Le moustique et le bulldozer.
Ma commission des conflits, c'est dans 48 heures, et curieusement, je n'y pense pas, je n'ai rien préparé. Ce n'est pas dans mes habitudes. Certes, j'ai été pas mal pris ces derniers jours. Mais en général, je sais m'organiser, j'anticipe, je ne laisse rien à l'improvisation. Sauf là. Je crois que je vais m'y rendre tout nu (c'est une image, à prendre au second degré). De toute façon, tout est su, connu, archi-connu, je ne pourrais que me répéter. Soit mes camarades seront bienveillants et attentifs, soit ils voudront me flinguer. Il n'y a pas de demi-mesure en politique.
Aujourd'hui, je suis revenu de mon lycée avec plusieurs bouquins de Pierre Hadot, ce philosophe qui sera mon compagnon cet été et qui nous recommande des "exercices spirituels" (je vous en ai déjà parlé). Je me suis fabriqué deux petits exercices de ce type, des épreuves de sagesse, si vous préférez:
- Anticiper, imaginer un évènement avant qu'il ne se produise.
- Se mettre dans la tête des protagonistes de l'évènement (autre que moi, bien sûr).
J'ai appliqué ces deux règles à ma rencontre de mercredi soir. Le résultat est assez amusant. Je ne sais pas si vous serez d'accord:
J'encours quatre peines: avertissement, blâme, suspension, exclusion (temporaire ou définitive). Quelle est celle qui est la plus probable? Intéressant, non?
Avertissement ou blâme, je n'y crois pas. On ne convoque pas une commission des conflits pour en arriver là. Car la sanction est scolaire, pas politique. Elle n'aurait absolument aucun impact, puisqu'elle ne changerait rien du tout. Ce que veulent certains camarades, c'est une vraie sanction, pas une remontrance.
L'exclusion alors? Je n'y crois pas non plus. Ce serait prendre un bulldozer pour écraser un moustique. Je siffle, je pique, mais je ne suis tout de même pas si redoutable et périlleux pour mon Parti au point de vouloir m'exclure! Généralement, on exclut quand il y a des enjeux de pouvoir, pas pour des chamailleries. Mais je n'ignore pas que la folie des hommes existe. Et quand un moustique vous siffle trop longtemps aux oreilles et qu'il promet de continuer très longtemps, vous n'avez qu'une envie: l'écraser!
Au fédéral, c'est concevable. Au national, ça passera difficilement. Exclure quelqu'un seulement pour sa liberté d'expression et son ton manifestement irrévérencieux, je ne connais qu'une Eglise pour faire ça, pas le Parti socialiste.
Reste la suspension, solution intermédiaire: je suis mis de côté, un an par exemple, ce qui me prive de voter pour le choix du secrétaire de section, ce qui m'interdit de faire campagne pour le courant social-démocrate en vue du congrès. C'est peut-être la punition la plus probable, mais je peux me tromper. Elle est en parfaite adéquation avec l'esprit procédurier de ceux qui me veulent du mal: une voix en moins afin d'asseoir leur pouvoir, que demandent-ils d'autres? L'esprit de boutique contre l'esprit de justice, les choses pourraient bien se terminer comme elles ont commencé.
A ceci près que la démarche procédurière, au fond, ne règle rien. Au contraire, elle envenime la situation. En politique, les vraies solutions sont politiques. Je suis exclu ou suspendu? Et alors? Je serai toujours là, présent, actif, poursuivant dans la voix que je me suis donné et qui me semble le seul avenir possible pour la gauche saint-quentinoise. Une voix en moins pour permettre à Jean-Pierre Lançon de devenir secrétaire de section? Qu'est-ce que ça change fondamentalement? Rien, la droite est là, pour longtemps, et c'est elle qui imprime sa marque à la vie saint-quentinoise.
Permettez-moi de terminer par une fantaisie, ça nous détendra. Vous savez que le catholicisme établit quatre catégories de péchés: en pensée, en parole, par action et par omission. J'aimerais terminer mon "exercice spirituel" de ce soir en interrogeant chacune de ces catégories appliquée à mon propre cas:
- En pensée: oui, j'ai péché, et ma pensée est claire: la tête de liste aux municipales s'est abusivement imposée, son alliance avec l'extrême gauche est une trahison de la volonté de la section et de notre identité socialiste.
- En parole: mes pensées sont toujours suivies de paroles, je ne fais pas de muettes prières. Mes paroles, ce sont les écrits de ce blog, qui ont rendu fous plus d'un.
- Par action: non, je n'ai nullement entravé la bonne marche de la campagne, j'ai même annoncé sur ce blog que je voterai pour la liste d'opposition, parce qu'il faut bien une opposition à la droite, aussi médiocre soit-elle.
- Par omission: là oui, j'ai omis de participer à la campagne Lançon, parce que je l'ai considérée comme une usurpation.
Ceci dit, mercredi soir, je serai face à des socialistes, pas des catholiques. Puisse malgré tout le Ciel être avec moi!
Bonne soirée.