Pourquoi François.
Tout strauss-kahnien que je suis, je serais de mauvaise foi à ne pas reconnaître que François Hollande monte dans l'opinion. Et j'ajoute : un socialiste doit toujours se réjouir qu'un autre socialiste étende son influence. En politique, c'est la somme des succès individuels qui contribue au succès collectif. Mais ça n'efface pas non plus ma préférence pour Strauss, que je vois plus apte à battre Nicolas Sarkozy que François. Si on me démontre le contraire, je change illico d'avis ; les personnes m'importent peu, c'est l'efficacité et le résultat qui comptent.
Parti de très bas dans les sondages, au même niveau que Moscovici, Valls ou Montebourg, voilà François Hollande qui fait maintenant bonne figure de présidentiable. Comment un tel "miracle" a-t-il pu se produire ? J'y vois cinq raisons :
1- Les primaires ne sont pas commencées, les "grands" candidats ne se sont pas déclarés, DSK ne peut pas, Aubry ne veut pas. Résultat : il se creuse un vide. Or, la nature comme la politique ont horreur du vide, qui se remplit alors très vite. Ce remplissage a aujourd'hui un nom : François Hollande. Qu'en sera-t-il lorsque les primaires auront démarré et que tous les candidats seront dans la course ? A voir ...
2- François Hollande, dix ans à la tête du Parti, est resté un homme d'appareil, c'est-à-dire un habile, un souple, un tacticien, qui plaît à beaucoup d'élus et aux hommes d'appareil (Strauss est plus lointain, plus théoricien, plus stratège). En 2 005, il a quand même réussi le tour de force de s'attirer les bonnes grâces du NPS et de l'aile gauche en les autorisant à ne pas suivre le vote majoritaire des militants en faveur de la Constitution européenne. Du jamais vu dans l'histoire du Parti socialiste ! Un homme aussi accommodant ne peut que rassurer et séduire.
3- François a un très bon contact avec les journalistes. Il a compris qu'il était aussi important d'avoir avec soi la presse que l'appareil. C'est une forme d'exploit : mes camarades n'ont pas toujours une bonne image du monde de la communication et des médias, où ils se promènent parfois comme des éléphants dans un magasin de porcelaine. Hollande, non : ce serait plutôt le genre gazelle. Résultat : une bonne partie des éditorialistes le soutiennent.
4- Face à un président atypique, pressé, souvent extravagant, d'un certain point de vue exceptionnel mais stressant, pour ne pas dire anxiogène, François Hollande incarne une véritable rupture d'image : c'est l'homme normal, ordinaire, sérieux et sympa, modeste, qui attend son heure sans forcer les portes ni bousculer les gens. L'opinion publique, en quête de nouveauté, peut y trouver son compte, après cinq ans de sarkozysme échevelé.
5- Comme DSK, Hollande est social-démocrate, précis et rigoureux dans ses propositions, réaliste dans son programme qu'il n'omet jamais de chiffrer, soucieux de réduire la dette et de relancer l'emploi. Cette ligne modérée est celle qui aujourd'hui rencontre le plus de succès auprès de l'électorat de gauche, qui ne croit plus aux beaux projets qu'on n'applique pas. Ce créneau-là est aussi celui de Strauss-Kahn. Hollande sera peut-être à Strauss ce que Jean-Baptiste était au Christ, toutes choses égales par ailleurs : le Précurseur qui annonce l'Elu. C'est en tout cas ce que je souhaite.
Bonne soirée,
à demain pour fêter le 1er mai.