Bonsoir à toutes et à tous.
J'ai parlé dans la journée du discours de Martine Aubry à La Rochelle dans sa
forme, très efficace. J'aimerais ce soir vous en parler dans son
contenu. J'ai retenu deux points essentiels, fort positifs :
1- D'abord, Martine a échappé au
double piège des primaires et des alliances. On l'attendait là-dessus, on pensait que l'université allait être dominée par ça, ce n'est pas le cas et c'est heureux. Ce qui compte, c'est notre
projet. Martine a mis le cap dans cette direction, c'est bien. En même temps, elle a lancé une rénovation en profondeur de notre vie interne : les primaires, les adhérents se prononceront ; les alliances, rien n'est figé. C'est ce qu'il fallait dire, elle l'a dit. Arnaud restera avec nous, tant mieux.
2- Ensuite, Martine a listé une série de
mesures sociales extrêmement pertinentes, attendues quand on se prétend socialiste et qu'on défend les intérêts des classes populaires. Autant la forme du discours a été, je l'ai dit tout à l'heure, efficace, autant le fond a été "
utile". Le mot a d'ailleurs été employé par Martine. Quoi de plus beau et de plus important en politique que de faire preuve de son
utilité ? Depuis aujourd'hui, il n'y a plus à en douter. Surtout, ces mesures sociales permettent à nouveau de nous différencier de la droite, ce qui est pour le moins bienvenu. Néanmoins, une liste de propositions ne fait pas encore un
projet politique. Pour ça, c'est la discussion collective et les conventions à venir qui apporteront leur contribution.
Je ne serais pas socialiste, je ne serais même pas républicain si j'étais d'accord avec tout ce qui a été proposé par notre Première secrétaire en une bonne heure de discours. Si j'applaudis, je ne me soumets pas. Ma discipline n'empêche pas ma liberté. Deux mesures avancées par Martine suscitent mon scepticisme :
a- D'abord le
refus de la taxe carbone proposée par Rocard. De ma villégiature de Carnas, j'avais soutenu cette proposition et expliqué pourquoi. C'est la droite qui s'apprête à l'adopter ? Et alors ? Je m'en fous, ce qui compte, c'est que ce soit une
bonne proposition. Et puis, la droite n'a rien décidé du tout, car dans ses rangs s'élèvent aussi des voix hostiles.
Je comprends le refus de Martine : cette taxe va frapper tout le monde, par conséquent les classes populaires. Mais il faut savoir ce qu'on veut : si l'écologie est une urgence (et le résultat des élections européennes semble l'attester), il faut cette taxe, qui frappe tout le monde parce que tout le monde pollue,
producteurs et consommateurs. Je ne vois pas comment sortir de là.
Si on veut frapper les plus riches, on le peut, il le faut, mais autrement : en retenant l'idée de Fabius d'une
nouvelle tranche fiscale sur les hauts revenus. Mais la taxe carbone, qui n'est pas l'impôt progressif sur le revenu, il faut bien que tout le monde y contribue. Et puis, en soutenant cette taxe, nous aurions lancé un
signal très clair à nos amis écolos, qui en sont les fervents défenseurs.
b- Ensuite la
mise sous tutelle par le TGI (Tribunal de Grande Instance) des entreprises qui font des bénéfices et délocalisent. Ce qui me gêne là-dedans, c'est que cette mesure est manifestement conçue pour contrer le slogan d'extrême gauche d'interdiction des licenciements, qui séduit hélas jusque dans nos rangs. Mais je comprends mal cette nouvelle façon de
judiciariser l'espace économique et social. "Mise sous tutelle", c'est une forme de pénalisation qui ne règle rien.
Strauss-Kahn avait fait une autre proposition, il y a déjà un certain temps, de "
nationalisation temporaire" pour les entreprises en difficulté. Cette idée, qui faisait intervenir la force publique et non la justice, pourrait être reprise et adaptée. Elle visait à réactiver la production en cherchant de nouveaux débouchés économiques. C'était tout de même très différent de la proposition de Martine, qui me laisse sur ma faim.
Ces deux réticences ne modifient en rien mon adhésion globale et le jugement très positif que je porte sur cette édition 2009 de notre université d'été. Ce qui compte en politique, c'est
l'accord sur l'essentiel. Pour le reste, les différences font partie de la vie. Quand, en 2005, des camarades se sont élevés contre un choix cette fois
essentiel du Parti socialiste (le soutien au Traité constitutionnel européen), qui plus est approuvé démocratiquement par la majorité des militants, je ne comprends pas pourquoi ils n'ont pas eu l'honnêteté politique de quitter une organisation dont ils désapprouvaient un
engagement majeur, comme Mélenchon a su le faire quelques années après. Ou alors je comprends trop bien. Mais si sur ce blog je vous ai promis de dire la vérité et
rien que la vérité, je ne suis pas allé jusqu'à prétendre dire
toute la vérité. Car un militant doit préserver, en certaines occasions, les intérêts de son organisation.
Bonne soirée.