiment probant.


Bonne soirée.

26 octobre 2010

Le serpent de Copé.

Bonsoir à toutes et à tous.


Est-ce parce qu'il fait moins parler de lui ces derniers temps ? Est-ce pour plaire à certains enseignants ? Toujours est-il que Jean-François Copé a ressorti un vieux serpent de mer particulièrement miteux : l'examen de passage en sixième. Comme si la France n'avait pas autre chose en tête ! Comme si l'Education Nationale ne cherchait pas d'autres solutions à ses problèmes !

Cette proposition est au sens propre du terme réactionnaire, puisqu'elle nous ramène cinquante ans en arrière, avant que les lycées et collèges ne se démocratisent en s'ouvrant à une grande masse d'élèves. A l'époque, les enfants du peuple accédaient rarement à ce qu'on appelle aujourd'hui le "second degré", qui était réservé aux plus méritants et surtout aux fils et filles de la bourgeoisie. Voilà le rêve rétrograde de Copé.

Il y a bien sûr de la démagogie derrière tout ça. Copé sait parfaitement qu'on ne peut pas revenir sur la révolution démocratique de l'Ecole. Mais il veut séduire les enseignants, dont un certain nombre approuvent ce genre de mesure, qui sélectionne les élèves, ne retient que les meilleurs et protège ainsi le collège de l'arrivée massive des classes populaires et déshéritées. Quand on sait combien il est difficile d'enseigner à ce niveau, on comprend la tentation du tri. Mais il ne faut pas y céder. C'est une fausse solution et une vraie régression. Les remèdes sont ailleurs.


Bonne soirée.

25 octobre 2010

Mélenchonisation des esprits ?

Bonsoir à toutes et à tous.


Le mot n'est pas très joli, mais est-il vrai ? Sur Radio J hier, Manuel Valls a parlé de "mélenchonisation des esprits", à propos des déclarations de Benoît Hamon sur l'allongement de la durée de cotisation dans la réforme des retraites, que l'aile gauche du PS conteste. Valls fait un rappel historique bien connu : "Il y a toujours, dans l'histoire du PS, cet inconscient qu'il faut être toujours très à gauche, qu'on doit regarder en permanence du côté d'une gauche de la gauche ou de l'extrême gauche, qui n'a pas envie de gouverner".

Je suis bien sûr d'accord avec Manuel. Sa dénonciation d'une "mélenchonisation des esprits" à gauche est à mettre en parallèle, à droite, avec la "lepénisation des esprits". Dans les deux cas, des partis de gouvernement subissent l'influence de partis contestataires ou extrêmes qui n'ont pas l'intention de gérer mais seulement de s'opposer. Je ne confonds pas non plus le "populisme" de gauche (puisque Mélenchon assume ce terme) et le populisme d'extrême droite, qui n'ont rien à voir l'un avec l'autre, qui se combattent. Mais le Parti socialiste doit rester lui-même, dans la tradition réformiste, et ne pas en sortir, se laisser tenter ou s'égarer.

Manuel a raison de parler de "faute politique". Ce n'est pas tant que notre aile gauche n'ait pas le droit d'avoir des positions en propre. Moi-même je ne partage pas toujours les décisions de mon Parti, et c'est normal : être de gauche, c'est accepter la liberté de penser et de débattre. Mais quand un choix est collectivement arrêté, il faut s'y tenir. Cet allongement de la durée de cotisation a été adopté dans notre projet en mai dernier, nous n'avons pas à le remettre aujourd'hui en question. En matière d'indiscipline, le plus scandaleux aura été le non respect du vote des adhérents en 2 005, alors que le Parti avait majoritairement dit oui à la Constitution européenne et que l'aile gauche militait pour le non, sous la direction de ... Jean-Luc Mélenchon ! La "mélenchonisation des esprits" n'est pas nouvelle.

Cependant, je ne suis pas complètement d'accord avec Manuel Valls. C'est le mot d' "inconscient" qui me fait tiquer. Cette "mélenchonisation" est parfaitement consciente, volontaire, assumée. Pour ces camarades, un strauss-kahnien n'est qu'un "social-libéral", c'est-à-dire, dans le meilleur des cas, une moitié de socialiste ! Allez vous étonner après ça que je rencontre personnellement quelques petites difficultés ... La déclaration de soutien d'Yves Daudigny à DSK n'a-t-elle pas fait du bruit dans le landerneau (voir L'Union du 12 octobre) ? C'est tout de même un monde ! On ne peut plus afficher ses préférences pour le meilleur de nos candidats sans créer des remous ...

Et puis, comme toujours, il y a les conversations de couloir. Il se dit qu'en cas de candidature DSK aux primaires, derrière laquelle se rangerait une grande majorité du PS, l'aile gauche jouerait sa partition en présentant Benoît Hamon. Ça me paraît dans l'ordre des choses : je vois mal l'aile gauche soutenir à ce stade Strauss. La social-démocratie n'est pas dans leur culture politique, et là encore ce n'est pas l'inconscient qui s'exprime, ce sont des idées qui n'énoncent très distinctement, et depuis longtemps.

Il reste une dernière interrogation, peut-être la plus mystérieuse : pourquoi les esprits "mélenchonisés" ne rejoignent-ils pas carrément Mélenchon ? Ce serait tout de même plus simple pour eux et plus clair pour tout le monde. C'est un peu comme si moi, social-démocrate, je restais dans un parti qui ne le serait franchement pas, ce serait intenable ! Mais c'est oublier que l'aile gauche véhicule aussi une culture du rapport de force qui la conduit inévitablement à pratiquer un opportunisme tactique, qui se vérifie en bien des occasions, y compris locales.

Au niveau national, l'exemple le plus spectaculaire a été donné par Jean-Pierre Chevènement, ancien leader de l'aile gauche qui a fini par quitter le PS, s'en est pris sévèrement à Lionel Jospin puis s'est rapproché du Parti en soutenant ... Ségolène Royal, dont les positions auraient dû normalement ne pas lui convenir. L'aile gauche qui s'allie au ségolénisme, ça ne se devrait pas, en bonne logique politique. Sauf que nous sommes dans une autre logique, qui m'est étrangère : le calcul, la tactique, le positionnement, qui met au second plan les convictions, qui est prête à beaucoup de concessions.

On cherche à se placer, à s'arranger, à négocier pour obtenir une place, jouer un rôle, exercer une influence. La politique est ainsi depuis toujours, mais est-ce une raison pour accepter cette logique, s'y soumettre ? Non, surtout quand on est socialiste et qu'on veut changer les choses, y compris les pratiques politiques. Et puis, les grandes victoires ne sont jamais issues de petites manoeuvres. C'est ce que nous apprend l'histoire, à quelque niveau que ce soit.

Jean-Luc Mélenchon est quelqu'un pour lequel j'ai beaucoup d'estime, sa sensibilité politique est éminemment respectable, son combat est courageux et c'est un partenaire tout à fait fiable. Mais la "mélenchonisation des esprits" à l'intérieur du PS est un gloubi-boulga inacceptable.


Bonne soirée,
sans gloubi-boulga.

24 octobre 2010

Georges Frêche est mort.

Georges Frêche, bien qu'exclus récemment du Parti socialiste, était un camarade. Je veux rendre ici hommage à sa mémoire. Non par pure convenance, puisque cet homme avait horreur des convenances, pour le meilleur et pour le pire, mais parce qu'un socialiste qui conquiert une grande métropole et une région mérite qu'on le salue. Je connais un peu Montpellier, j'y ai séjourné plusieurs fois : Frêche a transformé cette ville et y était extrêmement populaire. Ça invite tout de même au respect.

Mais il y a tout le reste, que je ne veux pas éluder au soir de sa disparition. La grandeur d'un homme est faite aussi d'ombre. Frêche passait pour autoritaire, brutal, cynique. Franchement, y a-t-il un seul politique d'un certain niveau qui soit doux, gentil et modeste ? Je n'en vois pas, sauf chez les candidats qui perdent les élections ou ne conservent pas très longtemps le pouvoir. C'est sans doute regrettable, on pourrait rêver à mieux, mais c'est ainsi, et qu'on ne se plaigne pas : c'était pire sous Jules César, la démocratie moderne a quand même domestiqué les moeurs politiques. Alors, laissons tomber ce genre de griefs : gauche ou droite, nos élus sont tous les mêmes sous ce rapport.

En revanche, les libres propos de Georges Frêche ont créés en plusieurs occasions la polémique et entraîné son exclusion du PS, avec raison. Mais Frêche n'était pas de notre époque, cette société devenue puritaine où le moindre mot vexe, choque, fait réagir. J'en sais quelque chose en rédigeant ce blog ! Je ne justifie évidemment pas ni n'excuse ses formules à l'emporte-pièce, blessantes et contre-exemplaires. Frêche était un provocateur dans un monde qui rejette la provocation et n'accepte que la dérision. Son passé maoïste explique beaucoup de choses.

Ce qui m'épate en lui comme en tous ceux de cette sorte, c'est qu'ils n'hésitent pas à dire ce qu'ils pensent, sans diplomatie ni hypocrisie, sans égard pour la susceptibilité des uns et des autres. Ça c'est bien. En même temps, il ne faut pas pousser le bouchon trop loin, à quoi s'est pourtant risqué le camarade Georges. Il est mort un peu jeune mais aura eu une belle vie. Je crois que c'était un brave homme qui s'est laissé aller à des paroles inacceptables. Je retiendrais ce soir le brave homme, je mettrais de côté les paroles inacceptables. Salut Georges, adieu camarade !


Bonne nuit.

Continuer ou pas ?


Bonsoir à toutes et à tous.


La semaine qui vient de s'écouler, la mobilisation contre la retraite à 62 ans ne s'est pas relâchée. Elle est toujours aussi massive, et l'opinion continue à la soutenir. La semaine qui s'annonce verra le Parlement légiférer. Sauf énorme et improbable surprise, le projet qui provoque le rejet de bon nombre de Français va être adopté. Jeudi prochain, ce sera la dernière occasion de protestation, dont on peut penser que le niveau sera aussi élevé que celui des précédentes. Et je ne crois pas que les vacances arrêtent quoi que ce soit (sinon quelle serait la motivation des manifestants ?). Au contraire, les salariés (qui d'ailleurs ne sont pas tous en vacances !) pourront plus facilement exprimer leur mécontentement.

Mais après jeudi, que faudra-t-il faire ? Le gouvernement rêve de la fin du mouvement et du retour à l'ordre normal. C'est sa prévision, son souhait, son espoir. A défaut de convaincre, il joue la montre. Il est certain que le vote de la loi changera tout. En République, c'est elle qui a le dernier mot, avec la décision du Parlement. Avant, il est logique de faire part de ses remarques, revendications et refus. Après, c'est la représentation nationale et ses choix qui prévalent. Sinon, nous n'en finirions jamais avec n'importe quel projet de loi, en permanence remis en question.

Ce principe républicain rappelé, le droit de grève et de manifestation s'éteignent-ils avec l'adoption d'une loi, quelle qu'elle soit ? Bien sûr que non. La République autorise à tout moment et sur n'importe quel sujet l'expression des citoyens, pourvu qu'elle se fasse dans la légalité et le calme, ce qui est le cas quand on fait grève et qu'on manifeste, droits garantis par la Constitution. Il ne faut donc pas opposer la loi adoptée et le droit maintenu. Si les salariés veulent poursuivre la mobilisation, rien ne pourra les en empêcher, les syndicats seront forcés d'admettre ce fait et le gouvernement de s'interroger, puisqu'il ne l'a pas fait jusqu'à maintenant.

Au delà de cette remarque théorique, il y a la réalité sociale, et je crois que la vraie question est là : le symbole des 60 ans est-il si fort que cela vaudra la peine de continuer le combat ? Les salariés y sont-ils prêts ? L'opinion les assurera-t-elle encore de son soutien, nonobstant l'inquiétude sur les carburants et les violences dans les rassemblements lycéens ? C'est la détermination ou non de la population qui décidera de la suite du mouvement. Les organisations syndicales ne pourront qu'en prendre acte, que cette population décide d'arrêter ou de continuer. Le mouvement social ne se décrète pas en appuyant sur un bouton.

Certes, la loi s'imposera, dans toute sa légalité et sa légitimité. Mais la loi n'est que la loi, elle n'a pas en République de caractère sacré, puisque ce qui est fait peut être défait. Au dessus de la loi, il y a le peuple, comme autrefois en monarchie il y avait Dieu au dessus du roi et de ses décrets. La loi a toujours le dernier mot, mais c'est le peuple qui tient la main du rédacteur, du législateur. Nous verrons donc dès vendredi ce qui se passera, dans le respect de la loi et à l'écoute du peuple.


Bonne soirée.

23 octobre 2010

Morcourt, acte un.


Bonsoir à toutes et à tous.


Les élections cantonales de Saint-Quentin Nord ont-elles commencé ce soir à Morcourt ? Ce n'est pas impossible. Dans la salle polyvalente, à 17h00, un vernissage avait lieu (voir vignette). Une semaine après l'investiture officielle de Jérôme Lavrilleux, je m'attendais à rencontrer mon adversaire UMP. Ce n'était certes pas un duel sur le pré, au petit matin, avec choix des armes et présence de témoins. Malgré tout, c'est dans ce genre d'inauguration que les candidats se croisent et se toisent, mesurent leur popularité, se font de nouveaux électeurs. Il suffit d'un rien : une petite attention, un mot bien placé, une poignée de main. Quel métier ! Mais non, le conseiller général sortant n'était pas de sortie, donnant raison à ceux qui disent qu'il ne peut pas être au four et au moulin, à Meaux et à Saint-Quentin. En tout cas, moi j'étais là.

Ce canton, que j'appelle "mon canton" parce que j'y étais candidat socialiste au dernier scrutin et que je le connais bien, je suis persuadé qu'il est gagnable pour la gauche. Une bonne présence, une campagne dynamique, un esprit d'ouverture (car ce canton n'est pas spontanément de gauche, c'est le moins qu'on puisse dire !) et la victoire est à portée de main. Aujourd'hui, Lavrilleux absent et moi présent, qui sait, c'est peut-être un signe ?

En attendant, le petit événement aura été discrètement (la presse n'était pas là) politique. Stéphane Lepoudère, maire-adjoint à la culture de Saint-Quentin, est venu en voisin, veillant à ne pas empiéter sur ses homologues de Morcourt ; un incident diplomatique est si vite arrivé ! Yvonne Bou, présidente de l'Arpal, association organisatrice de l'exposition, n'est pas une inconnue du sérail politique, puisqu'elle a été maire-adjointe socialiste sous Le Meur et toujours membre active du Parti, candidate sur la liste de gauche aux dernières élections municipales.

Parmi le public, on pouvait remarquer la présence de Nora Ahmed-Ali, responsable saint-quentinoise des Verts, conseillère municipale d'opposition, et Armelle Gras, de Génération Ecologie, numéro deux sur la liste du MoDem aux dernières élections régionales. C'est sûr, le canton de Saint-Quentin Nord aiguise les appétits et les prétendants risquent d'être nombreux. Mais que personne ne se fasse d'illusion : la bataille sera chaude et elle ne se gagnera pas avec des tièdes. Un canton de droite est toujours difficile à prendre, même si les circonstances sont cette fois pour la gauche exceptionnellement favorables.


Bonne soirée.
En vignette, une partie de l'exposition, que je vous invite à visiter ce week-end. Les éléphants, les fauves, la brousse, n'y voyez aucune allusion politique.

parti-socialiste.fr/retraites


Bonjour à toutes et à tous.


Le nouveau tract du PS sur les retraites (voir vignette) est original et concis. Tant mieux : les pensums techniques qui fascinent ceux qui n'y comprennent rien me passent par la tête. Je suis allé récemment à une réunion sur et contre la fameuse réforme, je n'ai rien pigé, tout le monde a fait semblant de saisir et les organisateurs étaient contents d'eux-mêmes. Pas moi.

Heureusement, au PS, nous avons des communicants. Le mot n'est pas joli mais c'est quand même bien pratique quand on veut faire passer un message pas toujours évident. C'est le cas avec ce petit carton qui va à l'essentiel et qu'on peut accrocher un peu partout. Le recto-verso illisible qui va dans la poubelle de celui qui poliment l'a pris, non merci !

Là, nous avons un petit bijou de communication : lisez le texte, tout y est. A propos de la réforme : elle frappe les classes moyennes, elle ne règle rien. A propos surtout des propositions du PS : financement, contribution du capital, maintien des 60 ans et, c'est à souligner, prise en compte de l'allongement de la durée de la vie. Ce qui lève l'incertitude introduite il y a quelques jours par mes camarades Hamon et Cherki (sur son blog), laissant entendre que ce dernier point pourrait être rediscuté.

La communication n'efface pas la dimension plus politique et technique du dossier. Il suffit alors de se reporter à notre site qui détaille le projet et dont je me suis servi comme titre pour ce billet.


Bonne journée.

22 octobre 2010

Quand la vérité est Apparu.

Bonsoir à toutes et à tous.


Non, je n'ai pas fait une grosse faute en titrant ce billet : la vérité est Apparu, je vise bien sûr le secrétaire d'Etat au Logement et sa déclaration d'hier. A propos du passage à 62 ans du départ en retraite, il a parlé de "régression sociale". Et ce n'était pas un lapsus puisqu'il a répété plusieurs fois, en toute conscience de ce qu'il disait, cette juste expression, qui caractérise parfaitement la réforme en cours. Faire de la politique, c'est savoir utiliser les mots exacts, précis. Bravo monsieur Apparu !

Merci aussi d'avoir explicité, sans qu'on vous y pousse beaucoup, le sens que vous donnez à cette formule. Elle se comprend certes aisément, mais avec une explication de texte, c'est encore mieux. Benoist Apparu a démontré que lorsqu'on apprenait à un salarié que son départ en retraite se ferait désormais deux ans plus tard, celui-ci ne pouvait le prendre que comme une "régression sociale". C'est l'évidence même !

Alors, comment se fait-il qu'aujourd'hui le secrétaire d'Etat revienne sur ses propos, finalement les récuse ? "Il n'y a que la vérité qui blesse", dit-on. Apparu le bien nommé a dû blesser au plus haut sommet de l'Etat pour ainsi se désavouer. Il parle de "boulette". Non, non, non, je ne vois aucune "boulette" (drôle d'expression) dans ce qu'il a dit. Au contraire, c'était clair, argumenté, convaincant, ça ne ressemblait aucunement à une "boulette". Mais il se pourrait bien que sa déclaration ne devienne un "boulet" à ses pieds et à ceux du gouvernement.


Bonne soirée.

21 octobre 2010

Y a-t-il un réformiste ... ?

Bonsoir à toutes et à tous.




Lors de l'une des dernières manifs contre la réforme des retraites, j'ai un peu chambré Corinne Bécourt, responsable communiste, en lui demandant s'il y avait un réformiste dans le cortège ? Mais la boutade avait un fond de sérieux, comme toujours avec les boutades. Évidemment, les réformistes sont partout dans les défilés, c'est pourquoi on ne les voit pas très bien. Les radicaux, aussi minoritaires soient-ils, sont plus visibles, plus actifs. Ces temps-ci, sur le terrain et dans la presse saint-quentinoise, ils font parler d'eux.


C'est d'abord Olivier Tournay, conseiller municipal PCF, qui s'est invité à l'inauguration de la foire de la Saint Denis, pour distribuer des tracts au nez et à la barbe de Xavier Bertrand. Gonflé ! Puis les communistes locaux ont appelé à manifester devant l'Hôtel de Ville le jour de l'élection du nouveau maire. Quelques jours plus tard, au même endroit, ils conduisaient un mouvement de protestation des personnels vacataires de la Municipalité. Un autre jour, c'est la permanence de Pierre André, sénateur, qui a été investie pour déposer les signatures d'une pétition. Hier, le Centre social Artois-Champagne était en grève, toujours sur le problème des vacataires.

Et puis, après chaque manif où le PC a une banderole pétante, les communistes entraînent une petite troupe à les rejoindre à la Bourse du Travail, où se retrouvent CGT territoriaux, FSU, quelques SUD, c'est-à-dire l'aile radicale de la mobilisation, qui pousse à la grève reconductible et aux actions d'éclat. Les syndicats réformistes, CFDT, UNSA, CFTC, sont absents. Ça ne me choque pas, chacun est libre de faire ce qu'il veut, mais ce n'est pas le rassemblement qu'on pourrait espérer. Surtout, cette ligne radicale n'est ni la mienne, ni celle de l'intersyndicale.

Ce n'est pas moi qui vais reprocher à mes camarades communistes de se bouger. Ils ont raison, c'est très bien comme ça. Le hic, c'est que je ne suis pas du tout sur leur ligne politique. Il faut savoir que leur courant "Colère et Espoir" est foncièrement hostile au Front de Gauche (qui est quand même la stratégie officielle de leur Parti !) et qu'ils assimilent allègrement le PS et la droite sur la question des retraites.

Je le leur redis, amicalement mais franchement : en 2 014, si j'ai quelque responsabilité dans la conduite de la liste de gauche aux élections municipales, il ne sera pas question de faire alliance avec eux au premier tour, nos divergences politiques sont trop grandes (avec l'extrême gauche, n'en parlons même pas, vous savez ce que j'en pense). Et je le pensais déjà en 2 008, aux dernières municipales.

Au second tour, je distingue toujours ma gauche de ma droite : le PS en tête devra rassembler, y compris les communistes, en proportion de leur résultat. Car le peuple est souverain en démocratie ; c'est lui qui décide finalement des alliances, pas les accords hors sol des appareils (du moins dans la conception que je me fais d'une gauche rénovée, que tout le monde ne partage pas). Je ne connais qu'une stratégie gagnante : celle-là. L'autre, on a déjà donné. Il faut une gauche rassemblée autour d'une ligne réformiste, et pas autour d'une ligne radicale.


Bonne soirée.

20 octobre 2010

Nous ne sommes pas en Mai 68.


Bonsoir à toutes et à tous.


A propos de la situation politique et sociale, j'entends dire ou je lis que nous irions vers "un nouveau Mai 68". C'est consternant, et j'ai un tas de raisons de le penser :

1- Depuis que je m'intéresse à la politique, c'est-à-dire depuis 1974, j'ai toujours entendu dire ou lu, à la moindre mobilisation lycéenne ou étudiante un peu importante, que nous allions vers "un nouveau Mai 68". J'attends toujours ...

2- Mai 68 se caractérisait par son surgissement imprévisible, sa spontanéité. Annoncer, prévoir ou déclencher un "nouveau Mai 68", c'est une contradiction dans les termes.

3- Mai 68 débute par une révolte de jeunes, étudiants et ouvriers, se poursuit par une mobilisation de toute la jeunesse autour de problèmes de jeunes. Aujourd'hui, ce sont des "vieux" qui manifestent, avec des préoccupations de "vieux" (j'emploie ce mot dans le sens qu'on lui donnait en Mai 68 : tous ceux qui ont plus de 30 ans). Les étudiants restent pour le moment silencieux, les lycéens défilent pendant le temps scolaire mais ne sont guère présents dans les cortèges syndicaux.

4- En Mai 68, l'objectif était de changer le monde, la société, la vie. Nous étions à des années-lumière de ce qui se passe ces dernières semaines, où il s'agit de préserver le système existant, la retraite par répartition et le départ à 60 ans. En 1968, on dénonçait l'exploitation, l'aliénation, l'autorité, on ne cherchait nullement à revendiquer une retraite correcte.

5- En Mai 68, les organisations syndicales traditionnelles étaient totalement dépassées par ceux qu'on appelait alors les "gauchistes". Aujourd'hui, ce sont ces organisations qui canalisent le mouvement, les "radicaux" n'ont qu'une influence marginale.

6- Même la violence n'est pas la même : en Mai 68, on brûlait des voitures pour contester la société de consommation et la violence ne se retournait pas contre les manifestants. Aujourd'hui, les "casseurs" ne sont que des délinquants, pas des révolutionnaires ou des rebelles. En 68, le seul exemple équivalent, c'était les "Katangais" de la Sorbonne, une poignée de voyous qui s'étaient mis au service de la révolution, mais dont le rôle était très secondaire et peu spectaculaire, à la différence des pillages et agressions d'aujourd'hui.

7- La menace d'une pénurie de carburant est un contresens absolu quand on assimile Octobre 2010 et Mai 1968, puisque cette crainte, en juin du joli mois de Mai, signifiait la fin du mouvement : les Français ont pris peur de voir leur sacro-sainte automobile paralysée et les non moins sacro-saintes vacances menacées.

8- Même en rêve, il ne serait pas souhaitable d'espérer un "nouveau Mai 68", puisque cette révolte a débouché, en juin de la même année, sur des élections législatives qui ont investi une écrasante majorité de droite et poussé la gauche vers une extrême gauche sans espoir ni perspective. Quant aux accords de Grenelle, ils ont été perçus, à tort ou à raison, comme une capitulation devant le patronat.

Karl Marx a écrit quelque part que la répétition d'un événement ne pouvait se faire que sur le mode de la comédie. C'est ce qui arrive avec Mai 68, dont nous ne pourrions avoir aujourd'hui que la singerie.


Bonne soirée.

19 octobre 2010

Ce sera donc Lavrilleux.

Bonsoir à toutes et à tous.


Ce sera donc Jérôme Lavrilleux mon adversaire de droite au canton nord en mars prochain, si je suis investi par mon Parti, comme je l'ai été la dernière fois, avec déjà cet adversaire-là. C'est évidemment une mauvaise nouvelle. Nous pouvions espérer une droite divisée, le bras droit de Jean-François Copé se faisant disqualifier par le proche concurrent de celui-ci, Xavier Bertrand. Mais finalement non.

Le nouveau maire de Saint-Quentin sait sans doute qu'on ne fait pas de bonne politique avec de mauvais sentiments, la peur, la jalousie, la rancune, la vengeance. C'est probablement ce qu'il y a de plus difficile en politique, tellement la réaction est humaine : faire abstraction de ses sentiments personnels, n'en rester qu'à l'intérêt général de son Parti. Xavier Bertrand, du moins sur ce coup-là, semble y parvenir très bien.

Et puis, je lis cette phrase de lui dans le Courrier Picard d'aujourd'hui : "Il ne faut pas se tromper d'élection". C'est ce que je dis moi aussi à mes camarades : ne faisons pas des cantonales la revanche des municipales, sachons accepter toutes les personnalités, réfléchissons au meilleur candidat possible, à celui qui pourrait battre Jérôme Lavrilleux. Je ne vais pas jouer les hypocrites ni faire semblant : ce meilleur, je crois que c'est moi. Je peux bien sûr me tromper, je reconnais que ça se discute, d'autres peuvent légitimement prétendre à ce titre. Mais j'ai mes arguments, mes intuitions et mes certitudes, et je ne suis pas le seul à penser ça.

La bataille sera difficile : voilà un canton de droite, avec un sortant de droite qui rassemble toute la droite. Il a la main, c'est incontestable. Mais je peux tordre cette main et rendre possible ce qui est difficile, parce que j'ai déjà été candidat, parce que j'ai la motivation, parce que la bataille sera très politique et que je me sens capable de la mener.

Pour preuve de cette politisation d'un scrutin cantonal généralement pépère, c'est la prise de bec entre Yves Daudigny et Colette Blériot (qui elle aussi sera reconduite dans le canton centre) lors de la dernière séance du Conseil général, telle que L'Aisne Nouvelle la relate dans son édition d'aujourd'hui. Avec ce commentaire du journaliste : "Il est clair comme le confirmèrent les protagonistes qu'on était déjà en campagne pour les cantonales". Et c'est plutôt chouette. Vive la politique !


Bonne soirée.

Coeur de manif, coeur de gauche.



Sachant que je suis prof et socialiste, on me demande parfois de définir ce qu'est la gauche, et l'on s'attend évidemment à une belle définition de ma part. La question me fait penser à celle qu'on posa, dit-on, au Bouddha, afin qu'il définisse le bouddhisme. Il répondit en tendant une fleur. Ne croyez pas que je vais répondre de façon aussi énigmatique, par exemple en offrant une rose ! Non, mais je vais montrer du doigt la manif d'aujourd'hui à Saint-Quentin : la gauche est là, la gauche c'est ça. Tout le reste est commentaire inutile.

De cette manif, je retiens les rangs serrés, la foule compacte, le lent écoulement de la place La Fayette jusqu'à la place de l'Hôtel de Ville, tellement il y avait de monde. J'ai fait pas mal de manifs, mais des comme ça, elles se comptent sur les doigts d'une main ces dernières années. J'ai été provisoirement infidèle à mon syndicat (pardon Corinne !) pour m'immerger dans les gros bataillons de la CGT. Car le coeur de la gauche, de son électorat, est là.

Les profs, j'aime bien. Mais les ouvriers, cheminots, territoriaux et autres, c'est le coeur du coeur de la gauche. Il faut les écouter, discuter avec eux. Je le fais au débotté, mon autocollant PS sur la poitrine. Ils savent ainsi qui je suis, ils réagissent, c'est intéressant. J'ai toujours aimé ça, aller vers ce qui est différent de moi, même si comme eux je suis de gauche, comme eux de famille ouvrière. Mais quand on devient prof, c'est autre chose, ce n'est plus la même classe sociale.

De quoi parle-t-on dans une manif ? Qu'est-ce qui se dit ? Voilà une importante question. D'abord, ne croyez pas que la politique obnubile les manifestants. Beaucoup sont loin de tout ça, presque méfiants. Ils parlent de leur boulot, de leurs copains, de leur famille, de leurs loisirs. Et puis, parmi tous ceux qui manifestent aujourd'hui, certains, plus qu'on ne croit, ont voté Sarkozy. Voilà ce qui arrive quand la gauche n'est pas à la hauteur des attentes du peuple de gauche ! Il ne faut jamais oublier ça, ne pas faire les malins, être modeste, se remettre à l'écoute de notre électorat.

Politiquement, le message de ce peuple de gauche est très clair : il faut maintenir la retraite à 60 ans, parce que c'est un acquis, une garantie, une protection, un progrès, pour eux, pour leurs proches, pour leurs enfants. Le reste, durée de cotisation, financement du système, notion de pénibilité, système à la carte, aussi intéressant soit-il, demeure oiseux. Un seul objectif compte, d'une redoutable simplicité : pouvoir partir en retraite correctement à 60 ans.

Revenir là dessus, même pour de bonnes raisons, est perçu comme une régression. Voilà ce que j'ai retenu de mes discussions avec les manifestants d'aujourd'hui, au coeur de la manif, au coeur de la gauche. Et je me dis que le candidat socialiste en 2 012, quel qu'il soit, ne pourra avoir pour mandat que de rétablir les 60 ans. A moins que Nicolas Sarkozy n'ait compris et renonce. Mais je n'y crois pas trop.



Vignette 1 : le soleil se couche, manifester est sérieux mais n'empêche pas l'humour.

Vignette 2 : la nuit tombe, nous voilà face à l'Hôtel de Ville, alors que d'habitude nous faisons front au théâtre Jean-Vilar. C'est un signe des temps : celui qui dirige cette maison n'est plus Pierre André mais le chef de l'UMP, et ça change tout.

Dure dure la durée.

Bonjour à toutes et à tous.


Olivier Besancenot n'a pas tort de dire que cette sixième journée nationale contre la réforme des retraites est "probablement historique". Si la mobilisation se maintient à son niveau, le gouvernement devra forcément s'interroger et bouger. Le plus sage serait l'ouverture de négociations. Sinon, le mouvement risque de basculer dans l'irrationnel : entêtement du pouvoir, psychose autour du manque de carburant, montée de la violence, radicalisation politique, débordement des syndicats, fuite en avant dans des mots d'ordre hystériques. La semaine en décidera, mais le pire n'est vraiment pas à souhaiter.

En attendant, une polémique s'est installée ces dernières heures à propos de la mesure de Martine Aubry d'allongement de la durée de cotisation. Jean-Luc Mélenchon, hier soir en meeting, a soutenu qu'elle rapprochait le PS de la droite. Bien sûr que non. La réforme de Nicolas Sarkozy n'est pas la nôtre, et ce n'est pas l'allongement de la durée de cotisation qui y change grand chose. Il faut répartir les efforts sur l'ensemble des cotisants, et pas en appeler au maintien du système et à la seule contribution du capital (nécessaire, juste mais financièrement insuffisante).

C'est ce qui sépare le PS de Mélenchon et de l'extrême gauche. Sociaux-démocrates, nous sommes dans un système du donnant-donnant : afin de préserver la retraite à 60 ans, pour laquelle nous irons manifester aujourd'hui, il faut faire des concessions, dont l'allongement de la durée de cotisation. Pour conserver un acquis, il faut aussi en payer le prix. Qui peut penser qu'un parti de gouvernement, qui n'est ni un syndicat, ni un parti protestataire, voit les choses autrement ? Et puis, un projet de réforme se juge dans sa globalité, pas sur un seul point, aussi important soit-il, en l'occurrence la durée de cotisation.

Au fond, sur les 62 ans, je crois que bon nombre de dirigeants socialistes auraient été prêts à étudier cette hypothèse de travail. Mais pas à n'importe quel prix, tout est là. La politique est de ce point de vue comme la vie : les choix sont multiples, tout dépend ensuite le prix qu'on veut y mettre. L'opinion publique elle-même n'est pas forcément hostile à un relèvement de l'âge légal de départ, mais pas dans n'importe quelles conditions : si la pénibilité n'est pas prise en compte, si la mesure s'impose à tous sans discernement, si le capital n'est pas suffisamment sollicité, si les syndicats ne sont pas associés, on ne peut que dire non, et c'est ce que nous répéterons durant toute cette journée dans les rues.

Le lapsus de Martine Aubry évoquant il y a quelques mois la possibilités des 62 ans, le mot de DSK sur les 60 ans qui ne sont pas un "dogme" me semblent suffisamment révélateurs. Quoi de plus normal d'ailleurs ? Tous les autres partis sociaux-démocrates sont allés vers ça, mais dans un tout autre cadre et avec d'autres moyens que la réforme Sarkozy. Mais la politique n'est pas une guerre de position (où chacun résiste dans sa tranchée), c'est une guerre de mouvement (évolutive, adaptatrice, faisant plus cas des circonstances que des convictions). Dans le contexte français actuel, devant une droite idéologiquement déterminée, les socialistes n'avaient guère d'autre choix que défendre leur bébé, les 60 ans. Il faut désormais nous y tenir, c'est notre ligne politique, de même en ce qui concerne l'allongement de la durée de cotisation.

C'est pourquoi je ne peux pas être d'accord avec Benoît Hamon qui, ce matin chez Apathie, a remis en cause cette disposition en suggérant qu'elle pourrait être renégociée en cas de victoire en 2 012. Car si c'est le cas, pourquoi alors ne pas imaginer revenir sur d'autres points de notre projet ? C'est à n'en plus finir et l'électorat est désorienté. Non, une position a été arrêtée, il faut en rester là. A force de subtilités (comme entre âge légal et âge réel de départ en retraite) et de conjectures (parier sur une embellie économique), on finit par ne plus être lisible et crédible. La politique n'est pas qu'une guerre de mouvement, c'est aussi un discours de constance et de clarté.


Bonne journée de manifestation.

18 octobre 2010

Le sens d'une mobilisation.

Bonsoir à toutes et à tous.


Demain sera une journée décisive pour la suite du mouvement contre la réforme des retraites. Je crois qu'il est important de rappeler le sens de ce mouvement, du moins tel que je le vois :

1- Ce mouvement est rigoureusement réformiste : les syndicats sont les initiateurs, leur unité est irréprochable, leur ligne n'est pas radicale (l'intersyndicale ne demande pas le retrait du texte, elle n'appelle pas à la grève générale ou reconductible, elle réclame simplement mais fermement l'ouverture de négociations).

2- Il ne s'agit pas, contrairement à ce qu'on entend, d'établir un rapport de force. En République, il n'existe qu'un seul rapport de force, c'est le verdict des urnes, qui a mandaté Nicolas Sarkozy et une majorité de droite jusqu'en 2012. Contre ça, on ne peut rien, sauf à vouloir le coup de force. Depuis que le monde existe, la force est du côté du pouvoir, pas de la rue. On peut s'en réjouir ou le regretter, peu importe : la réalité est celle-là.

3- La logique du rapport de force est immanquablement vouée à l'échec : des millions de manifestants ne feront jamais suffisamment le poids face à des millions d'électeurs. Comment croire qu'on pourra faire plier Sarkozy de cette façon-là ? Au contraire, on ne pourra que le renforcer dans sa détermination. Je vais même jusqu'à penser que la droite a tout à se réjouir d'un rapport de force qu'elle sait gagné d'avance pour elle. Et si la violence en marge des manifestations lycéennes se développe, c'est encore meilleur pour le gouvernement.

4- Alors que faire ? A la logique désespérée et irréaliste du rapport de force (tout rapport de force est une réaction de minoritaires, les majoritaires n'en ont pas besoin), il faut opposer la logique de la négociation, qui repose sur la recherche de l'intérêt général (le rapport de force voit s'affronter des intérêts particuliers). La retraite concerne tout le monde, y compris les générations à venir : c'est donc l'intérêt général qui doit prévaloir dans la solution du conflit.

5- Mais comment ? Il suffit de s'inspirer de ce qui se passe dans les grandes social-démocraties européennes : la recherche du consensus par le compromis social (toute négociation a pour but d'obtenir un compromis acceptable pour les parties en présence, alors que le rapport de force débouche sur un gagnant forcément arrogant et un perdant inévitablement humilié). Mais les positions des uns et des autres sont-elles conciliables ? Oui, puisque la droite reconnaît qu'il faut maintenir le système par répartition et la gauche admet que la réforme est nécessaire. Sur un tel sujet, une négociation ne peut être que longue, au moins un an, avec ses dimensions politiques mais aussi techniques.

6- Le dialogue social consiste à faire un pas l'un vers l'autre. C'est ce à quoi doit aboutir la mobilisation déterminante de cette semaine. La grève et la manifestation, ponctuellement efficaces pour exprimer un mécontentement et des revendications, ne peuvent pas être des modalités permanentes d'action. Le gouvernement s'honorerait à revoir sa copie sans renoncer à ses convictions, les syndicats auraient tout intérêt à retrouver un rôle dans la réforme d'un système sans renoncer à leurs revendications. Sinon, où ira-t-on ? Bien malin qui pourra répondre à cette question. Parce qu'un nouveau Mai 68, non je ne le sens vraiment pas.


Bonne soirée.

17 octobre 2010

Clin d'oeil du PSU !



Je parlais, en début d'après-midi, de ma soirée d'hier avec les chrétiens de gauche de Saint-Quentin. Comme un clin d'oeil ou un signe du destin, j'ai reçu, juste après, une information sur un colloque de Sciences Po consacré au PSU, dont nous célébrons cette année le 50ème anniversaire (voir vignettes ci-dessus). Je porte particulièrement à votre attention la matinée du 8 novembre, où il sera question des "composantes fondatrices du PSU", avec trois communications : sur les socio-démocrates, les chrétiens et les poperénistes du PSU. Et voilà comment, sans le vouloir, nous retrouvons Saint-Quentin ! Si ça n'est pas un clin d'oeil ou un signe du destin ? En tout cas une histoire à revisiter pour comprendre notre présent et préparer notre avenir.

Avec les chrétiens de gauche.



Bonjour à toutes et à tous.


Ça fait environ dix ans que je me rends au repas africain de l'ASTI, association de solidarité avec les travailleurs immigrés, c'est-à-dire les chrétiens de gauche. A Saint-Quentin, cette sensibilité un peu oubliée est néanmoins importante et influente. Elle ne fait pas beaucoup parler d'elle, ne communique guère (pas de journaliste hier soir) et pourtant elle travaille énormément, apporte à ceux qui en ont terriblement besoin. Je m'entends bien avec eux, je me sens bien parmi eux.

Ils ont parfois une petite précaution à mon égard parce qu'ils savent que je suis un militant laïque, mais j'apprécie leur ouverture, leur disponibilité, leur militantisme. A la différence de certains courants de gauche, ils ne sont pas sectaires bien qu'appartenant à une église. Je sais qu'ils seront toujours du côté des plus pauvres, des exploités, qu'ils sont insensibles au pouvoir, aux honneurs, à la reconnaissance. C'est déjà pour moi énorme.

La seule limite au delà de laquelle je me sépare de cette sensibilité, c'est le mélange ou le rapprochement entre religion et politique, foi et engagement. Non pas parce que je serais un stupide bouffeur de curé : autant je m'intéresse à la spiritualité, à la théologie, autant l'expression "chrétien de gauche" ne me convient pas personnellement. Le christianisme ne doit pas inspirer une politique, même de gauche (ou alors c'est donner raison d'une certaine façon à la droite cléricale), la gauche ne doit pas s'inspirer non plus d'une quelconque religion (voilà en quoi je suis fondamentalement laïque).

Claudette Lemire, Christian Vilport, son épouse François, Antonio Tejado, Marcel Ouillon, Jocelyne et Joseph Nardi, Viviane Caron, Marie-Reine Dufretel, Henri Bailleul et quelques autres, croyants ou pas, appartiennent ou sympathisent avec cette mouvance qui est chrétienne comme pouvait l'être une partie du mouvement ouvrier au XIXème siècle (autour de 1830), se référant au Christ comme figure émancipatrice de l'humanité.

Politiquement, les chrétiens de gauche, quand ils sont au PS, se rattachent plutôt à la tradition PSU et CFDT, ce qui me rapproche aussi d'eux. Sinon, on les retrouve volontiers à la CGT ou même au PCF, plus proche des milieux populaires que le PS. C'est également ce que j'apprécie. Je les reverrai à peu près tous mardi pour la nouvelle manif (eh oui, il a été question dans les discussions de table du mouvement contre la réforme des retraites, et je peux vous dire que tout le monde est gonflé à bloc !) et le 27 novembre, salle Foucauld, pour les rencontres de la Mission Ouvrière. Ainsi va la gauche, à Saint-Quentin comme ailleurs.


Bon dimanche.


En vignette : ma table et le livre que j'ai gagné à la tombola, qui a fait beaucoup rire.

16 octobre 2010

La manif à St Quentin.




Vignette 1 : c'est parti ! Et toujours beaucoup de monde ...

Vignette 2 : même les animaux ne veulent pas de cette réforme (ici le chien Pépette).

Vignette 3 : pas question de se faire plumer !

15 octobre 2010

Aubry a tranché.


Bonjour à toutes et à tous.


En rédigeant mon billet d'hier soir, je ne savais pas ce que serait la réponse de Martine Aubry en matière de stratégie du PS à l'égard du mouvement social et de la réforme des retraites : d'un côté les sociaux-démocrates, dont je suis, défendent l'engagement de négociations en remettant tout à plat, de l'autre l'aile gauche et Ségolène Royal demandent le retrait pur et simple du texte de loi. Martine Aubry a tranché dans le sens que je souhaitais.

Ce n'est pas pour me surprendre : Martine est par tradition et par conviction une social-démocrate qui utilise parfois, par souci tactique, la rhétorique de l'aile gauche, ce qui peut porter à confusion. Mais hier soir sur France 2, c'était très clair :

1- Le PS ne demande pas le retrait du texte mais la "suspension" des discussions.

2- Le but : "Il faut négocier", mettre les syndicats autour de la table, et ne pas épuiser les salariés dans des grèves sans fin qui sont coûteuses pour eux et incertaines dans leur résultat. Si le gouvernement refuse la négociation, c'est lui qui en assumera alors les conséquences. Mais peut-il rester fermé au dialogue quand trois millions de personnes sont dans la rue, avec l'opinion de leur côté ? Non.

3- Comme je l'esquissais dans mon billet d'hier, la question du départ avec une retraite à taux plein est majeure. Martine a été très claire : on ne peut pas céder sur les 65 ans.

4- Clarté, lucidité et réalisme : Martine a aussi précisé et souligné que l'allongement de la durée de cotisation était inévitable, ce qui nous distingue sur ce point du PCF et de l'extrême gauche, qui finalement veulent maintenir en l'état le système actuel, en taxant le capital pour alimenter les caisses.

5- Sur les lycéens, j'ai également beaucoup apprécié la modération et le discernement de Martine Aubry : oui ce sont des citoyens qui ont le droit de manifester, mais pas question de les encourager à descendre n'importe comment dans la rue.

Les socialistes ont leur feuille de route. Elle n'est pas nouvelle, mais comme la politique est pour certains le royaume de l'ambiguïté, mieux vaut être clair de chez clair, comme disent nos lycéens. A demain, 10h00, place Carnot à Saint-Quentin, avec cette feuille de route et le tract ci-dessus, qui informe la population des propositions socialistes !


Bonne journée.

14 octobre 2010

On fait quoi maintenant ?

Bonsoir à toutes et à tous.


Avec trois millions de personnes dans la rue et des manifs qui s'annoncent encore importantes samedi, on fait quoi maintenant ? Le gouvernement est sans doute tenté de laisser pourrir le mouvement. La politique du chien crevé au fil de l'eau est la plus dangereuse qui soit, pour le gouvernement lui-même. Il en restera toujours des traces. Alors quoi ? Simple : il faut né-go-cier. Sur quoi ? Évidemment sur le projet tel qu'il est en train d'être discuté au Parlement. Puisqu'il faut bien partir de quelque chose, c'est de ce texte-là.

Je ne suis pas pour le coup de force. La rue s'exprime et elle est raison, mais ce n'est pas elle qui fait la loi. Sinon nous ne sommes plus dans une République parlementaire et représentative. Il y a une majorité qui a été mandatée par le peuple et un président élu par lui. Je n'ai voté ni pour l'une ni pour l'autre, mais le peuple les a voulus. Il faut donc respecter cette légitimité, sauf à basculer dans un autre type de régime, ce que je ne souhaite pas.

C'est pourquoi demander le retrait pur et simple du texte de loi sur les retraites est un non sens, hormis le fait que le pouvoir ne peut pas de toute façon reculer. Croire qu'on puisse repartir de zéro est une illusion. Quant au fameux rapport de force, on en a vu d'autres dans l'histoire, beaucoup plus puissants, qui n'ont pas fait plier le gouvernement. Jean-Marc Ayrault a tracé la ligne la plus juste : "tout n'est pas forcément à rejeter", il faut "trouver un compromis". François Hollande, lui aussi, a prononcé les mots qu'il faut, en demandant "une discussion sur la base du projet actuel". Manuel Valls a abondé dans ce sens, qui est le bon.

Quelle est la marge de négociation ? Où un compromis est-il possible ? C'est aux organisations syndicales d'en décider. La plupart ont été suffisamment responsables pour ne pas exiger le retrait du projet, car une telle posture aggraverait l'épreuve de force et déboucherait sur une désespérante impasse. Il ne le faut pas. Alors quoi ? Je ne pense pas que la droite bougera sur les 62 ans. Mais sur les 67 ans pour un départ à taux plein, il y a là un excès que les Français n'acceptent pas. S'il y a un point où quelque chose pourrait bouger, ce serait là.

Car l'âge de départ est un aspect très relatif ; l'important, c'est le niveau de la retraite. D'autres points bien sûr méritent qu'on y revienne, qu'on les revoit : pénibilité, taxation du capital, retraite à la carte. Mais ces 67 ans qu'on doit attendre pour avoir une retraite normale, à laquelle on a droit, me paraît la plus grande injustice, le vrai scandale de cette réforme. Il faudra bien accepter, pour les uns et pour les autres, le donnant-donnant.

Dans un grand pays moderne, comment pourrait-on admettre qu'une réforme d'une telle ampleur, qui concerne tout le monde, ne fasse pas l'objet d'un compromis ? Si cela ne se faisait pas, c'est le dialogue social, la crédibilité des syndicats et le moral des salariés qui en seraient affectés pour longtemps. La politique, la social-démocratie, la vie, c'est le compromis, pas la guerre sociale ! Ou alors c'est le désespoir et la mort au bout du chemin ...


Bonne soirée.

13 octobre 2010

Une conviction se défend jusqu'au bout.

Bonsoir à toutes et à tous.


Samedi on remet ça, à Saint-Quentin place Carnot, 10h00. La mobilisation contre la réforme des retraites ne faiblit pas, se renforce même, c'est en soi extraordinaire et formidable. Il faut donc continuer. Mais pourquoi ? Parce qu'on y croit, parce qu'une conviction se défend jusqu'au bout.

Ne pensez pas pour autant que je me réjouis de ce qui se passe : Sarkozy ne cédera pas, ne peut pas politiquement céder, les syndicats ne relâcheront pas la pression, ils ne le peuvent pas, ils ont l'opinion avec eux. C'est donc une épreuve de force, mais c'est surtout une situation de blocage. Comment une démocratie moderne, normalement adepte du dialogue social, peut en arriver là ? Quelles qu'en soient les raisons, c'est catastrophique et déplorable. L'issue, franchement, je ne la vois pas. Mais ce n'est pas un argument pour renoncer : une conviction se défend jusqu'au bout.

Dans cette affaire, François Hollande a tenu des propos particulièrement pertinents, dès lundi soir sur Canal+ : "le rôle du PS ce n'est pas d'organiser des mouvements de rue (...) c'est de proposer des solutions (...) Le PS n'a pas à appeler aux grèves, elles sont là (...) Quand des partis politiques font du syndicalisme, ils ne sont pas dans leur rôle". La distinction est en effet essentielle et nous avons tendance, dans l'enthousiasme générale, à l'oublier.

En revanche, Marie-Noëlle Lienemann a eu tort de participer à un meeting commun au Havre avec Olivier Besancenot. Sur les retraites comme sur tout le reste, nous n'avons pas le même projet, il n'y a donc pas à se retrouver sur une même tribune, sauf à entretenir une confusion politique fâcheuse.

Quant à Ségolène Royal, son appel aux lycéens à manifester a été pour le moins maladroit. Je ne sais pas trop ce qu'elle a voulu dire puisqu'elle semble aujourd'hui faire marche arrière. Mais ce que je sais, c'est que les élèves doivent rester dans leurs classes et n'aller manifester, s'ils le souhaitent, qu'en dehors des heures de cours, et dans le cadre des rassemblements autorisés. C'est en tout cas ce que j'ai dit aux miens.


Bonne soirée.

12 octobre 2010

Nous sommes des millions.




En fin d'après-midi, à Saint-Quentin, la manifestation.

Cantonales : c'est parti !

Les militants saint-quentinois de l'UMP viennent de choisir leurs candidats pour les élections cantonales : pas de surprise, on prend les mêmes et on recommence, Colette Blériot et Jérôme Lavrilleux, les deux sortants. Les pronostiqueurs de scénarios tordus en sont pour leurs frais. Ils imaginaient une Colette lâchée par Pierre André pour cause d'indiscipline de vote au Conseil général, et un Jérôme ostracisé par Xavier Bertrand parce que directeur de cabinet de son rival Jean-François Copé. Des analystes encore plus audacieux prédisaient un éclatement de la droite, les candidatures dissidentes de Savelli, Grandin, Ribeiro ou Grzeziczak. On ne prête qu'aux riches, hélas. Rien de tout cela ne se fera, à moins d'un revirement de l'UMP à l'échelle départementale, mais c'est peu probable.

Le problème avec la droite saint-quentinoise, c'est qu'elle est intelligente. J'essaie pourtant de la prendre en flagrant délit de bêtise ou d'erreur politiques mais je n'y parviens pas. Je suis vigilant, je surveille, je fais des efforts, mais non ça ne vient pas. Si j'étais vicieux, je la pousserais à la faute mais ce n'est pas dans mes habitudes. La droite sera donc unie parce qu'elle sait que c'est la condition de sa victoire dans un scrutin pas si facile que ça pour elle. Et comment faire mieux la démonstration de son unité qu'en présentant des candidatures uniques ? C'est ce que je n'ai jamais cessé de répéter à mes camarades. Mais peut-être cette fois ...

Blériot et Lavrilleux, c'est le choix de la continuité et de la simplicité : pourquoi en présenter d'autres ? Ce sont de bons candidats pour la droite. Certes, on trouve toujours meilleurs en cherchant bien, mais pourquoi se priver de ceux qu'on a sous la main ? Un bon candidat, c'est souvent quelqu'un qui a déjà été candidat et qui a obtenu un bon score. Quand ce sont des sortants, c'est encore mieux et la question ne se pose même pas. Bertrand sait parfaitement qu'on ne l'emporte pas en réglant des comptes personnels, en satisfaisant une petite vengeance et en divisant son propre camp. La gauche pourrait peut-être très modestement en tirer quelques leçons si elle a la ferme intention de gagner.


Bonne manif à toutes et à tous.

Le pouvoir est triste.

Bonjour à toutes et à tous.


Très intéressante interview de Tony Blair hier soir chez Taddéï à l'occasion de la publication de ses mémoires, avec cette remarque de l'ancien Premier ministre britannique qui a retenu mon attention : il y a une "tristesse du pouvoir". On connaissait le mot de Mallarmé : "la chair est triste", ce qui d'ailleurs n'est pas vrai. Mais le pouvoir est triste, oui j'en suis persuadé, et pas seulement en écoutant Blair.

Observez les hommes de pouvoir en France aujourd'hui. Pouvez-vous m'en citer un seul qui soit ce qu'on appelle, au sens fort et précis, quelqu'un de joyeux ? Je n'en trouve pas. Fillon porte la tristesse sur son visage, c'est flagrant. Sarkozy est nerveux, pas joyeux. Borloo ou Bachelot ont un côté rigolo, mais on sent bien que ce n'est pas de la vraie joie.

A gauche, ce n'est pas mieux : Aubry n'est franchement pas une marrante, DSK est malicieux, facétieux mais pas jusqu'à être joyeux. Hollande peut-être se rapprocherait le plus de l'état de joie, mais par intermittence, et sous une forme plutôt humoristique. Non, la joie authentique, lumineuse, apaisante, n'est pas le lot de nos politiques.

C'est tout à fait normal, et pour plusieurs raisons :

1- La politique exige tellement de compromission, soumission, trahison qu'on ne peut pas y être soi-même. Or c'est l'une des clés de la joie : être soi.

2- La politique est une activité terriblement sérieuse, difficile, compliquée, qui exige énormément de travail. Tout ça ne peut pas être très gai.

3- Parvenu au sommet du pouvoir, on ne peut plus espérer aller plus loin, plus haut. C'est attristant. Et puis, on en découvre la réalité, moins belle et jouissive que son rêve.

4- Gouverner, c'est inévitablement décevoir. On y perd en popularité, on se fait rarement aimer, sauf exception.

Le pouvoir est donc triste. Mais moi au moins, qui n'ai pas le pouvoir mais fais de la politique, ne suis-je pas joyeux ? Non, absolument pas ! Mais j'ai des circonstances atténuantes : vu la situation, un socialiste saint-quentinois en joie ne pourrait être que cocaïné ou complètement idiot.


Bonne et joyeuse journée.

11 octobre 2010

Un petit jeu amusant et sérieux.

Bonsoir à toutes et à tous.


C'est un petit jeu amusant, mais c'est quand même un jeu très sérieux : qui sera bientôt Premier ministre ? Chef du gouvernement, ce n'est tout de même pas rien. La ligne politique ne changera pas, puisque c'est le président de la République qui la détermine. Mais la personnalité de celui ou celle qui occupera Matignon apportera sa marque, qui sera réelle, qui aura un impact. Pour la gauche, ce ne sera pas exactement la même opposition selon qu'untel ou untel occupera la place. Ils sont cinq à pouvoir prétendre avec quelque chance au poste :
1- Jean-Louis Borloo : c'est actuellement le mieux placé. Mais demain ? Tout va si vite en politique. Son atout : il ne ressemble pas à un homme de droite, on le prendrait volontiers pour un écolo de centre gauche, un créneau assez porteur par les temps qui courent. Mais il est gaffeur et imprévisible. C'est un luxe qu'on ne peut guère s'offrir en politique.

2- Jean-François Copé : c'est le choix le plus cohérent. Sarkozy a tout intérêt à mettre dans sa poche un contestataire de son propre camp. En politique, quand on veut se débarrasser de quelqu'un et qu'on est intelligent, on ne l'exclut surtout pas, au contraire on l'inclut en lui faisant une proposition qui ne se refuse pas. Qu'est-ce qui ne se refuse pas en politique ? Le pouvoir ! Et plus il est élevé, moins il peut se refuser. Et puis, Copé est un hargneux (Bertrand c'est le gentil). Si Sarkozy est faible, s'il a besoin d'être rassuré, il ne choisira pas Copé. Car Copé est tout sauf rassurant. A la tête de l'UMP, pourquoi pas. Mais à Matignon, ce n'est pas gagné.

3- Michèle Alliot-Marie : c'est une femme et les femmes sont à la mode. Elle est gaulliste traditionnelle, mais qui se reconnaît encore dans cette étiquelle à l'UMP ? Et puis, qui connaît MAM ? Je ne crois pas du tout à sa candidature.
4- Brice Hortefeux : il est populaire, et pour les très mauvaises raisons que vous savez. Avec lui, Sarkozy peut être tranquille, c'est un ami. Mais on ne doit pas mélanger politique et amitié : ce sont les pas bons qui se laissent aller à cette confusion. Rachida Dati n'est pas d'accord avec ce choix. Mais personne ne lui demandera son avis. Hortefeux, je n'y crois pas non plus.
5- François Fillon : eh oui, il n'est pas hors jeu (quand est-on hors jeu en politique ?). Il est populaire, n'inquiète personne sauf Sarkozy, rassure l'électorat de droite classique. Pourquoi pas encore lui ? Mais Sarkozy veut du changement parce qu'il sait que les Français aiment et attendent le changement. Donc ce ne sera pas lui.
N'y aurait-il pas une sixième hypothèse, un monsieur ou madame X sorti des cartons comme le lapin du chapeau du magicien ? Peut-être mais ce ne serait pas très sérieux. En politique, les choix les plus efficaces et les plus prometteurs sont les choix qui s'imposent, les choix évidents. Les bons candidats sont les candidats "naturels". Les autres, ce sont les pis aller, les faute de mieux, les secondes mains.
Bonne soirée.

Demain sera un nouveau jour.


10 octobre 2010

Qu'est-ce que j'en ai à faire ?

Bonsoir à toutes et à tous.


La vie politique française se nourrit d'incessantes polémiques qui sont oubliées aussi vite qu'elles sont exploitées. Ce week-end, c'était les signes de croix de Sarkozy au Vatican. Ce n'est évidemment pas très laïque, mais au fond qu'est-ce que j'en ai à faire ? Les Français ne sont pas dupes du personnage ni de sa politique. Alors pas la peine de s'exciter sur une histoire de signes de croix.

C'est comme Mélenchon, autre polémique de ces derniers jours : il a traité Pujadas de larbin, ce n'est évidemment pas bien. Mais au fond qu'est-ce que j'en ai à faire ? Chacun parle comme il veut avec les mots qui sont les siens. Pourquoi voudriez-vous que je sois choqué plus que ça ? L'indignation à répétition est un moulin à prière.

En revanche, j'en connais un qui a bien parlé ce dimanche, c'est Jean-Marie Le Guen : condamnation de toute radicalisation du mouvement social, refus de la tutelle de l'extrême gauche, opposition à tout référendum, critique de la culture de la grève (car celle-ci est un signe d'échec et règle rarement un problème, même s'il faut faire grève quand on ne peut pas faire autrement). Comme quoi la politique n'est pas encore totalement livrée à la polémique ...


Bonne nuit.

09 octobre 2010

L'adversaire le plus redoutable.


Bonsoir à toutes et à tous.


La photo, grande, en noir et blanc, est belle. L'homme est assis dans un fauteuil, jambes croisées, mains fermement réunies, sourire imperceptible, visage grave, avec un tableau derrière lui. Devant lui, car l'homme ne s'est pas mis au premier plan, c'est le buste de Marianne, symbole de la République, qui prend une bonne moitié de la place, comme si le symbole était plus important que l'homme. Cette photo est dans L'Aisne Nouvelle d'aujourd'hui, page 9 (voir vignette ci-dessus) ; l'homme, c'est le nouveau maire de Saint-Quentin, Xavier Bertrand.

Tout ce qui va se jouer désormais entre lui et nous, entre Bertrand et la gauche, est dans cette photo. Celui qui est là, posant devant les journalistes, respire le calme, la détermination et l'assurance. Pour ceux qui ne l'auraient pas encore compris, ce sera notre adversaire le plus redoutable. Pierre André avait des aspérités, des emportements, parfois des complicités, des faiblesses affectives, un côté malgré tout sentimental. Xavier Bertrand, c'est une bête politique, une machine de guerre, un bloc de marbre. Il sait ce qu'il veut, où il va, qui sont ses amis et ses adversaires. Pour la gauche, c'est l'adversaire le plus terrible.

De son entretien à L'Aisne Nouvelle, je n'ai strictement rien à dire. Avec Pierre André, il y avait souvent des coups de gueule ou des coups de griffe, des affirmations politiques assez fortes. Avec Xavier Bertrand rien, même en cherchant bien. Et c'est cette méthode (car c'en est une) qui le rend redoutable : c'est une savonnette ; mouillée, elle vous glisse entre les doigts ; mais sèche, elle vous fait très mal quand vous la recevez en pleine tête.

Cette méthode Bertrand, nous en avons eu une petite idée cette semaine, qui annonce les quatre ans qui viennent : continuité, présence, apolitisme. Xavier Bertrand le confirme : il n'y aura pas rupture avec le "système Pierre André". Pourquoi changer un système gagnant ? En retour, la gauche aurait tort de ne pas reconnaître la partie positive de ce bilan, sans renoncer bien sûr à préparer et à proposer son propre projet.

La présence, Bertrand n'a pas attendu d'être maire pour la pratiquer. C'est même sa marque de fabrique. On peut dire de lui tout le mal qu'on voudra, le gars est là, sur le terrain, à faire le job, à tel point qu'on se demande comment il s'y prend. Je ne donne pas cher de la peau de la gauche si elle ne bouge pas ses fesses et reste aussi "discrète". Les tambours de guerre pendant les séances du conseil municipal, c'est bien. Mais croire que tout se joue là, non certainement pas.

Enfin l'apolitisme : c'est amusant, c'est même un comble quand on est le patron de l'UMP. Mais je vous fiche mon billet que ça marchera auprès des Saint-Quentinois, hélas. C'est pourquoi la gauche doit se concentrer sur les dossiers locaux et pas en rester aux combats nationaux, aussi utiles et nécessaires soient-ils.

Il est quand même malin, le Bertrand. A la suite de l'interview avec Nassera Lounassi et Aurélien Walti, il répond aux questions d'Eric Leskiw sur la politique nationale et la réforme des retraites, sous ce titre : "Taxer plus le capital". C'est tout de même formidable ! On croirait entendre un homme de gauche. Mais Xavier Bertrand ne se veut-il pas le représentant de la "droite sociale", et personnellement "humaniste" de surcroît ? C'est le dernier piège qu'il nous tend, celui de la séduction. Autant vous dire que j'y suis totalement insensible, indifférent. Mais là aussi le charme peut opérer auprès des Saint-Quentinois, y compris de gauche. C'est pourquoi cet homme est notre adversaire le plus redoutable.


Bonne soirée.